Prosper M�rim�e,
r�cemment nomm� inspecteur des monuments historiques, avait pr�vu de
longue date de se rendre en Corse. Pour on ne sait quelles raisons,
il diff�ra son voyage initialement pr�vu pour le mois de juin 1839,
au 15 ao�t de la m�me ann�e, date � laquelle il s'embarque sur le
navire � vapeur Liamone au d�part de Toulon.
Parti � 8 heurs du
matin, le Liamone accoste le lendemain 16 ao�t � midi dans le port
de Bastia o� M�rim�e est accueilli par Tiburce Morati, maire de
Murato qui lui offre l'hospitalit�.
Sa mission le conduit �
Al�ria apr�s un d�tour par Cervioni pour examiner la chapelle romane
de Sainte Christine.
Le 31 ao�t, il est
Ajaccio, accueilli par Jourdan, pr�fet de la Corse. Dans
l'apr�s-midi, il visite la maison et la grotte de Napol�on et
termine sa journ�e par une promenade sur la route des Sanguinaires.
Le dimanche 1er
septembre, il est � Carg�se et � Paomia.
Le lendemain il est
re�u � Sollacaro par M. Colonna d'Istria, maire de cette commune.
Puis il part pour
Sart�ne o� il est l'h�te du sous-pr�fet Ange Pascal Costa. Il visite la
r�gion, se rend � Fozzano pour y rencontrer Colomba Bartoli
alors �g�e de 65 ans et sa fille Catherine, une tr�s jolie
fille de 20 ans, les c�l�bres h�ro�nes de son futur Roman "Colomba". (on dit,
qu'en voyant Catherine, M�rim�e en tomba �perdument amoureux, allant
jusqu'� demander sa main � Colomba qui la lui refusa).
Le 30 septembre, apr�s
avoir visiter Bonifacio et Cavallo, il est de retour � Bastia pour
entreprendre une tourn�e dans le Cap-Corse dont on sait peu de chose. On apprend seulement
qu'il a visit� latour de S�n�que � Luri.
De retour � Bastia, il
�crit � son ami Morati qu'il quitte la Corse � regret mais avec l'espoir
d'y revenir. Il lui confie sa frustration caus�e par "l'exc�s de
moralit� des femmes corses qui d�sole le voyageur".
Le 07 octobre, il
s'embarque pour Livourne, se rend � Naples et de Rome. Le 15
novembre, il est de retour � Paris.
Dans son compte rendu,
il portera un jugement m�diocre sur les monuments qu'il a pu visiter
et n�gligera totalement de parler des tours g�noises, une autre
richesse de notre patrimoine.
Seules, la Canonica,
Saint Michel de Murato et la cath�drale du Nebbio sont �pargn�es par
ses ses critiques et seul le clocher de Carbini m�rite � se yeux une
restauration. Les cons�quences de ce d�sint�ressement feront que
dans son rapport transmis au Comit� Historique des Arts et Monument,
M�rim�e ne demandera gu�re de subventions aux monuments historiques. Il est
cependant curieux que M�rim�e se soit rendu en Corse, alors qu'il savait que l'�le
n'offrait qu'une extr�me pauvret� du point de vue arch�ologique.
Etait-il obs�d� par sa rencontre avec Colomba dans la perspective
d'�crire sa fameuse nouvelle ?
Ce qui est certain, c'est que ce voyage (notes
d'un voyage en Corse) lui fournira la source d'inspiration
n�cessaire pour �crire un roman
qui sera publi� en 1840 et qui sera accueilli par le public comme un
chef d'oeuvre.
Fortement inspir� par la Corse, Prosper M�rim�e, avait d�j� �crit en 1829 sa premi�re nouvelle :
Mat�o Falcone.
L'�crivain donne
complaisamment les recettes de la vendetta: " Si vous avez tu� un
homme, allez dans le maquis de Porto-Vecchio, et vous y vivrez en
s�ret� avec un bon fusil, de la poudre et des balles ..."
Il raconte
avoir assist� au d�c�s d'un homme mort � la suite de sa maladie.
Autour du lit du d�funt, ses amis se pressent pour l'embrasser. L'un
deux lui murmure : "Pourquoi n'est tu pas d�c�d� de la malemort
(c'est � dire assassin�), nous aurions pu te venger !..."
M�rim�e r�sumera son voyage en Corse en
�crivant : "Je me suis fort amus� dans ce pays-ci et j'ai tach� de
tout voir... c'est la pure nature qui m'a plu surtout. Je ne parle
pas des maquis, dont le seul m�rite est de sentir fort bon, et le
d�faut de r�duire les redingotes en lani�res. Je ne parle
pas des vall�es, ni des montagnes, ni des sites, tous les m�mes et
cons�quemment horriblement monotones, ni des for�ts assez pi�tres,
quoi qu'on dise, mais je parle de la pure nature de l'homme. Ce
mammif�re est vraiment fort curieux ici et je ne me lasse pas de
me faire conter des histoires de vendettes".
M�rim�e a fait beaucoup
de mal � la Corse car dans ses �crits, son go�t pour le pittoresque
lui a fait caricaturer l'ensemble de notre soci�t� insulaire o�
selon lui, il n'y aurait que des bergers, des bandits (qui seraient
bien sur d'honneur) et des femmes toutes habill�es de noir comme sa
Colomba.
... Il y a plus d'assassinats chez nous que
partout ailleurs; mais jamais vous ne trouverez une cause ignoble �
cescrimes. Nous avons, il est vrai, beaucoup de meurlriers, mais pas
un voleur [...] Pourquoi envoyer de la poudre � un coquin qui s'en
servira pour commettre des crimes? Sans cette d�plorable faiblesse
que tout le monde para�t avoir ici pour les bandits, il y a
longtemps qu'ils auraient disparu de la Corse .... Et qu'a-t-il fait
enfin ton bandit, pour quel crime s'est-il jet� dans le maquis?
Brandolaccio n'a point commis de crime ! il a tu� Giovan Opizzo, qui
avait assassin� son p�re pendant que lui �tait � l'arm�e.
|