James Brown, le parrain de la soul - Rolling Stone

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James Brown, le parrain de la soul

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James Brown performs in New York
© Walter Iooss Jr./Getty Images

Il y a 90 ans jour pour jour naissait James Brown, figure emblématique de la musique qui a traversé le 20e siècle. Hommage en chansons.

3 mai 1933 : naissance de James Brown

Tout le monde connaît un air de James Brown. Une mélodie que l’on se surprend à fredonner, lorsque le moral est au plus haut. Un air qui donne envie de danser, de taper du pied ou de hocher la tête. James Brown est un mythe, un monument du funk, de la soul… de la musique en général. Le chanteur, parolier et producteur est né il y a 88 ans. Pour l’occasion, Rolling Stone lui rend hommage.

Avec des titres comme « I Feel Good (I Got You) », « Cold Sweat » ou encore « Get Up (I Feel Like Being a) Sex Machine », James Brown a évolué au travers de différents styles musicaux ; du funk à la soul en passant par le RnB et la pop. Une versatilité qui lui a permis d’influencer un grand nombre d’artistes, mais aussi de se diversifier au sein d’une musique toujours pertinente, en phase avec l’actualité.

Père de la musique funk, parrain de la soul… Les surnoms sont nombreux pour qualifier James Brown. Né dans une famille très pauvre de Géorgie, James a vite appris les règles de la rue. Avec sa musique, il s’est sorti de la « petite criminalité » pour côtoyer des géants comme Little Richard. Considéré par le Rolling Stone américain comme « le septième plus grand artiste de tous les temps », James Brown a vu seize de ses singles atteindre le premier rang au classement RnB du célèbre magazine Billboard. Multi-récompensé tout au long de sa carrière, l’artiste s’en est allée le jour de Noël en 2006, à l’âge de 73 ans.

« Please, Please, Please » (1956)

Considéré comme la chanson signature de James Brown et de ses Famous Flames, le titre est le premier single sorti par le groupe. Il atteint directement le top 10 des charts RnB à cette époque.

« Lost Someone » (1962)

Enregistrée lors d’un live à l’Apollo, cette chanson est devenue l’un des hymnes les plus enfiévrés de James Brown. Ce live marque aussi le coup d’envoi des enregistrements en concert pour James et son groupe. Il permet de constater la maîtrise de l’artiste et de son groupe, qui vire à la perfection.

« Out Of Sight » (1964)

Non, vous ne rêvez pas. James Brown n’était pas seulement un chanteur remarquable de maîtrise, il avait également des talents impressionnants de danseur. « Out Of Sight » sera par la suite repris par Van Morrison et demeure un des plus grands classiques du papa de la soul.

« Papa’s Got a Brand New Bag » (1965)

Ce titre est perçu par beaucoup comme étant l’un des morceaux précurseurs du funk, style musical souvent représenté par Prince notamment. Intemporel.

« Don’t Be A Dropout » (1966)

Si ce titre est loin d’être le meilleur de James Brown, il représente sa première tentative de « chanson engagée ». Dans « Don’t Be A Dropout », Brown demande aux jeunes de rester à l’école, de s’accrocher aux études. Le titre rencontrera un véritable succès en 1966… auprès des jeunes générations ! Pari réussi.

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Iron Maiden au festival Power Trip

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Nicko McBrain Iron Maiden
Larry Marano / Getty Images

Iron Maiden a conclu sa tournée de 2023 avec un passage au festival-événement Power Trip. Revivez leur concert mémorable, mélangeant classiques, raretés et morceaux récents.

5 juin 1952 : naissance de Nicko McBrain, batteur d’Iron Maiden

Et nous y sommes, au cœur de cette Eden repensé pour hard-rockers : en ce vendredi 6 octobre, la rumeur sourde des dizaines de milliers de festivaliers excités remue bien davantage la terre que les sabots des… mustangs sauvages depuis quarante ans. Sur ce gazon nickel, le public est compartimenté, en fonction de son pouvoir d’achat : le placement du ’Trip s’apparente à un graphique, pyramide des catégories socioprofessionnelles de l’Amérique. Un pit tout devant la scène gigantesque, vague expérience VIP mais debout, à 3 000 $ le ticket (sans les fees de rigueur et autres frais annexes du séjour !), auquel se succède toute une déclinaison de parcelles assises, soit entre 599 $ pour les plus éloignées, et 1 399 $ pour la proximité des gradins latéraux.

Tout le monde n’a pas encore regagné son siège ni fini d’avaler sa canette de Corona à 15 $ (+ taxes !) lorsque le soleil se couche derrière les montagnes mordorées : Iron Maiden est sur le point de monter sur scène, inaugurant sans première partie saugrenue cette édition exceptionnelle. Le heavy britannique est à l’honneur, rappelant ainsi qu’en ces terres, dans les années 1981-1983, ce fut alors le point de départ d’une véritable nouvelle British Invasion qui permit au metal d’être le genre le plus populaire du pays, le temps d’une décennie bien flamboyante.

“Somewhere in Time” ! Ce sont bien quatre extraits de cet album du même nom, de 1986 justement, que Bruce Dickinson et ses troopers interprètent — en ne dégainant toutefois qu’à moitié le jeu de la nostalgie : trop de morceaux épuisants du dernier Senjutsu viennent plomber un set très classique, où les duettistes Dave Murray et Adrian Smith affichent haut leur jeu et une classe sobre, reléguant le troisième larron Janick Gers au rang des inutiles danseuses en Spandex. Quel dommage que, pour un public américain friand de tubes, Iron Maiden n’ait pas osé se réserver une setlist exclusive ni son armada de “Run to the Hills” ou de “The Number of the Beast” en lieu et place de choses plus ennuyeuses — même un “Fear of the Dark” peine ici à égaler la ferveur des publics habituels.

Jean-Charles Desgroux

Setlist :
  1. Caught Somewhere in Time
  2. Stranger in a Strange Land
  3. The Writing on the Wall
  4. Days of Future Past
  5. The Time Machine
  6. The Prisoner
  7. Death of the Celts
  8. Can I Play With Madness
  9. Heaven Can Wait
  10. Alexander the Great
  11. Fear of the Dark
  12. Iron Maiden
  13. Hell on Earth
  14. The Trooper
  15. Wasted Years

Retrouvez le live report du festival Power Trip en intégralité dans notre numéro 158, disponible via notre boutique en ligne. Retrouvez également notre interview-fleuve du chanteur dans notre numéro 160. Commandez-le dès maintenant avec la couverture que vous préférez. Choisissez entre Eric Clapton et Bruce Dickinson.

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Bruce Springsteen : born again in the U.S.A.

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Bruce Springsteen Born in the USA

En 1984, le Boss publiait l’un des disques majeurs de la décennie. Avec Born in the U.S.A., le héros du New Jersey entamait véritablement sa conquête du monde. Rolling Stone revient sur l’impact provoqué, dans notre inconscient collectif comme dans la culture populaire, par ce blockbuster sonique gorgé de hits.
Voyage émotionnel dans l’Amérique de Bruce Springsteen.

4 juin 1984 : sortie de Born in the U.S.A. de Bruce Springsteen

Explorez la carrière du Boss en profondeur avec notre hors-série qui lui est entièrement dédié, disponible via notre boutique en ligne.

C’est une voiture qui découvre les rues d’une ville américaine. On imaginait depuis des années une balade plus exotique, plus western – Grand Canyon, Monument Valley, Route 66 – mais on a fini par se perdre dans les nœuds du New Jersey Turnpike à la sortie du Lincoln Tunnel, lumières de Manhattan dans le dos, fumées de raffineries à notre droite, premiers pick-up nous dépassant sur la gauche. Cette sortie vers Freehold ou une autre, au fond, on s’en fichait. On voulait seulement rouler, traîner dans les environs, s’imprégner, dessiner notre carte sentimentale du territoire, humer l’air poisseux de l’été finissant et pousser jusqu’à Atlantic City à la recherche de Burt Lancaster et Susan Sarandon, compagnons de jeu du film de Louis Malle.

Le lendemain, on a couru sous la pluie battante dans Prospect Park, à Brooklyn, T-shirt collé à la peau. On aurait pu s’embrasser sous les acacias, mais on ne l’a pas fait, on s’est tenu la main, ça semblait suffire. En rentrant chez la vieille dame qui nous hébergeait, on a mis une cassette où défilaient “Racing in the Street”, “Something in the Night”, “Sandy”, “Independence Day”, “Candy’s Room”, “Factory”, “Stolen Car”, “Mansion on the Hill” et l’indépassable “River”. Ça allait bien avec la nuit. On n’a pas dormi, d’ailleurs, on a continué à parler et à imaginer l’Amérique comme si nous n’avions pas encore atterri, comme si nous n’étions pas sur la terre promise par toutes ces chansons, ces films, ces livres, mais retenus dans la contrée du rêve. “Is a dream a lie if it don’t come true ?”, chantait Bruce Springsteen dans l’indépassable “The River”. Ce n’était pas magique tout le temps, en effet, mais subsistait l’écho du vieux frisson et quelques semaines devant nous pour envisager le détail des choses, leur revers, une autre réalité que celle des songes.

Bruce Springsteen live 1984

Getty Images

À l’aube, nous avons pris la route d’Ann Arbor, Michigan, la ville des frères Asheton, ramenant la vieille dame chez elle. Sur la I-80, à peine entrés en Penn-sylvanie, alors qu’elles somnolaient, que la circulation devenait fluide, on a tourné le regard vers la forêt et aperçu un cerf qui sortait à découvert. Il a parcouru quel-ques mètres en même temps que nous, chacun sur son chemin, boue ou asphalte, avant de rejoindre l’ombre protectrice d’une clairière. On a baissé le son de la musique ; ça n’avait aucune espèce d’importance, on connaissait les chansons, l’ordre des chansons par cœur. Après “Working on the Highway”, il y avait un carré magique : “Downbound Train”, “I’m On Fire”, “No Surrender” et “Bobby Jean”. Sur le disque, ce n’était pas pratique, il fallait retourner le vinyle, mais sur la cassette, pas de problème ; c’était bien, parfois, la technologie, le progrès. C’était bien aussi d’être là pendant que ça se passait. On avait 20 ans dans une voiture qui roulait vers les Grands Lacs, avec deux femmes endormies à nos côtés et le “Born in the U.S.A.” de Bruce Springsteen sur toutes les radios. On était en 1984.

Drôle d’année, 1984. Oracle d’Orwell pas encore avéré mais, pas la peine de faire les malins, il ne tarderait pas, alien bientôt expulsé des entrailles d’une nouvelle machine à écrire tout juste lancée sur le marché, le Macintosh, un cube beige assez moche, mais très pratique pour poser une enceinte hi-fi dessus. À New York, chez Tower Records et dans les cinémas de Broadway, il n’y en a que pour le disque et le film Purple Rain, mettant en scène l’ascension de Prince. “When Doves Cry” et “Let’s Go Crazy” écrasent la concurrence, “Jump” de Van Halen, Cindy Lauper, Kenny Loggins ou “Private Dancer” de Tina Turner. En Europe, le “no future” des punks est dans les choux, dans les clous de son programme hors du commun, fun, drugs & rock’n’roll.

De guerre lasse, on s’est découvert des cousins d’Amérique. Moins désespérés que les Anglais, plus proches des sources du rhythm’n’blues, déniaisés par l’écoute des Stooges et des Ramones, ils publient des disques mal enregistrés, à peine diffusés mais pleins d’énergie, comme si les ondes radioactives échappées de la centrale de Three Mile Island les avaient contaminés. Springsteen, presque un voisin, en fera une chanson terrible, “Roulette”. Les noms de ces groupes : Blasters, Gun Club, Fleshtones, Violent Femmes, Del Fuegos, Replacements, Certain General, Los Lobos, Plimsouls, jusqu’à ce college band d’Athens dont on achète l’album dans une station-service de l’Ohio, entre Youngstown et Akron : R.E.M. Reckoning, avec une perle nichée au cœur de la face A, “So. Central Rain (I’m Sorry)”, exprime avec justesse le spleen qui nous a saisi à l’adolescence. Le “Sorry” du refrain nous convient. Il s’excuse, et nous avec, de cet empêchement qui nous tient, nous retient. Pardon de ne pas y croire, pardon de ne pas s’engager, pardon de ne pas ou, comme on le lirait des années plus tard dans Bartleby d’Herman Melville, “I would prefer not to”, je préférerais ne pas… Pardon à nos parents de les avoir déçus, pardon aux amis de les avoir trahis, pardon à l’amour de l’avoir repoussé.

Bruce springsteen incarnait cette tentation de l’effacement, cette théorie du retrait. Celui des empêchés, des timides, encore coincés entre adolescence et vie d’homme. À une trilogie des débuts, Greetings From Asbury Park, N. J., The Wild, the Innocent and the E Street Shuffle et Born to Run, enregistrée avec la fougue de la jeunesse, avaient succédé, au tournant des années 1980, trois disques imparables, une trilogie des confins, Darkness on the Edge of Town, The River et Nebraska. Inspiré par Elvis, guidé par Dylan, Springsteen regardait son nombril, celui de sa petite amie, celui des copains, et auscultait la vie de ses parents avec guitare et harmonica. Ça n’allait pas beaucoup plus loin, c’était modeste, ça collait avec notre réticence. Il n’était pas le défenseur opportuniste de grandes causes, comme tant de ses collègues, le nez dans la poudre, les bras chargés de groupies mais le cœur sur la main dès qu’apparaissait un micro, une caméra. Il se tenait à l’écart du cirque, du show business, sonnait vrai au milieu du factice. Ce que les disques semblaient nous dire, les concerts nous le confirmaient au centuple. C’était un type souriant entouré d’une poignée de camarades. Ensemble, ils descendaient au même hôtel, à Saint-Étienne ou à Pantin, et offraient des concerts de trois heures qui étaient comme des films, avec des moments gais et des moments tristes, des moments où l’on faisait danser les filles et d’autres où on les embrassait.

Mais le temps des camarades avait eu une fin. Après la longue tournée de The River, Springsteen était resté seul, désœuvré, les membres du E Street Band s’émancipant, avec une femme, des enfants, un autre projet que le Band, que les potes. Son pays, l’Amérique vivait des temps difficiles, la fin des années Viet-nam, la fin des années Nixon, la fin du pétrole gratis, la fin du travail pour tous. En élisant Ronald Reagan après Jimmy Carter, les Américains avaient fait le choix du fantasme, de la démagogie, de la fuite en avant. Reagan avait souri, il avait fait des blagues, il avait même été courageux lorsque John Hinckley lui tira dessus, mais il était l’otage du complexe militaro-industriel qui avait soutenu sa carrière à Hollywood et ses élections successives, à la tête du syndicat des acteurs, comme gouverneur de Californie, puis comme président, et il avait favorisé leurs intérêts, creusé les déficits, mis l’Amérique au chômage, le cœur sur la main, lui aussi.

Lorsque Born in the U.S.A. sort, en juin 1984, Springsteen a 35 ans. Il a enjambé la dépression qui l’avait saisi et commence, après le temps de l’innocence, une carrière. Les membres du E Street Band savent que, désormais, ils ne sont plus seulement une bande de copains, mais les employés de celui qu’ils appelaient “The Boss” avec ironie et affection. Avant, ils partageaient tout : les pochettes de disques, la scène, les repas, la fraternité d’avoir quelque chose à faire ensemble, une guerre, un match, un boulot à la con, une tournée.

bruce Springsteen Clarence Clemons

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Les retrouvailles avec le groupe sont amères. Steve Van Zandt est parti ramer en solitaire avec The Disciples of Soul, Clarence Clemons, peu sollicité, enregistre avec Joan Armatrading ou Gary U.S. Bonds, et Bruce s’est trouvé une actrice comme copine. Il fait de la musculation avec elle, du sport, et, pire encore, il envisage de se marier. C’est qu’il est devenu un bon parti, le bougre. À la faveur de la création du CD, on a réédité ses disques, il a enfin touché des droits d’auteur sur les chansons qu’il a écrites, les musiques qu’il a composées, et il est devenu riche sans s’en apercevoir. Il a réussi. Ce qu’il souhaitait ardemment, mais ça lui fait drôle, cette vie facilitée, cet argent qui le coupe du commun des mortels. Le succès lui tombe dessus comme une bénédiction, mais il recèle sa part de malédiction : il est arrivé. Il n’a plus à se battre, à prouver, à se frayer un chemin, tous ces ressorts qui fouettent les sangs des vrais artistes, des créateurs. N’ayant plus à s’extraire de la classe moyenne, il va continuer à en parler, à raconter ses joies, ses tourments, mais désormais, il n’est plus un col-bleu, il observe leur lutte depuis “the edge of town”, les limites de la ville. Sa rédemption, il la trouve dans un livre, Born on the Fourth of July (Né un 4 juillet) de Ron Kovic, un vétéran du Vietnam qu’il a rencontré au bord de la piscine d’un motel en Arizona. Oui, ce type aux cheveux longs posé sur un fauteuil roulant est bien l’auteur du bouquin qu’il vient de dévorer. Ils deviennent amis. Des années après avoir échappé à la conscription, Bruce Springsteen, sensible au sort des oubliés de la défaite, paye sa dette en militant auprès d’associations regroupant d’anciens combattants mis au ban de la société. Les chansons “Shut Out the Light” et “Born in the U.S.A.” naissent de cet engagement. Cette dernière, enregistrée lors des infructueuses sessions studio avec le groupe pour Nebraska, sera la tête de pont du nouvel album, et son geste le plus retentissant en faveur de la cause.

Le reste de son septième disque est un assemblage de morceaux aux rythmes entraînants, à l’exception de trois ballades – dont l’émouvant “My Hometown” qui conclut avec fatalisme un disque cherchant à séduire un large public. Après avoir frôlé le précipice commercial avec l’austère Nebraska, la production habille les chansons de clochettes et de synthétiseurs, simplifie les arrangements – moins de saxophone, plus de batterie – et raccourcit spectaculairement la durée des titres, tous susceptibles de passer à la radio et à la télévision. C’est d’ailleurs lors du premier soir de la tournée, à Saint Paul dans le Minnesota, qu’est filmé le clip de “Dancing in the Dark”. Brian De Palma est aux manettes, la jeune comédienne Courteney Cox dans la fosse du concert. Elle monte sur scène et danse avec Bruce qui se dandine comme un ado emprunté mais rasé de près, rouflaquettes disparues, chemise blanche et sourire avenant. Ce sera sa seule concession à la ligne claire de MTV ; elle suffira. La chanson devient un plus gros tube que “Hungry Heart”, monte à la deuxième place des charts, seulement devancée par “When Doves Cry” de Prince. “Damn the artist formerly known as Prince”, écrira le Patron avec humour dans les notes de pochette d’un Greatest Hits.

Les choses sérieuses, la polémique, la politique, démarrent quelques semaines plus tard, durant un été qui voit les États-Unis cacher leur misère et gonfler le torse. À Los Angeles, se tiennent les jeux Olympiques. Après avoir boycotté ceux de Moscou en 1980, le pays tient sa revanche. Premiers JO où les marchands du temple sont acceptés dans l’enceinte du Coliseum, rentables, capitalistes sans ambiguïté, ils voient le triomphe de Carl Lewis et de la gymnaste Mary Lou Retton, une Nadia Comaneci version US. Mais l’été 1984, c’est aussi la campagne présidentielle. En novembre 1980, une première fois, au -lendemain de l’élection de Ronald Reagan, Bruce Springsteen était sorti de sa réserve coutumière en affirmant lors d’un concert : “C’était flippant, ce qui s’est passé hier soir !”

Quatre ans plus tard, au cours d’un meeting dans le New Jersey, Reagan évoque “l’enfant du pays” et sa “formidable chanson sur la fierté d’être un Américain”. Le lendemain, Springsteen met les choses au point : “Le président a parlé de moi. Je ne sais pas lequel de mes albums il préfère. Je ne pense pas que ça soit Nebraska. Ou alors, il ne l’a pas vraiment bien écouté.” Puis il interprète “Johnny 99” : “Well they closed down the auto plant in Mahwah late last month, Ralph went out lookin’ for a job but he couldn’t find none. He came home too drunk from mixin’ Tanqueray and wine, he got a gun, shot a night clerk.” C’est trop tard, cependant. La méprise sur le cliché de la bannière étoilée qui orne la pochette du disque, même s’il a l’air de pisser dessus, et l’art de la propagande des stratèges républicains transforment le cri de honte de Born in the U.S.A. en son contraire, une ode aux valeurs conservatrices. Il faudra toute la persévérance du chanteur pour inverser la vapeur et faire comprendre au public le vrai sens de la chanson. Aujourd’hui le doute est levé, mais lorsque Bruce Springsteen débarque en Europe en 1985, il est dans ses petits souliers. À La Courneuve, à Montpellier, il fait précéder la chanson d’un petit laïus embarrassé. Sauf que la foule a compris, elle sait qu’on peut aimer l’Amérique sur la promesse de la frontière, pour ses paysages et ses artistes, sans rien ignorer de son côté obscur. Ainsi, lorsque des milliers de voix reprennent en chœur le fameux refrain, c’est comme lorsque les Grecs et les Romains parlent avec l’accent du Texas dans les péplums, c’est à la fois ridicule et rigolo mais, personne n’étant dupe, ça passe.

Bruce Springsteen live 1984-

Getty Images

Finalement, Born in the U.S.A. serait le zénith de notre relation avec Springsteen. Viendrait ensuite le temps d’avancer, d’étudier, de travailler, de rencontrer d’autres filles, d’autres garçons qui nous feraient écouter d’autres musiques, celles de Prince ou de Dylan, par exemple. Et nous serions soufflés de tant d’intelligence, d’ironie, de grâce, de complexité. Celle de Bruce Springsteen, passé le beau post-scriptum de Tunnel of Love, perdrait son urgence et son romantisme en même temps qu’elle gagnerait en muscles et en audience. Les rocks des albums postérieurs nous casseraient la tête, et les producteurs débauchés du grunge nous consterneraient. Ne resteraient alors que les sentiers buissonniers empruntés par The Ghost of Tom Joad ou les Seeger Sessions, quelques musiques de films, Philadelphia, Dead Man Walking, Crossing Guard, The Wrestler.

La rage et la mélancolie qui habitaient ses disques ont déserté. La rage s’est éteinte, crocs limés par la réussite de superstar, la mélancolie s’est dissoute dans la vie de famille. Jusqu’à la sortie de High Hopes, qui voit le retour en force du mousquetaire, trente ans après, et dont la chanson-titre résonne comme un autre “Born in the U.S.A.” Enfin, fidèle aux vers de Tennyson : “Amis, venez, il n’est pas trop tard pour chercher un monde nouveau”, il y a cette version dantesque de “Stayin’ Alive” que Springsteen et sa bande jouaient ce printemps aux antipodes, et la présence sur le nouvel album du “Dream Baby Dream” de Suicide, en dernière carte, une élégie qui ressemble pourtant au chant d’une renaissance. “Born again”, Bruce Springsteen ?

Denis Soula

Découvrez également le making of de Born in the U.S.A.

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Interview – Stereophonics : le retour des princes de Galles

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Kelly Jones
James D Kelly

A l’occasion de la sortie d’Oochya!, 12e album de Stereophonics, nous avons interviewé Kelly Jones. Selon lui le “monde d’après” est marqué par l’optimisme et la nostalgie.

3 juin 1974 : naissance de Kelly Jones, chanteur de Stereophonics

Comment avez-vous vécu la pandémie ?

Nous venions de finir notre tournée quand nous sommes entrés en confinement… C’était en avril. Ma femme a accouché de notre quatrième enfant, le 1er mai… La 1re année, j’ai donc consacré mon temps et mon énergie à ma famille. Puis, progressivement, j’ai commencé à redevenir créatif, à faire de la musique… et plein d’autres choses !
Cette pandémie a été pour moi la première occasion en 25 ans où il m’a fallu arrêter de bouger, de me produire sur scène… Et pourtant, il n’y a pas eu de relâchement ! C’était vraiment une période intéressante entre ce que ma tête ressentait (l’envie de bouger) et les envies de mon corps (s’arrêter). Il a donc fallu faire en sorte que les deux se rejoignent…

En quoi cela a influencé l’atmosphère de l’album ?

Ce disque est né d’un catalyseur, d’une idée : je voulais à l’origine faire une compilation de 25 ans de chansons… Mais, très vite, ça s’est transformé en compilation de chansons, certes, mais non-terminées ou non-utilisées jusque-là… Je suis donc très content de ce revirement ! Certaines démos ont été retravaillées. Un tas d’autres a été écrit pour l’occasion… Le groupe s’est réuni et nous avons enregistré quasiment tout l’album en sept jours, avant d’aller le mixer à Londres.

Qu’en pensez-vous, aujourd’hui, avec le recul ?

C’est un disque qui montre beaucoup de facettes différentes du groupe. Il y a vraiment des chansons rock’n’roll ! Mais ça n’a pas non plus empêché d’y joindre quelques titres pleins d’âme. Un équilibre entre moments magnifiques, suspendus, légers et d’autres qui sont plus… sombres. Réalistes.

La mer et le soleil sont des thèmes qui reviennent souvent… Est-ce parce que c’était le contexte d’écriture ?

Ah oui ? [il réfléchit] Je pense que les saisons et le climat peuvent permettre de décrire comment les gens se sentent et… leurs perspectives de vie. Le soleil qui se lève puis se couche représente le temps qui passe, le fait que demain est un autre jour. C’est une métaphore très pratique, accessible… en plus d’être universelle ! Mais, oui, j’ai toujours utilisé des descriptions assez cinématographique et pittoresques dans mes textes.

Vos textes sont d’ailleurs très optimistes. Est-ce l’amour, la nostalgie… ?

Il n’y a pas de thème général qui se dégage, de fil conducteur… Comment pourrait-il y avoir une unité, étant donné que l’ensemble a été écrit à des époques et avec des sentiments différents ?
Prenez “Right Place Right Time”… C’est une chanson consciente. Idem pour “Every Dog Has Its Day” ! Tout l’inverse d’un “Forever” très optimiste… “Hanging On Your Hinges” est très rock’n’roll à la Stooges ! Et puis, oui, il y a parfois de la nostalgie : “Close Enough To Drive Home” et “Seen That Look Before”, par exemple. C’est cette diversité d’idées et d’intention qui a inspiré le titre de l’album, pouvant autant signifier la surprise que la vengeance.

Samuel Degasne

Retrouvez cette interview de Stereophonics en intégralité dans l’hebdo de Rolling Stone n°74, disponible ici.

Oochya!, le nouvel album de Stereophonics, est disponible à l’achat et à l’écoute.

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Bruce Springsteen : 10 anecdotes sur “Darkness on the Edge of Town”

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bruce springsteen
© Getty Images

Le quatrième album studio de Bruce Springsteen, Darkness on the Edge of Town, est sorti le 02 juin 1978. (Re)découvrez comment le punk, la country et d’autres genres musicaux parsèment ce disque culte.

« Il y a quelque chose d’effrayant à voir nos rêves se réaliser, parce qu’ils peuvent ou non surpasser ce à quoi l’on s’attendait, » confiait Bruce Springsteen à Rolling Stone en 1987 au sujet de la genèse de son iconique Darkness on the Edge of Town, réédité depuis. « Je crois que lorsque les gens rêvent, ils rêvent d’une vie sans complication. Et ça n’existe pas. »

Les rêves de rock and roll de Bruce Springsteen devinrent réalité en 1975 avec la sortie de son troisième album, Born to Run. Encensé par la critique, il s’est hissé jusqu’à la troisième place du Billboard 200, son single éponyme grimpant quant à lui à la 21ème place du hit-parade, ce qui a permis à Springsteen de figurer simultanément en couverture du Time et de Newsweek, et d’établir sa réputation comme nouveau héro rock des seventies.

Mais avec le succès de Born to Run vinrent un déluge de prises de têtes et d’embûches, qui colorèrent de façon significative le ton du prochain album de Bruce Springsteen, et en retardèrent l’enregistrement.  « Born to Run m’avait permis de m’offrir un piano Steinway et une Corvette Chevrolet de 1960, » écrivait-il dans son autobiographie en 2016. « Pour le reste, ce n’était que des factures que Mike [Appel, le manager de Springsteen] avait dissimulé pour nous garder à flot. »

En plus des complications sus mentionnées et de la pression de faire mieux, Springsteen et le E Street Band ne pouvaient légalement pas entrer dans un studio d’enregistrement sans l’approbation de leur manager…  que Springsteen poursuivait en justice pour annuler le contrat qu’il avait signé avec sa société en 1972. Tandis que Bruce Springsteen et les E Streeters avaient tenté de planifier le début de l’enregistrement de la suite de Born to Run en juin 1976, ils ne commencent à enregistrer les morceaux qui deviendront par la suite Darkness on the Edge of Town qu’un an plus tard, après qu’Appel et Springsteen aient enfin réglé leur différent hors des tribunaux.

Darkness sorti dans les bacs le 2 Juin 1978, révélant un artiste dont le son et la vision avait dramatiquement changé depuis la sortie de Born to Run. Remballés les personnages se battant pour être libres ; les voilà remplacés par des chansons plus dures que tout ce que Springsteen avait enregistré jusque là, racontant les histoires de personnes écrasées par les mêmes réalités sociales auxquelles les personnages de Born to Run avaient désespérément essayés d’échapper.

« Avec Darkness, j’étais prêt au combat. » écrivait-il dans Born to Run. « Mes protagonistes devaient se défaire de tout ce qui était inutile pour survivre. Dans Born to Run, une bataille personnelle était engagée, mais une guerre collective continuait. Dans Darkness, les implications politiques des parcours de vie que je décrivais étaient au premier plan. »

  1. Darkness on the Edge of Town était le premier album que Bruce Springsteen a être enregistré des les conditions du live par le E Street Band, cependant ça ne veut pas dire que ça été rapide ou efficace.

A l’été 1977, le E Street Band – alors composé du guitariste Steve Van Zandt, du saxophoniste Clarence Clemons, du pianiste Roy Brittan, de l’organiste Danny Federici, du bassiste Garry Tallent et du batteur Max Weinberg – pouvait se plier presque immédiatement à tous les caprices musicaux de Bruce Springsteen, c’était donc logique que les chansons de Darkness soient enregistrées dans les conditions du live. Malheureusement, la recherche perpétuelle de Springsteen du son ultime a contrecarrée tout ce qu’un tel arrangement aurait pu avoir d’efficace. Mécontent de ce qu’il obtenait aux studios Atlantic de New York, Springsteen déplaça les séances d’enregistrements à la Record Plant. Le co-producteur Jon Landau et l’ingénieur Jimmy Iovine passèrent d’interminables semaines à essayer de trouver le mix de batterie idéal.

« Des journées durant, les seuls sons qui émanaient du Studio B de la Record Plant étaient l’interminable bruit sourd des coups de baguettes de Max sur les toms, » écrivait Bruce Springsteen dans Born to Run. « Lorsque le jeu de batterie est énergique mais que le mix est en sourdine, ça laisse pas mal de place pour les guitares. Lorsque les guitares sont puissantes mais ne font pas de vague, on peut avoir des batteries la taille d’une maison. Reste qu’il faut faire des choix » Entre le challenge sonique que représentaient un tel enregistrement et le nombre important de chansons écrites par Springsteen, il fallait bien un an.

  1. Des classiques américains comme La Prisonnière du Désert et A L’Est d’Eden ont lourdement influencé l’album.

Même si Darkness on the Edge of Town n’était un pas un concept album dans le sens classique du terme, Springsteen voulait que les chansons de l’album ait un aspect cinématographique, un désir qui est né de ses heures passées à regarder des films tels que La Prisonnière du Désert de John Ford et des films noir des années 40 et 50.  

« Il n’y a pas de répit qui tienne, » expliquait-il à Rolling Stone peu après la sortie de l’album. « On capture une action en train de se dérouler, et à un certain moment, la caméra s’éloigne et peu importe ce qui se passe, ça se pase. Les chansons que j’écris, elles n’ont pas de début ni de fin. La caméra fait le point et elle repart. »

Chuck Plotkin, qui a mixé l’album, se rappelle dans le documentaire The Promise : The Making of Darkness on the Edge of Town que Springsteen voulait que l’album soit cinématographique dans la façon dont il allait passer d’une chanson à l’autre.  En ce qui concerne la transition de « Badlands » à « Adam Raised a Cain », Springsteen a dit à Plotkin : « Voilà ce que je veux que tu fasses. Imagine que tu es au cinéma et qu’à l’écran il y a deux amants en train de pique-niquer. Et ensuite la caméra coupe brutalement sur un cadavre. Cette chanson c’est le cadavre. »

  1. Le son et le ton de Darkness on the Edge of Town sont en partie inspirés par le punk anglais.

« Je recherchais un son plus épuré, un peu plus énervé, » se rappelait Springsteen dans The Promise. « Je voulais endurcir les chansons. Je voulais que l’album ait du mordant. » Alors qu’un son plus énervé fonctionnait pour des titres comme « Badlands » ou « Adam Raised a Cain », Springsteen s’engage dans la voie des groupes punks Anglais comme les Sex Pistols et les Clash. « Darkness a été également influencé par l’explosion du punk à l’époque, » confiait-il au public du Festival SXSW en 2012. « J’ai acheté tous les nouveaux albums estampillés punk… Ils étaient courageux, vous mettaient au défi… et vous rendaient courageux. Beaucoup de cette énergie est présente dans le sous-texte de Darkness. En 1977, on ne pouvait pas ignorer ce genre de musique. Des pairs l’ont fait. Et ils ont eu tort. On ne pouvait pas ignorer ce défi. »

  1. Le nouvel amour de Bruce Springsteen pour la country l’a aidé à écrire les paroles de l’album.

Si le punk a impacté la musique de l’album, les paroles de Darkness, et particulièrement des chansons comme « Factory » et « Prove It All Night », révèlent une influence grandissante de la musique country sur l’écriture de Springsteen. Ayant ignoré longtemps la country traditionnelle, il s’est retrouvé attiré par la simplicité de ces paroles, la nature brute de ces sujets et son attitude souvent fataliste.

« J’ai trouvé le blues dans la country, » se rappelle Springsteen à l’ouverture du Festival SXSW. « C’était ‘le blues du travailleur’ : la réalisation stoïque de la réalité du quotidien, et les petits riens qui vous permettent de mettre un pied devant l’autre. J’ai trouvé que le fatalisme de la country me plaisait. C’était réfléchit. C’était drôle. Mais c’était assez fataliste. »

  1. Les deux plus grands hits issus des sessions d’enregistrement de Darkness on the Edge of Town furent enregistrées par d’autres artistes.

La période séparant Born to Run et Darkness on the Edge of Town fut une des plus prolifique de Springsteen en tant qu’auteur-compositeur. Il avait écrit tellement de chansons pour l’album que d’autres artistes finirent par profiter de ce surplus, à commencer par Southside Johnny, Robert Gordon, Greg Kihn et Gary U.S. Bonds. Alors que « Prove it All Night » était le seul single de Darkness à atteindre la 33ème place du Top 40, deux artistes ont connu un succès phénoménal avec des compositions du Boss : Les Pointer Sisters grimpèrent à la deuxième place des charts avec leur enregistrement de « Fire » et Patti Smith connu le plus grand succès de sa carrière avec « Because the Night, » qui a atteint la 13ème place des charts américains et la 5ème des britanniques.

Smith enregistrait Easter avec Jimmy Iovine au moment où ce dernier travaillait sur Darkness. Elle a pris le morceau inachevé « Because the Night » et y a ajouter un couplet inspiré par sa relation longue distance avec son futur mari Fred « Sonic » Smith. « Je savais que je n’allais pas terminer la chanson, parce que c’était une chanson d’amour, et à cette époque j’avais le sentiment de ne pas être capable de les écrire, » se rappelle Springsteen dans The Promise, expliquant sa décision de donner la chanson à Patti Smith. « J’étais réticent à écrire une vraie chanson d’amour comme ‘Because the Night’. Je crois que j’étais trop peureux pour écrire ça à l’époque. Mais elle, elle était courageuse. »

  1. « Darkness on the Edge of Town », “Racing in the Street” et “Badlands” ont tout d’abord été des titres, Bruce Springsteen complétant le reste des paroles plus tard.

Peut-être est-ce du à sa fascination grandissante avec le cinéma, mais Springsteen s’est retrouvé a essayer plusieurs manières d’écrire des chansons… dont l’écriture de simples titres qui sonnaient bien dans ses cahiers. « Quand on choisis un titre de chanson comme ‘Racing in the Street,’ on sait que ce sera une chanson difficile à écrire, » confiait-il à Rolling Stone en 2010. « Donc j’inventais les titres, et je partais à la recherche des chansons qui les mériteraient. »

  1. Le riff principal de ‘Badlands’ est tiré de ‘Don’t let Me Be Misunderstood’ de The Animals.

Durant sa carrière, Springsteen a souvent rendu hommage à The Animals, que ce soit en chantant leurs louanges en interview, ou en reprenant les hits du groupe britannique « We Gotta Get Out of This Place » et « It’s My Life » en concert. « Pour certains, c’était juste un des meilleurs groupes des Sixties, » expliquait-il dans son discours au SXSW en 2012. « Mais pour moi, The Animals était une vraie révélation. Leur premiers albums sont impressionnants. »

Durant son discours, Springsteen a aussi mentionné l’influence du groupe sur Darkness on the Edge of Town avant de joyeusement démontrer  comment il avait tiré le riff principal de « Badlands » de « Don’t Let Me Be Misunderstood ». « C’est le même putain de riff, mec. » confiait-il, jouant les intros des deux chansons l’une à la suite de l’autre. « Écoutez bien les jeunes : c’est comme ça que l’on vole avec succès d’accord ? »

  1. A l’origine l’album de Bruce Springsteen devait s’appeler Badlands et le département artistique de Columbia Records avait même crée une pochette d’album correspondante.

Malgré le fait que Springsteen et le E Street Band avaient travaillés plusieurs fois sur la chanson « Darkness on the Edge of Town » durant les premiers stades de l’enregistrement de l’album, la chanson ne fut complétée qu’en mars 1978. Columbia s’était alors contenté de « Badlands » et avait même commandé à son département artistique une maquette de la pochette de l’album en octobre 1977.

La liste des chansons de cette version précoce de l’album incluait « Badlands », « Streets of Fire », »Promised Land », « Prove It All Night », « Candy’s Room » (sous son titre provisoire « Candy’s Boy ») et « Racing in the Streets ». Figurait aussi deux chansons qui n’ont pas été inclut dans l’album définitif : « Don’t Look Back » fut remplacée par « Darkness on the Edge of Town » et « Independence Day » qui se retrouverait sur The River en 1980 aux côtés de « Drive All Night », « Sherry Darling » et « Ramrod », trois autres chansons qui furent originalement écrite et enregistrée durant les sessions d’enregistrement de Darkness.

  1. Le solo de saxophone de Clarence Clemons  sur « Badlands » a été ajouté à la dernière minute.

Alors que les chansons de Darkness commençaient à prendre forme, Springsteen réalisa que le son plus tendu qu’il cherchait demandait de se concentrer davantage sur son jeu de guitare, même si cela signifiait laisser moins de place au saxophoniste Clarence Clemons. « La guitare a fait son retour dans Darkness parce qu’il était devenu moins urbain. Si on réduit le saxo, ça laissera plus de place à la guitare, » expliquait-il à Rolling Stone en 2010. « Le sax est un instrument chaud et mélodique. Si je voulais quelque chose de plus sale et brut, il fallait de la guitare. »      

Darkness en état déjà à l’étape du mixage quand Springsteen a réalisé qu’il devait faire machine arrière. Il a donc appelé Clemons et lui a fait enregistrer le désormais célèbre solo de « Badlands ». « C’était un solo de guitare à la base, » se rappelle Springsteen dans The Promise. « À la fin de l’enregistrement, je pensais que nous manquions de saxophone. J’ai sorti ma guitare et Clarence a joué par-dessus. »  

  1. Les photos de Bruce Springsteen sur les pochettes de Darkness on the Edge of Town et The River proviennent de la même session avec le photographe Frank Stefanko.

« Je connaissais un peu Patti Smith au travers de notre travail sur ‘Because The Night’, » se rappelle Springsteen dans Born To Run. « Quand je lui ai rendu visite pendant une de ses représentations au Bottom Line, elle m’a donné le nom d’un photographe de South Jersey et m’a dit que je devrais le laisser me photographier. » Son nom était Frank Stefanko, et sa sensibilité visuelle brute était en parfaite adéquation avec la crudité de Darkness on the Edge of Town. Springsteen a tellement adoré le résultat de leur session photo de quatre jours qu’il utilisa les images pour la couverture de Darkness, mais également de The River.

« Bruce est allé en Californie pour travailler sur The River, » confiait Stefanki à Rolling Stone en 2017. «  »Il m’a appelé. Il avait en sa possession toutes les photos de la session Darkness. Il les feuilletait. Pendant deux semaines, on a eu de nombreux échanges. Il m’appelait depuis la Californie à deux heure du matin et me disait juste : ‘Sors la photo 28. Regarde le négatif numéro quatre. Est-ce qu’on peut rendre le côté droit un peu plus sombre ?’ Je passais la nuit dans ma chambre noire et je lui envoyais le tout par FedEx. On a fait ça jusqu’à ce qu’il choisisse un portrait en gros plan pour lequel il portait la même chemise à carreaux que dans ‘Corvette Winter’ [La photographie de Stefanko utilisée sur la couverture du livre Born to Run]. »

Par Dan Epstein

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Blink-182 : retour à roulettes

Publié

Blink-182
Nicko Guihal / Live Nation

Le 9 octobre, Blink-182 était de retour avec son line up emblématique dans une Accor Arena remplie et acquise à la cause du trio.

1er juin 1999 : sortie d’Enema of the State de blink-182

Les venues des trois Californiens s’étaient faites rares en France. L’annonce du retour de Tom DeLonge au sein de blink-182 couplée avec celle du passage à l’Accor Arena, près de dix-neuf ans après leur dernière venue dans la salle parisienne, a suffi à faire bouger les foules. Ainsi, la salle remplie et le public motivé donne même quelques miettes de son enthousiasme à The Story So Far, groupe de punk-rock qui assure la première partie.

Mais l’enthousiasme explose en même temps que les feux d’artifice lorsque les musiciens, remontés comme jamais, arrivent sur scène et enchaînent les tubes comme “Dammit” ou “All The Small Things”, sans oublier leurs nouveaux morceaux, à l’approche de la sortie de One More Time, leur nouvel album. Avec une scène avancée dans la fosse, Mark Hoppus a la place pour sautiller en beau diable lorsqu’avec Tom DeLonge au chant ils ne se renvoient pas la balle. Côté batterie, Travis Barker montre qu’il n’a perdu ni son talent de batteur ni son sens de la démesure, en jouant sur une batterie suspendue à quelques mètres du sol le temps de quelques morceaux.

Si le spectacle foisonne d’effets délirants, blink-182 sait aussi amuser la galerie avec diverses blagues plus ou moins graveleuses entre Mark Hoppus et Tom DeLonge, offrant une capsule temporelle vers les années 2000. Le trio californien digne représentant du mouvement “punk à roulettes” montre qu’il est bel et bien de retour et que les années n’ont pas atteint sa forme juvénile. “What’s My Age Again?” On peine à y répondre.

Setlist :
  1. Anthem Part Two
  2. The Rock Show
  3. Family Reunion
  4. Man Overboard
  5. Feeling This
  6. Violence
  7. Up All Night
  8. Dumpweed
  9. Aliens Exist
  10. Dysentery Gary
  11. MORE THAN YOU KNOW
  12. EDGING
  13. DANCE WITH ME
  14. Happy Holidays, You Bastard
  15. Happy Holidays, You Bastard
  16. Stay Together for the Kids
  17. Always
  18. Down
  19. Bored to Death
  20. I Miss You
  21. Adam’s Song
  22. Ghost on the Dance Floor
  23. What’s My Age Again?
  24. First Date
  25. All the Small Things
  26. Dammit
  27. ONE MORE TIME

Mathieu David

Retrouvez ce live report dans Rolling Stone l’Hebdo n°133, disponible via notre boutique en ligne.

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