« Ce n’est pas l’âge de la retraite qu’il faut changer », dit Strauss-Kahn à Macron - Le Parisien

« Ce n’est pas l’âge de la retraite qu’il faut changer », dit Strauss-Kahn à Macron

Dans un texte publié sur Internet, Dominique Strauss-Kahn s’adresse au président de la République, Emmanuel Macron, et l’invite à renouer le dialogue avec les corps intermédiaires et à renoncer à la réforme des retraites dans sa version actuelle.

Dominque Strauss-Khan. Olivier Corsan / Le Parisien.
Dominque Strauss-Khan. Olivier Corsan / Le Parisien.

    « La France est dans un triste état ». Le constat de Dominique Strauss-Kahn est sans appel et lapidaire. C’est le début d’un texte que l’ancien président du FMI a partagé sur le réseau social Twitter ce mardi après-midi. Intitulé « la Cinquième erreur », ce message adressé au président de la République, Emmanuel Macron, l’invite à ne pas commettre cette fameuse « erreur » selon l’ancien ministre de l’Économie et des Finances du gouvernement Jospin, qui serait de ne pas renouer le dialogue avec les corps intermédiaires et de ne pas renoncer à sa réforme des retraites dans sa version actuelle.

    La première erreur du Président en exercice aurait été, selon DSK, le choix du moment particulièrement mal choisi à l’heure de la crise économique et d’une inflation vivement ressenti par les Français. « Si comme nous l’apprend un sondage récent, près de la moitié des Français les plus modestes ont été amenés à supprimer un repas par jour, alors c’est là qu’est l’urgence », souligne celui qui aujourd’hui a quitté le devant de la scène politique.



    La deuxième erreur macronienne serait la méthode. « Aujourd’hui, ce n’est pas l’âge de la retraite qu’il faut changer, c’est la conception même du système. C’est cette réforme systémique qu’en 2017 un candidat à la présidence de la République disait, à juste raison, vouloir entreprendre. Mais il a ensuite abandonné subrepticement cette voie », explique l’économiste de formation. « Pourtant, nous devons sortir d’un système qui repose sur l’âge de départ à la retraite pour construire un système fondé sur la durée de cotisation. L’âge couperet disparaîtrait alors. La durée de cotisation s’ajusterait lentement et régulièrement avec l’évolution des besoins de financement », analyse encore DSK.

    « Le péril est grand de voir le pays s’embraser à nouveau »

    Il reproche ensuite au président « une troisième erreur, stratégique cette fois. La France n’est pas un pays dans lequel on peut mener une réforme sociale d’envergure en se référant uniquement à un rapport de force politique et en négligeant le rapport de force social ». L’ancien candidat déchu à la présidentielle de 2012 invoque ensuite la figure de François Mitterrand. « Cette stratégie purement politique était vouée à l’échec. Non pas qu’il eût été impossible d’attirer quelques députés LR de plus pour faire voter le projet à l’Assemblée, mais parce qu’on ne peut gouverner un pays en lui imposant une réforme que les trois quarts des citoyens rejettent. François Mitterrand l’avait bien compris quand, le 14 juillet 1984, bien que disposant d’une majorité à l’Assemblée, il annonçait le retrait du projet de loi visant à intégrer les écoles privées dans un Grand service public de l’Éducation Nationale fusse-t-il au prix de la démission, le 17, de Pierre Mauroy et d’Alain Savary », souligne DSK, invitant en creux le président actuel à suivre l’exemple de l’homme qui gouverna la France pendant 14 ans entre 1981 et 1995.

    La quatrième erreur de Macron pour Dominique Strauss-Kahn est le recours au « passage en force du 49.3 », qui annonce un avenir sombre à l’Hexagone. « Sauf si le Conseil constitutionnel en décide autrement, la loi risque, à sa publication, de relancer le cycle de violences. On peut l’éviter en repoussant cette publication jusqu’à ce qu’un point d’équilibre ait été trouvé avec les forces sociales. Faute de quoi, demain sur le sujet des retraites, après-demain sur un autre, avec comme perspective historique un avenir politique de plus en plus brun », assure ce fervent opposant au Front national en son temps.

    « Les violences de ces dernières semaines défigurent notre République », commente le désormais conseiller politique. « C’est au président de la République qu’il appartient maintenant de prendre les initiatives permettant de renouer les fils d’un dialogue social trop brutalement interrompu. À défaut, une cinquième erreur viendrait s’ajouter aux précédentes », conclut-il dans son texte.