Ligue 1 : Elye Wahi ne perd pas le nord

Le 10 février 2024 peut sembler une date anodine, dans la carrière d'Elye Wahi, mais il s'agit pourtant d'un moment clé. Ce jour-là, les larmes ont coulé sur le visage de l'ancien montpelliérain. Des larmes de joie et de soulagement, au moment de célébrer l'ouverture du score qu'il venait de signer, à Bollaert, face au Racing Club de Strasbourg.

Et si l'émotion a débordé, ce n'est pas tant parce que le buteur sang et or venait de rester muet lors des cinq journées précédentes. C'est aussi et surtout parce que sur cette période et sur la phase aller, Elye Wahi a pour la première fois de sa carrière subi les critique et quelques sifflets, minoritaires, en provenance d'une frange de supporters dubitatifs quant à sa capacité à s'imposer au RCL.

Pas de quoi modifier le cap et faire douter le jeune homme de 21 ans, certain de ses qualités après une saison à 19 buts et six passes décisives au MHSC, mais de quoi heurter ses proches et notamment sa mère et sa sœur, Olga et Eunice, qu'Elye Wahi met un point d'honneur à ne jamais décevoir : "Ça m'a plus fait du mal pour ma famille et pour mes proches. Moi, les critiques, je les ai acceptées. En tant que footballeurs, on est forgé pour ça".

Ce but a donc libéré l'international espoirs d'un poids, présent malgré tout, notamment celui que son transfert (30 millions d'euros hors bonus) lui faisait porter. Et forcément, plus léger, l'attaquant formé à Grammont enchaine : quatre buts marqués lors des cinq dernières journées disputées en Ligue 1, en plus d'une offrande pour son compère David Pereira Da Costa, avec qui les étincelles se font de plus en plus nombreuse : "notre affinité se perçoit sur le terrain, c'est bien pour l'équipe. Que ce soit lui ou moi qui marque, on arrive à bien se comprendre", explique l'ancien pailladin.

L'Europe a fait la connaissance d'Elye Wahi

En revanche, si les premiers mois ont été éprouvants, émotionnellement, ils n'ont pour autant pas été noirs, sportivement : "J'ai aussi marqué dans des matchs clé, ça m'a fait du bien pour avancer", rappelle Elye Wahi. De fait, une passe décisive mais surtout deux buts, dont un au cours d'un succès historique contre Arsenal, pour sa première aventure en Ligue des Champions, ont d'abord permis d'entretenir l'espoir d'une qualification pour les huitièmes de finale.

Un autre en Europa League, celui du break contre Fribourg, aurait dû permettre aux hommes de Franck Haise de passer l'obstacle au match retour. Et enfin, deux passes décisives avec les Bleuets, en septembre et en octobre, ont aidé les hommes de Thierry Henry à décrocher la première place de leur groupe, après quatre matchs de qualification pour l'Euro 2025.

Pas si mal, pour le successeur de Lois Openda, de trois ans son ainé, alors que l'actuel super buteur de Leipzig savait déjà ce que c'était qu'un transfert, lorsqu'il est arrivé dans le Pas-de-Calais, contrairement à Wahi. Et alors que le belge, qui a aussi connu deux petites périodes de disette avec le RC Lens, n'avait eu à gérer que la Ligue 1, puisque sa formation n'était pas engagée sur la scène européenne, la saison passée.

Digestion terminée, soutien massif

Elye, lui, a logiquement "eu besoin d'un temps d'adaptation", comme il l'a confié récemment lors de sa première conférence de presse, avant la réception de Brest. Quoi de plus logique ? Nouvelle méthode, nouveaux partenaires, nouvelles ambitions, nouvel environnement et nouveau style de jeu : "Les consignes ne sont pas les mêmes. À Montpellier, on était plus sur un jeu de transition. Ici, on est plus sur un jeu de possession. C'est ce que j'ai dû assimiler. Sur le repli défensif ? Il fallait plus d'intensité, c'est ce qu'on a m'a demandé (...) Aujourd'hui, je pense que le coach est fier de moi. Il m'a beaucoup aidé, il me parle beaucoup, c'est toujours le cas. Mes partenaires aussi m'ont beaucoup aidé. Il fallait que tout le monde s'adapte, et c'est ce qu'on a réussi à faire".

Parmi les coéquipiers qui l'ont épaulé, le gardien Jean-Louis Leca, numéro 2 au RC Lens derrière Brice Samba : "C'est quelqu'un de très important pour le club, avant d'être important pour moi. C'est un nom, quelqu'un de reconnu. Il me parle beaucoup depuis mon arrivée. Il sent quelque chose en moi" confie son protégé.

Important aussi, dans l'appréhension de ce nouveau territoire et dans l'acquisition de ce nouveau statut, le public sang et or, celui de la tribune Marek en premier lieu, qui n'a jamais cessé de soutenir son joyau : "Je tiens à les remercier, ils m'ont fait une petite banderole pendant un match, et ça m'a beaucoup touché". Il faut dire qu'Elye Wahi est un émotif, et que ce genre de gestes lui va droit au cœur, lui qui n'en manque pas et qui compte bien tout faire pour s'installer, un peu plus encore, dans celui du plus grand nombre de supporters lensois.

L'Europe et les JO en ligne de mire

Les critiques dans le rétro, les stats qui gonflent et les performances qui séduisent : Elye Wahi est désormais sur les bons rails et veut encore accélérer : "Je me sens très bien, de mieux en mieux. J'ai tout ce qu'il faut pour avancer. On a un bon groupe, un bon staff et surtout un bon coach. Tout va pour le mieux".

L'homme aux neuf buts et trois passes décisives, cette saison, toutes compétitions confondues, espère désormais conduire le RC Lens en Coupe d'Europe, alors que lui et les siens occupent la cinquième place en Ligue 1, à trois points du podium.

Son autre souhait ? Monter dans le train vers Paris et les Jeux Olympiques, cet été, avec comme chef de bord un homme qui semble beaucoup apprécier ses qualités : Thierry Henry. Le sélectionneur des Espoirs et des U23 l'a d'ailleurs de nouveau retenu pour deux amicaux contre la Côte d’Ivoire et les États-Unis, les 22 et 26 mars.