Frank Sinatra, au-delà du crooner à la voix de velours

Frank Sinatra, au-delà du crooner à la voix de velours

Frank Sinatra dans le "Frank Sinatra Show", 1950.
Frank Sinatra dans le "Frank Sinatra Show", 1950.
Frank Sinatra, the Voice of America - Culture Prime
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Frank Sinatra, au-delà du crooner à la voix de velours

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Pendant plus de 50 ans, sa voix de velours et son regard d’ange ont fait danser l’Amérique. Surnommé “the Voice”, Frank Sinatra est considéré comme l’un des plus grands crooners de son époque. Sa voix était pourtant bien plus qu'uniquement celle d’un chanteur de charme.

En 1940, un jeune chanteur originaire de Hoboken fait son entrée dans les grands orchestres des États-Unis. D’abord aux côtés de Harry James, le jeune Frank Sinatra rejoint l’orchestre de Tommy Dorsey, le “roi du swing”, auprès duquel il développe certaines techniques. « Frank Sinatra était un vrai musicien. C'est quelqu'un qui s'inspirait beaucoup des musiciens qui l'entouraient. Par exemple, quand il travaillait dans le big band de Tommy Dorsey, qui était un tromboniste, il s'est beaucoup inspiré de son phrasé, de sa manière de respirer”, explique Arnaud Merlin, journaliste et producteur à France Musique.

Frank Sinatra (à droite) dans l'orchestre du tromboniste Tommy Dorsey (à gauche), 1941.
Frank Sinatra (à droite) dans l'orchestre du tromboniste Tommy Dorsey (à gauche), 1941.
© Getty

Très vite, Frank Sinatra se fait remarquer et lance sa carrière solo. C’est un triomphe, tant sur la scène que sur le grand écran. À ses débuts, le crooner marche dans les pas de son modèle : Bing Crosby. « Il est vraiment fou amoureux de la voix de Bing Crosby. Il essaie de l'imiter et ça se voit. Et ensuite, il va évoluer et aller vers quelque chose de beaucoup plus personnel », analyse Arnaud Merlin.

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Frank Sinatra (à gauche) et Bing Crosby (à droite), 1956.
Frank Sinatra (à gauche) et Bing Crosby (à droite), 1956.
© Getty

Une voix qui swingue

Car Frank Sinatra n’était pas qu’un crooner. « C’est un peu limitatif, il était beaucoup que cela. La voix de Sinatra, c’est une voix qui parle, c’est une voix qui touche et c’est une voix qui swingue », résume le producteur. L’un des points forts du chanteur est le timing, sa capacité à faire des pauses au bon moment et à incarner chaque mot et chaque mélodie. « Il a en lui la volonté de rendre les paroles intelligibles. Il a également en lui des choses à la fois de velours et des choses plus âpres, il a toute la palette de l'émotion. »

Frank Sinatra durant une session d'enregistrement au début des années 1950.
Frank Sinatra durant une session d'enregistrement au début des années 1950.
© Getty

Dans l’une de ses interprétations de When you’re smiling en 1951, on entend déjà quelque chose de très important chez lui : la manière dont il traite le phrasé : « C'est quelqu'un qui va enjamber les barres de mesure et qui va vraiment s'approprier la mélodie afin de faire sentir dans les mots du texte ce qu'il veut dire très précisément. On l'entend tenir une note, et puis il va enchaîner tout de suite sur la modulation au demi-ton supérieur. »

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Vers une voix plus rauque

Mais au début des années 50, la carrière de Frank Sinatra ralentit et il doit attendre 1953 pour que celle-ci reparte. Le crooner revient sur la scène avec une voix plus profonde, marquée par les évolutions de sa vie. « Quand il signe chez Capitol, ça va être le début de sa très grande période. Il a un répertoire qui s'élargit. Par exemple dans That Old Black Magic que l'on entend quand il donne un concert en Europe, en 1953, on perçoit une espèce de raucité dans la voix et des effets vocaux qu'on ne lui connaissait pas avant. »

Frank Sinatra et Antônio Carlos Jobim, 1967.
Frank Sinatra et Antônio Carlos Jobim, 1967.
© Getty

Les succès et les collaborations musicales s’enchaînent. Comme de nombreux chanteurs de variété internationale, Sinatra aborde plusieurs registres. « Il va toucher à la pop. Il va enregistrer plusieurs disques dans la veine brésilienne, comme avec Antônio Carlos Jobim et avec d’autres chanteurs brésiliens. Mais son cœur, son cœur de cible, si l'on peut dire, reste quand même ce qui tourne autour de la chanson et du jazz. »

Frank Sinatra était d’ailleurs reconnu dans le jazz : « Miles Davis disait par exemple que le phrasé de Frank Sinatra l'avait énormément influencé ». Il improvisait son phrasé et jouait avec les musiciens en rebondissant avec eux sur des sons qu'il entendait. « Il a vraiment l'art de rebondir systématiquement sur le temps après le temps, légèrement avant le temps. Donc c'est une voix qui swingue. »

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