Qui était Albine de Montholon, la dernière maîtresse de Napoléon

Qui était Albine de Montholon, la dernière maîtresse de Napoléon

Dans le huis clos de Sainte-Hélène, Napoléon a pu compter sur Mme de Montholon pour consoler sa solitude… Avec une belle compensation financière à la clé.

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« La Comtesse Albine de Montholon », William Bouguereau. 
« La Comtesse Albine de Montholon », William Bouguereau.  © Alamy / Alamy/ABACA

Temps de lecture : 4 min

Quand Napoléon débarque à Sainte-Hélène en 1815, l'humeur est maussade : l'îlot est battu par les vents, l'humidité permanente, la nourriture médiocre et les loisirs inexistants… Sans compter une surveillance des Anglais tatillonne, qui plombe encore plus le confinement des Français, comme le détaille l'historien Pierre Branda dans son dernier ouvrage truffé d'anecdotes, Napoléon à Sainte-Hélène (Perrin). D'autant qu'une grande majorité de la suite de l'Empereur déchu est jeune : sur la quinzaine d'officiers et domestiques qui gravitent autour de sa personne, une dizaine n'a pas trente ans. Inutile de préciser qu'ils tombent vite dans un ennui profond et ne tardent pas à courtiser les rares jeunes filles qui habitent Longwood House, tout en fréquentant des femmes de petite vertu que l'on fait monter depuis Jamestown, la capitale de l'île confetti.

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Napoléon, 46 ans, s'en offusque : il n'ignore rien du trafic de son entourage, certains officiers accueillant des prostituées dans leur chambre aux minces cloisons, à quelques mètres de celle de l'Empereur… Si celui-ci ne tomba pas dans ce commerce – très attaché à son rang – il est quasiment certain qu'il entretint plusieurs mois une relation avec Albine de Montholon, 37 ans, qui fit le voyage au côté de son époux le comte de Montholon, l'ancien chambellan du souverain…

DOSSIER Napoléon, la grande aventureCette romance ne passe évidemment pas inaperçue, d'autant que l'Empereur se permet quelques familiarités, comme pincer le postérieur de Madame en public… Le domestique Ali surprit un jour la comtesse sortir de la chambre de Napoléon en se rajustant. Quant au général Gourgaud, ennemi des Montholon, il se mit à épier leur manège, allant même jusqu'à prévenir le mari cocu, qui feint l'étonnement. En janvier 1817, Gourgaud écrit dans son journal : « L'Empereur nous fait demander. Il joue au billard avec la Montholon. Cette dernière fait tout ce qu'elle peut pour faire la passionnée avec Sa Majesté : yeux doux, pieds en avant, robe pincée sur la taille… Enfin, elle cherche à faire la belle et ce n'est pas facile. »

Aigreur et persiflages

Exaspéré par le favoritisme des Montholon, Gourgaud joue les langues de vipère et tente d'arracher son maître au bras de celle qu'il finit par surnommer « la putain » – il enrage de la voir toucher une pension de 12 000 francs de la part de l'Empereur, autant que son mari. « Elle se gratte trop la gorge et crache dans son assiette, ce n'est pas une femme bien élevée », persifle-t-il aux oreilles de Napoléon. Lequel lui répond aussi sec : « J'ai été habitué à vivre avec des femmes trop gracieuses pour ne pas voir les ridicules et mauvaises manières de Mme de Montholon ! Mais, enfin, ici, il faudrait faire sa société d'une perruche si on n'avait pas autre chose… » Ce qui laisse deviner dans quels ennui et lassitude se trouvait le captif de Longwood.

À LIRE AUSSI Jean-Paul Kauffmann : « Napoléon est le Petit Poucet de l'Europe » Tel un courtisan déchu, Gourgaud s'enferme dans son aigreur, devient insupportable et va même jusqu'à provoquer plusieurs fois le comte en duel, ce qui irrite fortement l'Empereur. « Lassé de ces querelles, Napoléon finit par demander à Gourgaud de partir de l'île, explique l'historien Pierre Branda. Et ce dernier, amèrement déçu par son maître, va passer à table en racontant à l'ennemi que Napoléon entretient une correspondance secrète à l'extérieur, qu'il pourrait s'évader facilement et qu'il se porte comme un charme, laissant entendre qu'il joue la comédie à merveille. Quand ces informations parviennent aux Anglais, ces derniers vont renvoyer le médecin et ami de l'Empereur, O'Meara, avec de graves conséquences sur la santé de Napoléon. Ils stoppent également son déménagement prévu à Rosemary Hall, dans la partie occidentale de l'île, bien plus riante et ensoleillée que celle où est situé Longwood. De ce point de vue, la trahison de Gourgaud a des conséquences désastreuses sur les conditions d'exil de l'Empereur. »

Un cocufiage rentable

Au bout de quatre longues années confiné à Sainte-Hélène, le couple Montholon envisage son retour. Napoléon se résigne à laisser partir Albine, mais refuse de se séparer de son ancien chambellan. Les tractations financières commencent : pour bons services rendus à l'Empereur, Albine repart avec une véritable fortune, à savoir 140 000 francs, plus une pension annuelle de 20 000 francs, à quoi s'ajoute un titre de rente rapportant près de 40 000 francs l'an – à cette époque, le revenu moyen avoisine les 1 000 francs par an. Mais l'absence de la comtesse pèse rapidement sur le moral de l'Empereur, preuve que cette liaison était sans doute bien plus sincère pour lui que pour elle. Une chape de plomb tombe soudain sur Longwood House, l'Empereur tourne en rond, dépérit, abandonne même quelques mois l'écriture de ses Mémoires… « Votre femme semait des fleurs sur ma tombe, depuis il n'y croît plus que des ronces », confie-t-il au comte. À la mort du conquérant, en 1821, Montholon se verra également gratifié de plus de 2 millions, la plus belle part de l'héritage, bien plus que Bertrand ou Marchand, les autres compagnons de captivité. Jamais cocufiage ne fut plus rentable…

« Napoléon à Sainte-Hélène », par Pierre Branda, éditions Perrin, 27 euros
« Napoléon à Sainte-Hélène », par Pierre Branda, éditions Perrin, 27 euros
Napoléon à Sainte-Hélène, par Pierre Branda, éditions Perrin, 27 euros.

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Commentaire (1)

  • P'tit-Loup

    Célébrée subtilement dans une chanson de Serge Lama... On comprend mieux l'allusion feutrée dans les paroles.