Edith Cresson : "Me nommer 1er ministre c'était prendre un risque vu la misogynie de la classe politique !"

Edith Cresson : "Me nommer 1er ministre c'était prendre un risque vu la misogynie de la classe politique !"

Edith Cresson, ancienne Première ministre ©AFP - LUDOVIC MARIN / POOL / AFP
Edith Cresson, ancienne Première ministre ©AFP - LUDOVIC MARIN / POOL / AFP
Edith Cresson, ancienne Première ministre ©AFP - LUDOVIC MARIN / POOL / AFP
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En cette année présidentielle, Edith Cresson, la seule femme premier ministre de France revient sur ses années dans les différents ministères. Comment était acceptée une femme premier ministre dans les années 1990 ?

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Du 15 mai 1991 au 2 avril 1992, Edith Cresson est la première ministre de François Mitterrand. Depuis aucune femme n'a été nommée premier ministre. Mais pourquoi ce choix ?

Dans l'enfer de Matignon

Lorsque François Mitterrand lui propose d'être premier ministre, Edith Cresson avait déjà quitté le gouvernement et avait créé une société dont le but était d'aider les entreprises françaises à s'implanter dans les pays de l'est. Elle avait été ministre de l'agriculture, du commerce extérieur, des affaires européennes, députée, maire. Quand François Mitterrand l'a convoquée pour lui demander de succéder à Michel Rocard, nous étions dans la deuxième partie du mandat, donc la période la plus difficile. Comme ministre, Edith Cresson affirme qu'elle n'a pas eu de difficultés. La classe politique acceptait qu'une femme soit ministre. C'est en arrivant à Matignon que les choses ont été différentes. Mais comment est-elle devenue premier ministre? 

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Moi j'ai commencé par refuser. Je n'avais pas du tout envie d'être premier ministre. Puis il a insisté. Il a tellement insisté que j'ai fini par accepter. Quand on parle de l'enfer de Matignon, je suis bien placée pour savoir que ce n'est pas exagéré. [...] J'avais prévu des difficultés mais pas à ce point là, pas cette hargne extraordinaire, cette méchanceté gratuite. Toutes ces fausses informations. On me prêtait des propos que je n'avais jamais tenu.  Enfin ça a été à la fois du côté des politiques principalement des socialistes et aussi avec certains journalistes avec qui ils sont très amis. Ça a été terrible. [...] Je savais que ce ne serait pas facile mais je n'imaginais pas l’extraordinaire hargne et le système qui c'est mis en place avec des connections entre les politiques et les journalistes de façon à essayer de saboter mon travail. 

Edith Cresson la seule femme premier ministre

Nommer une femme premier ministre n'était pas une chose acceptée dans les années 1990.

François Mitterrand le savait mais il partait du principe qu'il ne voulait pas terminer son mandat sans qu'une femme ait été premier ministre. C'était important à ses yeux car lui il n'était pas du tout misogyne. Je me souviens que, quand on a fait la liste aux élections européennes, il a exigé que sur la liste ce soit un homme une femme, un homme une femme. Qu'il y ait autant de femmes que d'hommes sur la liste. Quand il pouvait le faire, il faisait le maximum pour que des femmes accèdent à des responsabilités politiques. [...] (Me nommer premier ministre), C'était d'une certaine façon prendre un risque compte tenu de la misogynie formidable de la classe politique française. C'était pas mettre tous les atouts de son côté.

Des anecdotes, il y en aurait à raconter... Lorsque François d'Aubert (ancien ministre de la recherche) parle d'elle en disant Madame La Pompadour. "J'avais été élu député, maire, conseiller général et 5 fois ministres. Alors qu'est ce qu'il faut faire pour être légitime quand on est une femme. C'est vraiment extraordinaire." Une anecdote parmi d'autres... "Le bébête show me représentait sous l'aspect d'une panthère lubrique qui se roulait aux pieds de François Mitterrand, lequel donnait des coups de pied pour s'en débarrasser". 

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2022, une femme présidente?

Depuis le début de la 5ème république, aucune femme n'a été élue présidente, aucune n'a dirigé le sénat ou l'assemblée nationale, ni le conseil constitutionnel, ni la cour des comptes. Une seule femme à Matignon.

Pour la présidentielle, 3 femmes briguent la présidence de la république. Marine Le Pen pour le rassemblement national, Anne Hidalgo pour le parti socialiste et Valérie Pécresse qui a été désigné pour le parti les républicains après la primaire début décembre. Christiane Taubira quant à elle a annoncé qu'elle réfléchissait à se lancer dans la course à l'élection présidentielle et nous donne rendez-vous mi janvier...

Les choses se sont un peu améliorées aujourd'hui mais il y a toujours les même injures quand une femme monte à la tribune de l'assemblée nationale surtout après le déjeuner quand ils ont bu un coup ils crient à poil. Je l'ai entendu. Je n'ai pas inventé et je ne suis pas la seule. Depuis peu, une chose très intéressante s'est produite c'est que le président de l'assemblée nationale a pris une disposition. C'est à dire que les députés qui insultent les femmes, on leur prélèvera la moitié de leur salaire le mois d'après. Pour certains d'entre eux c'est probablement la seule chose financière qui les fasse réfléchir. [...] Je crois qu'une femme pourrait être présidente car les personnes votent pour une personne et tout le monde vote. C'est davantage incontestable contrairement aux ministres qui sont nommés.

Quant au parti socialiste qui ne décolle pas dans les sondages, "c'est une catastrophe" pour Edith Cresson. 

La déliquescence du parti socialiste je l'explique par le fait qu'on ait cessé de travailler comme avant,  où l'on travaillait sur des idées et on votait à l'intérieur du parti. Donc là on a une légitimité car on a un programme. On ne peut pas voter pour quelqu'un comme ça sans savoir son programme. 

Les engagements d'Edith Cresson aujourd'hui

Edith Cresson est aujourd'hui la présidente d'honneur des Simones. Cette association a été lancée le 9 décembre par deux 2 députées centristes : Pascale Fontenel-Personne et Sandrine Josso. "Le but est de promouvoir, encourager les femmes, et d'arriver à ce que davantage de femmes politiques puissent émerger."

Elle a également créé les écoles de la deuxième chance quand elle était à la commission à Bruxelles. Elle a également fait voter un budget européen pour que chaque pays membre de l'union européenne ait un budget pour créer un prototype. Elle a implanté la première école à Marseille. Il s'agit donc de jeunes qui ont décroché et qui n'ont pas été beaucoup à l'école. Aujourd’hui il y a 135 sites différents en France et 18-20 000 jeunes en France qui suivent ces cours avec 70% de résultats positifs (c'est à dire que ces jeunes trouvent un emploi ou qu'il y a un retour à une formation qualifiante). 

Une des grandes lacunes du système français (concernant l'éducation) c'est l'inégalité des chances, la panne de l’ascenseur social. On a essayé de le faire mais il faut aller beaucoup plus loin.

L'équipe