Proust et Dostoïevski : épisode • 2/4 du podcast Julia Kristeva, l'œuvre qui bouscule la littérature

Proust et Dostoïevski : épisode • 2/4 du podcast Julia Kristeva, l'œuvre qui bouscule la littérature

Photographie de Julia Kristeva. - John Foley
Photographie de Julia Kristeva. - John Foley
Photographie de Julia Kristeva. - John Foley
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Tout semble opposer Dostoïevski et Proust . Le premier guette le pulsionnel, la destructivité ; le deuxième a le goût des petites choses qui permettent de remonter le temps, d’accéder à l’intime. Julie Kristeva s'est penchée sur ces deux œuvres. Quelle est son analyse ?

Avec
  • Julia Kristeva Écrivaine, psychanalyste, professeure émérite à l’Université de Paris et membre titulaire et formateur de la Société Psychanalytique de Paris
  • Nicolas Aude Maître de conférences en littérature comparée à Sorbonne-Université
  • Antoine Compagnon Membre de l’Académie française, Professeur honoraire au Collège de France, Professeur à l’Université de Columbia à New York

"Avec Philosophie" propose une série d'émissions consacrée à Julia Kristeva. Dans ce deuxième épisode, Géraldine Muhlmann et ses invités s'intéressent à sa lecture de Dostoïevski et Proust.

La production d’un surplus de vivacité par l’écriture

“Le langage et cette invention de l'être humain qui lui permet de dire et la douleur et le plaisir”, indique Julia Kristeva. “Cette capacité du langage de produire un surplus de vivacité, c'est ce que cherche l'écriture”. Comment font les écrivains pour nous transmettre des émotions à partir du simple langage ? Proust produit ce surplus de vivacité grâce à la “transsubstantiation”, alors que Dostoïevski le fait “avec beaucoup plus d'insistance sur la douleur, le mal et la condamnation”.

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Proust, une “oeuvre monstrueuse” inachevée

Pour Antoine Compagnon, “l'œuvre de Proust est monstrueuse”. Surtout*, “'elle est inachevée : il y a un bon tiers qui est posthume*”. “C’est une œuvre qui a des tas de bavures, des tas de fils qui pendent, loose threads, des fils qui ne sont pas noués, qui auraient pu donner lieu à des développements: c'est une œuvre impure”. Or, “toutes les grandes œuvres sont impures, toutes les grandes œuvres ont quelque chose d'un peu monstrueux : elles ne sont pas parfaites, elles ne sont pas closes comme des œufs. On trouve toujours des raisons de les relire qui sont différentes de celles que pouvaient avoir les générations précédentes. C'est lié, en effet, à leur dimension d'imperfection”. Sur quel point se distingue son analyse de celle de Kristeva ?

Dostoïevski : “un écrivain de l’anti-mémoire”

La souffrance est au cœur de l'œuvre de Dostoïevski. Nicolas Aude indique : “les personnages de Dostoïevski qui sont des épileptiques sont en permanence excentrés du flux temporel et essaient de se souvenir. Parce que la crise, c'est une abolition du sujet et de sa mémoire. En quelque sorte, Dostoïevski, c'est un écrivain de l'anti-mémoire". Il est “un écrivain qui essaie en permanence, à travers ses personnages, de recréer un monde et un flux temporel autour de lui. Ce que découvre Kristeva, c’est cette jouissance” dans cette œuvre. De plus, il y a dans son œuvre "cette oralité qui énerve son écriture".

Pour en parler

Julia Kristeva, écrivain, psychanalyste, professeure émérite à l’université de Paris.

Antoine Compagnon, membre de l’Académie française, Professeur honoraire au Collège de France, Professeur à l’Université de Columbia à New York. Parmi ses publications, on trouve :

Nicolas Aude, maître de conférences en littérature comparée à Sorbonne-Université. Slaviste, spécialiste du domaine slave. Il a notamment publié :

Références sonores

  • ARC - André Marcowicz sur Dostoïevski, France Culture - 1996 - Emission Grand angle : “Les traducteurs en filigrane”, production de Françoise Estebe.
  • Lecture par Riyad Cairat d'un extrait de Julia Kristeva, Kristeva - Dostoïevski. Face à la mort, ou le sexe hanté du langage (2021), Livre I : La crue du verbe, Chapitre 1 : Le condamné à mort, le mal sacré et le soleil) - Section : 1.2.Le chant ultra-profond des êtres.
  • PROUST, La Prisonnière - 1923, lu par André Dussollier paru aux Editions Thélème.
  • Beethoven - Quatuor à cordes n°14 en ut dièse min op 131 : Allegro, interprété par le QUATUOR HONGROIS.
  • Lecture par Axel Dubois et Riyad Cairat d'un extrait d'Antoine Compagnon, La Vie derrière soi, 2021.

Le Pourquoi du comment, la chronique de Frédéric Worms

Retrouvez sa chronique ci-dessous.

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