Campagne de Prusse et de Pologne (1806-1807)

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Campagne de Prusse et de Pologne
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Napoléon à Friedland.
Informations générales
Date 18061807
Lieu Prusse, ancienne Pologne, Russie
Issue Victoire française
Traité de Tilsit
Changements territoriaux Prusse et Pologne
Belligérants
Drapeau de l'Empire français Empire français

Drapeau de l'Espagne Espagne

Drapeau de l'Empire russe Empire russe Drapeau de la Prusse Royaume de Prusse
Drapeau du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande
 Royaume de Suède
Drapeau de l'Électorat de Hanovre Électorat de Brunswick-Lunebourg
Drapeau de l'Électorat de Saxe Électorat de Saxe (1806)
 Royaume de Sicile
Commandants
Napoléon Ier
Louis Nicolas Davout
Frédéric-Guillaume III
Frédéric de Hohenlohe
Gebhard von Blücher
Alexandre Ier
Levin von Bennigsen
Forces en présence
160 000 Français 150 000 Prussiens
91 000[1] Russes
Pertes
Pour la campagne de Prusse :
145 000 morts blessés ou prisonniers[2]

Quatrième Coalition

Batailles


La campagne de Prusse et de Pologne se déroule pendant les guerres de la Quatrième Coalition de 1806 à 1807. Elle oppose la Grande Armée de Napoléon à l'armée prussienne, écrasée à la bataille d'Iéna, puis à l'armée impériale russe. Cette campagne, livrée en partie dans des conditions hivernales difficiles, se termine par une victoire française et oblige la Russie et la Prusse à signer les traités de Tilsit.

Contexte[modifier | modifier le code]

En , le roi Frédéric-Guillaume III est sur le point de se joindre à la Troisième Coalition mais il est pris de court par la victoire de Napoléon à la bataille d'Austerlitz. Celui-ci impose à l'Autriche le traité de Presbourg qui met pratiquement fin au Saint Empire et agrandit les alliés de la France, l'électorat de Bavière et celui de Wurtemberg, érigés en royaumes. La confédération du Rhin, créée en sous la présidence de Napoléon, regroupe les États du centre et du sud de l'Allemagne.

La Prusse n'accepte pas que la suprématie française s’étende jusqu’à ses portes et, le 9 août, alors que l’armée russe, mal remise de ses pertes d'Austerlitz, n'est pas encore en mesure d'intervenir, Frédéric-Guillaume, poussé par le Royaume-Uni, décrète la mobilisation afin de faire la guerre à la France.

Forces en présence[modifier | modifier le code]

Empire français[modifier | modifier le code]

Quatrième Coalition[modifier | modifier le code]

La campagne de Prusse[modifier | modifier le code]

La Grande Armée défile à Berlin.

En septembre, Napoléon concentre son armée sur le Rhin. Le 25 septembre, il quitte Saint-Cloud puis avance vers la Prusse avec environ 160 000 hommes (effectif de départ, augmentant au cours de la campagne). Le premier choc a lieu lors de la bataille de Saalfeld où le prince Louis-Ferdinand de Prusse est tué.

Iéna – Auerstadt[modifier | modifier le code]

L’avance rapide de l’armée française est telle qu’elle permet d’annihiler en une journée l’armée prussienne, comptant 250 000 hommes. En effet, Napoléon et le maréchal Davout la mettent en déroute lors des batailles d’Iéna et d’Auerstadt le .

Le , Napoléon entre à Potsdam et visite le tombeau de Frédéric le Grand, et devant ses maréchaux qu’il fait se découvrir, prononce ces mots : « S’il était encore vivant, nous ne serions pas là aujourd’hui. » Le , il fait son entrée à Berlin à la tête de la Grande Armée[3]. Au total, Napoléon n'a mis que 19 jours du lancement de son attaque sur la Prusse jusqu'à son entrée dans Berlin. En comparaison, la Prusse a lutté pendant trois ans durant la guerre de la Première Coalition.

Napoléon séjourne près d'un mois à Berlin. Le il y signe le décret de Berlin qui instaure le blocus continental contre le Royaume-Uni.

Capitulation de Prenzlau[modifier | modifier le code]

Tandis que Blücher parvient à s'échapper avec 10 000 hommes[4], le prince de Hohenlohe commandant en chef de l'armée prussienne, est obligé de se rendre le à Prenzlau, avec les lambeaux de son armée.

La poursuite[modifier | modifier le code]

Frédéric-Guillaume III.

Cette capitulation provoque le découragement des troupes prussiennes résistant dans les places fortes du royaume : cette crise de moral pousse ces garnisons à se rendre les unes après les autres. Le 29, avec seulement 500 cavaliers, le général Lasalle obtient la reddition des 6 000 hommes et de leurs généraux de la garnison de Stettin. Il y prend également 160 canons et des magasins considérables[5].

Davout fait cerner et prend Custrin avec 4 000 hommes et 90 canons. À Anklan Murat fait encore 4 000 prisonniers. À Strelitz, le général Savary fait prisonnier un général qui n’est autre que le beau-frère du roi de Prusse[6]. Le maréchal Ney fait le siège de Magdebourg.

Le , les corps de Soult, Bernadotte et Murat arrivent simultanément devant Lübeck où s’est réfugié le reste de l’armée de Blücher, grossi des colonnes du duc de Brunswick et du duc de Saxe-Weimar qui a abandonné le commandement à un de ses subalternes pour rentrer chez lui[7]. Aussitôt les Français passent à l’attaque et viennent rapidement à bout des défenses de la ville. À l’aube du 7, Blücher et ses généraux demandent à capituler. 16 000 fantassins, 5 000 cavaliers et 80 canons sont capturés[8].

Le Magdebourg capitule, Ney fait 22 000 prisonniers dont 20 généraux et 800 officiers, et prend 800 canons et de nombreux magasins[8].

Échec des négociations avec la Prusse[modifier | modifier le code]

Après ces revers, la Prusse accepte les propositions d'armistice de Napoléon. Le 16 novembre, les plénipotentiaires des deux camps signent la suspension d'armes à Charlottenbourg[9] qui prévoit une paix séparée entre la Prusse et la France.

La convention prévoit que les négociations doivent se poursuivre à Charlottenbourg et que l'échange des ratifications doit avoir lieu à Graudenz dans les cinq jours au plus tard.

Pendant ce temps, les troupes françaises arrivent sur la Vistule, le traité n'a plus d'objet. Le 20 novembre Lestocq reçoit la capitulation de Hameln et fait prisonniers 9 000 fantassins, 300 cavaliers et 6 généraux.

Le général Duroc est envoyé à Osterode pour rencontrer le roi Frédéric-Guillaume III de Prusse ; celui-ci l'informe qu'une partie de ses États est occupée par les Russes, l'empêchant de ratifier la suspension d'armes, étant dans l'incapacité de la faire appliquer[10].

La campagne de Pologne et de Prusse-Orientale[modifier | modifier le code]

Jean-Henri Dombrowski.

Après avoir nommé le général Clarke, gouverneur général de Berlin, Napoléon quitte donc la ville dans la nuit du 25 au . Il est à Poznań le 27.

Dix ans après le dernier partage de la Pologne, dans toutes les villes, dans toutes les campagnes, les soldats de Napoléon sont accueillis en libérateurs[11], d'autant que parmi eux se trouvent les anciens des légions polonaises de l'armée d'Italie de Dombrowski. L'insurrection des provinces polonaises contre l'occupant prussien ou russe fournit à Napoléon 30 000 hommes.

Le siège de Koźle, Wilhelm von Kobell(1808).

Devant Varsovie, les Russes se dérobent et refusent de livrer bataille. Murat s'empare de Praga faubourg de la capitale, et les poursuit sur le Boug. Les Russes détruisent les ponts derrière eux. Bien que plus petit que la Vistule, le Boug est à cet endroit aussi fort que la Seine à Paris, la reconstruction des ponts sera un travail considérable.

Le au soir, Murat entre à Varsovie. Il est rejoint par Davout le 29. Le , plus au nord, Ney passe la Vistule dont le cours est encombré de glace et entre à Thorn. Le général Dulauloy est nommé gouverneur de la ville.

Deux traités signés à Poznań, le premier le avec Frédéric-Auguste III de Saxe, devenu le précédent, par la volonté de Napoléon, roi de Saxe, sous le nom de Frédéric-Auguste Ier de Saxe, et le second signé le avec les cinq duchés saxons fournissent 8 800 hommes[12].

L'armée du prince Jérôme, composée de divisions bavaroises et wurtembourgeoises, est devant Głogów, capitale de la Basse-Silésie. La ville est entourée de bonnes fortifications. Jérôme fait construire des batteries autour de la place et laisse le général Vandamme continuer le siège pour se porter sur Breslau (aujourd'hui Wrocław), à la rencontre des Russes. La ville se rend le , dès le début du bombardement. 2 500 hommes, 200 canons et de nombreux magasins sont le résultat de cette conquête.

Napoléon à Varsovie[modifier | modifier le code]

Parti le de Poznań, Napoléon arrive le à Varsovie. Ce jour Davout passe le Boug. Augereau passe la Vistule à Utrata (pl). Soult traverse à Wyszogród. Face à eux se trouve l'armée russe, commandée par Kamenski, âgé de 70 ans et presque infirme.

Obligé d'hiverner en Pologne, Napoléon passe ainsi tout le mois de janvier à Varsovie où il donne des soirées, bals et réceptions et rencontre la comtesse Walewska. C'est que l'armée française a également bien besoin de repos. Ses pertes lui interdisent de poursuivre l'armée russe. Elle se replie alors sur la Vistule pour se reformer et recevoir les renforts de France. Heureusement, de mémoire de Polonais, jamais la météo n'a été aussi clémente. Pour les Français, la température est plus douce qu'à Paris en cette saison[13].

Pendant ce temps, la Perse et la Porte déclarent la guerre à la Russie.

Échec de l'encerclement devant le Narew[modifier | modifier le code]

Le , à la bataille de Golymin l'armée russe de Galitzine échappe à Murat, tandis que le même jour, à la bataille de Pułtusk, celle de Bennigsen échappe à Lannes. Les deux armées russes se retirent sur Ostrołęka, laissant dans ces deux batailles 12 000 morts, blessés ou prisonniers et 80 canons, les Français pour leur part ne déplorent que 800 morts et 2 000 blessés[14]. La résistance du général Galitzine, combinée à l'échec de Soult à contourner le flanc droit russe, fait perdre à Napoléon une chance de rattraper les lignes russes et de les emprisonner devant le fleuve Narew.

Napoléon à la bataille d'Eylau.

La Grande Armée se dirige alors vers le nord pour prendre la nouvelle capitale du roi de Prusse, Königsberg. Victor se met en marche le 8 janvier pour faire le siège de Colberg et de Dantzig.

Les Russes se dérobent à plusieurs reprises pour livrer, les 7 et , la sanglante bataille d'Eylau où ils sont vaincus et abandonnent le champ de bataille. Après cette victoire, l'armée française reprend ses quartiers d'hiver. L'empereur passe les mois de mars, avril et mai à Ostróda puis à Finckenstein[15], où il reçoit les ambassadeurs de Turquie et de Perse, jusque-là alliés de l'Angleterre. Le 4 mai, il signe le traité de Finkenstein avec la Perse.

Au printemps, les Russes prennent l'initiative avec une offensive devant surprendre les Français et faire lever le siège de Dantzig, mais le 19 mai, la ville se rend après deux mois de siège, au général Lefevbre, fait duc de Dantzig en récompense de sa victoire.

Heilsberg – Friedland[modifier | modifier le code]

L'armée française contre-attaque. Le 10 juin, à la bataille d'Heilsberg, au prix de lourdes pertes, une charge impressionnante de la cavalerie de Murat contraint l'armée de Bennigsen à se replier. Les Français les poursuivent et le 14 juin, remportent une victoire décisive à la bataille de Friedland.

Le traité de Tilsit[modifier | modifier le code]

Alexandre Ier.
Entrevue de Tilsit.

Vaincu, Alexandre Ier souhaite gagner du temps dans la guerre contre les Français. De son côté, Napoléon, au sommet de sa gloire, espère en finir avec la résistance du Royaume-Uni en associant la Russie au blocus continental destiné à ruiner l'économie britannique.

Le , les deux souverains se rencontrent pour la première fois, sur un bateau au milieu du Niémen. Deux jours plus tard, l'Empereur et le Tsar reçoivent le roi de Prusse.

Le traité de Tilsit est signé les 7 et . Napoléon est de retour à Paris le 27 juillet. C'est la fin de la Quatrième Coalition.

Conséquences[modifier | modifier le code]

Napoléon remet la Constitution au Grand duché de Varsovie (1807)
Peinture de Marcello Bacciarelli.

Fort des nouveaux territoires pris à la Prusse, Napoléon fait renaître la Pologne en créant le duché de Varsovie. Petit-fils d'Auguste III de Pologne, Frédéric-Auguste Ier de Saxe devient duc de Varsovie. Le royaume de Westphalie est également créé en faveur de Jérôme Bonaparte qui au mois d'août épouse Catherine de Wurtemberg et six jours plus tard, devient roi de Westphalie.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Histoire abrégée des traités de paix, entre les puissances…, page 385.
  2. Trente-deuxième bulletin de la Grande Armée, Berlin le 16 novembre.
  3. Jean Kermoysan, Napoléon : recueil par ordre chronologique de ses lettres…, volume 2, Firmin Didot frères, 1857.
  4. En convainquant le général Klein qu'un armistice étant signé, il était désormais libre – Biographie universelle, page 463.
  5. Vingt-quatrième bulletin de la Grande Armée, Berlin le 31 octobre 1806.
  6. Vingt-sixième bulletin de la Grande Armée, Berlin le 3 novembre 1806.
  7. Vingt-septième bulletin de la Grande Armée.
  8. a et b Trente-unième bulletin de la Grande Armée, Berlin le 10 novembre.
  9. Victoires, conquêtes, désastres, revers et guerres civiles des Français…, page 19.
  10. Trente-cinquième bulletin de la Grande Armée, Posen, le 28 novembre 1806.
  11. Histoire de Pologne, page 256.
  12. Victoires, conquêtes, désastres, revers et guerres civiles des Français…, page 22.
  13. Quarante-neuvième bulletin de la Grande Armée, Varsovie, le 8 janvier.
  14. Quarante-septième bulletin de la Grande Armée, Pułtusk le 5 décembre.
  15. Napoléon et Marie-Louise souvenirs historiques de M. le baron Méneval, page 252.

Sources[modifier | modifier le code]

  • Victoires, conquêtes, désastres, revers et guerres civiles des Français depuis 1792, Paris, 1856.
  • Joseph F. Michaud, Louis Gabriel Michaud, Biographie universelle (Michaud) ancienne et moderne, 1854.
  • William F. Schoell, Frédéric Schoell, Histoire abrégée des traités de paix, entre les puissances de l'Europe, depuis la paix de Westphalie, 1817.
  • Claude François de Méneval, Napoléon et Marie-Louise. Souvenirs historiques de M. le baron Méneval, 1844.
  • Joachim Lelewel, Histoire de Pologne, 1844.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Paul-Jean Foucart, Campagnes de Prusse et de Pologne (1806-1807) : Tome 1, La Campagne de Prusse (Iéna), Éditions Historiques Teissèdre, (ISBN 2-912259-00-2) (ISBN 978-2-912259-00-4).