Convoquer des États généraux de la francophonie nord-américaine | Le Devoir

Convoquer des États généraux de la francophonie nord-américaine

Entre 2016 et 2021, l’unilinguisme anglais a augmenté de 20 % au Québec, rapporte l’auteur.
Photo: Graham Hughes La Presse canadienne Entre 2016 et 2021, l’unilinguisme anglais a augmenté de 20 % au Québec, rapporte l’auteur.

Il n’y a en Occident que deux pays dont une minorité linguistique a un poids comparable à celui de la minorité française du Canada (21,4 % en 2021). Il s’agit de la Belgique (dont la minorité francophone représente 39 % de la population) et la Suisse (minorité francophone : 23 %). À vrai dire, aucune minorité linguistique occidentale n’est aussi menacée que la minorité française du Canada, dont la survie même est en péril.

Ni en Belgique ni en Suisse, le gouvernement central et sa bureaucratie ne manifesteraient le je-m’en-foutisme profond qui s’observe en cette matière à Ottawa depuis qu’Ottawa existe. Le Canada n’a à offrir à sa minorité francophone qu’une « aide politique à mourir » au milieu de beaux discours lénifiants, de promesses vides et de batailles en Cour suprême visant à faire échouer toute tentative du gouvernement du Québec de sortir la tête de l’eau.

Les politiques d’immigration du Canada ont toujours été dictées par la majorité anglophone et, souvent, par son courant le plus « orangiste », et elles ont eu, dans le secret des cabinets, comme objectif de noyer les francophones et de les conduire à l’assimilation pure et simple.

La constitution qu’on a imposée de force au Québec et les juges nommés par Ottawa qui l’interprètent se moquent de la survie de la collectivité française d’Amérique. Seuls comptent à leurs yeux le multiculturalisme, la protection de la minorité anglaise du Québec et la sacro-sainte liberté individuelle.

Tout est utilisé pour endormir le mourant : la nécessité supposée de traiter également les minorités francophones exsangues hors Québec (la plus importante de ces minorités, celle de l’Ontario, est sur le point de disparaître des radars !) et la minorité anglophone ultra-gâtée du Québec ; les paiements de péréquation, le mythe selon lequel le développement économique passe forcément par l’anglais (sur les dix pays ayant les PIB par habitant les plus élevés, il n’y en a que deux qui soient anglophones) ; la supposée impossibilité d’attirer des immigrants et des étudiants étrangers francophones, etc.

La solution adoptée en Suisse et en Belgique consistant à créer des régions linguistiques à l’intérieur desquelles une seule langue est utilisée dans l’enseignement, du primaire à l’universitaire, et dans les services publics, n’est même jamais considérée, alors que cette solution a fait ses preuves dans ces pays.

Si Ottawa se fout du déclin tragique du français malgré ses dénis, sa priorité étant la résurrection des plus de 60 langues autochtones victimes du génocide fédéral, les gouvernements québécois « dorment, eux, au gaz ». Comme l’assimilation est un processus s’étendant sur des décennies, nos gouvernements avalent les pilules de notre déclin une à une tous les cinq ans et passent rapidement à autre chose.

On imagine des lois « modérées » visant à freiner le processus inexorable en sachant très bien que le fédéral, ses juges et ses tribunaux vont les charcuter et les émasculer. L’important est de gagner la prochaine élection en tablant sur la pusillanimité de la population.

Pendant ce temps-là, en Ukraine, les gens meurent pour sauver leur nation, leur culture, leur langue, leur démocratie et leur existence comme peuple souverain.

Le signe le plus éloquent de notre résignation se trouve dans le comportement des Québécois anglophones. Ces derniers se sont mis au bilinguisme au lendemain du premier, puis du second référendum, quand ils ont vu que nous relevions la tête. Cela a pris fin entre 2016 et 2021.

 

Depuis l’effacement du Parti québécois, l’unilinguisme anglais est redevenu la norme. Entre 2016 et 2021, en seulement cinq ans, l’unilinguisme anglais a augmenté de 20 % au Québec, ce qui est énorme ! Nos Anglos ne nous prennent plus au sérieux.

Seul le Parti québécois s’alarme devant les mauvaises nouvelles du recensement de 2021 et souligne que les réformes de la CAQ sont vouées à l’invalidation par les juges et ne sont que des sacs de sable tentant de stopper le tsunami.

Mais qui l’écoute, alors qu’à longueur de journée, nous sommes intoxiqués par des publicités infantilisantes vantant les talents de thaumaturge de notre anesthésiste en chef, François Legault ? Qui d’entre nous croit vraiment que la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français (PL 96) changera notre destin ?

Un véritable leader convoquerait d’urgence les États généraux de la francophonie nord-américaine pour sauver celle-ci avant qu’il ne soit trop tard, et ce leader nous dirait : « S’il faut vraiment l’indépendance du Québec pour survivre, faisons-la. »

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