La carrière de grès ferrugineux est directement au pied du château.
La carrière de grès ferrugineux est directement au pied du château. Alexis Feertchak/Le Figaro
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Au château de Guédelon, le temps retrouvé des bâtisseurs

REPORTAGE - Au cœur de l'Yonne, quarante ouvriers construisent depuis 1997 un château fort comme au temps de Philippe Auguste. Vestige encore à naître, Guédelon protège un «patrimoine immatériel des gestes», aussi ancestral que d'avant-garde.

Il pleuviote ce lundi d'automne sur la campagne icaunaise. La terre gorgée d'oxyde de fer tire vers l'orange, qui se mêle aux flaques troubles du chantier. À travers le ciel gris à faire pâlir les chênes encore verts, perce une atmosphère médiévale qui nous projette aussitôt dans l'univers d'une basse-cour capétienne. Mais notre imagination n'a guère besoin de travailler.

À droite sous la muraille, une troupe d'oies cacardent et battent de l'aile dans la boue ; à gauche, retentit le cliquetis régulier d'un tailleur de pierre ; en face au pied de l'enceinte du château, un lourd cheval de trait comtois traîne au pas son poids en matériaux de construction. Seuls quelques enfants, baskets aux pieds et sweat-shirts à capuche sur la tête, nous rappellent que nous sommes en l'an 2022, près de huit siècles après la mort du Seigneur de Guédelon.

L'un des quatre «Comtois» à l'entrée du château. Alexis Feertchak/Le Figaro

Un ancêtre né en 1199, mais si jeune. La chronique n'a pas retenu le nom de Guilbert Courtenay, chevalier de Puisaye, vassal d'une illustre maison dont la lignée a donné deux régents à l'Empire latin de Constantinople. En remontant l'arbre généalogique, un embranchement a comme disparu des parchemins ; impossible de trouver trace du mariage du petit seigneur de l'Yonne avec une nièce de Jean de Toucy. Absolument rien avant 1997, date à laquelle on découvre que Guilbert a reçu du souverain Philippe Auguste, roi de France de 1180-1223, le droit de «bastir chastel». Le château en question se dresse là, comme immarcescible malgré le poids des années. S'il n'y avait pas cette légère patine brune finement déposée sur la surface des pierres et cette absence étonnante de toiture sur une large partie de l'édifice, l'on se demanderait presque par quel miracle un tel vestige a bien pu traverser le temps sans s'altérer davantage.

En 2023, les toitures seront posées. Alexis Feertchak/Le Figaro

Ruse archéologique

Miracle divin peut-être pas, mais stratagème temporel assurément. Toute l'histoire de Guédelon relève d'une ruse archéologique destinée à tromper le temps qui passe. Quand l'histoire ne laisse pas suffisamment de traces derrière elle pour la retracer, ne suffit-il pas de la revivre ?…

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