Présidentielle de 2027 : comment Bernard Cazeneuve se prépare
Après avoir dessiné sa gauche – sociale-démocrate et anti-Nupes – l’ex-Premier ministre Bernard Cazeneuve accélère et se structure. Une première réunion d’experts s’est tenue ce mardi.
Bernard Cazeneuve est un homme méticuleux. Un « manifeste pour une gauche sociale-démocrate » en septembre pour indiquer ses valeurs. Le lancement d’un « mouvement » début février pour passer des mots aux choses. Puis, à la fin de ce même mois, une tribune de soutien de 110 élus pour une « fédération de la gauche républicaine » autour de l’ancien Premier ministre. L’heure est donc à la structuration. « Je ne suis pas dans la volonté de construire une machine pour ma pomme, je ne détruirai pas d’autres hypothèses au motif que ce n’est pas moi, mais s’il faut y aller, je prendrai mes responsabilités », précise l’intéressé, qui n’a pas besoin de prononcer le mot « présidentielle » pour que tout le monde y pense.
Un des axes majeurs de Bernard Cazeneuve, c’est de faire des propositions réalistes et intelligentes. Il ne s’agit pas de promouvoir la retraite à 60 ans avec 40 annuités
Mardi dernier, pour la première fois, il a réuni dans une salle de l’Assemblée nationale une quarantaine d’experts prêts à le nourrir de notes. Ce jour-là, pendant une heure et demie, chacun s’est présenté sous l’œil attentif de Louis Schweitzer, ancien haut fonctionnaire, ancien patron de Renault et animateur de ce réseau. « Nous voulons être une sorte de fabrique d’idées, glisse-t-il. Un des axes majeurs de Bernard Cazeneuve, c’est de faire des propositions réalistes et intelligentes. Il ne s’agit pas de promouvoir la retraite à 60 ans avec 40 annuités. » Soit ce que défend la Nupes aujourd’hui.
Des référents départementaux
Ces derniers temps, Cazeneuve sillonne la France pour structurer son Mouvement. Il sera à Lyon (Rhône) jeudi puis samedi matin dans l’Ariège pour soutenir lors de futures partielles la candidate PS dissidente Martine Froger face à Bénédicte Taurine, la candidate LFI de la Nupes. L’après-midi, il se rendra à Toulouse à la conclusion du congrès du Parti radical de gauche au côté de son président, Guillaume Lacroix. Une invitation qui vaut compagnonnage. « Nous nous mettons en ordre de bataille pour cette nouvelle fédération, confirme Lacroix. Il faut que tous les orphelins de la gauche de gouvernement aient une maison commune alors qu’une autre gauche fait du spectacle. »
Les premiers travaux remontent à cet été. La dynamique est enclenchée
Pour tisser sa toile, Cazeneuve met aussi en place des référents départementaux. « Courant mai, nous organiserons une conférence de presse pour présenter le maillage », prévoit l’ancien ministre de l’Intérieur. En parallèle, le Mouvement planche sur plusieurs thématiques : Europe, logement, travail, transition écologique. « Dans les mois et les années qui viennent, nous allons organiser des conventions thématiques territorialisées », indique-t-il. Les premières pourraient avoir lieu au printemps « au plus tôt » ou à l’« automne au plus tard ».
Le Mouvement comme la « fédération » paraissent encore relativement gazeux. Sans organigramme ni statut. Sans argent ni locaux. Mais pas sans organisation politique. Ancienne membre des gouvernements de Manuel Valls et Bernard Cazeneuve, Clotilde Valter joue le rôle de bras droit. Une soixantaine d’élus se réunissent environ toutes les trois semaines. « Les premiers travaux remontent à cet été, cadre le président du conseil départemental de Loire-Atlantique, Michel Ménard. La dynamique est enclenchée. » « Le débat sur les retraites, nous l’avons eu entre nous », illustre le député des Pyrénées-Atlantiques David Habib, un des piliers du dispositif. Autre soutien de poids : le président de la Région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard. Lui se réjouit que Cazeneuve « accepte de prendre du temps pour réfléchir à un projet de société et pour penser l’avenir de la gauche ».
Combien de divisions ?
Alors que celui qui est désormais avocat se félicite du « flux d’adhésions quotidien », d’autres pointent les limites. À distance, Jean-Luc Mélenchon moque Cazeneuve et sa gauche « notariale, polie et bien habillée » avant d’ironiser sur les foules qui se lèvent aux cris de « Youpi, Bernard est revenu ! ». « Ni François Hollande, ni Carole Delga, ni Stéphane Le Foll, ni Hélène Geoffroy ne veulent se mettre derrière lui, relève, plus prosaïque, un éléphant social-démocrate. Quand vous faites l’appel du 18 juin, vous espérez quand même que quelques esquifs regagnent Londres. » Si Le Foll se dit « en proximité avec ses initiatives », il est « trop tôt », selon lui, pour s’engager. « Ce n’est pas le timing opportun pour préparer la présidentielle », juge-t-on dans l’entourage de Delga. Quant au président du groupe PS au Sénat, Patrick Kanner, longtemps l’un de ses soutiens, il préfère s’investir « d’abord à l’intérieur du PS », un parti que Cazeneuve a quitté en mai dernier.
La coalition des empêcheurs a une capacité de toxicité très grande et je n’ai pas l’intention de me laisser impressionner
Si cet homme peu pressé sort si tôt du bois, c’est sans doute qu’il doit convaincre ses amis de sa détermination. La preuve ? Un temps il s’était préparé pour 2022, avant de renoncer. « Ce qui avait bloqué, c’était la réaction du premier secrétaire du PS, qui avait vu d’un mauvais œil qu’on essaie de structurer quelque chose », se souvient l’ancien secrétaire d’État Christophe Sirugue. « Ceux qui ont organisé l’empêchement ont du mal à l’assumer, poursuit Cazeneuve. Le reste, c’est une histoire racontée aux enfants. La coalition des empêcheurs a une capacité de toxicité très grande et je n’ai pas l’intention de me laisser impressionner. » Voilà qui est dit.
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