Comment rentabiliser la livraison à domicile de produits alimentaires

Comment rentabiliser la livraison à domicile de produits alimentaires

La livraison de courses effectuées en ligne prend différentes formes, selon les acteurs et les enseignes. Chacun tente d’optimiser cette activité, toujours moins rentable que l’achat en magasin, à sa façon. Tour d’horizon des stratégies opérées.

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Comment rentabiliser la livraison à domicile de produits alimentaires
Pour la LAD, Carrefour passe par des prestataires ou des entrepôts. Il exige un montant minimum de commande de 60 euros et ne prélève aucun frais pour des courses hebdomadaires de plus de 150?euros.

Les pistes à étudier

Rentabiliser ses livraisons revient à poser une équation multifactorielle

  • L’enseigne a-t-elle intérêt à livrer depuis son magasin ou un entrepôt ?
  • Doit-elle le faire seule ou avec des prestataires ?
  • Comment optimiser au mieux les choix opérés ?
  • À quelles conditions proposer la livraison à domicile (LAD) pour limiter les frais ?

Livrer les achats des clients chez eux coûte cher. Un produit vendu au même prix en magasin sera toujours plus rentable pour les enseignes. Mais impossible pour les acteurs de la grande distribution de se passer de la livraison à domicile (LAD). « C’est un service qui nourrit l’image de marque globale et qui reste un moyen de faire découvrir son offre. C’est un point de contact supplémentaire avec les consommateurs », avance Yannick Franc, associé chez Deloitte et spécialisé dans le retail.

L’e-commerce reste toutefois largement dominé par le drive, dont le modèle économique est bien plus rentable. « Avec le drive, le client vient chercher ses courses. Vous enlevez donc la livraison du dernier kilomètre, qui représente un important poste de dépenses pour les enseignes », précise Yannick Franc. L’e-commerce a atteint 8,3 % des ventes de la grande distribution en 2023, dont 7,5 % pour le drive et seulement 0,8 % pour la livraison à domicile, selon NielsenIQ. Sur l’ensemble de l’année dernière, la LAD a quasi­ stagné en volume (- 0,2 %). Mais en valeur, sous l’effet notamment de l’inflation, elle a progressé de 10,5 %.

Les chiffres

  • 8,3 % : le poids de l’e-commerce dans les ventes de la grande distribution en 2023,

dont

  • 7,5 % pour le drive et 0,8 % pour la LAD (- 0,2 % en volume vs 2022)

Source : NielsenIQ, total 2023

Bien choisir son entrepôt

Souvent, la livraison s’organise sur la base d’entrepôts dédiés. « Le principal enjeu est alors de parvenir à saturer au maximum l’espace disponible pour écraser les coûts fixes, comme le loyer et les frais logistiques », souligne Yannick Franc. L’enseigne doit évaluer le niveau de la demande dans les environs pour éviter un entrepôt trop grand et peu rempli. Mais elle doit disposer aussi d’assez de place pour apporter une offre de produits assez large et intéressante aux clients. Les enseignes doivent donc réfléchir à la taille adéquate pour leur activité.

Carrefour, qui assure être leader en France dans la livraison à domicile, revendique un tiers de parts de marché sur ce segment. L’enseigne combine ainsi plusieurs modes de livraison, « dont certains sont déjà à l’équilibre », selon elle. Elle recourt à des partenaires « comme Uber Eats ou Deliveroo », mais opère aussi « directement au départ d’entrepôt de préparation de commandes ». Le distributeur exige un montant minimum de commande de 60 euros. Ses frais de livraison varient ensuite « de 4,90 euros à 8,90 euros », selon la taille du panier. Comme la plupart de ses concurrents, Carrefour ne prélève aucun frais pour des courses hebdomadaires importantes, dès lors que les 150 euros de commande sont dépassés. Ce seuil est toutefois plus élevé que chez d’autres acteurs. Franprix offre, par exemple, la livraison dès 50 euros d’achats.

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Chez Franprix, implanté dans des zones très urbaines, les commandes en ligne sont préparées par les employés des magasins.

Remplir à fond les camions

Chez Picnic, ce service est proposé gratuitement, mais il n’est pas possible de se faire livrer pour un panier inférieur à 40 euros. Le pure player néerlandais, présent dans les Hauts-de-France depuis trois ans et en région parisienne depuis mars 2023, fonctionne comme Carrefour sur un modèle d’entrepôts, mais avec ses spécificités. « Nous avons deux centres de préparations de commandes en France, d’environ 20 000 m2, puis une quinzaine de petits entrepôts d’où partent nos vans pour livrer dans un rayon maximal d’une dizaine de kilomètres », détaille Grégoire Borgoltz, directeur des opérations. L’entreprise vise des zones industrielles, plutôt que les centres-villes, pour profiter de plus faibles loyers.

Picnic cible principalement les habitants des banlieues pavillonnaires, en petite ou grande couronne. « Une maison est très facile et rapide à livrer, alors que monter au 4e étage dans le 18e arrondissement de Paris prendra au moins cinq minutes », argue Grégoire Borgoltz. En outre, la circulation en centre-ville est plus dense, ralentissant les livraisons et affectant leur rentabilité. Les vans de la société, qui peuvent contenir une douzaine de commandes, livrent les courses à J+1, sur un créneau de vingt minutes, à des familles dans plus de 60 % des cas. « C’est la bonne clientèle pour nous, aux paniers plus gros et plus fréquents que des célibataires », reconnaît Grégoire Borgoltz, qui a fait le choix de limiter certains articles, difficiles à rentabiliser et compliqués à manipuler. Pas plus d’un pack d’eau de Cristaline par commande, par exemple !

Dans la même logique, pour optimiser le remplissage des véhicules, l’enseigne Cora propose des abonnements à la livraison, d’un mois (9,90 euros) à douze mois (89,90 euros), permettant jusqu’à une commande par jour de 30 euros minimum. « Pour saturer les camions, soit vous disposez de beaucoup de clients dans une même zone, soit les clients doivent faire des commandes plus grosses et plus fréquentes », résume Yannick Franc.

De son côté, Franprix s’appuie sur son réseau de 1 200 supermarchés, dont 90 % en Île-de-France, pour rentabiliser ses livraisons. Pas d’entrepôt pour l’enseigne, implan­tée dans des zones très urbaines : les commandes sont préparées directement en magasin, « ce qui nous permet de minimiser les coûts marginaux liés au loyer, à une chaîne d’approvisionnement spécifique ou à l’embauche de préparateurs dédiés », souligne Laurent Rapoport, directeur exécutif de Franprix. L’enseigne joue sur la polyvalence de ses salariés, en rayon, à la caisse et donc aussi parfois à la préparation de commandes, avec une livraison effectuée en trente minutes en moyenne à Paris.

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Intermarché a adopté un modèle similaire, là encore sans entrepôt. Mais au sein de son supermarché de Libourne (33), une équipe de 10 préparateurs est dédiée aux commandes. « Nous payons en quelque sorte des collaborateurs pour faire les courses à la place des clients, sans augmenter le prix des produits », indique Olivier Bel, à la tête du magasin. Résultat, les marges sont forcément plus réduites dans le cadre de la livraison à domicile.

Différentes typologies d’acteurs

  • Des professionnels de la livraison express : Beaucoup d’enseignes travaillent avec des marketplaces, Uber Eats et Deliveroo en tête, auxquelles elles versent des commissions. Franprix recourt aussi aux vélos cargos de Stuart. Comme Epicery, qui fait appel à Chronopost et à des flottes de coursiers en autoentrepreneurs. La start-up, qui aide 1 500 commerçants à développer leur e-commerce, facture aux clients 2,90 à 4,90 euros la livraison, « selon la distance à parcourir », note son CEO, Édouard Morhange. Mais elle peine à être rentable.
  • Des spécialistes de la livraison collaborative : L’Intermarché de Libourne (33) a opté pour la livraison collaborative, en recourant à des applis comme Shopopop. Des particuliers et des employés en dehors de leurs horaires livrent les courses aux clients. Sur ce créneau, la start-up italienne Everli a été revendue pour 1 euro…
  • Des pure players ne reposant que sur la LAD : La grande distribution est concurrencée par des pure players, comme La Belle Vie et Picnic. Le premier assure avoir trouvé la rentabilité depuis mai 2023, et a racheté Frichti en septembre. Le second ne l’est pas encore. Plusieurs quick commerçants (livraison à domicile rapide) se sont essayés en France, en vain. Seul survivant : Flink.

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