[actualisé] Quelle est l'histoire de l'inscription sur le calvaire de la Boisserie à Colombey ?
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23 Mai 2024 à 22:30
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[actualisé] Quelle est l’histoire de l’inscription sur le calvaire de la Boisserie à Colombey ?

En avril, le mur de la Boisserie est bordé de lilas en fleurs.

A Colombey, la demeure du général de Gaulle, la Boisserie, est entourée d’un beau parc aux arbres centenaires et d’un muret de pierres, où du lilas vient fleurir en avril. Quid du calvaire de ce muret, qui porte une inscription datant du XIXe siècle ? Sollicité par la correspondante de jhm quotidien, le Centre généalogique de Haute-Marne a effectué des recherches.

« La maison de Colombey était une large demeure, recouverte de vigne vierge et isolée de la route par un haut mur. Des lilas fleurissaient le long du mur quand nous sommes arrivés, et une fois à l’intérieur, nous avons pu admirer l’horizon lointain où seigle et trèfle ondulaient dans le vent. » C’est ce qu’écrit Eugène Jolas dans ses Mémoires. L’éditeur et poète franco-américain a loué la Boisserie à Alice Bombal, la propriétaire des lieux, de 1927 à 1930*.

Alice, qui l’avait reçue de ses parents – Anastasie et Henry Descaves -, vendra la propriété au lieutenant-colonel Charles de Gaulle en 1934. Si la maison, bourgeoise, a subi de nombreux changements à la suite de cette acquisition par la famille de Gaulle**, le domaine, dont la superficie est de l’ordre de deux hectares et demi, était déjà tel qu’il est aujourd’hui après 1894, date à laquelle Anastasie Descaves, la mère d’Alice, achète à un certain Fauvé une terre labourable d’un hectare et quinze ares. Or il se trouve que ce nom de “Fauvé” est inscrit sur le calvaire.

Voici l’inscription, telle qu’on peut la lire quand on se trouve à l’extérieur du domaine, sur l’actuelle rue du Général-de-Gaulle, anciennement rue des Moulins : « A la dévotion de Fauvé-Descornet et de sa famille. Année 1851 ».

Un petit doute, néanmoins, sur le chiffre “1”, qui est un peu effacé. En tout état de cause, ce calvaire a été érigé dans les années 1850 pour rendre hommage à la famille Fauvé-Decornet (le tailleur de pierre a sans doute mal orthographié le nom “Decornet” en ajoutant un “s”). Qui était donc cette famille ?

Grâce aux recherches de Pierre Debert, le président du Centre généalogique de Haute-Marne (CG 52), voici ce que l’on peut retenir aujourd’hui : né et mort à Colombey-les-Deux-Eglises, le meunier Jean-Baptiste Fauvé (1784-1868) avait épousé en premières noces Thérèse Chaput (1776-1832).

Des moulins

De cette union étaient nés deux fils : Jean-Baptiste Victor Fauvé, et Joseph Fauvé. La famille possédait alors un terrain, au lieu-dit “Le Champ des Moulins”, rue des Moulins. Ce terrain en question constitue la partie Est du parc de la Boisserie, le long de la route, justement à l’emplacement actuel du muret au calvaire. Tout porte donc à croire qu’il y avait jadis ici des moulins – probablement à vent, puisqu’aucune rivière ne coule à Colombey.

Devenu veuf à l’âge de 48 ans, le père Fauvé s’est remarié en 1834 avec la Colombéenne Anne Decornet (1792-1872), veuve elle aussi, et âgée de 42 ans. De sa première union avec Nicolas Dallemagne, Anne avait eu deux filles : Anne Elisabeth et Emélie Adélaïde.

Famille recomposée et double mariage

La famille Fauvé-Decornet ainsi recomposée s’est si bien entendue que, dix ans plus tard, les deux fils Fauvé ont épousé les deux filles Dallemagne-Decornet (en 1843 et 1845). La vie est parfois bien faite. Comme dit le proverbe : «Marie-toi à ta porte avec des gens de ta sorte».

Cela dit, le fils aîné des Fauvé, Jean-Baptiste Victor, est mort trois jours seulement après son mariage. On ignore les causes de son décès. Anne Elisabeth, sa jeune veuve, se remariera en 1850 avec un autre Colombéen. En 1851, Jean-Baptiste Fauvé et Anne Decornet, liés par leur mariage et ceux de leurs fils et filles, ont probablement fait ériger ce calvaire pour affirmer leur foi et protéger les leurs.

Plus de 40 ans plus tard, en 1894, les Fauvé ont vendu leur terrain à Anastasie Huot, épouse Descaves. Son mari, Henry Descaves (1840-1896), était architecte. En 1895, quand Alice Descaves reçoit donation de la propriété de ses parents, le domaine s’appelle La Brasserie. Ce sont Alice et son mari, François Bombal, qui le renommeront La Boisserie au tout début du XXe siècle (entre 1899 et 1909).

*Aurélie Chenot a fait le récit de cette histoire dans “Colombey est une fête”, éditions Inculte, 2022.

** Lire à ce propos “De Gaulle et la Haute-Marne”, sous la direction de Céline Anché, Alain Morgat et Samuel Mourin, éditions Liralest / Le Pythagore Editions, 2020.

A propos des moulins à vent de Colombey

Pour donner suite à l’article du lundi 13 mai (en pages « Rendez-vous savoirs »), consacré à l’histoire du calvaire du mur de la Boisserie, plusieurs lecteurs de jhm quotidien ont apporté leurs précisions concernant la présence effective de moulins à vent à Colombey au XVIIIe siècle. Notamment Yves Royer, ingénieur des mines et spécialiste local des énergies renouvelables, qui réside à Rizaucourt. Il aborde ce sujet dans son livre “Eole, du souffle pour nos campagnes” – qu’il dédicacera par ailleurs à la Halle de Bar-sur-Aube à l’occasion de la 11e édition de “Bar aux Livres” le 2 juin -, au chapitre intitulé “Abus de la notion de protection du patrimoine et du paysage”, des pages 329 à 331.

La carte Cassini laisse apparaître les moulins à vent de Colombey.

L’auteur conseille aussi de « consulter la carte de Cassini (vers 1760) des alentours de Colombey, sur laquelle on voit trois moulins à vent ». Un propos similaire a été rapporté au président du Centre généalogique de Haute-Marne, Pierre Debert, par un de ses administrateurs, avec la carte en question à l’appui. Cela dit, M. Debert avait peu de doute concernant l’existence de plusieurs moulins à vent sur cette parcelle puisque la rue et le champ s’appelaient “des” Moulins.

En revanche, ce qui était certain pour le généalogiste c’est « qu’ils n’existaient plus en 1894. Mais la date exacte de leur destruction est extrêmement difficile à retrouver. J’estime qu’ils ne devaient déjà plus exister, du moins à cet endroit, en 1824, date de la création du cadastre, sinon ils apparaîtraient sur les plans cadastraux ».

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