Europe « Je t’aime moi non plus » : Aqui !
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L'ÉDITO

 par Solène MÉRIC Solène MÉRIC
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13/05/2024

Europe « Je t’aime moi non plus »

Seul un Français sur deux déclare savoir que le Parlement européen est composé de députés européens et qu'il a un rôle législatif, selon le baromètre Viavoice de mai 2024. Ce sont les 18-24 ans qui ont le plus faible niveau de connaissance sur le Parlement européen. 32%, c'est un chiffre deux fois plus élevé que chez les 65 ans et plus. Paradoxalement ces primo-votants aux élections européennes sont 25 % à pouvoir citer une mesure votée par le Parlement européen depuis 5 ans. C’est certes peu mais ils ne sont que 21 % pour leurs aînés de 65 ans et plus… entre ces deux générations, ça n’est pas mieux non plus. A croire que plus on connaît l’institution européenne, plus on s’en détourne.

Il faut dire que cette génération « senior » visiblement déçue est sans doute celle qui dans sa jeunesse y a le plus cru. Celle qui a vu naître, quasiment en même temps qu’elle-même, cette Europe gage d’une paix tant attendue entre d’abord, l’Allemagne et la France. La première à avoir voté lors de la première élection du Parlement européen au suffrage universel direct en 1979, la première à avoir expérimenté la disparition des frontières et la libre circulation sans passeport, à avoir vu ses enfants partir étudier sous la casquette Erasmus, celle aussi, avec les générations suivantes, qui s’est largement enthousiasmée à la création d’une monnaie unique, symbole économique de poche de la concrétisation de l’élan initial de rapprochement entre les peuples.

L’enthousiasme pour l’Union a donc bel et bien existé, porté par une époque où l’on détruisait davantage les murs qu’on ne les construisait. Mais depuis, même si l’Europe a travaillé à donner de plus en plus de place à ses citoyens (le suffrage universel direct tout de même...), beaucoup, en France en tout cas, ne se sont pas remis de la gifle du non respect de leur « non », exprimé lors du référendum sur le traité constitutionnel en 2004, vite remplacé par le traité de Lisbonne, sans référendum cette fois. A ce déni de démocratie, s’est ajoutée la peur de ce « plombier polonais », mêlant dans un seul concept menace de dumping social et peur d’immigration incontrôlée.

L’Europe à 15, puis à 18 s’est élargie encore, avant de travailler réellement à un indispensable sentiment d’appartenance, et rendant difficile de se rappeler de tête et sans se tromper de l’intégralité de ses membres. Puis l’apparition de nouvelles puissances, de nouvelles guerres, de nouveaux terrorismes, une nouvelle mondialisation et ses nouvelles crises économiques, sanitaires, et bien sûr, environnementales... Un monde en tension, plus grand lui aussi, pour une Europe de moins en moins affirmée sur la carte géopolitique, et lointaine dans l’esprit de nombre de ses citoyens, en France en tout cas.

Des erreurs et un éloignement ajoutés à la montée des peurs, exacerbées par quelques populistes volontaires à la tâche, tout prêts à la simplification à outrance et aux petits arrangements avec la vérité. En cette période de campagne électorale, les stars de TiKToK ne le savent que trop bien. Mais, avant eux, déjà, même les plus europhiles des partis avaient préparé le terrain, en reniant à moitié leur Europe, et affirmant au fil de leur propre lâcheté, la si pratique et opportuniste « faute à Bruxelles »… Quand les victoires européennes sont facilement captées par le niveau national.

Pourtant l’UE, n’est pas une abstraction, elle est la somme de ses membres, contrairement à ce que tous nos acteurs politiques nationaux ou presque voudraient faire croire à leurs concitoyens. Ces mêmes acteurs qui se plaignent tous les cinq ans, que ces mêmes concitoyens ne la connaissent pas. On n’est pas à un paradoxe près. Il est certain en tout cas que parler d'Europe au moment des élections européennes, c'est déjà en parler trop tard.

Pourtant, selon le baromètre Viavoice 65% des Français déclarent être en demande d'informations afin de combler leurs lacunes, et 79 % pensent qu'il n’y a pas suffisamment de débats sur le fond entre les candidats à l’occasion de cette campagne. De ces chiffres, il est d’autant plus frustrant que les politiques, mieux l’État français, membre fondateur (en plus!) de cette Union mal connue, plus que mal aimée, ne s’en saisissent pas. Que font les politiques, certes, mais que fait l’école en la matière ? Que font aussi les médias ? Reconnaissons volontiers que nous ne donnons pas suffisamment chair à cette Europe, tant sur ses enjeux globaux que sur ses aspects les plus concrets, jusqu’au coeur de nos régions. Soutien à l’innovation dans les entreprises, aux initiatives au coeur de nos ruralités, dans la formation, les mobilités, en agriculture, l’aide aux plus démunis...

Colombe, cette militante RN, petite main bénévole aux Restos du coeur sait-elle que l’Europe partage son combat ? Le Fonds européen d'aide aux plus démunis, doté pour la France de 90 millions d’euros, co-financé par l’UE à hauteur de 85 %, permet l’achat annuel d’une trentaine de denrées différentes distribuées auprès de La Croix-Rouge française, du Secours populaire français, de la Fédération française des banques alimentaires…. Et des Restaurants du Cœur. L’Europe est presque partout, même là où beaucoup de ses détracteurs ne l’attendent pas.

1 Commentaire

Un commentaire

  • RENARD, le 13/5/2024 à 11h02

    Merci de ces écrits d’appel à la réflexion mais surtout à la mobilisation pour l’Europe, ses projets, peu et surtout mal compris, déformés par ses détracteurs. Nous avons besoin de davantage de constructions européennes, pas toujours celles proposées, mais alors, justement participons à cette élection, non pour expulser, rejeter, agiter des peurs, mais pour bâtir avec réalisme et ambition.


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