Pastiche

Nom commun - fran�ais

pastiche \pas.ti?\ masculin

1. Imitation de la mani�re d'un artiste ou d'un �crivain, soit par jeu, soit � dessein de sugg�rer la critique des proc�d�s que l'on contrefait.
   • La Bruy�re, au chapitre de la Soci�t� et de la Conversation, a fait un agr�able pastiche de Montaigne.
2. Imitation du costume, du ton et du style d'une �poque.
   • Un charmant pastiche du XVIII^e si�cle.

• 1Nom donn� � des tableaux d'imitation, dans lesquels l'auteur a contrefait la mani�re de quelque peintre, ses touches, son dessin, son coloris, etc. On appelle commun�ment pastiches les tableaux que fait un peintre imposteur en imitant la main, la mani�re de composer et le coloris d'un autre peintre, sous le nom duquel il veut produire son ouvrage, Dubos, R�flexions sur la po�sie et la peinture, II, 7. Vous �tes comme ces connaisseurs nouvellement venus d'Italie, tout remplis de leur Rapha�l, de leur Carache, de leur Paul V�ron�se, et qui d�m�lent tout d'un coup les pastiches de Boulogne, Voltaire, Lett. le Franc, 30 oct. 1738. Je suis bien f�ch� contre ce mot de pastiche qui marque du m�pris et qui peut d�courager les artistes de l'imitation des meilleurs ma�tres anciens, Diderot, Salon de 1767, ?uv. t. XIV, p. 329, dans POUGENS.
• 2Imitation m�lang�e de la mani�re et du style de diff�rents ma�tres. C'est un pastiche des anciens ma�tres.
• 3 Terme de litt�rature. Ouvrage o� l'on a imit� les id�es et le style d'un grand �crivain. Un talent rare et fort au-dessus du m�rite de cette singerie, qu'on appelle pastiche, c'est de savoir r�ellement s'assimiler � un grand �crivain, Marmontel, ?uv. t. IX, p. 190. Cette pi�ce [du P. Por�e] ressemble � toutes celles du m�me auteur, qui ne sont que des esp�ces de pastiches, des copies maladroites de nos plus belles trag�dies fran�aises, La Harpe, Cours de litt�r. t. XI, p. 116, dans POUGENS.
• 4Nom donn� � un op�ra form� de la r�union de morceaux de musique pris dans diff�rents ouvrages et ajust�s tant bien que mal � un nouveau po�me. La For�t de S�nart de Castil-Blaze est un tr�s agr�able pastiche. On faisait autrefois de ces pastiches en Italie, lorsque l'op�ra pr�par� pour la saison dans une ville ne r�ussissait pas?; presque toujours ils �taient bien accueillis, parce que chaque chanteur y faisait introduire les morceaux qui �taient les plus favorables � son talent, F�tis, Dict. art. pastiche.

PASTICHE, s. m. (Pein.) tableau peint dans la maniere d'un grand artiste, & qu'on expose sous son nom. Les pastiches, en italien pastici, sont certains tableaux qu'on ne peut appeller ni originaux, ni copies, mais qui sont faits dans le go�t, dans la maniere d'un autre peintre, avec un tel art que les plus habiles y sont quelquefois tromp�s. Mais d'abord il est certain que les faussaires en Peinture contrefont plus ais�ment les ouvrages qui ne demandent pas beaucoup d'invention, qu'ils ne peuvent contrefaire les ouvrages o� toute l'imagination de l'artiste a eu lieu de se d�ployer. Les faiseurs de pastiches ne sauroient contrefaire l'ordonnance, ni le coloris, ni l'expression des grands ma�tres. On imite la main d'un autre, mais on n'imite pas de m�me, pour parler ainsi, son esprit, & l'on n'apprend point � penser comme un autre, ainsi qu'on peut apprendre � prononcer comme lui.

Le peintre m�diocre qui voudroit contrefaire une grande composition du Dominiquain ou de Rubens, ne sauroit nous en imposer plus que celui qui voudroit faire un pastiche sous le nom de Georg�on ou du Titien. Il faudroit avoir un g�nie presque �gal � celui du peintre qu'on veut contrefaire, pour r�ussir � faire prendre notre ouvrage pour �tre de ce peintre. On ne sauroit donc contrefaire le g�nie des grands hommes, mais on r�ussit quelquefois � contrefaire leur main, c'est-�-dire leur maniere de coucher la couleur, & de tirer les traits, les airs de t�te qu'ils r�p�toient, & ce qui pouvoit �tre de vicieux dans leur pratique. Il est plus facile d'imiter les d�fauts des hommes que leurs perfections. Par exemple, on reproche au Guide d'avoir fait ses t�tes trop plates�: elles manquent souvent de rondeur, parce que leurs parties ne se d�tachent point & ne s'�levent pas assez l'une de l'autre. Il suffit donc, pour lui ressembler en cela, de se n�gliger & de ne point se donner la peine de pratiquer ce que l'art enseigne � faire pour donner de la rondeur � ses t�tes.

Jordane le Napolitain, que ses compatriotes appelloient ilfapresto ou d�p�che-besogne, �toit, apr�s Teniers, un des grands faiseurs de pastiches, qui jamais ait tendu des pieges aux curieux. Fier d'avoir contrefait avec succ�s quelques t�tes du Guide, il entreprit de faire de grandes compositions dans le go�t de cet aimable artiste, & dans le go�t des autres �leves de Carache. Tous ses tableaux qui repr�sentent diff�rens �v�nemens de l'histoire de Pers�e sont peut-�tre encore � G�nes. Le marquis Grillo, pour lequel il travailla, le paya mieux que les grands ma�tres dont il se faisoit le singe, n'avoient �t� pay�s dans leur tems. On est surpris en voyant ces tableaux, mais c'est qu'un peintre qui ne manquoit pas de talens ait si mal employ� ses veilles, & qu'un seigneur g�nois ait fait un si mauvais usage de son argent.

Il est bien plus ais� d'imiter les portraits & les paysages que l'ordonnance, parce qu'il ne s'agit que de contrefaire la main. La copie qu'Andr� del Sarto fit du portrait de L�on X. peint par Rapha�l, trompa Jules-Romain lui-m�me, quoique ce peintre en e�t fait les habits.

Le Loir (Nicolas) copioit si bien � force d'�tude les paysages du Poussin, qu'il est difficile de distinguer la copie d'avec l'original.

On rapporte que Bon Boullogne saisissoit � merveille la maniere du Guide. Il fit un excellent tableau dans le go�t de ce ma�tre, que monsieur, frere de Louis XIV, acheta sur la d�cision de Mignard pour un ouvrage du peintre italien�; cependant le v�ritable auteur ayant �t� d�couvert, Mignard d�concert� dit plaisamment pour s'excuser, ��qu'il fasse toujours des Guides, & non pas des Boullognes��.

Pour d�couvrir l'artifice des pastiches, on n'a guere de meilleur moyen que de les comparer attentivement avec l'expression & l'ordonnance du peintre original, examiner le go�t du dessein, celui du coloris & le caractere du pinceau. Il est rare qu'un artiste qui sort de son genre ne laisse �chapper quelques traits qui le d�celent. (D. J.)