Concours Lépine : il a donné son nom au concours des inventeurs, mais qui était Louis Lépine?

Son nom est passé à la postérité avec le fameux concours des inventeurs dont la nouvelle édition débute ce mercredi 1er mai à la Foire de Paris. De nombreuses rues lui sont également dédiées en France et une place à Paris, devant la préfecture de Police. Et pour cause, Louis Lépine a révolutionné le fonctionnement de l'institution et même créé le musée de la préfecture de Police. Entretien avec sa responsable, Anaïs Eveno.

Peut-on dire de Louis Lépine qu'il est l’inventeur de la police moderne ?

Oui, c'est un des fondateurs de la police moderne. En fait, il devient préfet de Police à la fin du 19ème siècle et va rester très longtemps en poste : une première fois de 1893 à 1897 et puis une deuxième de 1899 à 1913. Il a le temps de mettre en place beaucoup de choses et de s'inspirer des pays étrangers pour moderniser la gestion de la criminalité et améliorer la vie quotidienne des citoyens à Paris. La fin du 19ème d'ailleurs est une période marquée par beaucoup d'instabilité politique, par l’émergence d’une nouvelle criminalité avec les bandes de jeunes criminels qu'on appelle les Apaches. Ils sévissent dans les rues de Paris provoquant de l’insécurité. Il y a aussi tous les attentats anarchistes entre 1892 et 1894 qui aboutissent à l'assassinat de Sadi Carnot en 1894 (Président de la République assassiné à Lyon par l'anarchiste italien Sante Geronimo Caserio). Donc Lépine a pas mal de travail ! Il va créer trois brigades emblématiques qui existent toujours et qui soutiennent les missions de la Préfecture de Police aujourd'hui : la brigade fluviale à l’occasion de l’exposition universelle de 1900, la brigade cycliste en 1901 pour sécuriser les rues. Les criminels avaient compris le système de rondes des policiers qui étaient à pied. Doter les policiers de vélos a permis de casser cette routine et pouvoir se déplacer plus vite au gré des besoins. Enfin en 1908, toujours pour sécuriser les rues, il fonde la brigade cynophile avec des chiens qui pouvaient aussi secourir les gens qui tombaient dans la Seine.

Louis Lépine est un des fondateurs de la police moderne

Anaïs Eveno, responsable du musée de la Préfecture de Police

Il a également modifié le quotidien des parisiens ?

Oui car c'est une période qui est marquée par l'augmentation de la population et par les flux d’automobile qui s'accroissent. Le réseau ferroviaire augmente également, de nouvelles technologies apparaissent comme le cinéma et donc des lampes qui augmentent le risque d’incendie… Louis Lépine va d'abord sécuriser les rues et les flux de circulation en mettant en place un certain nombre de règles de circulation qui n'existaient pas auparavant. Il va s'inspirer de l’Américain Phelps Eno qui avait créé à New York en 1903 un code de la rue. En 1910 Louis Lépine fait la même chose à Paris : c'est l'apparition des rues à sens unique, des premiers sens giratoires avec la place de l’Etoile, des passages piétons qui vont être matérialisés par des panneaux ou par des agents de circulation qui sont là pour vous aider à traverser. Il va aussi créer le fameux bâton blanc en 1896 qui est parfois assimilé à une matraque mais pas du tout ! C'était censé matérialiser les gestes des agents de circulation pour aider les automobilistes à mieux les voir.

C’est lui qui est aussi à l’origine du concours Lépine ?

Au début du 20ème siècle des boutiquiers souffrent de la concurrence des vendeurs à la sauvette. Plutôt que de multiplier les rondes des agents de police et les arrestations, il va créer ce fameux concours-exposition de jouets et d'inventions en 1901. Les lauréats gagnent un brevet gratuit, une protection contre le plagiat. Il voulait protéger le savoir-faire des fabricants.

Pourquoi a-t-il voulu créer le musée de la Préfecture de Police? 

Il a créé le musée en 1909. Il était à l'origine situé au 36 quai des Orfèvres et il désormais installé depuis 1975 au commissariat du 5ème et 6ème arrondissement. Au départ, il a pour ambition de rapprocher la police de la population et de faire connaître l'histoire de la police parisienne à tous les citoyens, de montrer les missions de la PP et faire passer le message que les agents de police sont là pour encadrer et sécuriser les citoyens avant tout. D'ailleurs, c'est le but qu’on a toujours au musée, c'est toujours de décrire et d'expliquer au public toute la variété des missions de la préfecture de police et des services.

Il y a aussi toute une impressionnante collection d’armes qui est présentée avec des couteaux, rasoirs, des poings américains ou même des os de moutons taillés en lame utilisés par les fameux Apaches. Que préconisait Lépine ?

Il faut avoir à l'idée qu’à cette époque la police n'est pas armée ni équipé d'automobiles. Elle se déplaça à pied, à cheval ou à bicyclette et ne dispose que de matraques comme armes. Les policiers n’ont pas d’arme à feu. Suite à l'affaire de la bande à Bonnot, la sûreté générale et la préfecture de police en 1911. La bande à Bonnot sont les premiers bandits à faire des braquages violents en automobile et armés, ils n’ont vraiment pas de scrupules. Ils se revendiquent anarchistes, ils braquent et n’hésitent pas à tirer sur les policiers et sur les agents de la banque. Ils sévissent assez lourdement dans toute la France sont très mobiles avec ces nouvelles voitures et échappent aux policiers. Donc Lépine (avec Célestin Hennion) va se rendre compte qu'il faut absolument doter les policiers de nouveaux moyens pour qu'ils puissent faire face à cette nouvelle criminalité. En 1911 Louis Lépine fait armer la préfecture de police avec des Browning 1900 la fameuse arme qu’avait Jules Bonnot.

 

Quel est aujourd’hui l’intérêt du musée de la Préfecture de Police ?

Déjà parce que c'est gratuit ! Nous présentons toutes les missions de la PP et c'est très intéressant parce que la police, c'est pas que le maintien de l'ordre et la gestion de la sécurité de l'État. C'est l'encadrement de tout notre quotidien, de la demande de papiers d’identité à l’hygiène des restaurants !  Ça permet au musée de présenter autant donc l'histoire de la police parisienne du XVIIe à nos jours parce que c'est au 17e qu’est créée la charge de lieutenant général de Police, donc l'ancêtre du préfet de Police. On met aussi en avant les uniformes et les équipements qui ont évolué en fonction de la criminalité. Et puis c’est l’occasion de découvrir toutes les brigades importantes : fluviale, la police judiciaire, criminelle, les stupéfiants, la répression du proxénétisme. Il y a également toute une pièce consacrée à la police technique et scientifique. C'est une histoire assez remarquable de voir toutes les évolutions qui ont eu lieu en un siècle, depuis Bertillon à la fin du 19ème qui crée la fameuse méthode anthropométrique basée sur la reconnaissance des individus par les mesures du corps humain (puis donc d'ailleurs soutenu par Louis Lépine en 1893 qui crée le service de l'identité judiciaire à la PP) et jusqu'à aujourd'hui avec l'ADN, les empreintes digitales.

La voix de Louis Lépine est à découvrir sur le site de Bibliothèque Nationale de France. 


Infos pratiques

Évènement : Musée de la Préfecture de Police

Date : du mardi au samedi

Lieu : 4, rue de la montagne Sainte-Geneviève, Paris 5

 

L'actualité "Sorties et loisirs" vous intéresse ? Continuez votre exploration et découvrez d'autres thématiques dans notre newsletter quotidienne.
L'actualité "Sorties et loisirs" vous intéresse ? Continuez votre exploration et découvrez d'autres thématiques dans notre newsletter quotidienne.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité