Micheline Presle s'est éteinte à l'âge de 101 ans

Micheline Presle s'est éteinte à l'âge de 101 ans

« Les Saintes Chéries », « Le Baron de l'écluse », « Falbalas »... Cette actrice élégante et populaire, mère de la cinéaste Tonie Marshall, est morte à l'âge de 101 ans.

Par Jean-Noël Mirande

Temps de lecture : 4 min

Lecture audio réservée aux abonnés

Les habitants de la rive gauche à Paris avaient l'habitude de croiser sa silhouette familière. Chevelure blonde, vêtue de clair, sac en bandoulière, c'est une femme simple et élégante qui traversait depuis des décennies le carrefour de l'Odéon, un Pariscope sous le bras, en route vers le cinéma, toujours à la première séance le mercredi de 14 heures. Mais depuis quelques années, elle accueillait ses proches dans la maison de retraite où elle vivait désormais. Micheline Presle était « l'une des trois glorieuses » du cinéma français avec Michèle Morgan et Danielle Darrieux, parties avant elle. «  Ce sera bientôt mon tour », disait-elle en souriant, lucide et étonnée d'être encore là.

La newsletter culture

Tous les mercredis à 16h

Recevez l’actualité culturelle de la semaine à ne pas manquer ainsi que les Enquêtes, décryptages, portraits, tendances…

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Née le 22 août 1922, celle qui était Micheline Chassagne à la ville avait la passion du 7e art chevillée à l'âme. Une curiosité intacte comme actrice et comme spectatrice. Elle aimait la découverte. « J'ai la chance de vivre au milieu des salles de cinéma. C'est ma joie de découvrir des films, de jeunes réalisateurs. Cet enthousiasme ne m'a jamais quittée. Ce qui m'intéresse, c'est la rencontre avec l'univers d'un metteur en scène. Évidemment, à mon âge, je ne peux jouer que les vieilles dames, mais, si c'est pour être une grand-mère gentille, ça ne m'intéresse pas. Tout est dans la manière de traiter un sujet ou de montrer un personnage. » Son nom fut au générique pour la dernière fois, pour une simple apparition dans le film de sa fille Tonie Marshall Tu veux ou tu veux pas, où elle était créditée dans le rôle de « la dame indignée dans la rue ». Mais depuis 2020, son visage s'assombrissait quand elle évoquait la réalisatrice franco-américaine, qui avait remporté le césar de la meilleure réalisation pour Vénus Beauté (Institut)décédée à l'âge de 68 ans.

Une carrière de plus de 100 films

L'originalité de cette actrice aura été sa capacité à se laisser surprendre. Il faut revoir Certaines Nouvelles, de Jacques Davila, un film bouleversant sur fond de guerre d'Algérie. Micheline Presle, toujours dans le mouvement, avait des projets jusqu'à ce que le grand âge l'en empêche. Elle ne regardait jamais en arrière, et regrettait seulement que l'on ne puisse plus tourner de films en noir et blanc : « Ce n'est pas par passéisme, mais parce que le rêve et la magie surgissent immédiatement sur l'écran. De nombreux réalisateurs voudraient pouvoir l'utiliser, mais ne le peuvent plus parce que la télévision ne voudrait pas diffuser leurs films. »

En plus de 100 films, ce sont plusieurs générations qui ont grandi avec ce beau visage et cette voix inimitable. Micheline Presle n'a jamais cessé de tourner pendant soixante-quinze ans. Les jeunes gens nés dans les années 1960 la découvraient avec Les Saintes Chéries de Jean Becker, une série-culte où elle était l'épouse de Daniel Gélin, qu'elle appelait « mon minet ». L'une des premières actrices de cinéma à travailler pour la télévision permit aux enfants de la télé de découvrir que leur héroïne était avant tout une étoile du cinéma. Micheline Presle a tourné avec les plus grands réalisateurs avant et après-guerre. Un premier rôle à 15 ans, une apparition au côté de Charles Trenet dans Je chante à 16, c'est avec Georg Wilhelm Pabst que tout commençe avec Jeunes Filles en détresse. Elle est alors Jacqueline Presle et trouve son nom de scène grâce à son partenaire André Luguet. Grâce aux DVD, notre époque réputée amnésique a désormais accès à toute cette mémoire du cinéma. Et quelle mémoire en ce qui concerne Micheline.

Que de chefs-d'œuvre ! Du Paradis perdu d'Abel Gance à Félicie Nanteuil de Marc Allégret. De Boule de suif de Christian-Jaque à La Locomotive du bonheur de Marcel L'Herbier, elle illumina l'écran. Elle rayonna dans Falbalas de Jacques Becker, responsable en partie de la vocation du couturier Jean Paul Gaultier, qui lui a rendu hommage en la filmant dans son récent Fashion Freak Show aux Folies Bergère.

Elle partagea William Marshall avec Michèle Morgan

La première actrice française à choisir son scénario, son metteur en scène et ses partenaires décida d'être la partenaire de Gérard Philippe, dans Le Diable au corps de Claude Autant-Lara. Le couple restera inoubliable. Après la guerre, Micheline Presle tenta l'aventure hollywoodienne comme Michèle Morgan. Elles eurent le même mari, l'acteur William Marshall. Outre-Atlantique, l'aventure tourne court. Après avoir tourné avec Tyrone Power et Errol Flynn, elle revient en France. Après la guerre, la star, un peu oubliée dans son pays, fait quelques films en Italie, dont L'Assassin, avec Marcello Mastroianni. Jean Delannoy lui offre l'un de ses plus beaux rôles comiques avec le personnage de Perle Germain-Joubert dans Le Baron de l'écluse, avec Jean Gabin.

Micheline Presle restera une légende, Alain Delon lui écrivit tout simplement : « Merci d'exister, merci d'être là. » Il nous restera toujours le joli souvenir de ces dimanches soir, où dînant seule ou accompagnée dans un bistrot, face à la rue, elle répondait toujours aux passants qui lui faisaient un signe de la main.

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation
Lire la charte de modération

Commentaires (2)

  • Djill-59

    Je ne les atteindrai jamais, à moins que : j'arrête la cigarette (il paraît qu'elle tue). J'arrête le pinard (il paraît que c'est mauvais). J'arrête mon abonnement au Point (les prises de bec avec Anastasie étant épuisantes).

  • Aileas

    Quel talent, quelle élégance. Une Actrice, une vraie.