Une fois n'est pas coutume, Monsieur
Voltaire s'en prend � la religion. Mais cette fois, son propos est sans doute moins frontal que dans nombre de ses �crits, contes, controverses. Non, cette fois, c'est avec une apparente nonchalance, une petite oeuvre toute de s�duction, d'humour raffin� et presque de douceur que l'essayiste s'en prend � la th�ologie et � ses d�fenseurs. Ainsi, imitant les contes persans et arabes - � commencer par les mille et unes nuits-,
Voltaire s'en prend par le biais � la Bible, lui faisant prendre le d�tour d'une agr�able fabulette que l'on se raconterait entre gentes et prudes demoiselles autour d'une tisane.
Mais que nul s'y trompe ! Quoi qu'usant de tous les charmes de sa plume l�g�re et exp�riment�e pour confondre le lecteur dans cette �l�gante �l�gie, notre alerte philosophe se moque dans les grandes largeurs du texte biblique tout autant que des gens de son temps ; de ces Monarques, par exemple, ou Seigneurs plein de courage d�s lorsqu'il s'agit de sacrifier une innocente, mais qui deviennent plus pleutres que des agneaux perdus aussit�t que l'ombre d'une Eglise et de ses servants pointe le bout de son dogme. Et que dire du sort qu'il fait subir � ces proph�tes bibliques, � ces animaux sacr�s du texte r�v�l�, � tous ces suppos�s h�ros dont les noms sont arriv�s jusqu'� nous par l'entremise des �crits h�bra�ques ?
En un mot comme en cent, Monsieur Arouet a la dent aussi dure contre la foi, la religion et les d�vots lors m�me qu'il semble d�peindre tout cela sous le verni d'une doucereux racontar. Grattez ce verni, et l'ironie vive et mordante de notre g�nie des lumi�res r�appara�t bien promptement. Pour le plus grand plaisir du lecteur, m�me deux si�cles et demi plus tard !
Que l'on soit croyant ou pas, il est urgent de red�couvrir
Voltaire et sa d�nonciation des fausses bigoteries, sa m�fiance � l'�gard des religions qui tuent plus qu'elles ne sauvent, de cette d�fiance toujours acerbe mais intelligente � l'�gard des �glises, des pouvoirs �tablis, des mauvaises intentions politiques ou th�ocratiques, quels qu'ils soient.