Deux-Sèvres. Contre les « bassines », les opposants forcent le barrage, 1 500 gendarmes mobilisés
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Deux-Sèvres. Contre les « bassines », les opposants forcent le barrage, 1 500 gendarmes mobilisés

Plusieurs milliers de personnes manifestent, samedi 29 octobre, malgré l’interdiction de la préfecture des Deux-Sèvres, à Sainte-Soline. Ils s’opposent à la construction d’une nouvelle réserve d’eau destinée à l’irrigation agricole. 1 500 gendarmes sont mobilisés. Cinq gendarmes et deux manifestants ont été blessés, selon la préfète.

Julien Le Guet du collectif « Bassines Non Merci » et Yannick Jadot, ex-candidat EELV à la présidentielle, à Sainte-Soline, ce 29 octobre. AFP / PASCAL LACHENAUD
Julien Le Guet du collectif « Bassines Non Merci » et Yannick Jadot, ex-candidat EELV à la présidentielle, à Sainte-Soline, ce 29 octobre. AFP / PASCAL LACHENAUD | AFP / PASCAL LACHENAUD
  • Julien Le Guet du collectif « Bassines Non Merci » et Yannick Jadot, ex-candidat EELV à la présidentielle, à Sainte-Soline, ce 29 octobre. AFP / PASCAL LACHENAUD
    Julien Le Guet du collectif « Bassines Non Merci » et Yannick Jadot, ex-candidat EELV à la présidentielle, à Sainte-Soline, ce 29 octobre. AFP / PASCAL LACHENAUD | AFP / PASCAL LACHENAUD

Leur manifestation a été interdite par la préfecture des Deux-Sèvres. Ils voulaient quand même crier leur opposition, une nouvelle fois, au projet de réserve d’eau géante destinée à l’irrigation agricole, qui déjà en construction à Sainte-Soline. Ce rassemblement contre cette « bassine » se déroule en pleine sécheresse historique.

Selon un premier bilan communiqué par la préfète des Deux-Sèvres, Emmanuelle Dubée, vers 16 h 30, cinq gendarmes et deux manifestants ont été blessés. Quatre interpellations ont eu lieu. Le procureur devrait prendre la parole en fin de journée.

Gaz lacrymogènes

Quelque 4 000 manifestants, répartis en trois cortèges pour essayer de contourner les forces de l’ordre, ont très vite été bloqués, samedi 29 octobre, par les 1 500 gendarmes déployés pour protéger le chantier, mais certains d’entre eux ont réussi à forcer un premier barrage, ont constaté des journalistes de l’Agence France Presse.
Avec une surface à couvrir de plusieurs hectares, les forces de l’ordre avaient du mal à contenir la foule, dans laquelle des centaines de militants masqués ou cagoulés côtoyaient des familles et de nombreux retraités. Deux fourgons de gendarmerie sont entrés en collision lors d’une manœuvre d’urgence.

Des gaz lacrymogènes ont été lancés et des élus arborant leur écharpe tricolore molestés, notamment la députée écologiste de la Vienne, Lisa Belluco, selon un photographe de l’AFP.

L’objectif des organisateurs ? « Réussir à atteindre la bassine, à enlever toutes les grilles qui protègent le chantier, à reboucher le début du trou, empêcher la reprise des travaux », selon un tract diffusé sur place.

« Accaparement de l’eau »

Le collectif « Bassines Non Merci », qui rassemble des associations environnementales, organisations syndicales et groupes anticapitalistes, s’oppose à ce qu’il juge être un « accaparement de l’eau » destiné à l’« agro-industrie ».

« Maïs pour tous, justice nulle part », peut-on lire sur l’immense chapiteau jaune qui trône au milieu d’un camp constellé de barnums montés par différentes organisations.

Interdiction de manifester

« Toute manifestation » a été interdite dans plusieurs communes dont Sainte-Soline lundi par la préfecture. La préfète des Deux-Sèvres Emmanuelle Dubée a expliqué vendredi vouloir « limiter » d’éventuels « actes de violence », en référence aux dégradations et aux heurts entre manifestants et forces de l’ordre qui avaient émaillé un précédent rassemblement en mars.

Les autorités craignent la création d’une Zad sur place. Ce village de Sainte-Soline, d’environ 350 habitants, est devenu le nouvel épicentre d’un conflit sur l’usage de l’eau qui se raréfie avec le réchauffement climatique. 

Environ 200 élus, avocats ou professeurs ont dénoncé un manquement à « la liberté fondamentale de manifester » dans une tribune publiée par Libération . Parmi les signataires, des élus insoumis ou écologistes comme Mathilde Panot, Clémentine Autain, Alexis Corbière ou Yannick Jadot, annoncé sur les lieux samedi. Ce dernier est sur place, tout comme la députée Sandrine Rousseau.

260 piscines olympiques

La réserve de Sainte-Soline est la deuxième de 16 réserves de substitution, au cœur d’un projet élaboré par un groupement de 400 agriculteurs réunis dans la Coop de l’eau, pour « baisser de 70 % les prélèvements en été », dans cette région qui connaît encore des restrictions d’irrigation après une sécheresse estivale hors norme.

Ces cratères à ciel ouvert, recouverts d’une bâche en plastique, sont remplis grâce au pompage de l’eau des nappes phréatiques superficielles l’hiver et peuvent stocker jusqu’à 650 000 m3 (soit 260 piscines olympiques). Cette eau est utilisée pour l’irrigation l’été, quand les précipitations se font plus rares.

Les opposants dénoncent des « mégabassines » réservées à de grandes exploitations céréalières tournées vers l’exportation et défendent la mise en place d’autres mesures pour mieux partager et préserver l’eau – agroécologie, changement de cultures, retour des prairies…

Béchu : « Pas de conséquences négatives pour les nappes »

Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a estimé samedi sur France Inter que les opposants « dénoncent quelque chose de juste, la nécessité qu’on diminue collectivement, et les agriculteurs aussi, nos usages d’eau », mais a souligné qu’une étude publiée en juillet était « venue dire à quel point le projet n’avait pas de conséquences négatives pour les nappes » phréatiques.

Selon cette étude du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), le projet pourrait, par rapport à la période 2000-2011, augmenter « de 5 % à 6 % » le débit des cours d’eau l’été, contre une baisse de 1 % l’hiver, sans prendre en compte l’évaporation potentielle des futures réserves, ni la menace de sécheresses récurrentes liée au réchauffement climatique. Une étude basée sur des chiffres « qui datent de dix ans » : « Le niveau des nappes a baissé depuis », insite, sur France Info, Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne, opposée à ces bassines.

Christophe Béchu a également rappelé que le « plan signé par tout le monde il y a quatre ans » après une longue concertation entre agriculteurs, élus, autorités et associations, conditionnait l’accès à l’eau à des changements de pratiques (réduction des pesticides, plantation de haies, conversion à l’agroécologie).

Mais sur dix agriculteurs utilisant la première retenue, « aucun n’a souscrit de réduction de pesticides », selon Vincent Bretagnolle, spécialiste d’agroécologie au CNRS à Chizé (Deux-Sèvres) et membre du comité scientifique et technique de suivi (CST) du projet, et depuis la signature, plusieurs associations se sont retirées du protocole.

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