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Où sont passées les scènes de sexe au cinéma ?

Barry Keoghan dans le rôle d’Oliver dans le film Saltburn (2023).
Barry Keoghan dans le rôle d’Oliver dans le film Saltburn (2023). Amazon Content Services LLC

Les séquences torrides se font de plus en plus rares sur le grand écran : à Hollywood, leur nombre a baissé de 40% depuis 2000.

Trop ou pas assez ? Les scènes de sexe au cinéma, pourtant de plus en plus rares, font débat. Certains blâment une époque à la croisée entre le mouvement féministe MeToo et un puritanisme exacerbé par la politique américaine. D’autres, la nécessité de plaire à tous les publics des marchés étrangers, y compris aux plus pudibonds qui ont la censure facile.

Stephen Follows, qui s’est fait pour spécialité l’analyse des données cinématographiques, a voulu en avoir le cœur net. Pour cela, il a analysé les 250 films les plus rentables aux États-Unis, chaque année depuis 2000. Il a constaté que le nombre de scènes de sexe a chuté de près de 40% en 25 ans. Alors qu’en 2000, plus de 80 % des films les plus rentables comportaient un épisode à caractère sexuel, il n’en dénombre aujourd’hui qu’à peine un sur deux.

Le reflet d’une époque censurée

Les scènes torrides au cinéma n'ont pourtant pas totalement disparu des grands écrans et, quand elles y trouvent leur place, se montrent même très explicites, inimaginables encore il y a vingt ou trente ans. Parmi les derniers exemples en date: le film Pauvres créatures avec Emma Stone qui a beaucoup fait parler de lui. L’un des passages du film met en scène la protagoniste - qui s’adonne alors gaiement à la prostitution - coucher avec l’un de ses clients devant les deux fils de ce dernier, qu’il a décidé d’amener à son rendez-vous pour qu’ils prennent des notes et apprennent. Cette scène a même dû être modifiée pour être diffusée dans les salles anglaises.

Saltburn d’Emerald Fennell montre aussi à l’écran plusieurs scènes à caractère sexuel qui ont défrisé les ligues de vertus. Le personnage d’Oliver se livre par exemple à une séance de sexe oral sur Venetia alors que celle-ci a ses règles. Dans une autre scène, Oliver simule un acte sexuel sur la tombe de l’homme qui était l’objet de son désir. Assimilé à de la nécrophilie, c’est autour de cet extrait que beaucoup de discussions ont tourné. La nudité frontale, longtemps taboue à Hollywood, est également plus assumée, à l’instar de Challengers , sorti au mois d’avril, qui ne cachent rien du corps des sportifs sous leur douche.

Avec ces scènes délicates à réaliser, les coordinateurs d’intimité - chargés de faire la liaison entre les réalisateurs et les acteurs et de chorégraphier les scènes de sexe - sont devenus des personnages indispensables au bon déroulement des tournages. Indispensables, mais pas pour tout le monde. Certains acteurs comme Jennifer Aniston (Friends) ou Sean Bean (Games of Thrones) les considèrent inutiles et atténuant la spontanéité du tournage. Les coordinateurs d’intimité, parfois moqués, comme dans la série The Idol qui tourne la profession au ridicule dans son épisode pilote, peuvent être considérés comme le reflet d’une époque censurée craignant des écarts charnels, d’autant plus depuis MeToo.

«Il ne peut y avoir de liberté sans cadre»

En revanche, d’autres personnalités du cinéma, comme Kristen Stewart flattent le métier. L’actrice a affirmé avoir aimé travailler avec une coordinatrice d’intimité pour son film Love lies bleeding, et raconte à Yahoo Entertainment que cela a aidé à créer des scènes qui paraissaient «réelles» et d’avoir des «conversations ouvertes et agréables» sur ce que chaque acteur souhaitait, au lieu d’être «projetée» dans les scènes en question comme elle dit que cela a été le cas plus tôt dans sa carrière.

Ita O’Brien, une coordinatrice d’intimité ayant participé aux tournages de Normal People ou Sex Education , compare son métier à celui des coordinateurs de cascade qui, de la même manière, doivent chorégraphier certaines scènes en veillant à leur utilité dans le scénario ainsi qu’à la sécurité des acteurs. En réponse aux détracteurs de la profession, elle répond dans les colonnes de Madame Figaro : «Il ne peut y avoir de liberté sans cadre.»

Pour ce qu’il en est de la nouvelle génération, le Center for Scholars and Storytellers de l’université de Californie à Los Angeles a réalisé un sondage auprès de jeunes étudiants. Ils durent classer 19 sujets dans l’ordre de ceux qu’ils préféraient regarder dans des films. «La romance ou le sexe» est arrivé treizième. En septième position, on retrouve «le contenu qui n’inclut pas de sexe ou de romance». Le futur du cinéma pourrait s’en trouver de plus en plus pudique.

Où sont passées les scènes de sexe au cinéma ?

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19 commentaires
  • baboune44

    le

    les scènes se passent avec le réalisateur avant le film, dans une chambre d'hôtel?

  • dutch

    le

    C'est Hitchcock (très pudique) qui avait raison en montrant un train entrer dans un tunnel !

  • dutch

    le

    L'explication est qu'on est blasé et que ça n'intéresse plus personne. C'est fini l'époque du cinéma Paradiso, ou la vue d'un nichon faisait monter la température de la salle !

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