Elisa Barbessi : Les personnages féminins homériques dans la cantate italienne jusqu’en 1750.

Elisa Barbessi est docteure en musicologie de Sorbonne Université, sous la direction de Raphaëlle Legrand et de l’Université Tor Vergata de Rome sous la direction de Teresa Maria Gialdroni. Ses recherches dans le cadre de son doctorat l’ont emmené à étudier l’élaboration des personnages féminins homériques dans la cantate baroque italienne. Qualifiée Maîtresse de Conférence par le Conseil national des universités, titulaire du poste de professeur de clavecin et d'histoire de la musique au CRR du Grand-Avignon, Elisa poursuit actuellement son parcours scientifique dans le cadre du post-doctorat « Accord des instruments de musique et conception pluridisciplinaire de la justesse, du geste et de la perception » sous le guide de Théodora Psychoyou et Benoit Fabre à l’institut Collegium Musicæ.

"Passionnée par les archétypes mythologiques, j’ai analysé la mise en musique des personnages féminins dans la cantate baroque italienne, faisant de ce parcours un outil d’exploration scientifique et personnelle. Au début du XVIIe siècle la création musicale puise dans le mythe des éléments narratifs garantissant le principe de vraisemblance, véhiculant ainsi la vivification courtoise des sentiments des personnages représentés, tel qu’Orphée. La recherche que je conduis retrace la transmission littéraire du mythe, et tente d’identifier la reprogrammation qui s'est opérée dans la période baroque.

Ainsi le profil de ces femmes émerge sous un nouveau regard :

Andromaque est peinte dans la cantate de Benedetto Marcello lors de son dernier salut au mari Hector, narré dans l’Iliade. Sa fragilité, ses peurs sont représentées grâce à l’utilisation d’accords diminués, des passages mélodiques fragmentés, accentuant le contraste avec la figure grave du guerrier troyen, caractérisé, au contraire, par des éléments tirés du langage musical militaire, comme le rythme pointé. La force de cette femme apparaît dans le touchant adieu à son fils Astyanax, dans la cantate Rendimi Ulisse ingrato de Rocco Ciruti, inspirée de la tragédie de Sénèque.

Hélène, partagée dans ses dispositions amoureuses, est libérée du jugement moral. Sa détermination lui permet d’avancer dans son destin. Dans la cantate Ecco chi già nell'Asia d'Alessandro Stradella elle fait de sa beauté une arme de résolution, lorsqu’elle nous livre un enseignement touchant dans Cadute erano alfine de Marco Marazzoli. Circé est élaborée comme un véritable modèle de séduction, alors que Amphitrite s’impose dans sa puissance effrayante.

Cette étude permet également d’identifier les ouvres qui ont nourrit la réception de ces figures : des Métamorphoses d'Ovideou de la Genealogia deorum gentilium de Boccace, jusqu’à l’identification de l’influence d’auteurs moins connus à nos jours, tels que Nonos de Panopolis. En 1727, l’ Iliade résonne dans les 326 vers élaborés sous la plume d’Antonio Conti et Benedetto Marcello. La cantate Cassandra, synthèse exceptionnelle, s’inscrit légitimement dans la Querelle des Anciens et des Modernes : elle représente le plus grand stratagème narratif musical visant à faire connaître au public vénitien l'œuvre homérique, à travers la complainte et le désespoir d'une femme inouïe.

Comment s’opère donc la transfiguration de la compassion en passion, de la composante tragique en drame ? Allons-y ! choisissez votre personnage. Il vous accompagnera dans une aventure inédite, à la recherche de clés de résolutions à vos interrogations les plus profondes."