Jacques Chirac a rendu hommage, dans un communiqué, au général Alain de Boissieu, décédé mercredi 5 avril, en évoquant "un grand soldat ayant consacré toute son existence au service de la France".

"C'est un homme de devoir, généreux et respecté de tous qui nous quitte", a indiqué le chef de l'Etat, rappelant qu'"après une conduite héroïque au cours de la campagne de France en 1940, il est fait prisonnier puis s'évade pour rejoindre, parmi les premiers, le général de Gaulle à Londres".

Le chef de la France libre avait remarqué en 1941, à Londres, ce jeune et brillant officier qui venait de réussir, en compagnie du général Billotte, une spectaculaire évasion d'Allemagne via l'URSS. Puis, le 22 août 1962, Alain de Boissieu, qui vouait à son beau-père une admiration inconditionnelle, se trouvait dans la voiture de De Gaulle au moment de l'attentat du Petit-Clamart.

Nommé grand chancelier de la Légion d'honneur en 1975, il avait démissionné de son poste en mai 1981, au moment de l'élection à la présidence de la République de François Mitterrand, pour ne pas avoir à remettre le collier de Grand maître de l'Ordre à un homme qui, selon lui, "avait insulté le général de Gaulle".

"Si Dieu vous prête vie, vous commanderez un jour Saint-Cyr"

Marié depuis 1946 à Elisabeth, la fille de De Gaulle, le général de Boissieu était chancelier de l'Ordre de la Libération depuis septembre 2002.

Né le 5 juillet 1914 à Chartres (Eure-et-Loire), Alain de Boissieu Dean de Luigne entre à Saint-Cyr en 1936 et en sort deux ans plus tard officier de cavalerie. Deux fois cité pendant la campagne de France, il est fait prisonnier en juin 1940 entre l'Aisne et la Marne et emmené dans un oflag en Poméranie dont il parvient à s'évader.

Très impressionné par le récit de son évasion, le général de Gaulle lui déclare : "Si Dieu vous prête vie, vous commanderez un jour Saint-Cyr". La prédiction s'accomplira lorsque le général de Boissieu deviendra commandant de l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr (1964-1967).

Ardent défenseur de l'armée de conscription

Commando dans les unités spéciales britanniques, Boissieu participe à plusieurs missions sur les côtes françaises avant de faire partie de l'état-major particulier de De Gaulle jusqu'en 1942. Affecté ensuite aux Forces françaises d'Afrique orientale, il contribue au rétablissement de l'autorité française à Madagascar et à Djibouti.

En mars 1943, il rejoint la colonne blindée de Leclerc, se bat en Tunisie et fait toute la campagne de libération avec la 2e D.B. (Normandie, Paris, Strasbourg, Berchtesgaden). De 1945 à 1954, il est chef d'escadrons, à l'école d'état-major, puis à Brazzaville. Il est reçu à l'Ecole de guerre en 1953.

Affecté en Algérie à partir de 1956, il commande le 4e régiment de chasseurs dans le Constantinois, puis promu colonel, il devient en 1958 directeur du cabinet militaire de Paul Delouvrier, délégué général en Algérie.

Chef d'état-major de l'inspection de l'armée blindée et de la cavalerie (1959), puis commandant de la 2e brigade blindée (1962), il est promu successivement: général de brigade (1964), général de division (1968), général de corps d'armée (1970) et enfin général d'armée (1971).

Nommé chef d'état-major de l'Armée de terre (1971-75), le général de Boissieu se fait à ce poste l'ardent défenseur de l'armée de conscription et du service militaire de douze mois.

AFP