Stade Rennais. « Chez les Bourigeaud, le match commence la veille »
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Stade Rennais. « Chez les Bourigeaud, le match commence la veille »

Marine Capon, 26 ans, a accepté de se confier à Prolongation durant tout le mois d’avril. Elle est la compagne de Benjamin Bourigeaud, joueur cadre du Stade Rennais et de la L1. Elle est une femme de. Elle est une femme, surtout, Calaisienne, ancienne basketteuse de bon niveau, maman aimante, caractère trempé, pas « wags » pour deux sous ou alors juste un peu. Elle est de ces femmes que l’on envie de loin, à qui l’on ne demande jamais rien car elle a soi-disant tout, et rien à dire. Vraiment ?

Marine Capon, compagne de Benjamin Bourigeaud, ancienne basketteuse au COB Calais, prend la plume pour Prolongation.
Marine Capon, compagne de Benjamin Bourigeaud, ancienne basketteuse au COB Calais, prend la plume pour Prolongation. | LUCIE WEEGER
  • Marine Capon, compagne de Benjamin Bourigeaud, ancienne basketteuse au COB Calais, prend la plume pour Prolongation.
    Marine Capon, compagne de Benjamin Bourigeaud, ancienne basketteuse au COB Calais, prend la plume pour Prolongation. | LUCIE WEEGER

Voici la première des quatre cartes blanches que Marine Capon, compagne de Benjamin Bourigeaud (milieu de terrain du Stade Rennais), a accepté d’écrire en exclusivité pour Prolongation. Une par semaine, pendant quatre semaines, dans lesquelles elle vous racontera sa vie de femme, son parcours. C’est un témoignage rare et l’on sait tous pourquoi : parce que, par principe, une femme de joueur a déjà tout et qu’elle n’a rien à dire. Vraiment ? Lisez, vous verrez. On est allé voir avec elle derrière le miroir d’Instagram, des heures de conversation à bout touchant. Aujourd’hui, elle a choisi d’aborder le sujet des jours de match.

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Les thèmes des quatre cartes blanches de Marine Capon

Jeudi 8 avril : « Le jour du match »

Jeudi 15 avril : « Le vestiaire, la vie de vestiaire »

Jeudi 22 avril : « L’empreinte des coaches »

Jeudi 29 avril : « Le déracinement »

« Il est des femmes de joueurs qui n’aiment pas le sport, qui détestent même le football ou s’en fichent, qui ne regardent pas les matches. Pourtant, chacune apporte autant à son mari à travers des choses différentes. Certaines font de la sphère privée une vraie coupure avec le milieu. Ce n’est pas mon cas. J’aime le sport. Je regarde. Je suis. Je lis.

On peut avoir de vraies discussions foot avec Benjamin. Centrées surtout sur ses performances individuelles. Je lui dis les choses que je perçois. Je lis surtout ses postures. Je sais quand il va rater un penalty, je sais quand il va bien frapper un corner. À sa position, à la façon dont il pose le ballon, la marque face à lui, à ses deux petits pas autour pour bien marquer la terre, à ses trois pas en arrière. En revanche, je n’engage jamais d’échange sur les questions tactiques. Je ne suis pas entraîneur, je ne suis pas footballeuse, ça se saurait. Chacun à sa place.

Marine Capon, Benjamin Bourigeaud et leur fils Timao pendant l’un des rares moments, finalement, qu’ils peuvent passer en famille, loin du foot. | DR
Marine Capon, Benjamin Bourigeaud et leur fils Timao pendant l’un des rares moments, finalement, qu’ils peuvent passer en famille, loin du foot. | DR

Chez les Bourigeaud, le match commence la veille. Benjamin s’entraîne l’après-midi et part souvent dans la foulée en mise au vert. On s’écrit quelques messages, on ne s’appelle pas trop, je le laisse tranquille. Honnêtement, je préfère qu’il soit au vert. Pour lui. Pour moi c’est long, je dors mal, mais je préfère parce que je ne sais pas trop faire la cuisine. Depuis peu, je m’y essaie, et il a la gentillesse de ne pas me faire de remarques. Et puis, aussi, parce que si notre fils est malade ou qu’il ne dort pas de la nuit, ça peut être un facteur déterminant dans sa performance. Enfin, parce que c’est chouette les mises au vert. J’adorais ça. Être tous au même étage, faire les mêmes choses, partager le repas, être là pour un but commun même si les échanges ne sont pas forcément continus. J’adorais ça avec le basket !

« Les jours de match, on calque inconsciemment notre journée sur celle de Benjamin »

Je ne le revois donc pas avant le lendemain soir, après le match, les soins, la presse. Je vis ma journée avec le match du soir en tête. Et notre fils. Lui et moi on se lève le matin, on fait des activités, on sort un peu se promener s’il fait bon. Je ne vous ai pas dit, mais Timao (notre fils), c’est mon meilleur ami. Je le trimballe partout avec moi depuis toujours. À deux semaines, il était déjà au stade Bollaert de Lens. On fait une sieste l’après-midi. Puis on se douche. C’est comme si on calquait notre journée sur celle de Benjamin. Sortie, repas, sieste, douche, lui aussi fait tout ça.

« Je ne vous ai pas dit, mais Timao (notre fils), c’est mon meilleur ami », dit Marine Capon. | DR
« Je ne vous ai pas dit, mais Timao (notre fils), c’est mon meilleur ami », dit Marine Capon. | DR

Et puis c’est une journée où je m’habille, où je quitte mon survêtement. La semaine tourne autour de notre fils, des allers-retours à l’école. Entre femmes de joueurs, on s’adore toutes, mais on ne se fréquente pas beaucoup. Le match, c’est ma sortie de la semaine. Je me maquille, plus ou moins féminine, selon mon humeur. Les gens disent qu’on fait les belles parce qu’on va être vues au stade. Non, non même si, on ne va pas se mentir, c’est un peu de la représentation. Mais, pour moi et beaucoup d’autres, ce sont les seuls soirs, exceptés peut-être ceux où on s’autorise un restaurant, où je sors.

Timao s’habille aussi, chaud et à l’aise parce qu’il courra partout comme d’habitude. Il prépare son sac de jouets, son Kinder, son doudou, sa tétine, son ballon.

Dans la journée, je n’ai de contact avec Benjamin que de manière très furtive. Un petit message souvent avant la causerie du coach. Et un après, celui dans lequel il m’annonce avec fierté qu’il est titulaire. Depuis toujours, il m’envoie un message pour me dire s’il est titulaire ou non, ce qui confirme surtout que pour lui, rien n’est jamais acquis, quelle que soit la période. En réponse, je lui envoie à chaque fois un message (qu’il n’écoute pas souvent, d’ailleurs) sur sa prestation lors du match précédent, tout ce qui n’avait pas été.

« Depuis le début de la pandémie, le match c’est devant la télé en pyjama… »

Les matches, les équipes et les stratégies sont différents, bien sûr, mais je le fais quand même. « Baja, attention, la dernière fois, tes transversales n’arrivaient pas dans les pieds. Ne te jette pas sur la balle. Bouge-toi. Tu ne cours pas assez. » Ou alors : « Joue au ballon, joue, amuse-toi, prends du plaisir ». Ou alors, comme contre le PSG : « Tu mérites autant qu’eux. Ne doute pas. Ils sont comme toi et moi ».

Nos échanges se limitent à ça, quand d’autres s’appellent tout au long de la journée, cinq minutes par cinq minutes. Je me sais assez grande gueule, éruptive, donc peut-être que je limite aussi les échanges dans ces moments-là.

« Je me sais assez grande gueule, éruptive, donc peut-être que je limite aussi les échanges avec Benjamin les jours de match », confie Marine Capon. | LUCIE WEEGER
« Je me sais assez grande gueule, éruptive, donc peut-être que je limite aussi les échanges avec Benjamin les jours de match », confie Marine Capon. | LUCIE WEEGER

Joueuse de basket, j’étais très superstitieuse. La même brassière pour le match, la même culotte, la même heure pour le café, le même repas. Je le suis encore pour Benjamin parfois. Une fois habillée et prête, quand j’arrive au stade, je vais toujours prendre une frite avec notre fils chez le même marchand. À lui et personne d’autre. S’il n’est pas là, je n’en prends pas. J’arrive toujours cinq minutes après le coup d’envoi. Il se passe toujours quelque chose, je ne suis jamais à l’heure, c’est infernal ! On regarde la première mi-temps depuis la tribune puis, en fonction de la température, on finit souvent par regarder la seconde dans le salon « Famille » du Roazhon Park. À la fin du match, s’il y a victoire, Timao va sur la pelouse. Je me souviens d’un tacle qu’il avait fait à un des petits d’Edou (Édouard Mendy), je me suis dit mon Dieu cet enfant n’est pas possible ! Entendre le kop encourager les petits quand ils s’amusent après le match, c’est juste magique.

Depuis la pandémie liée au Covid, tout ça c’est fini. C’est devant la télé dans nos pyjamas. Ça manque énormément. Mais curieusement, on garde une routine.

« Dans Glasgow, seule pendant trois jours, comme une fan »

Je vis les matches. Je viens voir mon mec jouer, je ressens de la fierté, il y a toujours un peu d’adrénaline. J’ai trouvé que c’était encore plus prégnant lors des matches européens. C’était fou. J’ai fait plusieurs déplacements en me disant : « Peut-être que je ne le revivrai jamais et lui non plus ». Et ceci dans une démarche tout à fait égoïste, pour moi, même pas pour Benjamin. Comme une fan. Seule à Glasgow pendant trois jours, le marché de Noël, la grande roue, les rues du centre-ville. La Ligue 1, les coupes, c’est pour Benjamin, pour être là. Pas la Coupe d’Europe. Je mets la finale de la Coupe de France 2019 à part, avec notamment l’histoire de cette vidéo, que je vous raconterai plus tard.

Depuis peu, j’arrive à lui dire de ne pas se prendre la tête au sortir d’un mauvais match. Depuis peu, seulement. J’en étais incapable avant, j’avais tellement envie qu’il réussisse tout, je vivais tellement les choses à travers lui. Il n’avait pas le droit d’avoir de failles. Ses failles, c’était les miennes. Je transposais. Benjamin a la maturité pour piocher dans ce que je lui dis.

Moment flou et fou de la soirée au Stade de France qui vit en 2019 le Stade Rennais remporter la Coupe de France. | DR
Moment flou et fou de la soirée au Stade de France qui vit en 2019 le Stade Rennais remporter la Coupe de France. | DR

Sur le chemin du retour à la maison, après une victoire, il peut m’arriver à moi aussi d’être dans une forme d’euphorie douce. Après une défaite, c’est la déception qui prévaut, mais je ne suis jamais en colère. Je prends les bons côtés, de manière égoïste sans doute. J’ai appris à me détacher un peu des enjeux au contact d’autres femmes de joueurs qui se fichent du foot, ou de celles qui ont sans doute plus de recul que moi, bien que, clairement, toute mon année soit calquée et dépendante de celle de Benjamin et de ses résultats.

« C’est comme si je vivais, dans son ombre, ma passion pour le sport »

Je crois qu’avec lui, je vis ma passion du sport par procuration. J’ai été basketteuse donc, et très jeune je m’entraînais avec les pros à Calais. J’alternais les entraînements avec elles, et ceux avec les filles du centre de formation. Au fil des années et des expériences, j’ai lâché, vécu presque un profond dégoût pour la pratique sportive. Je vous raconterai ça dans ma prochaine chronique. Je n’arrive même plus à trouver la motivation pour courir. Donc, c’est comme si Benjamin faisait tout ça pour moi, comme si je vivais dans son ombre.

Voilà. Quand un match à domicile est terminé, je l’attends. Pour dîner. Pour débriefer s’il le souhaite. Quand les mecs rentrent, ce sont des mecs, avec leurs ego, leurs caractères. Dès qu’il franchit le pas de la porte, à son visage, à sa façon d’entrer dans la pièce, je sais dans quel état il est. Si le Stade Rennais a perdu, par principe son match a été mauvais. Parce que s’il avait été bon, il se dit que l’équipe aurait gagné. C’est un compétiteur. Il s’installe et on parle. L’autocritique n’est jamais chose facile, je vous reparlerai de cela, aussi.

On vit, on gagne, on perd différemment, mais ensemble. »

Marine Capon écrira quatre cartes blanches en avril. | LUCIE WEEGER
Marine Capon écrira quatre cartes blanches en avril. | LUCIE WEEGER

Les thèmes des quatre cartes blanches de Marine Capon

Jeudi 8 avril : « Le jour du match »

Jeudi 15 avril : « Le vestiaire, la vie de vestiaire »

Jeudi 22 avril : « L’empreinte des coaches »

Jeudi 29 avril : « Le déracinement »

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