Biographie de THÉODORE DE BÈZE (1519-1605) - Encyclopædia Universalis

BÈZE THÉODORE DE (1519-1605)

Successeur de Calvin et guide des huguenots lors des guerres de religion. Fils d'un bailli bourguignon, Théodore de Bèze mène d'abord, après des études juridiques à Orléans et à Paris, une vie de dilettante et de poète. Sa conversion et sa fuite à Genève (1548) lui permettent de jouer, pendant quinze ans, un rôle considérable dans le monde protestant français. Jusqu'en 1558, il enseigne le grec à l'Académie de Lausanne et soutient Calvin dans sa lutte contre Bolsec et Servet. Il compose une traduction des Psaumes et le drame Abraham sacrifiant, qui se révèlent tous deux de grands succès.

Doué d'une remarquable intelligence politique, il se voit chargé de nombreuses missions délicates, dont trois voyages en Allemagne : pour obtenir un soutien des luthériens au profit des coreligionnaires persécutés, il minimise les divergences relatives à la Cène, ce qui l'éloigne des réformés suisses. En 1559, il devient recteur de l'Académie genevoise, mais il se consacre davantage aux huguenots dont il apparaît comme le chef spirituel. Par crainte d'une Réforme par en bas et de déviations doctrinales, il favorise la politisation des Églises réformées françaises et encourage les intrigues des grands qui sont acquis à la Réforme.

Théodore de Bèze dirige la délégation protestante au colloque de Poissy (1561) et, pendant la première guerre de religion, il est l'aumônier et le trésorier de l'armée de Condé. En 1571, il préside le synode de La Rochelle et, après la Saint-Barthélemy, il lance un appel à la résistance contre la tyrannie (De iure magistratum). Mais, depuis qu'il a pris la succession de Calvin à Genève comme modérateur de la Compagnie des pasteurs (1564), son rayonnement diminue en France. Il dirige avec sagesse l'Église de Genève et joue un rôle de conciliation dans la politique et la vie ecclésiastique de cette ville.

Soucieux des droits des magistrats, Théodore de Bèze défend néanmoins l'indépendance du pouvoir spirituel, sans lui accorder la même influence que Calvin. Il est le conseiller écouté de la Compagnie des pasteurs. Enseignant de valeur et fondateur de la faculté de droit, il a contribué au prestige international de l'Académie de Genève. Jusqu'à sa mort, il demeure en correspondance avec tous les chefs huguenots et de nombreux théologiens protestants européens. Après 1560, il entre en conflit avec les luthériens allemands au sujet de la Cène et de la christologie par deux écrits dirigés contre Brenz et Andreae ainsi que par le colloque de Montbéliard (1586), dont la version de Bèze a connu un grand succès dans le monde calviniste européen.

Diplomate, humaniste et chef d'Église, Bèze est aussi un écrivain de talent qui a publié une Confession de foi, une traduction latine annotée du Nouveau Testament et un schéma dogmatique.

— Bernard VOGLER

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur d'histoire de l'Alsace à l'université de Strasbourg-II

Classification

Pour citer cet article

Bernard VOGLER. BÈZE THÉODORE DE (1519-1605) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CALVIN JEAN (1509-1564)

    • Écrit par Jean CADIER, André DUMAS
    • 5 330 mots
    • 3 médias
    ...pour celle de l'élite. Plusieurs professeurs qui avaient dû quitter Lausanne vinrent à Genève et constituèrent un corps professoral de grande valeur. Théodore de Bèze en fut le recteur. Le nombre des étudiants atteignit rapidement plusieurs centaines. Le livre du recteur nous a conservé leur nom et...
  • CALVINISME

    • Écrit par Jean CADIER, André DUMAS
    • 4 244 mots
    • 1 média
    Au lendemain de la mort de Calvin, sa tâche fut continuée par celui qui était depuis plusieurs années son collaborateur et son ami, Théodore de Bèze. Ce dernier affermit à Genève l'œuvre commencée, et ses écrits théologiques sont très importants. Il fut au colloque de Poissy, en 1561, le chef de...
  • FRANÇAISE LITTÉRATURE, XVIe s.

    • Écrit par Frank LESTRINGANT
    • 6 760 mots
    • 3 médias
    ...oublier la farce et la sottie, continuent d’être jouées en France au moins jusqu’au milieu du siècle. La tragédie naît avec l’Abraham sacrifiant de Théodore de Bèze (1519-1605), pièce biblique en cinq actes à la fin bienheureuse. Comme le sous-titre l’indique, c’est la première « tragédie française...
  • LITTÉRATURE ÉPISTOLAIRE

    • Écrit par Alain VIALA
    • 6 810 mots
    • 1 média
    ...illustres », des lettres éloquentes et savantes. En France, si les traités en forme de lettres furent assez peu nombreux durant la Réforme, le protestant Théodore de Bèze publia une Epistola magistri Passavanti (1553) qui reprenait le même schéma. Se faisait jour, de la sorte, une veine de l'éloquence...

Voir aussi