Robert Namias : "Comment ne pas croire les témoignages de femmes contre PPDA, il y en a une soixantaine"

"Donnez tout pouvoir à l'homme le plus vertueux qui soit, vous le verrez bientôt changer d'attitude", écrivait Hérodote. Platon, lui, disait "La plupart des hommes au pouvoir deviennent des méchants". Pour Robert Namias, les Grecs anciens avaient déjà beaucoup dit sur le pouvoir : « Il y a aussi cette phrase, le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument. C'est une réalité que l'on constate à travers l'histoire de la République et en particulier de la Vème et nettement depuis une cinquantaine d'années. Je trouve que les choses ne vont pas en s'améliorant. En France en particulier, on frise quand même le pouvoir absolu et les institutions et leurs dérives actuelles font qu'on est dans une forme de pouvoir absolu. Personne ne peut le nier. Il faudrait surtout retrouver un équilibre parlementaire qui n'existe plus depuis longtemps. Nous ne sommes pas dans une démocratie parlementaire et certains ne le souhaitent pas. Ce qui me frappe aussi, c'est que tous ceux qui ont dénoncé le pouvoir absolu, notamment présidentiel, lorsqu'ils s'en sont emparé, l'ont eux-mêmes pratiqué. »

Un polar et un roman à clefs

Le pouvoir, la politique, la presse, l'argent, le sexe, la vengeance, il y a tout ça dans le quatrième roman de Robert Namias, L'affaire Chanteclerc, qui paraît à l'Observatoire. C'est un roman à clefs, un polar avec un assassinat au cœur du livre : « J'essaye de raconter au fond notre société et ses dérives à travers des personnages auxquels je me reconnais depuis la fin des années 50 jusqu'à aujourd'hui. Mais ce n'est pas du tout une vengeance. »

Un roman sur l'amitié

L'affaire Chanteclerc, c'est une fresque sur plus de 50 ans, entre quatre amis qui ont grandi à La Rochelle et qui se sont rencontrés au lycée. Ils sont ambitieux et ils vont chacun faire carrière à Paris. Olivier devient un grand reporter télé, adulé des Français, Charles, un acteur très populaire, Benoît un ministre de droite, de gauche ou du centre, selon l'heure et le sens du vent, écrit Robert Namias. Enfant, Rodolphe, le narrateur, est un écrivain qui enchaîne les best-sellers. Tout va bien dans leur vie, sauf qu'Olivier, le journaliste star est retrouvé mort, et on apprend vite que c'est un assassinat et qu'il est accusé de viol par plusieurs femmes. C'est un livre sur l'ambition, le pouvoir et la masculinité après MeToo, mais c'est aussi un livre sur l'amitié qui traverse les années, qui se distend parfois quand il ne reste plus que les souvenirs du passé : « Ce sont quatre très ambitieux qui ont en commun l'ambition et beaucoup de combats, notamment politiques dans leur jeunesse. Au fil des années, les uns s'enfoncent dans des compromis, d'autres dans des mensonges, les troisièmes dans des manipulations, mais finalement, ils se pardonnent tout. L'amitié pardonne tout finalement, plus qu'en amour. En amitié, on accepte beaucoup plus de faux-semblants. »

Un polar avec l'affaire PPDA en filigrane

Au cœur du livre, il y a cet homme de plus de 50 ans percuté par MeToo. Robert Namias essaye de comprendre comment chacun de ces trois hommes va être ébranlé à l'annonce de la mort de leur copain, mais surtout de toutes ces femmes qu'il aurait violées, ou agressées sexuellement. Le narrateur s'engueule avec ses deux amis. Lui croit à la culpabilité d'Olivier, les autres s'en offusquent alors que les commissariats croulent sous les plaintes. De la première à la dernière page du livre, il y a la figure de Patrick Poivre d'Arvor dont Robert Namias a été le rédacteur en chef et le patron au moment où il a été démis de ses fonctions : « Je ne règle pas mon compte avec l'histoire de PPDA que je trouve absolument abominable et tragique. Mais on a toutes les raisons de croire les témoignages. S'il doit y avoir une vérité, elle ne peut éclater que dans une salle d'audience, mis au-delà de ça, ce qui m'a beaucoup frappé au moment de l'éclatement de cette affaire, c'est que beaucoup, on dit que tout le monde savait alors que c'est absolument faux. Son coté drague et séduction mielleuse, tout le monde le voyait, mais là, on parle de viols et d'agression sexuelle les plus dégueulasses qui soient. Comment voulez-vous ne pas les croire les témoignages des femmes contre PPDA, il y en a une soixantaine. »

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