Marseille : Ounahi, la crise de croissance

Recruté par l'Olympique de Marseille au lendemain d'une Coupe du monde qui l'avait vu faire merveille sous les couleurs du Maroc, Azzedine Ounahi peine à convaincre. Rarement décisif, sporadiquement utilisé, l'ancien joueur d'Angers traverse les semaines comme une ombre, au point de venir de plus en plus grossir la colonne, déjà bien garnie, des échecs de recrutement du club présidé par Pablo Longoria. Pourquoi et comment en est-on arrivé là ? Éléments de réponse.
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Lille, 5 avril 2024 : relancé dans le onze de départ après un mois sans titularisation, Azzedine Ounahi est rappelé sur le banc peu après l'heure de jeu (65e). Un autre international en difficulté, le Sénégalais Iliman Ndiaye, le remplace. Désireux de terminer la saison sur une bonne note, le Marocain sort la tête basse. L'opération séduction attendra. 

Le lendemain, L'Équipe lui attribue la note de 3/10 et le range dans la colonne des flops de la rencontre. « Relancé dans le onze après des semaines à se désespérer de son sort, il n’a pas montré qu’il méritait mieux au fil d’un match où il n’a pris aucun risque, jouant trop souvent vers l’arrière », juge le quotidien sportif. Dur mais juste, tant le natif de Casablanca aura traversé ce match entre prétendants à l'Europe comme une ombre, loin des promesses de janvier 2023, quand l'OM déboursait une somme estimée à 10 millions d’euros pour s’attacher les services du prometteur milieu relayeur.

Un impact limité sur l'OM

L'examen des statistiques confirme cette impression : lors de ses 14 titularisations seulement en Ligue 1 depuis le début de cet exercice 2023-2024, Azzedine Ounahi n'a terminé que trois fois les rencontres. Il n'a marqué que deux fois et n'a pas délivré la moindre passe décisive à ses coéquipiers, lui qui est pourtant réputé pour sa qualité technique et son « QI foot ». Les entraîneurs ont beau se succéder à un rythme accéléré sur le banc du club phocéen, Azzedine Ounahi ne semble trouver grâce aux yeux d'aucun d'entre eux. Sa polyvalence jouerait-elle des tours à l'ancien de l’Académie Mohammed VI ? 

Exilé sur le côté gauche de l'entrejeu par l'Espagnol Marcelino, le Lion de l'Atlas ne se montre pas beaucoup plus à son aise dans le double-pivot de son successeur Gennaro Gattuso, qui voyait en lui un regista (meneur reculé à la Andrea Pirlo, ndlr). Et quand l'ancien SCOïste marque un but splendide contre Rennes, le 3 décembre, l’Italien en profite pour le recadrer vigoureusement. « Il peut faire mieux. Il a des qualités techniques, on l’a vu sur son but. Il doit être plus juste avec le ballon. Et voir comment ne pas déséquilibrer l’équipe. J’en attends plus, assène le coach. Je n’ai pas aimé sa première période, j’ai préféré sa deuxième. »

Le tacle est appuyé, mais les mots du technicien résument ce que beaucoup pensent d'Azzedine Ounahi parmi les suiveurs du club olympien : le Marocain tient davantage du joueur de fulgurance, de l'intermittent du spectacle que de la promesse tenue. Car si le joueur est apparu comme une révélation soudaine au grand public lors du Mondial au Qatar, son ascension n’a rien eu d’évident. Après avoir signé à Strasbourg en 2018, le jeune homme y stagne deux ans avec la réserve du club, en National 3. Ces deux saisons dans les rangs amateurs marquent l'intéressé, qui ne s’imaginait pas y évoluer lors de son arrivée en France. 

Avec son agent, celui qui vient de souffler ses dix-huit bougies décide alors de quitter l’Alsace pour tenter de se relancer à Avranches, en National 1. Ce choix va s'avérer payant. Avec 6 buts et 1 passe décisive en 30 matchs, Ounahi apparaît vite comme l’un des meilleurs joueurs de la division. La suite, c’est à Angers qu’il l’écrira dix-huit mois durant, endurci car conscient de la difficulté d’être un joueur de haut niveau et de le rester dans la durée.

Un avenir loin de la Canebière ?

À Marseille, Azzedine Ounahi savait qu'il devrait encore relever son degré d'exigence. « En arrivant à l'OM, il va découvrir un grand club, à la riche histoire, où les attentes du public sont importantes », prévenait alors Nasser Larguet, interrogé par TV5 Monde. « Ce qu'il a démontré à la Coupe du monde, où la pression est au maximum pendant un mois, il va devoir l'assumer au quotidien dans un grand club », ajoutait celui qui dirigea le centre de formation de l'Olympique de Marseille entre juillet 2019 et avril 2022 après avoir été le premier directeur de l’Académie Mohammed VI, inaugurée en 2009 par le roi du Maroc. Un peu plus d'un an plus tard, Azzedine Ounahi, certes pas épargné par diverses blessures, est loin du compte. S'il brille toujours en sélection au poste de relayeur droit, dans la zone forte de son équipe nationale, occupée par Achraf Hakimi et Hakim Ziyech, il ne parvient pas à convaincre dans les joutes hexagonales.

Soutenu par ses coéquipiers quand il a perdu en octobre Oussama Fallouh, son meilleur ami passé comme lui par Avranches et Angers, dans un accident de la route à Casablanca, Azzedine Ounahi a avoué avoir été extrêmement touché par ce drame intime. « J'ai regardé la vie différemment », avouera-t-il à BeIN Sports. Des moments difficiles propices aux grandes remises en question. Celle de son avenir s'est déjà posée cet hiver. Plusieurs clubs saoudiens, parmi lesquels Al-Hilal où évolue son coéquipier de sélection Yassine Bounou, ont effectué des approches. Azzedine Ounahi est resté sur la Canebière mais l'OM pourrait bien ne pas le retenir en cas d'offre convaincante.