Mort de Robert Herbin : à jamais dans la légende du football français - Le Parisien

Mort de Robert Herbin : à jamais dans la légende du football français

Le mythique entraîneur des Verts est mort ce lundi à l’âge de 81 ans. Il avait façonné l’équipe stéphanoise des années 70, celle qui avait disputé la finale de Coupe des champions contre le Bayern en 1976.

 Robert Herbin aura laissé une trace immense dans le football français.
Robert Herbin aura laissé une trace immense dans le football français. PRESSE SPORTS

    Le Sphinx a retrouvé son mutisme éternel et c'est comme si un voile noir venait d'obscurcir le vert de nos mémoires. Robert Herbin, le mythique entraîneur de l'AS Saint-Etienne dans les années 70, est mort à 81 ans au CHU de Saint-Etienne, victime de graves problèmes cardiaques et respiratoires.

    Avare de mots et d'épanchements en public, Herbin aurait probablement préféré qu'on se contente, sans y glisser le moindre sentiment, d'égrener froidement son palmarès pour le résumer. Neuf titres de champion de France et six Coupes de France comme joueur puis entraîneur.

    Sans omettre la finale de la Coupe des clubs champions, le 12 mai 1976 perdue 1-0 face au Bayern Munich à Glasgow avec les fameux poteaux carrés, qui empêchèrent plusieurs fois le ballon de rentrer dans les filets.

    A une époque où le football français était un petit d'Europe, l'épopée stéphanoise a marqué les esprits au fer vert. Même si elle résonne aujourd'hui comme celle des perdants valeureux, dans un football français où l'on ne savait pas encore que les trophées n'étaient pas seulement réservés aux autres, la fièvre verte s'empara de la France.

    Elle fut le début d'un renouveau. La première pierre d'un édifice qui allait ensuite voir surgir Platini, Zidane, l'Euro 84 ou le Mondial 98. Pour bâtir, il fallait un architecte surdoué. Ce fut Herbin.

    L'apogée à Hampden Park en 1976

    Niçois d'origine, il fut d'abord remarqué par Saint-Etienne où la technique et l'abattage de ce milieu défensif lui permirent de devenir l'un des meilleurs joueurs de l'ASSE et de disputer 23 matchs en Bleu.

    En 1972, son mentor, Albert Batteux, quitte le club. A 33 ans, c'est à lui que son président, Roger Rocher, confie les rênes du club. Herbin va alors s'appuyer sur le centre de formation forézien où pouponnaient notamment Rocheteau, Bathenay, Lopez, Janvion ou Santini.

    En quelques années, alors que la ville s'enfonçait dans une crise minière et industrielle dont elle ne se remettrait jamais vraiment, Herbin allait faire lever les yeux au ciel à un public stéphanois qui descendait dans les mines.

    Son équipe fut à l'image de la ville. Désargentée mais combative. Les Verts d'Herbin ne pouvaient que se sublimer pour faire oublier à Geoffroy-Guichard la montée du chômage, l'agonie de la mine ou de Manufrance. Sur ce terreau de désillusions et de désindustrialisation, Herbin a façonné une équipe qui allait tout remporter.

    Les titres, les cœurs de la région puis de la France. Au point, aujourd'hui encore, d'exister par un refrain lancinant qui a traversé le temps et passé des transistors au format Mp3 : « Qui c'est les plus fort ? » Evidemment, c'était les Verts d'Herbin.

    L'apogée fut donc la finale européenne de 1976, ses poteaux carrés du terrain d'Hampden Park à Glasgow où s'écrasèrent deux frappes vertes et où se percutent encore aujourd'hui les regrets de tout un pays.

    L'histoire d'amour, pour devenir un bon roman, ne pouvait que mal se finir. Celle d'Herbin et des Verts se fracassa quelques années plus tard sur l'affaire de la caisse noire du club. Ceux qui s'étaient tant aimés et avaient tant gagné se déchirèrent pour le pouvoir.

    Le Druide a fini par fuir le Chaudron

    Herbin n'échappa pas au désastre, choisit un camp et perdit comme tous les autres. Evincé des Verts en 1983, il signera, blessé dans son orgueil, chez le rival lyonnais. Quatre ans plus tard, il revint sur le banc stéphanois. Mais ce nouveau passage ne lui apporta rien. Sauf la certitude que des vieux amants ne devraient pas toujours redonner une seconde chance à leur couple. Ils risquent juste d'écorner leurs souvenirs des années d'extase.

    Un peu las d'un football où il ne se reconnaissait plus et après un passage au Red Star puis un ultime coup de main au coach de l'ASSE, Pierre Repellini en 1998, Herbin s'est installé définitivement sur les hauteurs de la ville.

    Descendant régulièrement puis de moins souvent au stade les soirs de matchs, il s'est peu à peu isolé. Sans aigreur. Juste par caractère. Parce qu'un concerto de son compositeur favori, Gustav Mahler, ou la compagnie de ses chiens le touchaient plus que convoquer le souvenir de ses vertes années.

    Le vieux druide fuyait son chaudron. Il s'en va au moment où Geoffroy-Guichard, comme toutes les enceintes de France, est au repos forcé. L'idée ne lui aurait pas déplu. Partir sur un dernier silence.