LE MONDE 🔵 Kareen Guiock Thuram, chanteuse d’une authenticitĂ© dĂ©sarmante – Shango Media
General-FRNews-FRONT-FR

LE MONDE 🔵 Kareen Guiock Thuram, chanteuse d’une authenticité désarmante

Kareen Guiock Thuram à l’Aguillage, à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), en juillet 2022.

Rire Ă©clatant, intelligence sereine, gravitĂ© soudain grave, 1,78 mètre sans les talons hauts qu’elle affectionne, tresses cĂ©lèbres Ă  l’écran comme Ă  la ville, journaliste sĂ©rieuse sur M6 durant dix ans, Kareen Guiock Thuram, est, mardi 14 mai, au programme du festival Jazz Ă  Saint-Germain-des-PrĂ©s, organisĂ© jusqu’au 20 mai. Ni une prĂ©sentatrice vedette qui tenterait sa chance dans la chanson ni une nouvelle venue : « Ni-ni Â», sans doute, « Je suis une vieille chanteuse qui dĂ©bute. Â»

Qu’elle joue entre musiciens antillais (Mario Canonge, pianiste) ou qu’elle enchante la critique avec Nina, en 2023, son album en hommage Ă  Nina Simone (1933-2003), mis en scène par Dominique Fillon (pianiste), Kareen Guiock Thuram est d’une authenticitĂ© dĂ©sarmante : orchestration, tempo, phrasĂ©, voix sur le rasoir de l’émotion, jamais d’excès, Nina remporte un vif succès. CĂ©lĂ©brer Nina Simone relève de la gageure. Kareen Guiock Thuram se lance avec autant de rigueur que de pudeur. Sa fantaisie (Mr Bojangles, Mississippi Goddam), sa dĂ©licatesse sur les intouchables titres de Nina Simone (I Put a Spell on You, Little Girl Blue, Ne me quitte pas) signent une subtilitĂ© de l’interprĂ©tation très rare.

NĂ©e Ă  Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne) en 1977, fille d’une enseignante guadeloupĂ©enne et d’un père martiniquais, elle suit sa mère Ă  Apatou (Guyane), juste Ă  cĂ´tĂ© de Saint-Laurent-du-Maroni (compter quatre heures de pirogue) : « Les gamins parlaient tak-tak, tout Ă©tait effrayant, c’était un monde merveilleux. Â» Poursuivant ses Ă©tudes au LycĂ©e des droits de l’homme, Ă  Petit-Bourg (Guadeloupe), elle obtient la meilleure note du pays au bac. Au passage, « j’ai appris Ă  parler crĂ©ole Â». Danser sur le gwoka, ça ne s’apprend pas : c’est lĂ  – comme respirer ou ĂŞtre belle.

Une rigueur aimable

Cap sur l’hypokhâgne du lycĂ©e Chaptal (Paris 8e). Gros changement de ciel et de rythme scolaire. Elle poursuit ses Ă©tudes en philosophie Ă  Nanterre et rĂ©dige un mĂ©moire (François Laruelle, directeur) : « L’ExpressivitĂ© du corps. Â» Rapport Ă  la France ? « Un rapport contrarié… un rapport d’amour qui n’est pas partagĂ©. Â» Le racisme ? « Bien sĂ»r, j’ai eu Ă  le subir. Mes parents m’avaient appris que ça existait. L’éprouver, c’est autre chose. Du folklore Ă  la blessure, sans compter l’infini des micro-humiliations de tous les jours. Ce qu’on ne sait pas, c’est que ça vient vous piquer Ă  vif : la peau se contracte, la gorge se serre, on est sans rĂ©partie, dans cette impuissance du moment… Les gens ne se rendent pas compte que ce n’est pas un plaisir d’être susceptible. Â»

Il vous reste 48.9% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Bouton retour en haut de la page
Fermer