Le d�sir attrap� par la queue - Pablo Picasso - Babelio
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EAN : 9782070741649
72 pages
Gallimard (23/11/1995)
4.05/5   10 notes
R�sum� :
�il est beau comme un astre c'est un r�ve repeint en couleurs d'aquarelle sur une perle - ses cheveux ont l'art des arabesques compliqu�es des salles du palais de l'Alhambra et son teint a le son argentin de la cloche qui sonne le tango du soir � mes oreilles pleines d'amour - tout son corps est rempli de la lumi�re de mille ampoules �lectriques allum�es - son pantalon est gonfl� de tous les parfums d'Arabie - ses mains sont de transparentes glaces aux p�ches et aux... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Picasso, comme j'aurais aim� le conna�tre ! Derri�re sa c�l�brit�, son argent, ses femmes, on ne voit pas toujours son immense oeuvre. � tel point que son nom est devenu le synonyme de l'incompr�hensible dans l'art ! Mais la cr�ation litt�raire de Picasso est aujourd'hui compl�tement �clips�e par ses oeuvres picturales. Et pourtant il consacrait autant d'heures � l'une qu'� l'autre forme d'expression. J'imagine que dans sa folie de production il choisissait, cas par cas, ce qui �tait plus rapide comme technique. Et sa passion litt�raire faisait tr�ve � sa passion plastique. Il devait avoir un cerveau en �bullition ! L'album Picasso de Marie-Laure Bernadac, que j'ai ador� et que je ne cesse pas de citer, m'a bien �clair�e sur l'esth�tique du peintre. Ensuite, je tombe par hasard sur cette pi�ce de th��tre dans toute sa dimension de philosophie de l'art ! Picasso l'�crit en 1941 et sa premi�re date de 1944. Cette oeuvre n'est pas juste un caprice, il faut dire que Picasso tient un journal tout au long de sa vie. Ses amis �taient principalement des �crivains et lui-m�me �tait un lecteur avide et raffin� de po�sie, ainsi qu'un illustrateur de livres de po�mes. Tous ses textes ont �t� superbement recueillis et �dit�s par Marie-Laure Bernadac et Christine Piot en 1989 (Paris, Gallimard).
Donc, Picasso peint dans son atelier et �crit dans sa cuisine ! Les sp�cialistes, notamment J�ssica Jaques Pi, remarquent que l'iconographie culinaire chez Picasso est en lien direct avec son exil, l'id�e d'un retour po�tique au foyer et, en m�me temps, une r�volte politique contre l'invasion de l'espace intime par l'arm�e de Franco.
Les premiers jours de l'ann�e 1941 �taient domin�s par l'incertitude dans le Paris de l'occupation. Cette atmosph�re �trange a nourrit la r�daction de cette pi�ce qui deviendra une sorte de th��tre de l'absurde avant la lettre.
Personnages :
Michel Leiris: le Gros Pied
Jean-Paul Sartre: le Bout Rond
Raymond Queneau: L'Oignon
Jacques�Laurent Bost: le Silence
Germaine Hugnet: L'Angoisse Grasse
Dora Maar: L'Angoisse Maigre
Zanie Campan (Zanie Aubier): La Tarte
Simone de Beauvoir: Sa Cousine
Jean Aubier: Les Rideaux
Louise Leiris: Les Deux toutous
Photographe :
Brassa�
Spectateurs:
Henri Michaux, Jean Cocteau, Jean Marais, Valentine Hugo,
Pierre Reverdy, Mar�a Casares, Jacques Lacan
Si le D�sir attrap� par la queue fut en 1941 une pi�ce sur l'absurdit� de la guerre, il devint en 1944, lors de sa premi�re, une r�action de stupeur face � l'horreur doubl�e d'une affirmation de la R�sistance des intellectuels parisiens qui, dans les derniers mois du conflit, commenc�rent � se r�v�ler et � t�moigner de leurs actions. Les photographies exceptionnelles de Brassa�, prises en juin 1944, sont devenues embl�matiques de cette forme particuli�re de r�sistance. Je tiens � vous dire que la premi�re du D�sir attrap� par la queue est un hommage � Max Jacob, mort au camp de d�portation de Drancy quatre jours avant (le 15 mars).
La question fondamentale pos�e par Picasso dans le D�sir attrap� par la queue pourrait �tre formul�e de cette mani�re : que faire avec le d�sir (�rotique et philosophique) dans une �poque o� r�gnent l'absurde et la stupeur ? Il s'agit bien �videmment d'une variation picassienne sur le th�me du Banquet de Platon. Tout comme dans l'oeuvre de Platon, dans le D�sir attrap� par la queue, la triade d�sir � connaissance � sexe s'articule autour d'un banquet. Mais dans le cas de Picasso, il s'agit d'un banquet de la faim et du froid, qui s'inscrit dans une fuite de la r�alit�, contrairement � l'essentiel de sa production plastique. Ainsi, � une �poque de restrictions s�v�res, les iconographies culinaires du D�sir sont riches et succulentes. Malgr� tous les aspects sordides du quotidien (ce n'est pas un hasard si le lieu de l'action principale de la pi�ce est un sordid hotel ), les sc�nes cocasses du D�sir sont impr�gn�es de candeur et me rappellent Charlot r�vant de d�licatesses pendant qu'il m�che sa chaussure dans La Ru�e vers l'or (1925) ou, dans le m�me film, la danse des petits pains.
Comme pour certains, la t�l� en marche c�est un convive suppl�mentaire � table, pour moi d�sormais, gr�ce � cette lecture ph�nom�nale, c�est Picasso qui est l�invit� constant de ma cuisine o� nous go�tons tout pendant la cuisson !
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Dans �LE DESIR ATTRAPE PAR LA QUEUE�, pi�ce de th��tre �crite en 1941, issue d'un v�ritable acte de "r�sistance cr�ative", Picasso opte pour l'�criture automatique et, visiblement, ne semble pas trop se soucier des conventions purement th��trales. Les d�bordements de son imaginaire, qui se laisse aller � ses seules et uniques r�gles, expliquent peut-�tre en grande partie les tr�s rares tentatives de montage de ce texte profond�ment irr�v�rent.
Il faut l'imaginer, Picasso, en ces temps de privations de toutes sortes, vivant dans son atelier froid qu'il n'arrivait pas � chauffer en ce mois de janvier 1941, dans ce Paris sous l'Occupation qu'il n'avait pas voulu d�serter, pour comprendre pleinement pourquoi les personnages du �D�sir� passent leur temps � vouloir se mettre au chaud et � bien bouffer! Faim, froid, qu�te d'amour, o� m�me le Silence et les Angoisses (deux soeurs ins�parables : l'Angoisse Maigre et l'Angoisse Grasse) acc�deront au rang de personnages � part enti�re.
Le d�sir doit �tre attrap� par la queue, rattrap� par tous les moyens possibles dans ces absences inqui�tantes o� il risque de dispara�tre d'une fois pour toutes. Picasso pr�tendait qu'il �crivait � des moments o� il ne pouvait �ni peindre ni dessiner�. L'�criture restera pourtant marqu�e ici par le sceau de son art pictural. Ses personnages, apr�s tout, ne pourraient-ils repr�senter des formes graphiques (le Bout Rond) ou des morceaux de corps (le Gros Pied) ? Picasso se serait-il repr�sent� lui-m�me en Gros Pied, l'artiste? Nous connaissons tous la fr�quence et l'ampleur de cet �l�ment anatomique dans ses tableaux : les grands pieds y sont, en effet, un motif tr�s r�current.
Le �D�sir� comporte encore bien d'autres allusions � la peinture, y compris un � D�jeuner sur l'herbe � litt�ralement mis en bo�te, dans des cercueils o� les personnages seront enferm�s et clou�s! Ce sont encore des tableaux que Picasso aurait pu �voquer lorsque, par exemple, les personnages f�minins coupent les cheveux de Gros Pied endormi (Samson et Dalila) ou quand les Rideaux, vivants, s'agitent par une nuit d'orage au milieu de feux follets et de la pluie qui tombe.
L'on trouve �galement, parmi les personnages, des l�gumes (l'Oignon) et un dessert (la Tarte), ingr�dients par ailleurs d'un bon repas! Il y a dans la pi�ce un caract�re franchement �culinaire �, comme l'avait remarqu� � juste titre Raymond Queneau � la lecture du texte. Les Angoisses, bien qu'ic�nes d'une certaine f�minit� � coloration ouvertement masochiste, sont �galement du �gras� et du �maigre�, personnages-ingr�dients indispensables � la soupe pr�par�e au deuxi�me acte, dans la grande baignoire-casserole o� tous trempent et d'o� elles �mergeront en compagnie de l'Oignon, du Bout Rond et�pourquoi pas, d'un Gros Pied de cochon!!
La femme d�sir�e (la Tarte) est, quant � elle, le dessert qui se d�robe � l'homme, ou qu'il d�vore. L'amour ici devient urgence et d�voration, les r�ves s'av�rent impossibles ou finissent en massacre. Si, au d�but de la pi�ce, il s'agit de bien bouffer dans une belle villa, � la fin tous se retrouvent dans la chambre-�gout des Angoisses. L'id�al qu'ils partageaient se transformera en une s�rie d'accusations r�ciproques et st�riles, alors que, dehors, les bombes et la destruction les guetteront.
Plut�t que raconter une histoire chronologiquement structur�e ,� le D�sir attrap� par la queue � se pr�sente comme une succession de sayn�tes et tableaux. �Farce tragique ou trag�die bouffonne�, selon l'auteur lui-m�me, passant sans transition du sublime au grotesque, la pi�ce est � classer parmi les grands textes du th��tre de l'absurde. Corpusculaire et morcel�e, � l'image m�me du d�sir et de sa nature fonci�rement insaisissable, son texte est construit � partir d'un m�lange original de langages artistiques et sensoriels, � la fois po�tique et pictural, olfactif et gustatif.
La premi�re �pr�sentation� officielle du �D�sir� en fut la lecture qui eut lieu chez les Leiris en 1944, entour�s entre autres de Sartre, Beauvoir, Camus, Lacan..! Depuis, une petite poign�e de montages d'avant-garde auront essay� de restituer sur sc�ne, tant bien que mal (souvent par le biais de lectures-montages ou de lectures-performances) un texte ayant acquis la f�cheuse r�putation de ne pas avoir �t� con�u pour faire l'objet d'une vraie mise-en-sc�ne th��trale. Dommage ! L'�volution de la mise en sc�ne contemporaine, avec le d�veloppement de la notion de � spectacle vivant total�, tendant � briser les barri�res entre les langages artistiques et sc�niques (le cirque-th��tre, le th��tre-danse, l'installation vid�o�) et associant en m�me temps de nouvelles technologies (�clairage, son, hologrammes�), justifieraient pleinement une remise en cause du caract�re � imontable � dont ce texte semble, h�las, encore de nos jours, p�tir injustement.
Jouissif et transgressif, le � D�sir.. � reste, sous son aspect apparemment d�lirant, exp�rimental et foutraque, un pi�ce dot�e d'un langage po�tique et visuel extr�mement puissant, n'ayant pas trouv�, � ce jour, une r�alisation, me semble-t-il, qui lui ai v�ritablement rendu honneur. Potentiellement riche de sens � explorer sur sc�ne, certaines de ses �vocations restent d'une incontestable actualit�. Telle, par exemple, cette derni�re sc�ne, o� tous les personnages ayant �chou� enfin dans la chambre-�gout des Angoisses, et alors que le danger approche, ne peuvent rien faire d'autre que se bander les yeux et s'accuser mutuellement�Mais l'�trange boule qui descend sur eux pour sceller leur sort, portera tout simplement l'inscription : PERSONNE.
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Petite p�pite trouv�e ce matin � la brocante de Villeneuve-l�s-Avignon , cet opuscule de 70 pages pour quelques cinq euros (et oui Denis, moi aussi je trouve de petits tr�sors!)
Un drame, une pochade , une farce, tout � la fois tragique, burlesque, all�gorique , (tr�s) absurde qu'il faut savoir , pouvoir, d�crypter, * en six actes, �crit en tr�s peu de temps, 15-17 janvier 1941�, alors que la France- est occup�e .
On y d�couvre aussi la palette du peintre�: les nuages roses, la glace couleur pomme du ciel, la couleur chocolat qui r�de dans le noir du caf�, le bal blanc, des gencives mauves, �)
Mais pour moi, l'int�r�t de ce livre, c'est de retrouver, d'abord , et encore Camus � qui en fit la mise en sc�ne et qui, lors de la repr�sentation priv�e le 19 mars 1944, rencontra Maria Casar�s.
(Je pr�senterai cet opuscule lors de ma prochaine conf�rence �� Parce que c'�tait Elle, parce que c'�tait Lui��.)
* Au travers des mots, et des jeux de mots, les maux de de la guerre�: les restrictions , la faim le froid�


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Du th��tre surr�aliste? Pas seulement. Ce g�ant de la peinture avait bien saisi bien des subtilit�s de l'inconscient langagier.....
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La faim, le froid, l'amour ... - Picasso a �crit cette petite pi�ce en 1941 pour exorciser dans un style surr�aliste � sa mani�re les d�mons qui pouvaient hanter les jours des Parisiens pendant la 2�me guerre mondiale.
Peut-�tre aussi parce qu'il venait de se voir refuser la nationalit� fran�aise par le gouvernement de Vichy alors qu'il vivait en France depuis pr�s de 40 ans !
Il donnera une premi�re lecture de cette pi�ce en mars 1944 chez Louise et Michel Leiris, interpret�e par les Leiris eux-m�mes, Queneau, Sartre et Beauvoir devant Lacan, Bataille, Barrault, Braque, etc et il la reprendra peu apr�s dans son atelier des Grands Augustins.
etc - voir la fiche ci dessous

Lien : http://fr.wikipedia.org/wiki..
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
L'Angoisse Grasse - La Tarte, pr�sente tes comptes.

La Tarte- J'ai 600 litres de lait dans mes nichons de truie. Du jambon. Du gras double. Du saucisson. Des tripes. Du boudin. Et mes cheveux couverts de chipolatas. J'ai des gencives mauves, du sucre dans les urines et du blanc d'�uf plein les mains nou�es de goutte. Des cavernes osseuses. Du fiel. Des chancres. Des fistules. Des �crouelles. Et des l�vres tordues de miel et de guimauve. Habill�e avec d�cence, propre, je porte avec �l�gance les toilettes ridicules qu'on me donne. Je suis m�re et parfaite fille de joie et je sais danser la rumba.
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Il est beau comme un astre c'est un r�ve repeint en couleurs d'aquarelle sur une perle - ses cheveux ont l'art des arabesques compliqu�es des salles du palais de l'Alhambra et son teint a le son argentin de la cloche qui sonne le tango du soir � mes oreilles pleines d'amour - tout son corps est rempli de la lumi�re de mille ampoules �lectriques allum�es - son pantalon est gonfl� de tous les parfums d'Arabie - ses mains sont de transparentes glaces aux p�ches et aux pistaches - les hu�tres de ses yeux renferment les jardins suspendus bouche ouverte aux paroles de ses regards et la couleur d'a�oli qui l'encercle r�pand une si douce lumi�re sur sa poitrine que le chant des oiseaux qu'on entend s'y colle comme un poulpe au m�t du brigantin qui dans les remous de mon sang navigue � son image
LE GROS PIED � l�Oignon tr�ve de plaisanteries nous voici bien
reveillonnes et � point de dire les quatre verites premi�res � notre
cousine. II faudrait s�expliquer
une fois pour toutes les causes ou les consequences de notre mariage
adulterin
il ne faut pas cacher ses semelles crott�es et ses rides au gentleman
rider
si respectueux soit-il des convenances
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Toi la tarte, de ce pas je vais lui raconter tout, � ta m�re. C'est du joli et du beau ! Toute nue devant un monsieur, un �crivain, un po�te� et toute nue avec des bas, c'est peut-�tre tr�s litt�raire et tr�s cochon, mais �a ne fait pas ni V�nus ni mise ni le genre qui convient � une jeune-fille qui se respecte.
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Le gros pied

[...]
deshabiller tout de suite le silence de son
complet et le mettre nu /
dans la
soupe
qui entre parenth�ses
commence
� refroidir
� une vitesse folle,
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Picasso, interrog� en 1969.
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