Carole Merle, une riche carrière pour finir... ruinée

En 1990, la championne de ski alpin Carole Merle confie la gestion de son patrimoine puis de ses revenus à Me Yvan Michel, un notaire varois qui est aussi son oncle (1). En mars 1994, elle met un terme à l’une des carrières les plus étoffées du ski français: médaillée d’argent aux jeux Olympiques d’Albertville en 1992, championne du monde de géant l’année suivante et, au total, cinq Coupes du monde inscrites à son palmarès. Son patrimoine s’élève alors à 23,5 millions de francs. Aujourd’hui, elle se trouve endettée à titre personnel et par l’intermédiaire de ses dix sociétés dans lesquelles son notaire l’aurait associée, pour plus de 70 millions de francs. Contacté par téléphone et se montrant coopératif, Me Michel a indiqué qu’il était «tenu par le devoir de réserve le plus total» tant qu’aucune action en justice n’était intentée à son encontre. Il a ajouté que, en cas de faute reconnue de sa part, une assurance serait à même de le couvrir et qu’il attendait de répondre devant un tribunal. Après avoir tenté – en vain – une transaction en vue d’un règlement à l’amiable et confidentiel, Carole Merle ouvre – au grand jour – son dossier… Entretien.

Publié le 18 décembre 1997

Pourquoi avoir porté votre dossier sur la place publique?

Carole Merle Honnêtement, le fait de le rendre public me soulage. Mais, avant tout, j’aimerais que mon cas serve d’exemple. J’aimerais que mes déboires éveillent de la méfiance ou de la vigilance chez les sportifs de haut niveau en mal de placer leurs revenus. Et, bien sûr, grâce aux pouvoirs des médias, j’espère parvenir à régler au plus vite ce dossier. Vous savez, ces deux dernières années furent très dures. Pendant ces deux ans où j’ai espéré résoudre – dans la confidentialité – ce dossier. Ce fut un gros bébé à porter, un très gros souci. Je vivais donc coupée du monde. Mais, tous les jours, 24 heures sur 24, j’étais obsédée par ce dossier. J’étais complètement déstabilisée.

Que vous est-il arrivé exactement?

Carole Merle Au fil de ma carrière, comme j’ai gagné de l’argent, j’ai donc eu besoin de trouver quelqu’un pour gérer et placer mes revenus. Faute de connaissances en gestion de patrimoine et de ses ficelles juridiques, faute de temps, puisqu’un skieur est sur les pistes onze mois sur douze, j’ai dû confier cette gestion à une tierce personne. Dans un premier temps, j’ai été sollicitée par des personnes que je ne connaissais pas et qui paraissaient plus intéressées par mon argent que par ma personnalité. Et, comme mon oncle était notaire, je lui ai naturellement fait confiance.

Résultat?

Carole Merle Aujourd’hui, je suis ruinée et endettée à hauteur de plus de 70 millions de francs…

Mais, comme c’est votre patrimoine, donc vos revenus, vous êtes responsable de vos déboires?

Carole Merle Non, je ne suis pas responsable du tout! Je m’en veux terriblement de lui avoir fait une confiance aveugle. Oui, ça me tord véritablement les boyaux! Je suis écoeurée. Vous vous rendez compte, c’est toute une vie de travail. D’accord, j’ai été privilégiée parce que j’ai eu la chance incroyable de pouvoir vivre ma passion, le ski. J’ai vécu cette passion à 300% et j’ai pu bien en vivre. Et, aujourd’hui, toute ma vie bascule. Oui, c’est un énorme gâchis.

N’aviez-vous aucun contrôle sur les investissements et les placements de votre notaire?

Carole Merle Lorsque je lui posais des questions, comme il est à la fois charmeur donc beau parleur, il possédait l’art et la manière de me rassurer, de dissiper mes doutes ou de me faire lire des dossier incompréhensibles. Il a purement et simplement abusé de ma confiance. Par exemple, en récupérant une partie du dossier, j’ai appris qu’il m’avait acheté, sans m’en informer, un terrain contigu au sien…

Vous disiez que toute votre vie a basculé. Votre vie privée aussi?

Carole Merle Oui, à cause de cette histoire, ma vie de famille a implosé. Cette histoire est – en partie – à l’origine de mon divorce (2) et à l’origine de la séparation, depuis deux ans, de mes parents. Vous savez, comme mes parents se sont parfois portés caution, ils sont aussi inquiets qu’inquiétés. Nous vivons un vrai drame. J’en suis malade.

Aujourd’hui, de quoi vivez-vous?

Carole Merle Je vis de rien. Je vis à Super-Sauze (Hautes-Alpes) chez et grâce à ma mère. C’est elle qui me prête l’argent dont j’ai besoin. Aujourd’hui, je n’ai plus de compte et je suis interdite bancaire, donc je n’ai plus le droit de me servir d’un chéquier ou d’une carte bleue.

Et votre restaurant «L’Op-Traken» à Super-Sauze?

Carole Merle Il est actuellement en gérance. Mais, en station, pour qu’un restaurant tourne bien, il faut y accoler un hôtel. A cause de ces problèmes, je n’ai pas eu l’argent pour le construire.

Puis-je me permettre de vous demander si vous êtes à la recherche d’un travail?

Carole Merle Oui, je suis à la recherche d’un emploi. Je n’ai plus aucune rentrée d’argent, plus de partenaire, plus de sponsor. Honnêtement, c’est avec un grand plaisir que j’irai comme consultante aux jeux Olympiques de Nagano (3).

Entretien réalisé par CLAUDE HESSEGE

(1) Son oncle, le frère de la mère de Carole. Michel Yvan a son étude à Trans-en-Provence (Var) et appartient au réseau Monassier France, considéré comme le plus grand réseau d’études de notaire en France.

(2) En 1995, avec Philippe Pellet. Avant de fréquenter Carole, il était le kinésithérapeute de l’équipe de France de ski alpin féminine.

(3) Du 7 au 22 février 1998 au Japon.

Propos recueillis par


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