Jean-Marie Loret

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Jean-Marie Loret
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Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Jean-Marie LobjoieVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Père
Adolf Hitler (hypothèse)
Mère
Charlotte Eudoxie Alida Lobjoie (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Conflit

Jean-Marie Loret, né le [1] à Seboncourt (Aisne) et mort le à Saint-Quentin (Aisne), est un Français qui affirma être le fils illégitime d’Adolf Hitler. Selon lui, sa mère aurait eu une liaison avec le jeune soldat Hitler quand au cours de la Première Guerre mondiale, le régiment bavarois de celui-ci vint en repos dans le village de Fournes-en-Weppes (sud-ouest de Lille) alors à l'arrière du front.

La thèse, qui eut un certain écho médiatique, était défendue par l'historien allemand Werner Maser (1922-2007) qui avait émis dans les années 1960 la thèse d'un fils caché d'Adolf Hitler conçu en France durant la Première Guerre mondiale[2] et avait ensuite, dans les années 1970, travaillé avec Jean-Marie Loret pour établir sa filiation[3]. Cette thèse a été rejetée par ses confrères, notamment Anton Joachimsthaler (de), Timothy Ryback (en), Thomas Weber ou encore Ian Kershaw, qui jugent qu'elle est extrêmement improbable, voire qu'elle relève de la légende.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jean-Marie Loret nait, sous le nom de Jean-Marie Lobjoie, dans les derniers mois de la Première Guerre mondiale en mars 1918 à Seboncourt, un village picard du nord du département de l'Aisne. C’est un enfant illégitime. Sa mère Charlotte Eudoxie Alida Lobjoie (1898-1951) est la fille du boucher local, Louis Joseph Alfred Lobjoie, et de son épouse Marie Flore Philomène (née Colpin). Diverses sources[Lesquelles ?] attribuent à Charlotte Lobjoie la profession de danseuse, mais il est difficile de savoir si elle l'était déjà en 1916 et 1917. Elle semble n'avoir adopté cette profession qu'après son déménagement à Paris, quelques mois après la naissance de son enfant et après le retrait des Allemands du territoire français.

Jean-Marie passe ses sept premières années chez ses grands-parents, avec lesquels Charlotte avait rompu tout contact après avoir quitté sa famille. Le , elle épouse le lithographe Clément Loret, qui autorise le fils illégitime de sa nouvelle femme, qu'il n'a à ce moment-là encore jamais vu, à porter son nom de famille.

Après la mort de ses grands-parents maternels, respectivement en 1925 et 1926, qui, selon les déclarations de Loret, l'avaient « mal traité », sa tante, Alice Lobjoie s'emploie pour faire adopter son neveu par la famille d'un riche magnat de la construction de Saint-Quentin, la famille Frizon. À partir de ce moment, le garçon fréquente deux pensionnats catholiques, d'abord à Cambrai puis à Saint-Quentin.

En 1936, Jean-Marie Loret fait son service militaire et monte en grade les années suivantes, atteignant celui de sergent-chef. Il s'enrôle dès 1939 dans les corps francs qui allaient se battre en avant de la ligne Maginot. Les mois suivants, en 1940, son unité mène un combat violent contre les troupes allemandes dans les Ardennes. Pendant l'Occupation, il est contacté par le réseau de la Résistance OCM (Organisation civile et militaire) au sein duquel il porta le pseudo de Clément[4]. Il devient un résistant[5] aux armées hitlériennes.

Après guerre, il travaille quelques années dans les affaires jusqu'en 1948, où il cesse ses activités pour cause d'insolvabilité.

Loret précisa qu'il savait dès son enfance être le fils d'un soldat allemand mais qu'il n'avait aucune idée de l'identité de son père. Il affirma que peu de temps avant de mourir[6] en 1948, sa mère lui révéla que le soldat dont elle lui avait parlé aurait en fait été Adolf Hitler qu'elle aurait fréquenté entre 1914 et 1918. Loret affirma que cette annonce provoqua chez lui un grand abattement et qu'il se réfugia dans le travail pour éviter la dépression[7].

Dans les années 1970, alors qu’il a fondé une famille, il semble mieux accepter cette filiation (non prouvée). En 1979, il fait mener des enquêtes pour faire officialiser ce (supposé) lien de parenté[8]. Il contacte à cette fin un avocat, Maître François Gibault, s'adjoint les services d'un historien, l'universitaire allemand Werner Maser qui a travaillé dans les années 1960 sur une relation d'Hitler avec une Française pendant la Première Guerre mondiale, retourne sur les lieux de son enfance, interroge quelques rares témoins et diligente une série d'enquêtes qui plaideraient en faveur d'une parenté entre lui et Hitler[4].

En 1981, il publie un livre, Ton père s'appelait… Adolf Hitler, pour revendiquer cette filiation. Dans la préface de l'ouvrage, il écrit : « Mon père est Adolf Hitler. Croyez-le ou non, ce point est sans importance. C'est un fait gênant, paraît-il, pour un peu tout le monde. Je crois, moi, en ma filiation, parce que je crois en ma mère. » Si le livre rencontre alors peu d'échos en France[4], au Japon, la télévision publique recevra Loret dans ses studios et le présentera comme le fils du dictateur allemand.

La vie familiale de Jean-Marie Loret reste peu connue. Il a été marié au moins une fois et a eu neuf enfants[9].

Un de ses fils Jean-Charles Loret, a accordé un entretien en à L'Aisne nouvelle[9] indiquant être en quête de vérité mais qu'il était difficile pour lui de remettre en cause la parole de sa grand-mère dite sur son lit de mort[9].

La liaison supposée entre Adolf Hitler et Charlotte Lobjoie[modifier | modifier le code]

Les informations sur cette liaison supposée ne viennent que de Jean-Marie Loret et de ce que sa mère lui aurait rapporté peu avant de mourir.

Dans un récit fait à Paris Match en , Jean-Marie Loret indique que sa mère Charlotte Lobjoie, alors jolie fille de 17 ans, quitte sa famille à Seboncourt pour se rendre chez des parents à Prémont[1]. Ces derniers la voient fréquenter un « soldat allemand à petite moustache »[1].

Selon l'article du Point de 2012 s'appuyant sur l'ouvrage de Jean-Marie Loret, la rencontre se serait faite dans la commune voisine de Fournes-en-Weppes[4].

« Un jour, je faisais les foins, avec d'autres femmes, lorsqu'on vit un soldat allemand, installé de l'autre côté de la rue, révèle celle-ci à son fils bien des années plus tard. Il avait une sorte de carton et semblait dessiner. Toutes les femmes trouvèrent intéressant ce soldat et se montrèrent curieuses de savoir ce qu'il dessinait. Je suis désignée pour essayer de l'approcher[4]. »

Elle indiqua qu'Hitler se montra attentif et chaleureux et ils entamèrent une relation de plusieurs semaines. Lorsque Hitler le pouvait, ils se promenaient ensemble[4] :

« Lorsque ton père était là - très rarement -, il aimait m'emmener dans des promenades à la campagne. Mais ces promenades se terminaient en général plutôt mal. En effet, ton père, inspiré par la nature, entreprenait un discours auquel je ne comprenais pas grand-chose. Ne pouvant s'exprimer en français, il déclamait en allemand, s'adressant à un auditoire absent. Si je parlais l'allemand, je ne pouvais le suivre, d'autant plus que l'histoire de la Prusse, de l'Autriche ou de la Bavière ne m'était pas familière, loin de là. Ma réaction mettait ton père en colère en me voyant rester de marbre à ses effets oratoires[4]! »

Un soir de juin 1917, Hitler après avoir bu avec un camarade se fait très entreprenant auprès de Charlotte et la met enceinte[4].

Non démentie par la chronologie[modifier | modifier le code]

Adolf Hitler, engagé volontaire dans un régiment de l'armée bavaroise, se trouve dans la région de Lille dès le . Il sert comme estafette, assurant la liaison entre l'état-major et les bataillons. Il a séjourné dans les localités de Seclin, Fournes, Wavrin, et Ardooie dans les années 1916 et 1917. Cette localisation est cohérente avec les dires de Charlotte Lobjoie.

Entre juin et août 1917, période pour la supposée procréation (Jean-Marie Loret est né en ), Hitler se trouvait bien dans la région. En mars 1917, il revient dans le Nord de la France, à Vimy après un séjour dans un hôpital de Berlin où il a soigné une blessure à la jambe consécutive à l'explosion d'un obus quelques mois plus tôt sur le front. Il ne repartira de la région qu'en septembre 1917, pour une permission de 15 jours à Berlin.

Les arguments de Jean-Marie Loret : pas d'infirmation mais pas de confirmation[modifier | modifier le code]

Jean-Marie Loret travailla dans les années 1970 avec l'historien allemand Werner Maser pour étayer sa filiation. Maser, alors qu'il travaillait dans les années 1960 sur les origines du national-socialisme, indiqua avoir alors découvert qu'Adolf Hitler aurait eu une liaison avec une jeune Française entre 1916 et 1917 et que de cette liaison un enfant serait né[1]. Par la suite, Maser s'est rendu dans le Nord de la France pour poursuivre ses recherches[1]. C'est à la suite de ces travaux, que Jean-Marie Loret l'aurait contacté en 1975[1]. Werner Maser, dubitatif au départ, lui posa une trentaine de questions pour voir si les informations qu'il avait déjà collectées concordaient avec celles de Loret, ce qui fut le cas[1].

Avec l'aide de Maser, et avant de rompre avec ce dernier, Jean-Marie Loret obtient différentes études qu'il publie en annexe de son ouvrage coécrit avec l'historien local René Mathot[10], qui prouveraient selon lui sa filiation :

  • une « expertise en méthode d'identification par la physionomie comparative » réalisée par Élisabeth Kaiser-Lindner, qui « fit plusieurs portraits du Führer ». Elle affirma que Loret était le fils de ce dernier. Cette « expertise » s'appuie, écrit son auteur, sur le constat que « comme portraitiste de Hitler, je connaissais chaque trait de sa physionomie. Je crois qu'il n'existe personne, autant que moi, qui ait pu faire des portraits de Hitler. C'est pour cette raison que j'ai reconnu les yeux de M. Loret, car il a exactement le regard de son père » et sur un ensemble de collages de photographies des visages de Loret et de Hitler l'amenant notamment à constater que « du fait que M. Loret tourne la tête légèrement vers la droite et Hitler légèrement vers la gauche, il n'y a pas superposition absolue quant au sommet de la tête et aux cheveux, à la joue et aux oreilles, mais la vue frontale du visage coïncide absolument lors de la superposition »[11]
  • des « extraits de rapport d'expertise des Dr C. Steffens et F. Vogel de l'Institut d'Anthropologie et de Génétique de l'Université de Heidelberg » signalant que Loret et Hitler ont le même groupe sanguin, A rhésus positif,
  • une « étude comparative psycho-graphologique entre Adolf Hitler et Jean-Marie Loret ». Celle-ci souligne que « très peu de graphologues ont abordé l'expression du tempérament psychobiologique dans l'écriture. Il est vrai que ce que champ de recherche requiert des connaissance approfondies en psychobiologie. M. Sigurd Müller, Beratender Psychologue und Schießsachverständiger [sic], de Sarrebrück, maîtrise ces disciplines ». Au terme de divers tableaux comparatifs consacré notamment à « l'affirmation de soi », à « l'autonomie, volonté de puissance » ou à la « volonté d'expansion et de faire valoir », l'auteur conclut que « le pourcentage important de concordances (2/1) ne laisse qu'une conclusion possible : il y a chez Jean-Marie Loret une parenté étroite (de premier rang) avec Adolf Hitler[12] »
  • une comparaison graphologique des écritures des deux hommes[13].

Mais si Jean-Marie Loret a avancé ces arguments pour soutenir la thèse de sa filiation et s'ils n'apportent aucune infirmation à celle-ci, leurs conclusions sont beaucoup plus prudentes ou sujettes à caution dans leur interprétation. Ainsi sur :

  • L'« expertise en méthode d'identification par la physionomie comparative » qui, utilisant une « méthode [qui] apparaîtra tout à la fois inédite et surprenante quant à son application » ;
  • Les « extraits de rapport d'expertise des Dr C. Steffens et F. Vogel de l'Institut d'Anthropologie et de Génétique de l'Université de Heidelberg » concluent que « M. Loret n'a pu être comparé avec sa mère et Hitler que sur 25 % environ des signes caractéristiques qui sont étudiés en règle générale pour les recherches en paternité. Cette comparaison a dû se faire d'après des photographies qui, en particulier pour la mère, ne laissaient pas entrevoir de détails anthropométriques notables. Il en résulte que l'on n'a pu aboutir ni à une constatation de ressemblance entre M. Loret et Hitler ni à un argument de poids contre une filiation possible entre les deux individus[14]. »

Le reste des arguments de Loret ne repose que sur ses dires même s'il a affirmé avoir retrouvé des témoins oculaires de la relation entre Charlotte et le soldat Hitler mais sans témoignages validés de ces derniers.

Ainsi il affirma que :

  • des officiers de l'armée allemande, lors de l'Occupation, auraient remis de l'argent en espèces à sa mère, Charlotte Lobjoie[5],[15].
  • il aurait été convoqué au siège de la Gestapo à Paris pendant l'Occupation où on lui aurait posé des questions sur ses études et ses dispositions naturelles[1]. Selon Maser cela aurait été la conséquence de la visite d'Adolf Hitler dans la région juste après qu'il eut signé l'Armistice à Compiègne le [1], visite au cours de laquelle il aurait demandé à la Gestapo de se renseigner sur la famille Loret[1].
  • sa mère aurait conservé des tableaux prétendument de la main d'Hitler, mais on ne sait ni combien elle en a possédé, ni s'ils étaient signés, ni ce qu'ils sont devenus. Jean-Marie Loret conservait un dessin de l'église de Fourdrain, dont le coin inférieur droit avait été déchiré par sa mère Charlotte Lobjoie[16].

Werner Maser avança des arguments supplémentaires pour appuyer cette filiation.

  • Charlotte Lobjoie, qui serait devenue alcoolique avant guerre, aurait été soignée dans un sanatorium en Allemagne[1].
  • Il a retrouvé[1] en Allemagne un portrait attribué à Hitler et qui selon lui représente Charlotte Lobjoie [5],[7], le visage dessiné ressemblant aux photos de la jeune fille à l'époque[1].

D'autres arguments ont été rapportés mais sans fondement semblent plus tenir de la rumeur :

  • Selon le registre des naissances de sa ville natale, le père de Loret était un soldat allemand non identifié de la Première Guerre mondiale.[réf. nécessaire]
  • Au cours de la Seconde Guerre mondiale, Loret travailla comme chargé de mission dans la police française[réf. nécessaire] à Saint-Quentin. Il aurait obtenu qu'on lui accordât ce poste sur la demande personnelle d'Hitler, mais, jusqu'ici il semble bien qu'aucune preuve solide n'ait pu être apportée pour soutenir une telle affirmation d'autant qu'on sait qu'il s'engagea dans la Résistance. Tout aussi peu prouvées sont les allégations selon lesquelles il aurait en cette qualité collaboré avec les unités de la Gestapo stationnées en France[réf. nécessaire]. Le fait qu'après la guerre aucun procès pour collaboration n'ait jamais été intenté contre lui va manifestement à l'encontre d'une telle affirmation.
  • La presse belge avait rapporté que « diverses sources » - mais sans les citer - prétendent qu'Hitler a fait détruire tous les documents concernant Loret[7].

Les analyses ADN[modifier | modifier le code]

L'analyse ADN de 2009 : infirme la filiation sous réserve de l'authenticité des prélèvements[modifier | modifier le code]

En 2009, deux Belges, un journaliste, Jean-Paul Mulders, et un agent des douanes passionné d’histoire hitlérienne, Marc Vermeeren, ont mené une enquête pour retrouver l'ADN d'Hitler (en particulier le chromosome Y qui se transmet en ligne masculine) au travers de celui de ses collatéraux[7]. Ils se rendent ainsi aux États-Unis pour récupérer de l'ADN de petits-neveux de Hitler dont le lien de parenté est lui avéré. Ces derniers refusant tout contact, ils arrivent à récupérer une serviette en papier que l'un d'eux a utilisée dans un fast-food[17]. Ils se rendent également en Autriche où ils retrouvent 36 personnes ayant un lien de parenté plus ou moins lointain avec Hitler allant jusqu'à récupérer un mégot de cigarette fumée par un cousin lointain d'Hitler[17]. En France, ils récupèrent un timbre poste d'une lettre collée par Jean-Marie Loret. De retour en Belgique, les ADN sont extraits de ces différents supports et analysés dans un laboratoire en Belgique.

Les résultats démontrent les liens de parenté entre les petits neveux d'Hitler et les "cousins" autrichiens[17] mais établissent l'absence de lien entre l'ADN contenu dans la salive supposée de Jean-Marie Loret et celui de la famille de Hitler[5]. Jean-Paul Mulders en conclura : « De deux choses l’une : soit il n’est pas le fils, ce que je pense. Soit ce n’est pas lui qui a léché le timbre de la lettre qu’il a envoyée[17]. » À l’époque, les journaux belges flamand Het Laaste Nieuws et francophone Le Soir publièrent une série d’articles sur leur quête. Il apparaît alors que l'ADN commun des cousins autrichiens et américains d'Hitler relève de l'haplogroupe E1b1b, un haplogroupe que l'on trouve surtout au Maghreb, en Afrique de l'Est et au Proche-Orient. On le retrouve, à des fréquences moins importantes, en Europe du Sud, principalement en Sicile et dans les Balkans, ce qui peut s'expliquer par des migrations selon Ronny Decorte, expert en génétique à l'université Katholieke Universiteit Leuven[18],[19].

En 2012, l'historien François Delpla, même s'il juge la filiation peu probable, a affirmé que ce test ne prouvait pas que Loret n'était pas le fils d'Hitler[3]. Il précise que seul un test ADN sur les enfants de Jean-Marie Loret permettrait de trancher la question mais ces derniers l'ont d'abord refusé[3] avant de lancer par eux-mêmes une nouvelle procédure de tests ADN comparatifs, dont le résultat final a également permis de conclure à une absence de filiation[2].

L'analyse de 2014 : infirme la filiation sous réserve de vérité de l'arbre généalogique[modifier | modifier le code]

En 2014, Philippe et Élisabeth Loret, enfants de Jean-Marie Loret, décident de faire une nouvelle analyse ADN ; ils prennent contact avec le docteur Philippe Charlier, l’un des spécialistes du génome humain et de la résolution d'énigmes historiques, qui propose de comparer leur ADN à celui de lointains cousins d’Hitler retrouvés en Autriche grâce à son arbre généalogique. L'analyse, qui a fait l'objet d'un documentaire[20], montre une absence de lien mais ne permet pas de préciser si l'haplogroupe identifié chez les cousins autrichiens est l'haplogroupe E1b1b trouvé lors des analyses de 2009. Philippe Loret affirme avoir toujours un doute et émet l'hypothèse, non exclue par Philippe Charlier, que l'un des pères de l'arbre généalogique ne soit pas le bon du fait d'une infidélité, d'autant que de nombreuses générations le séparent de ses supposés cousins autrichiens. Philippe Loret affirme que le doute ne sera dissipé que lorsqu'il aura pu faire analyser l'ADN d'Alois Hitler via une exhumation.

Le point de vue des historiens : filiation improbable[modifier | modifier le code]

L'hypothèse de cette filiation a été défendue par l'historien allemand Werner Maser[21].

Elle a été réfutée en particulier par son confrère Anton Joachimsthaler (de)[22]. Donald McKale relève, pour sa part, que « Maser n'avait pas de réelle documentation à l'appui de son affirmation extravagante », et, constatant que « son nationalisme apparent l'[avait alors] conduit dans une campagne visant à discréditer l'autopsie d'Hitler publiée par les Russes qui affirmaient que le Führer n'avait qu'un seul testicule », considère qu'il s'agissait en fait pour celui-ci d'un argument destiné à « prouver son point de vue selon lequel Hitler était sexuellement "normal" ».

Pour Thomas Weber, auteur d'une étude de référence sur Hitler[23] durant la Première Guerre mondiale, « Hitler voyait d'un mauvais œil le recours aux services de prostituées ou les relations plus durables nouées avec les Françaises. L'anecdote, souvent reprise, qui lui attribue la paternité d'un enfant né pendant cette période n'est qu'une légende[23] ». De même, François Kersaudy, renvoyant aux travaux d'Anton Joachimsthaler, rappelle que « durant ses quatre années passées au front entre 1914 et 1918, le caporal Hitler refuse catégoriquement toute relation avec des femmes belges ou françaises, ce que ses camarades de combat mettront avec indulgence et hilarité sur le compte de son intransigeance patriotique ». Kersaudy conclut qu'« il en résulte en tout cas que les élucubrations complaisamment colportées par l'historien allemand Werner Maser au sujet de Jean-Marie Loret, le "fils français d'Adolf Hitler", sont entièrement dénuées de fondement[24] ». Le principal biographe d'Hitler dans les années 2000, Ian Kershaw, souligne également que l'attitude d'Hitler le fait qualifier de « moine » par l'un de ses camarades et juge, en note, cette théorie extrêmement improbable[25].

François Delpla, qui n'avait abordé la question ni dans sa biographie d'Hitler[26], ni dans son ouvrage sur les relations d'Hitler avec les femmes[27], se montre plus hésitant. Il affirme d'abord, en 2005, dans une interview au magazine Famille chrétienne, qu'« il faut prendre au sérieux le témoignage d’un certain Jean Loret, enfant naturel né en 1918 dans une zone occupée par les Allemands dans le nord de la France et à qui sa mère, au moment de mourir, va "révéler" à la fin des années 1940 que son père était un certain Adolf Hitler[28] ». En , invité sur la chaine d'information LCI à la suite de la parution de l'article du Point, Delpla semble ne plus croire à cette thèse, mais, peu après, lors d'une interview accordée en au magazine Les Inrocks[3], il se déclare moins catégorique dans ses conclusions, jugeant cette filiation non pas impossible mais très improbable. Au cours de cette interview, il signale que même Werner Maser a eu des doutes à la fin[3].

Traitement médiatique de l'affaire[modifier | modifier le code]

En 1977, Paris Match consacre un long article à Jean-Marie Loret. Des articles lui sont consacrés dans les années suivantes dans l'Aisne nouvelle et la presse belge.

En 1981, il sort son livre écrit avec un historien local, Ton père s'appelait… Adolf Hitler, pour revendiquer cette filiation mais qui a peu d'échos.

En 1985, France 3 Picardie lui consacre un reportage[29].

En 2009, les journaux belges flamand Het Laaste Nieuws et francophone Le Soir publièrent une série d’articles sur l'enquête d'un de leurs confrères, Jean-Paul Mulders, sur la recherche de l'ADN d'Hitler et sa filiation.

En , Jérome Béglé publie dans le magazine Le Point un article intitulé « Le fils français caché d'Adolf Hitler », qui va agiter les médias français et certains médias étrangers.

Ainsi François Delpla constate que « Jean-Marie Loret, le fils français, caché et putatif qu’aurait conçu Hitler pendant la Première Guerre mondiale, a curieusement agité les rédactions vendredi à la suite d’un simple article du Point en ligne au sujet de ce marronnier, sans actualité particulière : encore un dérangement climatique ? Il m’a en tout cas valu une invitation au Grand Journal de LCI, propice pour montrer la couverture de mon ouvrage, qui sans cela avait peu de chances d’attirer l’attention d’une chaîne d’information continue le lendemain de sa sortie ! ».

L'article du Point a été mis en cause par d'autres médias pour son sensationnalisme, annonçant un soi-disant scoop alors que cette histoire était déjà connue depuis longtemps. L'historien François Delpla conteste aussi l'affirmation dans l'article que cette filiation était considérée comme probablement vraie au Japon ou en Allemagne. L'article avance aussi des faits non étayés comme « il est établi que, pendant l'Occupation, des officiers de la Wehrmacht apportaient des enveloppes d'argent liquide à Charlotte. »

Donald McKale à propos des travaux de Maser avait conclu que « les histoires les plus récentes sur les enfants d'Hitler nous disent aussi quelque chose de la nature humaine […] Adolf Hitler est un bon produit, le Führer fait vendre »[30].

En 2014, David Korn-Brzoza signe un documentaire qui retrace la vie de Jean-Marie Loret. Évoquant la quête de vérité à laquelle se livrent deux de ses enfants, Élisabeth et Philippe, ce documentaire mentionne la recherche de membres de la famille autrichienne apparentée à Hitler et les tests ADN réalisés afin d'établir si Philippe et Élisabeth sont bien les petits-enfants d'Hitler.

En 2018, la chaîne télévisée russe NTV diffuse un documentaire dans lequel Philippe Loret, le fils de Jean-Marie Loret, est interviewé. Il affirme être le petit-fils d'Hitler. Le documentaire est tourné dans son domicile, où l'on peut apercevoir des reliques nazies. Philippe Loret évoque une conspiration des Rothschild[31].

Notes et références[modifier | modifier le code]

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Jean-Marie Loret » (voir la liste des auteurs).

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j k l et m « Le dossier complet du "fils d'Hitler" », Paris Match,‎ (lire en ligne)
  2. a et b « Hitler, mon grand-père », RTS Deux, Radio télévision suisse « Doc du lundi »,‎ (lire en ligne [[vidéo]])
  3. a b c d et e François Delpla et Eléonore Sok-Halkovich, « Légende du fils français d’Hitler : il n’y a pas d’ADN fiable », les InRocks,‎ (lire en ligne)
    Le Français Jean-Marie Loret, décédé en 1985, prétendait être le fils d’Adolf Hitler. L’historien François Delpla, spécialiste du nazisme et auteur d’une biographie d’Adolf Hitler, revient sur cette épineuse question.
  4. a b c d e f g h i et j Jérôme Béglé, « Le fils français caché d'Adolf Hitler », Le Point « Exclusif »,‎ (lire en ligne)
    Hitler aurait eu un fils avec une Française ! Celui-ci a voulu faire reconnaître sa terrible ascendance. Avant d'y renoncer sur les conseils de son avocat et de ses enfants... Récit, photos et documents d'époque.
  5. a b c et d Mylène Vandecasteele, « Le Français Jean-Marie Loret était-il le fils d'Adolf Hitler ? », Express.be,‎ (lire en ligne)
    Le magazine français Le Point[4] publie l’incroyable histoire de Jean-Marie Loret, un Français mort en 1985, qui a été résistant, et qui affirmait qu’il était le fils d’Hitler. Cette histoire avait déjà fait sensation dans les années 1980.
  6. Loret et Mathot 1981, p. 127-149
  7. a b c et d Kessava Packiry, « Le lourd héritage des descendants », La Liberté « Histoire vivante » « Nazis »,‎ (lire en ligne [PDF])
    Ils s’appellent Rainer Hoess, Bettina Goering ou encore Katrin Himmler. Et doivent vivre aujourd’hui avec ces noms associés au nazisme. Ils témoignent dans un documentaire télévisé. Le bas de page de cet article est consacré à Jean-Marie Loret et porte le titre suivant : « L’homme qui croyait être le fils d’Hitler ».
  8. « Un fils d'Hitler dans la résistance française », L'Expression,‎ (lire en ligne)
    Un Français résistant durant la Seconde Guerre mondiale apprend des années plus tard qu'il est le fils caché du Führer. Le journal Le Point[4] a révélé qu'Adolf Hitler aurait eu un fils avec une Française.
  9. a b et c Magali Filou, « Le présumé fils caché d'Hitler ressuscité », Aisne Nouvelle « Aisne »,‎ (lire en ligne, consulté le )
  10. Loret et Mathot 1981
  11. « Rapport de Mme Kaiser-Lindner, Expert en méthode d'identification par la physionomie comparative », dans Loret et Mathot 1981, p. 266-269.
  12. , Sigurd Müller, « Étude comparative psycho-graphologique entre Adolf Hitler et Jean-Marie Loret », dans Loret et Mathot 1981, p. 270-280.
  13. « Testament rédigé par A. Hitler le 2 mai 1938 à l'âge de 49 ans - Écriture de J-M Loret en 1980, à 62 ans », dans Loret et Mathot 1981
  14. « Extraits de rapport d'expertise des Dr C. Steffens et F. Vogel de l'Institut d'Anthropologie et de Génétique de l'Université de Heidelberrg », dans Loret et Mathot 1981, p. 253-263..
  15. Emmanuel Magdelaine (auteur) et Fabien Garreau (reportage), « Le fils caché d'Hitler né à Fournes-en-Weppes ? », France 3 Nord Pas-de-Calais « Archive »,‎ (lire en ligne)
    Jean-Marie Loret, mort en 1985, serait le fils caché d'Adolf Hitler et d'une habitante de Fournes-en-Weppes
  16. Jean-Marie Loret (narrateur) et René Mathot (historien, coauteur), Ton père s'appelait... Adolf Hitler, Paris, Éditions de l'université et de l'enseignement moderne « Dossiers de l'histoire », coll. « Témoignages », , 287 p., biographie, ill., 21 cm (OCLC 10778094, présentation en ligne, lire en ligne), « Les différents cantonnements de Hitler de 1917 à 1918 (y compris dans l'Aisne) », p. 248-251
  17. a b c et d Blandine Grosjean, « La véritable histoire des 39 parents d'Adolf Hitler », sur rue89, nouvelobs.com, (consulté le )
  18. Knack,%2018%20août%202010. http://knack.rnews.be/nl/actualiteit/nieuws/wetenschap/hitler-was-verwant-met-somaliers-berbers-en-joden/article-1194797075630.htm Hitler was verwant met Somaliërs, Berbers en Joden, Knack, 18 août 2010.
  19. De%20Standaard,%2018%20août%202010. http://www.standaard.be/artikel/detail.aspx?artikelid=DMF20100817_117 Hitler verwant met Somaliërs, Berbers en Joden, De Standaard, 18 août 2010.
  20. Hitler,%20mon%20grand-père%20?,%20Dimanche%2014%20décembre%202014%20sur%20France%205. http://www.france5.fr/et-vous/France-5-et-vous/Les-programmes/LE-MAG-N-51-2014/articles/p-22075-HItler-mon-grand-pere-.htm La Case du siècle, Hitler, mon grand-père ?, Dimanche 14 décembre 2014 sur France 5.
  21. Maser 1978.
  22. Joachimsthaler 1989.
  23. a et b Weber 2012.
  24. François Kersaudy, Les secrets du IIIe Reich, Perrin, 2013 (ISBN 978-2262037529), [EPUB] (ISBN 9782262041694) emplacement 2089 et suiv. sur 6948.
  25. Kershaw 2001.
  26. François Delpla, Hitler, Grasset, 1999, 541 p. (ISBN 978-2-246-57041-7)
  27. François Delpla, Les Tentatrices du diable – Hitler, la part des femmes, Paris, L'Archipel, , 361 p. (ISBN 2-84187-683-7)
  28. François Delpla, « Hitler était-il un monstre ? », dans Famille chrétienne, no 1424, 30 avril 2005 (lire en ligne)
  29. Extraits du reportage de France 3 Picardie sur Dailymotion
  30. McKale 1981 p. 46-55,47, 52 et note 17 p 54. Sur la légende d'Hitler mono-testiculaire, voir François Kersaudy, Les secrets du IIIe Reich, Perrin, 2013 (ISBN 978-2-262-03752-9), [EPUB] (ISBN 978-2-262-04169-4), note 2, emplacements 2047-2382 sur 6948.
  31. (ru) ntv.ru, « Внук Гитлера раскрыл мрачные тайны своего кровожадного деда — эксклюзив НТВ », sur НТВ (consulté le )

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Témoignages[modifier | modifier le code]

  • Jean-Marie Loret (narrateur) et René Mathot (coauteur), Ton père s'appelait... Adolf Hitler, Paris, Éditions de l'université et de l'enseignement moderne «Dossiers de l'histoire», , 287 p. (OCLC 10778094)

Travaux[modifier | modifier le code]

Autres[modifier | modifier le code]

  • Jacques de Launay & Paul de Saint Hilaire, Histoires secrètes du IIIe Reich, RTL édition, 1986,175 Pages, (pages 7 à 26, qui penchent pour une véritable filiation)

Liens externes[modifier | modifier le code]