MEET THE
MANSFELDS
MEET THE
MANSFELDS
Sous la direction de Gilles Genot
Ouvrage publié à l’occasion de l’exposition
Meet the Mansfelds. La représentation de père
et fils, princes de la Renaissance (16e - 18e siècles)
17.11.2023 – 18.2.2024
Publications du Lëtzebuerg City Museum, 3
Luxembourg, 2024
TABLE DES MATIÈRES
Lydie Polfer
Préface
9
Jean-Luc Mousset
Les Amis du Château de Mansfeld
au service du patrimoine de la Ville
11
Gilles Genot
Introduction: Mansfeld who?
13
Eelke Muller, Jona Mooren
The looting and restitution of Jewish property:
a portrait of Peter Ernst of Mansfeld during
World War II
21
Ann-Cathrin Rothlind
Unknown amongst the well-known: the portrait
of Peter Ernst of Mansfeld in the collection of
Skoklosters slott in Sweden
31
Gilles Genot
Artificial intelligence in exhibition curation:
a case study
39
Ralph Lange, François Reinert
Und jetzt im Musée Dräi Eechelen: das Porträt
von Karl von Mansfeld – ein Jahrhundertkauf
55
TABLE DES MATIÈRES
Benoît Reiter
Charles de Mansfeld (1543/45-1595).
Le diable devenu héros de la chrétienté
Gilles Genot
Se mettre en scène sur papier :
la lettre de rémission accordée par Philippe II
à Charles de Mansfeld
97
135
Benoît Reiter
Les portraits du prince et comte Charles de
Mansfeld : peintures, gravures et dessins
143
Muriel Prieur
Possibilités et limites : la pluridisciplinarité
au musée
189
Claire Toussat, Christina Currie, Alexia Coudray,
Steven Saverwyns
Tel père tel fils ? Comparaisons matérielles
et stylistiques de deux portraits de Pierre-Ernest
et Charles de Mansfeld
203
Jean-Luc Mousset
Le site et les antiquariums du château Mansfeld
à Luxembourg-Clausen : emprunts italiens et
adaptations locales
217
Notices d’auteurs
254
8
Préface
Le prestigieux château Renaissance « La Fontaine », érigé par le comte Pierre-Ernest
de Mansfeld au 16e siècle, a durablement marqué le quartier de Clausen de son
empreinte et fait encore aujourd’hui la fierté de notre ville. Pourtant cet extraordinaire
domaine était tombé en ruines après la mort du gouverneur en 1604 et les lieux
avaient subi maintes transformations depuis lors. Il a fallu attendre les fouilles
archéologiques des années 2002 à 2007 pour que les vestiges longtemps invisibles
apparaissent à nouveau au grand jour. Depuis 2015, la Ville a entamé des études
patrimoniales et architecturales poussées, complétées par un processus de
participation citoyenne, pour donner une nouvelle vie au site Mansfeld. En 2017,
premier pas, la partie non bâtie du parc a pu être ouverte au public. En 2018,
commença une collaboration avec l’Université du Luxembourg qui a abouti,
au printemps 2022, à un symposium international réunissant d’éminents experts.
Les résultats de ces deux journées de réflexion et d’échanges ont fait l’objet d’une
publication au titre évocateur « Mansfeld revisited » et ont alimenté le cahier des
charges du concours d’idées d’urbanisme pour la remise en valeur du site Mansfeld.
En juin 2023, les projets retenus lors de ce concours d’idées ont été présentés au public.
Les efforts conjoints de la Ville et de son Service Urbanisme, de l’Institut national
de recherches archéologiques, de l’Institut national du patrimoine architectural,
de l’Université du Luxembourg et – last but not least – des
Portrait de Pierre-Ernest de Mansfeld,
Amis du Château de Mansfeld ont accru de façon notable
publié dans l’Historia Belgica Nostri
nos connaissances sur l’ancien château « La Fontaine
Potissimvm Temporis […] de Emanuel
» et son parc à Luxembourg-Clausen. Mais qu’en est-il
van Meteren (1535-1612), feuille
de la personnalité de Pierre-Ernest de Mansfeld et de
détachée (extrait), 1598
la destinée de sa progéniture ? Force est de constater
Allard Pierson, University of Amsterdam,
que les études sur la biographie et l’action politique et
OM 63-949 (1)
militaire de Mansfeld n’ont pas avancé au même rythme
que les investigations portant sur l’architecture et les fastes de son palais. C’est dans
cette brèche que le Lëtzebuerg City Museum se lance maintenant en publiant un
ouvrage scientifique qui prolonge l’exposition « Meet the Mansfelds. La représentation
9
de père et fils, princes de la Renaissance (16e-18e siècles) », qui s’est tenue au musée
d’histoire de la Ville du 17 novembre 2023 au 18 février 2024. Cette publication explore
la question cruciale de la véracité des images. L’exposition a su rassembler toutes les
représentations actuellement connues du père et de son fils Charles. Mais ces portraits,
censés représenter un même personnage, se ressemblent parfois si peu qu’on vient à
douter de leur réalisme. Quelle fut la finalité de ces représentations gravées et peintes
de deux princes de la Renaissance ? Qu’est-ce qu’elles nous dévoilent de leur caractère
? Les auteurs du présent volume se livrent à des enquêtes passionnantes sur le vrai et
le faux, l’original et la copie, le réel et l’imaginaire dans l’iconographie des « hommes
illustres ».
Je tiens à remercier les spécialistes du Musée national d’archéologie, d’histoire et
d’art, du Musée 3 Eechelen, du Het Noordbrabants Museum, du Statens Historiska
Museet de Stockholm, de l’Institut Royal du Patrimoine Artistique et des Amis du
Château de Mansfeld qui se sont associés au Lëtzebuerg City Museum pour nous
faire découvrir de nouvelles facettes de la riche histoire des Mansfeld.
LYDIE POLFER
Bourgmestre de la Ville de Luxembourg
10
Les Amis du Château
de Mansfeld au service
du patrimoine de la Ville
Le but de l’Association des Amis du Château de Mansfeld est de promouvoir le site
Mansfeld, de l’étudier et de transmettre les résultats de ses recherches à l’ensemble
de la population ainsi qu’aux administrations directement engagées à Clausen. Depuis
sa fondation en 2016, les Amis ont régulièrement participé à des actions publiques et
variées en collaborant avec des partenaires différents. Pour l’ouverture du Parc Mansfeld
en 2017, ils ont rédigé les textes et proposé les images qui expliquent l’histoire du site
sur la palissade du lieu. En même temps, ils ont pu réaliser, grâce au mécénat de
Madame Antoinette Probst, deux projections, l’une reconstituant de façon virtuelle
le château et, l’autre présentant le personnage de Pierre-Ernest de Mansfeld. Ces films
peuvent être vus sur le terrain des vestiges grâce à l’écran y installé par la Ville. En 2019,
l’ACM a organisé, ensemble avec les Archives Nationales, l’exposition « Mansfeldschlass :
Un château disparu ? (1604-2018) ». Cette dernière se voulait être la suite de la grande
exposition internationale « Un prince de la Renaissance, Pierre-Ernest de Mansfeld
(1517-1604) » qui a eu lieu au MNAHA à l’occasion de la visite d’Etat du Roi et de la
Reine d’Espagne en 2007. De même, en publiant pour la première fois la vue inconnue
de Callot qui montre la ville de Luxembourg au 18e siècle, l’association a rendu
possible son exposition ultérieure au LCM.
En 2023, l’ACM a proposé à ce musée une présentation inédite consacrée aux portraits
des Mansfeld, père et fils. Elle associe des œuvres issues de collections publiques à des
portraits appartenant à Benoît Reiter, secrétaire de l’Association. Dans le même esprit de
fédérer les compétences, la présente publication réunit des contributions de spécialistes
institutionnels et privés dont la toute première biographie de Charles de Mansfeld. Enfin,
l’article sur les apports de l’Italie à Clausen devait directement être utile au Service
d’urbanisme de la Ville dans sa mission de revitaliser ce lieu historique.
JEAN-LUC MOUSSET
Conservateur honoraire du MNAHA et président des Amis du Château de Mansfeld
11
GILLES GENOT
Introduction :
Mansfeld who?
L’être humain, en tant qu’animal social, accorde une importance particulière à la
reconnaissance faciale. Le visage est le moyen le plus immédiat et personnel de se
connecter à une personne, même à travers les barrières du temps. Présenter, par
exemple, les visages des personnalités historiques dans des publications offre aux
lecteurs un point d’ancrage visuel, les aidant à établir un lien émotionnel et cognitif
avec le passé.
En gardant cette prémisse à l’esprit, l’exposition Meet the Mansfelds explore la
physionomie de Pierre-Ernest et Charles de Mansfeld, figures emblématiques de
la Renaissance. Pierre-Ernest de Mansfeld (1517-1604), treizième enfant d’une fratrie
de vingt-deux, s’est illustré au service des Habsbourg d’Espagne. Son fils, Charles
(1543/45-1595), au tempérament fougueux, s’est illustré en tant que commandant
militaire majeur dans les guerres menées par les Habsbourg d’Espagne durant la
deuxième moitié du 16e siècle.
Ceux qui ont fréquenté le Musée d’Histoire de la Ville de Luxembourg depuis 1996
ont eu accès à une unique représentation de Pierre-Ernest de Mansfeld, à savoir celle
qui fait partie de nos collections et que l’on peut attribuer prudemment au peintre
maniériste flamand Otto van Veen (1556-1629) (ill. 1).1 L’exposition s’inscrit dans
la série intitulée « The Luxembourg Story in Focus », laquelle explore en détail un
élément spécifique de l’exposition permanente inaugurée en 2017. Pour cette édition,
le portrait de Mansfeld était à l’honneur. Pourtant, cette représentation de PierreErnest de Mansfeld, qui est sans doute l’une des plus
Ill. 1. Pierre-Ernest de Mansfeld
réussies sur le plan artistique, montre-t-elle fidèlement
Les 2 Musées de la Ville de Luxembourg,
le physique du gouverneur du Luxembourg et maître
n° d’inventaire 1992.136
d’ouvrage du château « La Fontaine » à Clausen ?
En effet, les représentations peintes, dessinées et gravées de Pierre-Ernest ont connu
une diffusion à l’échelle européenne, offrant ainsi la possibilité d’une contextualisation
multidimensionnelle du portrait en question, objectif central de cette exposition.
1
Jean-Luc MOUSSET et Krista DE JONGE (dir.), Un prince de la Renaissance. Pierre-Ernest de Mansfeld (1517-1604), vol. 2,
Essais et catalogue, Luxembourg, 2007, p. 447.
13
En 2020, un portrait de Charles de Mansfeld (ill. 1, p. 142) a intégré une collection
privée luxembourgeoise après avoir été mis en vente par la galerie Birello de Buenos
Aires (Argentine) sur la plateforme en ligne eBay. La documentation existante sur
le tableau étant très limitée, aucune institution muséale luxembourgeoise, toutes
financées par des fonds publics, n’avait osé acquérir le tableau. En vue de l’exposition
actuelle, la peinture a été examinée aux frais du musée par l’Institut Royal du
Patrimoine Artistique (IRPA) à Bruxelles, pour obtenir des informations sur la période
de création en déterminant notamment les pigments utilisés par l’artiste, confirmant
ainsi l’authenticité de l’œuvre. Une fois celle-ci établie, le tableau a été soumis à la
même procédure que celle appliquée au portrait de Pierre-Ernest issu des collections
du musée : Benoît Reiter, éminent spécialiste de la famille de Mansfeld au 16e siècle,
a entrepris un inventaire complet des représentations peintes, dessinées et gravées
de Charles. Les résultats émanant de ces investigations, dont seulement une fraction
minime pouvait être exposée, sont consignés dans deux articles de cette publication.
Ces contributions représentent les premières investigations approfondies concernant
la biographie et les représentations de Charles de Mansfeld.
Les investigations menées par les collègues de l’IRPA sur les deux portraits de
Pierre-Ernest et Charles de Mansfeld sont également présentées sommairement
dans l’exposition. Cela offre aux visiteurs une illustration tangible du processus
de validation de l’authenticité d’une œuvre par le biais de recherches scientifiques.
Lorsqu’une représentation artistique émerge des années, voire des décennies, après
la disparition de la personne représentée, on peut légitimement conjecturer que le
peintre s’est inspiré d’une œuvre antérieure, réduisant ainsi potentiellement sa fidélité
aux détails et caractéristiques physiques. Un exemple concret de cette pratique très
répandue est un tableau de Charles de Mansfeld, acquis récemment par le Musée
national d’archéologie, d’histoire et d’art du Luxembourg
(MNAHA), ayant été utilisé comme modèle pour le double Ill. 2. Vue de l’exposition :
portrait de Charles et Octavien, qui décorait à l’époque les présentation des résultats de
espaces privés du château de Clausen et qui est conservé recherche de l’IRPA et des deux
aujourd’hui dans les collections du musée du Prado. Les tableaux sous lumière UV
analyses scientifiques menées à l’IRPA, présentées dans Photo: © Les 2 Musées de la Ville
de Luxembourg / Christof Weber
cette publication par Claire Toussat, Christina Currie,
Alexia Coudray et Steven Saverwyns, dévoilent des
perspectives inédites sur les deux tableaux. Sont ainsi mis en lumière des différences
au niveau des inscriptions, du format, des couches préparatoires, du dessin sousjacent, des matériaux picturaux, et du style, indiquant deux commandes distinctes
et des artistes différents.
Dans le cadre des préparatifs de l’exposition, les deux tableaux de Pierre-Ernest,
intégrés aux collections du MNAHA respectivement en 2007 et 2011 sous l’égide de
l’ancien conservateur du musée et collaborateur au présent projet d’exposition, JeanLuc Mousset, après la grande exposition monographique de 2007, ont été examinés
14
dans les laboratoires du MNAHA. Les enjeux pluridisciplinaires de telles études sont
exposés par Muriel Prieur, restauratrice en chef du musée, dans le présent catalogue.
Celle-ci souligne le rôle crucial du restaurateur dans la compréhension globale des
œuvres à travers des méthodes pluridisciplinaires, soulignant que la combinaison de
données scientifiques, d’approches historiques et stylistiques est essentielle pour une
compréhension holistique d’œuvres d’art de ce genre.
L’exposition révèle donc intégralement toutes les représentations connues de PierreErnest et Charles de Mansfeld. Qu’elles proviennent de galeries de portraits ou de
publications historiques, ces représentations dévoilent ainsi une « généalogie »
des visages des deux personnages. Le portrait de Pierre-Ernest conservé dans les
collections du Lëtzebuerg City Museum reflète-il donc fidèlement la réalité physique
de Pierre-Ernest ? Des variations s’observent intrinsèquement, tant du point de
vue de la qualité des représentations que des caractéristiques faciales. Cependant,
l’ensemble des peintures, représentant Pierre-Ernest à plusieurs étapes de sa vie,
laisse supposer que le tableau est, dans les limites des conventions artistiques de
l’époque, une représentation réaliste du comte de Mansfeld. En ce qui concerne les
gravures, la source d’inspiration initiale est connue pour certaines, tandis que pour
d’autres, elle demeure inconnue. Néanmoins, les premières éditions de ces gravures
restent remarquablement fidèles à la réalité, même si cette précision diminue au
fil des rééditions. L’exposition offre ainsi une plongée multidimensionnelle dans la
physionomie (ou les physionomies ?) de Pierre-Ernest à travers les siècles. La même
observation peut être faite, conformément aux attentes, pour Charles de Mansfeld.
15
Les recherches effectuées pour l’exposition, menées en étroite collaboration avec
les collègues de l’association Les Amis du château de Mansfeld et ponctuellement
épaulées par Jeanne Clercq-Roques, étudiante en histoire Ill. 3. Vue de l’exposition : extrait de
de l’art à l’université Paris-Sorbonne, ont donné lieu à des la « généalogie » des visages de
découvertes extraordinaires.
Pierre-Ernest et Charles de Mansfeld
Photo: © Les 2 Musées de la Ville
Aut nunc, aut numquam : fin juin 2023, alors que
de Luxembourg / Christof Weber
les préparatifs de l’exposition battaient leur plein,
un portrait de Charles von Mansfeld déjà connu, mais se trouvant jusqu’alors dans
une collection privée, a été mis en vente chez Christie’s à Londres. Grâce au soutien
financier des Amis des Musée, le Musée national d’archéologie, d’histoire et d’art du
Luxembourg (MNAHA) a réussi à acquérir le tableau pour le Musée Dräi Eechelen et
a généreusement consenti à le prêter pour cette exposition. La précieuse collaboration
ne s’arrête pas là : la contribution de Ralph Lange et François Reinert du Musée Dräi
Eechelen, engagée dans une étude minutieuse du tableau, offre une compréhension
approfondie de la complexité de cette représentation exceptionnelle de Charles
de Mansfeld.
Nos recherches ont également abouti à la mise au jour d’un portrait jusqu’alors
inconnu de Pierre-Ernest de Mansfeld, conservé dans les collections du château de
Skokloster en Suède. En raison de contraintes budgétaires, la présence de l’original
dans l’exposition et donc sa présentation au public luxembourgeois n’a pas été
possible. Toutefois, la description détaillée d’Ann-Katrin Rothlind, conservatrice
aux Statens historiska museer, offre aux lecteurs une présentation approfondie
de la provenance du tableau.
16
Une troisième surprise de taille a été découverte grâce à une mention quelque peu
anodine publiée en mai 2023 dans CODARTfeatures.2 Il y est fait référence à un
tableau qui n’est entré dans les collections du Noordbrabants Museum à Bois-le-Duc
qu’en 2020 et qui, jusqu’alors, était considéré comme étant un portrait du gouverneur
des Pays-Bas espagnols Luis de Zúñiga y Requesens (1528-1576). Des recherches
récentes menées par Eelke Muller et Jona Mooren, chercheuses au NIOD Institute
for War, dont les résultats sont exposés en détail dans cette publication, ont toutefois
permis d’identifier le personnage représenté comme étant Pierre-Ernest de Mansfeld.
On a donc, une fois de plus, affaire à un portrait parfaitement inconnu du comte
de Mansfeld. Il est particulièrement important de signaler ici la provenance récente
de ce cette pièce: le tableau a été saisi en 1942 par le régime nazi chez l’artiste et
collectionneur d’art juif Joseph Henri Gosschalk (1875-1952) et intégré dans les
réserves de la banque de pillage Lippmann, Rosenthal & Co. dont le siège se trouvait
à Sarphatistraat, Amsterdam. Le lecteur attentif identifiera le nom de « Lippmann »
comme celui du banquier et collectionneur d’art luxembourgeois Léo Lippmann
(1808-1883), fondateur de l’institution bancaire mentionnée, dont la collection d’art
est aujourd’hui conservée dans les collections de la Villa Vauban.3 Cette parenthèse
est nécessaire, dans la mesure où l’on ne sait guère au Luxembourg, où un vaste projet
de recherche sur l’art spolié est actuellement en cours,4 que plusieurs années après
la mort de Léo Lippmann, l’institution financière qu’il avait fondée a été exploitée
à des fins abusives par le régime nazi. Le tableau en question a été restitué en 2002
aux héritiers de Joseph Henri Gosschalk sur l’avis de la Commission des restitutions
néerlandaise (Adviescommissie Restitutieverzoeken Cultuurgoederen en Tweede
2
Jona MOOREN, Eelke MULLER, Tracking Down the Provenance of Old Masters: The Research in a Few Basic Steps,
in: CODART features, mars 2023.
3
L’auteur tient à remercier M. Boris Fuge de lui avoir attiré l’attention sur ce point.
4
Projet PROVILUX, initié dans le cadre de l’accord du 27 janvier 2021 signé entre le gouvernement du Luxembourg
et le Consistoire israélite du Luxembourg.
17
18
Wereldoorlog).5 En 2003, la famille a fait don du tableau au Noordbrabants Museum,
qui a accepté de le prêter à notre musée et de l’exposer ainsi pour la première fois.
L’exposition et la publication cherchent à démontrer une fois de plus que les
recherches sur la présence des Mansfeld au Luxembourg, tant physique aux 16e et
17e siècles que sur le plan mémoriel depuis lors, demeurent un domaine de recherche
en constante évolution. De même, le binôme exposition-catalogue souligne que ces
recherches peuvent également s’avérer pertinentes dans
Ill. 4. En bonne compagnie :
différents contextes d’actualité. Dans cette perspective
deux portraits peints de Pierre-Ernest
l’exposition plonge également dans le rôle de l’intelligence
de Mansfeld, jusqu’à récemment
artificielle (IA) dans le monde numérique actuel à
inconnus
l’exemple de la gravure de Pierre-Ernest de Mansfeld
Photo: © Les 2 Musées de la Ville
réalisée par Domenicus Custos au tournant du 16e
de Luxembourg / Christof Weber
au 17e siècle (ill. 4, p. 42). L’utilisation du logiciel Letz.
ai pour recréer des portraits à première vue réalistes soulève la grande question de
l’authenticité d’images à l’ère numérique. La comparaison entre les portraits générés
par l’IA et les originaux historiques offre une réflexion critique sur la production et la
diffusion d’images dans le monde contemporain. De manière connexe, la contribution
substantielle de Jean-Luc Mousset, axée sur les emprunts à l’Italie ayant largement
influencé la singularité du château et du jardin de « La Fontaine » (un aspect non
représenté dans l’exposition), révèle que le site de l’ancienne demeure de la Renaissance,
actuellement en ruine, n’est pas encore pleinement compris dans toute son importance
et ses spécificités historiques. Les réflexions des autorités communales sur la future
affectation et la mise en valeur du site de l’ancien château bénéficieront de tels
apports continus de la recherche historique.6
Le lecteur aura compris que le présent recueil résulte d’une collaboration extrêmement
agréable avec les différents auteurs, originaires de quatre pays distincts et
représentant encore davantage de disciplines variées. Leur expertise et leur
engagement ont été des éléments essentiels pour la réalisation de l’exposition
et nous leur exprimons notre sincère gratitude.
Un livre abondamment illustré procure indéniablement un plaisir accru à ses lecteurs,
mais sa préparation s’avère également bien plus laborieuse. Dans cet esprit, nous
tenons à exprimer notre reconnaissance toute particulière à Noémie Montignie pour
sa contribution essentielle à l’obtention de ces illustrations, tout comme pour son
apport tout aussi vital dans la relecture des manuscrits. Nous tenons aussi à remercier
Boris Fuge dont le souci du détail a été un atout inestimable tout au long de ce projet,
contribuant de manière significative à sa réussite.
5
Advice concerning the application for restitution of NK 3409, URL: https://www.restitutiecommissie.nl/en/recommendation/
portrait-of-don-luis-de-requessens-y-zuniga/ (consulté le 15 novembre 2023).
6
MILANI-NIA, Shaaf et Martin UHRMACHER (éds.), Mansfeld revisited. L’ancien château “La Fontaine” et son parc à
Luxembourg-Clausen / Das ehemalige Schloss “La Fontaine” und sein Park in Luxemburg-Clausen, Luxembourg, 2023.
19