Dany Saval raconte Michel Drucker, son mari : «Il a une grande qualité: il ignore la colère»
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Dany Saval raconte Michel Drucker, son mari : «Il a une grande qualité: il ignore la colère»

Ils ne comptent pas les années mais les printemps, 49 depuis leur mariage. Ici dans leur propriété d’Eygalières, en 2018.
Ils ne comptent pas les années mais les printemps, 49 depuis leur mariage. Ici dans leur propriété d’Eygalières, en 2018. © Vincent Capman / Paris Match
Interview Irène Frain , Mis à jour le

De sa femme Dany, comédienne de renom dans les années 1960, Michel dit : «Elle connaissait ce métier et ses dangers bien avant moi.» Après bientôt 50 ans de mariage, leur amour est plus fort que jamais. Interview.

Paris Match. Quelles sont les qualités requises pour être la femme de l’anxieux Michel Drucker? Ça relève de l’exploit.
Dany Saval.
Je ne l’ai pas vécu ainsi. Ça m’a toujours paru évident.

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À 80 ans, il ne dételle toujours pas. Vous avez le même âge, vous pourriez avoir envie de souffler…
Michel a en effet une vie professionnelle intense mais je suis moi-même très occupée. J’ai ma vie! À commencer par Li-za, mon association de protection des animaux. Et je suis très famille: Stéfanie, ma fille, habite l’immeuble voisin du nôtre; ma petite-fille, Rebecca, n’est pas loin non plus, et mon frère Philippe Alain travaille dans la société que nous avons fondée Michel et moi. Ça aussi, ça occupe!

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Vous étiez une actrice extrêmement connue, ça a dû être difficile de vivre dans l’ombre de Michel.
Non. Par tempérament, j’aime la discrétion.

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Après quelques années de mariage avec lui, vous vous êtes éclipsée des plateaux. Vous ne le regrettez pas?
Pas un instant. Ma vie, très tôt, a été riche en événements et en expériences de toute nature. J’ai commencé à travailler à 8 ans!

Si tôt?
Je suis une enfant de la balle. Je voulais être danseuse étoile, mes parents m’avaient inscrite à l’École du spectacle. En plus de mes heures de scolarité “normale”, je dansais le soir au théâtre Mogador dans une opérette. J’étais en classe de 13 à 17 heures. Quand la cloche sonnait, j’avais peu de répit, je devais être au théâtre à 19 heures pour le maquillage et l’habillage. Je rentrais vers 23 heures. Je vivais au milieu d’apprentis acrobates, trapézistes, danseurs et j’avais comme copains des gamins qui sont devenus très connus comme Higelin et Jean-Jacques Debout.

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Avec Dany Saval et Stéfanie, la fille qu’elle a eue avec Maurice Jarre mais que Michel a élevée. À Paris, en 1977.
Avec Dany Saval et Stéfanie, la fille qu’elle a eue avec Maurice Jarre mais que Michel a élevée. À Paris, en 1977. © RINDOFF-PATERSON / BESTIMAGE

C’est une vie dure pour un enfant de cet âge!
La danse me passionnait. Mais j’étais aussi très consciente que mon travail aidait mes parents à joindre les deux bouts. C’était l’après-guerre, nous étions cinq enfants et mon père vivait de petits boulots. Je n’ai pas pu entrer à l’Opéra comme j’en rêvais mais, dès l’adolescence, j’ai eu beaucoup d’engagements. À 13-14 ans, j’ai parcouru la France en tournée. J’ai même dansé un moment au Moulin Rouge, puis ma troupe de ballet est partie aux États-Unis et, comme j’étais mineure, je n’ai pas pu la suivre. J’ai alors tenté ma chance comme figurante de cinéma. Ça a marché, on m’a donné des seconds rôles, notamment dans “Les tricheurs”, aux côtés de Belmondo. À partir de là, j’ai énormément tourné. Après ma rencontre avec mon deuxième mari, Maurice Jarre, le père de Jean-Michel, j’ai eu des contrats aux États-Unis. J’ai appris l’anglais, ma fille Stéfanie est née à Los Angeles, mais je n’aimais pas cet univers, je préférais vivre avec mon enfant et, après mon divorce en 1966, j’ai coupé avec le métier. Je tournais seulement quelques semaines quand je revenais en France. C’est ainsi que j’ai rencontré Michel, dans un studio de banlieue lors du tournage d’un film à sketchs où il jouait comme moi quelques séquences. Dès qu’il m’a vue, il ne m’a plus quittée des yeux. Il y avait là Jean Lefebvre, à qui j’ai demandé: “Qui est-ce ?” Il a été stupéfait de mon ignorance : “Mais c’est le fameux Michel Drucker!” Et il m’a expliqué. Le soir même, Michel a tenu à me raccompagner en voiture. Il y avait d’énormes embouteillages, on a donc beaucoup parlé. Et vers 22 heures, il m’a rappelée: “Je pense beaucoup à vous.” J’avais un compagnon, j’ai répondu: “On verra ça demain.” Le lendemain, le travail au studio a été perturbé par des grèves de techniciens et, à un moment, on s’est retrouvés seuls derrière un décor et dans le noir total. Il m’a alors lâché: “Vous êtes la femme de ma vie.” Je lui ai répliqué: “On ne se connaît pas, comment vous pouvez le savoir?” Ça ne l’a pas démonté: “Moi, j’en suis sûr.” À partir de là, on s’est vus deux ou trois fois par semaine, on parlait. Un flirt très sage, jusqu’au moment où Michel m’a demandé de l’accompagner à Nantes où il devait commenter un match de foot. Et on ne s’est plus quittés.

Qu’est-ce qui vous a fait craquer?
Les mêmes raisons que le public: sa gentillesse, son dévouement. Et on se sentait bien ensemble. Il a aussi une grande qualité: il ignore la colère

Est-ce au moment de votre mariage que vous vous êtes réparti les rôles, vous dans les coulisses et Michel sous les feux de la rampe?
Ça n’a pas été pensé. J’ai tout de suite vu que Michel ne savait rien gérer, ni l’argent ni les tâches pratiques les plus élémentaires. Une seule chose était à sa portée : faire sa valise ! Le reste lui échappait entièrement et c’est toujours comme ça. Il y a encore vingt ans, il ne savait même pas où se trouvait notre frigo ! J’ai tout pris en charge.

En août 1983, entre sa femme et sa belle-fille. Dany et lui se sont mariés dix ans plus tôt.
En août 1983, entre sa femme et sa belle-fille. Dany et lui se sont mariés dix ans plus tôt. © Jean-Claude DEUTSCH/PARISMATCH

Décision courageuse!
Je ne crois pas. J’ai simplement saisi que tout ce que Michel ne savait pas faire, c’était mon truc. J’étais habituée de longue date à être autonome. Et j’étais plus mûre que lui, plus clairvoyante. J’avais dû élever ma fille seule aux États-Unis et, dans mon métier, je m’étais aussi construite par mes propres moyens. On était parfaitement complémentaires, lui et moi. Je pouvais lui donner l’environnement qui lui permettait de faire son métier en toute liberté.

J’ai tout de suite vu que Michel ne savait pas gérer les tâches les plus élémentaires. Tout ce qu’il sait faire, c’est sa valise

 

Au point de le laisser ignorer où est le frigo ?
Vous avez joué les mamans! Là encore, je ne crois pas. J’avais compris que Michel avait besoin de vivre dans un univers hyper organisé qui puisse le rassurer. Il avait eu une enfance très anxiogène. Son père ne comprenait pas la raison de ses échecs scolaires, dus sans doute à un déficit d’attention. Il lui avait mis une pression énorme pour qu’il réussisse à l’école, en pure perte. Du coup, il fallait que Michel se prouve constamment qu’il valait quelque chose et, comme il n’avait pas fait d’études approfondies comme ses frères, il avait quantité de connaissances à rattraper, ce qui l’angoissait beaucoup et le rendait très distrait. J’ai voulu lui offrir un univers de sérénité qui lui permette de se concentrer. Je l’ai allégé du quotidien. De sa vie, il n’a jamais eu de secrétaire particulier, d’assistant personnel ni même d’attaché de presse. Cela dit, il a deux atouts majeurs: il a une mémoire exceptionnelle et il est toujours à l’heure.

Vous l’avez aussi pris en main pour sa carrière?
Ah non! Sur ce plan-là, il a toujours su ce qu’il avait à faire. Je me souviens seulement qu’au tout début je lui ai dit: “Tu ne peux pas te borner à être reporter sportif. Il faudrait que tu aies un jour une émission à toi et que tu la présentes.”

Avec son « femmes club », en 2008, sur la patinoire
du Plaza Athénée (de g. à dr.): Rebecca, sa petite-fille, Marie,
sa nièce, Dany, sa femme, Léa, son autre nièce,
Stéfanie, sa belle-fille, et Yleng, sa fille de cœur.
Avec son « femmes club », en 2008, sur la patinoire du Plaza Athénée (de g. à dr.): Rebecca, sa petite-fille, Marie, sa nièce, Dany, sa femme, Léa, son autre nièce, Stéfanie, sa belle-fille, et Yleng, sa fille de cœur. © Virginie CLAVIERES / Paris Match

Michel n’en a pas fait mystère, il a traversé de grands moments de doute. En plus du reste, vous avez dû jouer les confidentes.
Pas vraiment car il n’a connu qu’un grand moment difficile, à 40 ans, quand un patron de chaîne lui a signifié qu’il était trop vieux pour faire son métier. Là, oui, on a beaucoup parlé mais, comme toujours, il a trouvé les solutions tout seul et il avait un atout considérable: son succès ne s’était jamais démenti.

Beaucoup de femmes n’ont pas manqué de tourner autour de Michel…
Disons qu’il y a eu des périodes plus dures que d’autres.

Vous avez été jalouse?
Plus inquiète que jalouse.

À 40 ans, un patron de chaîne lui a signifié qu’il était trop vieux...

 

Comment vit-on ces crises-là? On songe à partir?
Je n’ai jamais été inquiète outre mesure.

Il y a vingt ans, Michel a été bouleversé par la mort subite de son frère Jean. Comment l’avez-vous aidé?
Qu’est-ce qu’on peut faire dans des moments pareils, à part être là?

Lorsque Michel, à l’automne 2020, a eu un gravissime accident de santé, c’est encore ce principe que vous avez appliqué?
Non, pour la bonne raison que c’était impossible. À cause du Covid-19, les familles des patients n’avaient pas le droit de pénétrer dans les hôpitaux. Donc je ne l’ai pas vu pendant six mois. C’était son frère, Jacques Drucker, médecin lui-même, qui parlait aux médecins. Michel lui a demandé de me transmettre des informations rassurantes, donc je ne me suis pas du tout inquiétée. C’est seulement quand Michel est rentré à la maison que j’ai su ce qui s’était passé: il s’est écroulé en sanglotant dans mes bras puis il m’a tout raconté. Je suis tombée des nues. J’avais aveuglément cru ce qu’on m’avait dit.

Michel avait voulu vous protéger?
Sans doute.

Vous définiriez-vous comme son pilier?
Non. On est deux, mais l’un ne va pas sans l’autre.

C’est ce qui explique que votre mariage ait été à toute épreuve?
Peut-être. Il y a cinquante ans, Michel avait eu une formidable intuition quand il m’avait chuchoté dans le noir que j’étais la femme de sa vie alors que la veille encore on ne se connaissait pas. Ce n’était pas un comportement ado comme je l’avais cru sur le moment. Il avait su bien avant moi qu’on était faits l’un pour l’autre.

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