Haïti. Les affrontements entre-gangs font 89 morts, Port-au-Prince s'enfonce dans la violence
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Haïti. Les affrontements entre-gangs font 89 morts, Port-au-Prince s'enfonce dans la violence

Déjà gangrené par l'inflation et le risque d'enlèvements, la capitale d'Haïti connait depuis une semaine des affrontements violents entre gangs. 89 personnes ont été assassinées, 74 blessés par balle ou à l'arme blanche et 16 autres sont portées disparues, selon un bilan partiel au mercredi 13 juillet 2022.

Des Haïtiens protestant contre les prix élevés et les pénuries brûlent des pneus dans une rue de Port-au-Prince, le 13 juillet 2022.
Des Haïtiens protestant contre les prix élevés et les pénuries brûlent des pneus dans une rue de Port-au-Prince, le 13 juillet 2022. | RICHARD PIERRIN / AFP
  • Des Haïtiens protestant contre les prix élevés et les pénuries brûlent des pneus dans une rue de Port-au-Prince, le 13 juillet 2022.
    Des Haïtiens protestant contre les prix élevés et les pénuries brûlent des pneus dans une rue de Port-au-Prince, le 13 juillet 2022. | RICHARD PIERRIN / AFP

Au moins 89 personnes ont été tuées en une semaine dans des affrontements entre gangs à Port-au-Prince, capitale d'Haïti où les prix s'envolent et les carences de carburant s'aggravent toujours davantage, menaçant l'aide humanitaire pourtant cruciale pour les habitants.

« Au moins 89 personnes ont été assassinées et 16 autres sont portées disparues », a indiqué le Réseau national de défense des droits humains dans un communiqué, précisant que le bilan partiel de ces violences fait également état de « 74 blessés par balle ou à l'arme blanche ».

Des familles cloîtrées sans eau ni nourriture

Depuis jeudi, les rafales d'armes automatiques crépitent à longueur de journée à Cité Soleil, commune la plus défavorisée et la plus densément peuplée de l'aire métropolitaine : deux factions de gangs s'y affrontent sans que la police, en manque d'hommes et d'équipements, n'intervienne.

Le long des corridors des bidonvilles qui s'y sont formés au fil des quatre dernières décennies, des milliers de familles n'ont d'autre choix que de se terrer chez elles, sans pouvoir se ravitailler en eau et nourriture.

Certains habitants sont victimes de balles perdues à l'intérieur même de leurs modestes logements, faits de simples tôles, mais les ambulances ne sont pas autorisées à circuler librement dans la zone pour venir en aide aux blessés.

« Nous appelons tous les belligérants à permettre le passage des secours vers Brooklyn (nom du quartier de Cité Soleil où se concentrent les violences, N.D.L.R) et à épargner les civils », a exhorté mercredi Mumuza Muhindo, chef de mission de Médecins sans Frontières.

« Champ de bataille »

Entravée dans ses opérations d'évacuations des victimes, l'organisation humanitaire a néanmoins opéré une quinzaine de blessés par jour en moyenne depuis vendredi, dans son hôpital situé à proximité de Cité Soleil.

« Le long de la seule route menant à Brooklyn, nous avons rencontré des cadavres en décomposition ou brûlés », a ajouté Mumuza Muhindo.

« Il peut s'agir de personnes tuées lors des affrontements ou essayant de fuir et qui ont été abattues. C'est un vrai champ de bataille ».

Ces affrontements meurtriers entre gangs affectent l'ensemble des activités à travers la capitale, car c'est à Cité Soleil que se situe le terminal pétrolier qui alimente Port-au-Prince et tout le nord d'Haïti.

À travers la capitale, les stations-services ne distribuent plus une goutte de carburant, faisant drastiquement flamber les prix au marché noir.

Multiplication des enlèvements

En colère face à cette situation, des chauffeurs de taxi moto ont érigé mercredi quantité de barricades à travers les principaux axes routiers de Port-au-Prince.

Face à ce mouvement spontané, seuls les courts déplacements en moto à l'intérieur des quartiers étaient possibles, ont pu constater des journalistes de l'AFP.

Soumis à de tels aléas, les habitants de la capitale peinent à organiser leurs activités quotidiennes, déjà entravées par le risque d'enlèvement.

Depuis plus de deux ans, les gangs multiplient les rapts crapuleux dans la ville, séquestrant des personnes de toute origine socio-économique et de toute nationalité.

Jouissant d'une très large impunité, les bandes criminelles ont amplifié leurs actions au fil des semaines : au moins 155 enlèvements ont été commis en juin contre 118 au mois de mai, a signalé le Centre d'analyse et de recherches en droits humains, dans son dernier rapport publié mercredi.

20 % d'inflation annuelle

Quantité d'Haïtiens qui le peuvent fuient vers la République dominicaine ou les États-Unis. Beaucoup, n'ayant ni les moyens économiques ni les visas, risquent leur vie en prenant place sur des bateaux de fortune, espérant atteindre la Floride.

Nombreux échouent sur les côtes cubaines ou bahaméennes ou sont stoppés en mer par les garde-côtes américains.

Plus de 1 200 migrants en situation irrégulière ont été renvoyés en Haïti au cours du seul mois de juin, selon les statistiques de l'Office national des migrations.

À leur retour, ils retrouvent leurs difficultés pour survivre, glanant des petits boulots informels dans un pays où l'inflation annuelle a franchi la barre des 20 % depuis déjà trois ans.

Augmentation de la faim

Face aux conséquences de la guerre en Ukraine sur l'économie mondiale, ce taux pourrait dépasser les 30% d'ici la fin de l'année, alertent les économistes.

« Nous constatons une augmentation significative de la faim dans la capitale et dans le sud du pays, Port-au-Prince étant la plus durement touchée », s'est inquiété mardi Jean-Martin Bauer, directeur du Programme alimentaire mondial (PAM) en Haïti.

Pour contourner les zones périphériques de Port-au-Prince, aux mains des gangs, l'agence onusienne utilise les voies aériennes et des routes maritimes pour envoyer de l'aide dans le sud et le nord du pays.

Près de la moitié des 11 millions d'Haïtiens souffrent déjà d'insécurité alimentaire dont 1,3 million qui sont confrontés à une situation d'urgence humanitaire précédant le stade de la famine, selon la classification du PAM.

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