Severiano de Heredia

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Severiano de Heredia
Illustration.
Fonctions
Ministre des Travaux Publics
Gouvernement Maurice Rouvier
Prédécesseur Édouard Millaud
Successeur Émile Loubet
Député français

(8 ans, 2 mois et 21 jours)
Circonscription Seine
Gouvernement IIIe République
Groupe politique UR (1881-1885)
GR (1885-1889)
Président du conseil municipal de Paris

(6 mois et 11 jours)
Prédécesseur Jules-Antoine Castagnary
Successeur Léopold Cernesson
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance La Havane (Cuba)
Date de décès (à 64 ans)
Lieu de décès 17e arrondissement de Paris (France)
Nationalité Cubaine (de naissance)
Française (par naturalisation)
Enfants Marcelle Lapicque

Severiano de Heredia, né le à La Havane et mort le dans le 17e arrondissement de Paris[1], est un homme politique français. Il est député, ministre et président du conseil municipal de Paris[2],[3].

Biographie[modifier | modifier le code]

Né à La Havane, à Cuba, pendant la domination espagnole, Severiano de Heredia est le fils de Henri de Heredia et de Brigitte de Cardenas, tous deux gens de couleur libres[4],[5]. Il est baptisé en tant que « mulâtre, né libre ». Son parrain, l'avocat et riche planteur Ignacio Heredia y Campuzano, marié à Madeleine Godefroy, est vraisemblablement[6] son père naturel, ce qui ferait de lui le cousin germain direct du poète cubain José María Heredia et le cousin issu de germain du poète français José-Maria de Heredia.

À l'âge de dix ans, son parrain l'envoie en France. Severiano de Heredia fait de brillantes études au lycée Louis-le-Grand, où il reçoit en 1855 le grand prix d'honneur du lycée. Il compose plusieurs nouvelles et essais poétiques. Son parrain fait de lui son héritier, le mettant à l'abri du besoin.

Franc-maçon, il est initié en 1866 à la loge « L'Étoile polaire » du Grand Orient de France et en devient par la suite le Vénérable[7].

Il épouse Henriette Hanaire à Paris, le [8], avec qui il a deux enfants : un fils, mort accidentellement à l'âge de douze ans, ainsi qu'une fille. Celle-ci, Marcelle Lapicque, sera neurophysiologiste, au côté de son mari Louis Lapicque ; leur neveu et fils adoptif, Charles Lapicque, sera un peintre de la nouvelle École de Paris.

Severiano de Heredia demande la nationalité française « pour montrer qu'il reconnaissait ce qu'il devait à la France en ces temps difficiles et pour lui être utile »[8],[source insuffisante]. Il obtient sa naturalisation par un décret du [9].

Il prend part à la rédaction de La Chronique universelle et de La Tribune dans les années 1870[10]. Face à la Commune de Paris, « ce rentier fortuné, républicain et patriote éclairé, admira l'héroïsme des communards face aux Prussiens mais, bourgeois attaché à l'ordre, il se tint à distance de l'insurrection et de ses ambitions égalitaires[10]. »

Carrière politique[modifier | modifier le code]

En 1873, Severiano de Heredia est élu au conseil municipal de Paris pour le quartier des Ternes (17e arrondissement de Paris). Il est républicain de tendance radicale. En 1879, il devient président du conseil municipal de Paris[11]. À ce poste, il crée les bibliothèques municipales de la capitale[12].

En 1881, il est élu à la Chambre des députés. Républicain et laïque convaincu, il effectue son premier mandat sous l'étiquette de l'Union républicaine, et son second sous celle de la Gauche radicale[13].

Il lutte pour réduire la journée de travail en usine à dix heures pour les enfants de moins de douze ans, se prononce contre le général Boulanger, intervient dans le vote des lois sur le réseau métropolitain de Paris, prend part aux débats sur les sociétés de secours mutuel, sur les conventions avec les compagnies de chemins de fer, vote pour les crédits de l’expédition du Tonkin et réclame en vain la limitation de la journée de travail à onze heures[10].

En 1887, il est nommé ministre des Travaux publics dans le premier gouvernement de Maurice Rouvier. Il contribue au développement de la voiture électrique[14],[15].

L'Exposition coloniale de 1886 coïncide avec le début du déclin de sa carrière. Les milieux réactionnaires font de lui une cible privilégiée, le décrivant comme le « Nègre du ministère », le « ministre chocolat », « le nonchalant créole », celui dont « le teint avait la nuance d’un cigare colorado »[10]. Il perd l'élection législative de 1889 et celle de 1893 face au candidat boulangiste Charles Le Senne[13]. Il se retire de la scène politique pour se consacrer à l'histoire de la littérature.

Fin de vie[modifier | modifier le code]

Chapelle funéraire au cimetière des Batignolles.

Severiano de Heredia meurt le , terrassé par une méningite[16], en son domicile parisien du 177 bis rue de Courcelles[17]. Il est enterré au cimetière des Batignolles à Paris dans une concession à perpétuité (division 8, ligne 1, numéro 39). Sa famille l'y rejoint, dont Louis et Marcelle Lapicque.

Hommages[modifier | modifier le code]

Le , à l'initiative de l'élu socialiste Lamine Ndaw et avec le soutien du maire Bertrand Delanoë, son nom est associé à une voie du 17e arrondissement, dans le cadre d'une opération visant à améliorer la diversité et la parité des personnalités remarquables dans l'espace public[18]. La rue Severiano-de-Heredia se trouve dans le quartier des Batignolles.

En septembre 2021 paraît la bande dessinée Severiano de Heredia - Élu de la République, dessinée par Isabelle Dethan et scénarisée par Antoine Ozanam[19].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Visionneuse - Archives de Paris. 1901, Décès, 17, p. 11 », sur archives.paris.fr (consulté le ).
  2. À la suite de la Commune, le président du conseil de Paris est désigné au suffrage indirect, par les conseillers et pour une durée d'un an. Ce mandat n'est pas comparable à celui d'un maire et a un caractère honorifique.
  3. « Severiano de Heredia a-t-il été le premier maire de Paris noir ? », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  4. Acte de baptême du , paroisse San Jesus del Monte de La Havane, 9e livres des baptêmes des pardos.
  5. Bien qu'il soit métis, durant l'époque coloniale, les personnes métisses étaient considérées comme des personnes noires.
  6. Historia de familias cubanas par el conde de Jaruco, 1940.
  7. « L'Étoile polaire », sur le site mvmm.org du Musée virtuel de la musique maçonnique (consulté le ).
  8. a et b « Paris 1879 : Severiano de Heredia, le mulâtre dans les hautes sphères de la République », huffingtonpost.fr, (consulté le ).
  9. Adolphe Crémieux, « Bulletin des lois de la République française », Imprimerie nationale, (consulté le ) : « N° 48. – DÉCRET (signé par le membre et délégué du Gouvernement de la Défense nationale, garde des sceaux, ministre de la justice) qui admet à jouir des droits de citoyen français le sieur de Heredia (Severiano), né le 8 novembre 1836, à la Havane (île espagnole de Cuba), sans profession, demeurant à Paris. (Tours, 28 septembre 1870.) », p. 35
  10. a b c et d Rosa Moussaoui, « Severiano de Heredia, premier maire noir de Paris », sur L'Humanité, .
  11. Véronique Chalmet, « Severiano de Heredia. Quand le Maire de Paris était noir », Ça m'intéresse Histoire, vol. Mars/avril, no 59,‎ , p. 24, 25 (ISSN 2117-9468 et 2111-4579)
  12. « Severiano de Heredia a-t-il été le premier maire de Paris noir ?», Le Monde, 27 juin 2020.
  13. a et b « Severiano DE HÉRÉDIA », sur assemblee-nationale.fr (consulté le ).
  14. James Michael Laux, In first gear : the French automobile industry to 1914, Liverpool, UK, Liverpool University Press, , 239 p. (ISBN 978-0-7735-0264-2, lire en ligne), p. 91

    « An 1891 graduate of the Ecole Centrale des Arts et Manufacturers, Krieger and Severiano de Heredia formed a company to make electric cars in 1895, the Société Civile des Voitures Électriques, Système Krieger. »

  15. Nick Baldwin, The world guide to automobile manufacturers, New York, USA, Facts on File Publications, (ISBN 978-0-8160-1844-4, lire en ligne), p. 268

    « In 1895 he formed the Societe Civile des Voitures Electriques, Systeme Krieger, in partnership with Severiano de Heredia, a wealthy Cuban- born, French-naturalized politician. »

  16. « Échos » [« Echos »], Le Figaro, no 41,‎ , p. 1 (ISSN 0182-5852, lire en ligne, consulté le ) :

    « Nous apprenons la mort de M. S. de Hérédia, emporté hier soir presque subitement par une méningite. »

  17. « Severiano DE HÉRÉDIA », sur Base de données historique des anciens députés – Assemblée nationale, Paris, France, Secrétariat générale de l'Assemblée nationale, (consulté le )
  18. Site paris.fr, 9 septembre 2013
  19. « Severiano de Heredia - Élu de la République », sur bdtheque

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Severiano de Heredia, L'appel au peuple : Paix ou guerre ?,
  • Severiano de Heredia, Faisons la paix,
  • Severiano de Heredia, Paix et plébiscite,
  • Severiano de Heredia, Société des écoles laïques… Appel aux habitants du 17e arrondissement,
  • Paul Estrade, Severiano de Heredia. Ce mulâtre cubain que Paris fit « maire », et la République, ministre, Paris, Les Indes savantes, coll. « la Boutique de l'histoire », , 162 p. (ISBN 978-2-84654-270-8, présentation en ligne), [présentation en ligne]
  • Bande dessinée. Severiano de Heredia. Dessin Isabelle Dethan, scénario Antoine Ozanam. Editions Passés Composés, collection Biopic. 2021. (ISBN 978-2-3793-3520-4)

Sources[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :