Vingt années de violences conjugales, à huis clos familial, sont arrivées devant les juges de Versailles, ce lundi 26 septembre 2022.
Dans le box, un homme de 46 ans. Il en paraît dix de plus.
Face à lui, son épouse. La seule femme qui a partagé sa vie.
Dans le public, les membres de la famille. Venus en nombre.
Le décor était planté dans la salle des comparutions immédiates pour entendre le récit glaçant de deux décennies de violences. Deux décennies marquées par un alcoolisme profond. Et un secret familial omniprésent.
Le 22 septembre dernier, le quadragénaire regagne son domicile de Mantes-la-Jolie.
Il est ivre. Il veut retourner boire avec ses amis. Son épouse lui refuse la carte bancaire et surtout qu’il prenne les clés de la voiture.
Des injures, des menaces. Une gifle. La femme décide d’appeler la police.
Frappée, sans raison et même enceinte
Au commissariat, elle se livre. « Ce soir-là, il était comme enragé. Il avait les yeux injectés de sang. »
Aux enquêteurs, elle raconte subir des violences ; pratiquement depuis la première année de mariage, en 2002. « Il m’a toujours frappée, avec ou sans raison. Même enceinte. Je cachais les bleus avec du maquillage. »
Une nuit, elle s’est sentie plus en sécurité en allant dormir dans sa voiture, sur un parking.
« Papa ? Il boit dès le réveil »
Entendus, les enfants du couple témoignent d’un alcoolisme omniprésent.
« Papa ? Il boit dès le réveil. Jusqu’à minuit. Il insulte et menace maman. Il lui jette des trucs. Une fois, il l’a mordue au bras, jusqu’au sang. »
Dans ses récits, les policiers apprennent que l’homme carbure à la bière, au whiskey, au vin…
Lui ne semble pas réaliser.
« J’ai des hauts et des bas. Je gueule. Je crie. Je ne fais que la pousser. C’est le coup des nerfs… Je m’emporte. Je l’ai déjà frappée. Ça arrive une fois par semaine. »
Dans la salle du tribunal, l’homme pose sa situation : « J’ai un problème avec l’alcool. Je vais me faire soigner. »
Le juge le reprend. « On ne vous reproche pas de boire mais d’être violent avec votre femme. »
Sa femme vole à son secours
Elle justement, vole au secours de son mari. « D’abord, je veux dire que j’ai décidé de retirer ma plainte. Quand il ne boit pas, c’est un ange. Ensuite, nous sommes mariés pour le meilleur et pour le pire. Là, c’est le pire. Après, ce sera le meilleur. »
Le président du tribunal tique.
« Le problème, c’est qu’il boit tous les jours. Et ensuite, vous devez comprendre que le pire dure depuis 20 ans ! »
« C’est un bon père. Il s’occupe bien des enfants », lance l’épouse comme une bouée de secours.
« Tyran domestique »
Les visages se figent aux premiers mots de la procureure de la République.
« Tyran domestique. C’est une expression très à la mode. Parfois exagérément reprise. Mais s’il y a bien un dossier qui l’illustre, c’est celui-ci. Les témoignages des enfants sont terribles. Il la considère comme un punching-ball. Il a eu 20 ans pour arrêter de boire et voir les traces de coups sur le visage de sa femme. Ses excuses, je n’y crois qu’à moitié. Il doit être puni. »
La magistrate avait prévenu qu’elle allait demander une sanction lourde. « Je requiers 4 ans de prison, dont deux années avec sursis pendant 3 ans. Avec incarcération. »
Face à cela, l’avocat de la défense sait qu’il va devoir batailler. Principalement pour la peine.
« Faire l’introspection d’une vie si rapidement et dans un tribunal, c’est difficile. La justice peut taper dur et fort. Elle peut aussi se dire qu’il est mieux que Monsieur suive des soins de qualité à l’extérieur que rien ou presque rien en prison. »
Les juges délibèrent. Et prononcent finalement une peine d’une année de prison avec incarcération à domicile, sous bracelet électronique.
L’homme devra vivre chez son frère, en Eure-et-Loir. Il devra se soumettre à des soins. Il lui a été interdit de rentrer en contact avec sa femme et de se rendre au domicile familial.
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