J'ai beaucoup appr�ci� cette nouvelle, qui du reste peut presque s'apparenter � un court roman.
Balzac y prend le temps de pr�senter ses personnages, de les poser dans leur �l�ment, cette boutique du drapier Guillaume, au nom �nigmatique et fantaisiste. J'avoue m'�tre demand� si le chat tricotait, ou m�me s'il avait les mains baladeuses ? Non, le chat joue au jeu de raquette, comme la pelote basque. Il est vrai que la boutique est un personnage � part enti�re, en ce que la demeure incarne � merveille le mode de vie de la famille Guillaume.
Le drapier Guillaume m�ne avec fermet� sa maison, compos�e d'une �pouse et de deux filles, Virginie, �g�e de 28 ans, et Augustine, �g�e de 18 ans, ainsi que de ses trois apprentis, qui sont comme adopt�s par leur ma�tre, en des soins tout paternels mais d'une rigueur monacale. Joseph Lebas, premier commis et orphelin, est plus ou moins destin� � �pouser Virginie, mais il est amoureux d'Augustine. Virginie est bien �prise de Joseph, mais sans retour, et Augustine... personne ne le sait encore, elle aime en cachette un jeune peintre, qui a fait son portrait de m�moire, et va devenir c�l�bre avec ces premi�res toiles expos�es au Salon.
Leur destin va se sceller le jour o� Guillaume annonce enfin � Joseph qu'il va devenir son gendre, et lui propose de s'associer ; seulement, c'est Augustine qu'il voudrait �pouser. Pour se sortir de ce mauvais pas, celle-ci avoue qu'elle aime un jeune homme, Th�odore de Sommervieux, � qui elle s'est plus ou moins promise. Il est peintre, certes - m�tier qui ne peut rencontrer les attentes des deux parents, boutiquiers raisonnables et �conomes, mais il conna�t le succ�s, et il est de la meilleure soci�t�. L'ambiance est tendue, mais Augustine aura gain de cause, et pourra s'installer dans son m�nage avec Th�odore, et vivre leur amour.
Ils sont jeunes, beaux, ils s'aiment et sont envi�s de tous ; Augustine rayonne, la gloire du peintre rejaillit sur elle. Jusqu'� ce que les nuages s'amoncellent, et que la jeune fille prenne conscience qu'aimer ne suffit pas, qu'il faut aussi faire bonne figure dans le monde, montrer de l'esprit, de l'�ducation, que sa nature simple et sa jeunesse renferm�e ne lui ont pas permis d'acqu�rir. Les amis de Th�odore n'aiment pas la jeune femme, elle leur para�t trop prude, insensible. Th�odore se d�tourne, et Augustine cherchera par tous les moyens � comprendre, � le reconqu�rir...
Cette nouvelle met du temps � s'installer, mais ce pr�lude n'est en rien ennuyeux, car il pr�sente une �tude de cas �tonnante, avec cette famille et son train de vie. de m�me, il am�ne la relation � venir entre Th�odore qui �pie la maison de l'ext�rieur et Augustine, qui cache bien son jeu. Lorsque les deux jeunes gens se marient, le rythme s'acc�l�re vivement, enlev� jusqu'au d�nouement brusque. J'ai �t� int�ress�e par les efforts d'Augustine pour s'instruire, et sa lente prise de conscience qu'aimer et se donner toute enti�re � l'amour ne suffit pas. Je ne peux en revanche pas dire que j'aie eu une empathie surd�velopp�e pour Th�odore et ses tracas d'artiste, quoique, selon l'auteur, il ait souffert aussi. J'ai �t� curieuse de l'entrevue entre Augustine et la duchesse de Carigliano, rivale �minemment impressionnante de la jeune femme, qui se r�v�le pourtant relativement bienveillante, et propose � sa mani�re de l'aider. C'est un face-�-face intense et dramatique, un d�cor de s�duction ma�tris�e, une belle prouesse d'auteur.
Pour tout dire, je me suis vraiment trouv�e bien d'avoir lu
Physiologie du mariage, car cette nouvelle est en grande partie une illustration des th�ories
De Balzac quant au mariage, notamment en ce qui concerne la dur�e limit�e de la lune de miel dans le couple, et ce qui fait - ou non - les mariages r�ussis. C'est une nouvelle qui peut tout � fait faire appr�cier
Balzac, si ce n'est qu'il faut un peu patienter avant que l'action ne s'engage.