A l'origine de Carrefour, un pari fou | Les Echos
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A l'origine de Carrefour, un pari fou

+ VIDEO. Carrefour vient d'annoncer un plan choc pour répondre à ses défis technologiques. Un vrai challenge pour ce géant européen, créé en 1963 par trois Savoyards.

Par Florence Renard-Gourdon

Publié le 27 janv. 2018 à 14:00

« Demain, sois je suis riche, soit je suis ruiné ». Le 14 juin 1963, Marcel Fournier est sur le point de lancer avec les frères Jacques et Denis Defforey, le premier hypermarché à Sainte-Geneviève-des-Bois, dans l'Essonne, ou plutôt le premier « grand magasin libre-service ». Un pari fou pour l'époque.

En fait, l'aventure a commencé quatre ans plus tôt à Annecy. Les trois commerçants savoyards y avaient ouvert le premier supermarché Carrefour. Pourquoi « Carrefour » ? Parce que les trois acolytes avaient installé leur magasin au croisement de cinq rues.

Prix bas, rotation rapide des stocks, libre-service, mélange d'alimentaire et de textile… La formule fait mouche et le succès est immédiat.

Le modèle américain

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Mais Marcel Fournier, Denis et Jacques Defforey voient beaucoup plus grand. Pour se perfectionner, ils vont aux Etats-Unis apprendre les méthodes modernes de distribution. Ils reviennent avec des certitudes : les magasins doivent être situés à la périphérie des villes et être assortis de parkings, les marchandises doivent être empilées, le libre-service doit être la règle et l'ambiance doit être soignée…

Très vite, leur choix se porte sur Sainte-Geneviève des Bois, à 25 kilomètres de Paris. Le magasin est immense (2.300 mètres carrés), le parking contient 450 places et les prix sont inférieurs à la moyenne. Là encore, le succès est au rendez-vous. Le premier hypermarché français a fait son apparition.

Pour les deux familles fondatrices, le pari est gagné.

Le temps de la conquête

Les trois décennies qui suivent sont celles de la conquête des champs de bataille européens et américains. A marche forcée, le groupe s'introduit en Bourse en 1970 et se développe partout en France et à l'étranger (Espagne, Brésil, Argentine, Asie…)

En 1990, c'est la rupture. Pour la première fois un président n'appartenant pas aux familles fondatrices prend la tête du groupe. Michel Bon est choisi par les actionnaires familiaux pour remplacer Denis Defforey, atteint par la limite d'âge. L'aventure tourne court. En 1992, Michel Bon est démissionné, les objectifs de résultats n'étant pas atteints.

La « fusion du siècle »

Daniel Bernard reprend les rênes de Carrefour. Il y mène une vraie révolution managériale, multiplie les implantations à l'étranger et, surtout, supervise en 1999 la « fusion du siècle » avec Promodès.

Présenté comme un remède aux éventuelles attaques du numéro un mondial de la distribution, l'américain Wal-Mart, ce mariage mettra pourtant un temps fou à répondre aux attentes. Il est en effet mis en oeuvre à un moment délicat, celui de l'apparition des « hard discounters » et des chaînes de magasins spécialisées très performantes, qui remettent en cause le modèle initial de la grande distribution.

En 2005, Daniel Bernard démissionne. Carrefour change de gouvernance et choisit l'Espagnol José Luis Duran pour prendre la tête du groupe.

Le cours de l'action poursuit néanmoins sa chute, Carrefour multipliant les « profit warnings ». En 2008, José Luis Duran est débarqué à son tour et remplacé par un Suédois, Lars Olofsson, qui trois ans plus tard, subira le même sort.

La fin d'un modèle ?

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Georges Plassat, son successeur, parviendra à renouer avec la croissance des ventes, et restera aux commandes du groupe jusqu'en juin 2017. Mais la Bourse boude toujours la valeur.

Comme tous les distributeurs traditionnels, Carrefour est bousculé par le numérique et la mutation de la consommation. Il est contraint de garder des prix bas et de multiplier les services, tout en continuant à verser des dividendes aux actionnaires (à plus de 64 %, le capital de Carrefour est détenu par des investisseurs minoritaires).

Un vrai casse-tête pour le nouveau patron, Alexandre Bompard, qui vient d'annoncer un « plan de transformation » sur cinq ans pour réduire les coûts et les foyers de perte. Ce plan est assorti de mesures drastiques, comme la suppression de 2.400 postes, la cession de magasins et de lourds investissements dans l'e-commerce.

EN VIDEO. 2.400 emplois supprimés : le plan choc de Carrefour

Carrefour en chiffres

Aujourd'hui Carrefour est présent dans plus de 30 pays avec plus de 12.000 magasins et des sites d'e-commerce. En France, il disposait fin 2016 de 5.670 magasins et en Europe (hors France) de 4.541 magasins. En Chine, où il est présent depuis 1995, Carrefour comptait 254 magasins fin 2016 et 952 magasins en Amérique latine.Il emploie plus de 380.000 collaborateurs dans le monde, dont 57 % en Europe, 26 % en Amérique latine et 17 % en AsieIl a affiché en 2017 un chiffre d'affaires de 88,24 milliards d'euros, dont la moitié réalisée en France. Son résultat opérationnel est attendu à environ 2 milliards d'euros, en baisse d'environ 15 %.

Florence Renard

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