Mobilisation propalestinienne : à la Sorbonne, la police évacue des manifestants, 86 personnes en garde à vue - Le Parisien

Mobilisation propalestinienne : à la Sorbonne, la police évacue des manifestants, 86 personnes en garde à vue

Suite à cette intervention nocturne, 86 personnes ont été placées en garde à vue pour des « dégradations volontaires » et « violence sur personne dépositaire de l’autorité publique » notamment, selon le parquet de Paris.

En écho à la mobilisation sur des campus américains, plusieurs actions propalestiniennes ont lieu depuis quelques semaines en France, comme ici à la Sorbonne. (Illustration) AFP/Miguel Medina
En écho à la mobilisation sur des campus américains, plusieurs actions propalestiniennes ont lieu depuis quelques semaines en France, comme ici à la Sorbonne. (Illustration) AFP/Miguel Medina

    Pour la seconde fois en deux semaines, les étudiants mobilisés ont été délogés. Les forces de l’ordre sont intervenues mardi soir au sein de la Sorbonne pour évacuer des manifestants propalestiniens qui occupaient depuis environ deux heures un amphithéâtre de l’université parisienne en « solidarité » avec Gaza, a-t-on appris de source policière. Le rectorat a décidé de porter plainte après des violences contre des agents publics.

    Des premiers manifestants, qui sont environ une centaine au total à l’intérieur, selon des sources concordantes, ont été sortis dans la rue, depuis une porte d’accès latérale de l’université, parfois portés à bout de bras par des agents des forces de l’ordre, a constaté une journaliste de l’AFP, alors que des militants propalestiniens étaient également toujours présents à l’extérieur, à proximité.

    Des policiers ont procédé à des relevés d’identité. La préfecture de police a fait état de 88 interpellations lors de cette intervention qui s’est terminée peu avant minuit, selon le rectorat et une source policière. Quelques heures plus tard, le parquet de Paris a indiqué que 86 personnes, toutes majeures, ont été placées en garde à vue.

    Elles sont inquiétées principalement pour des « dégradations volontaires, participation à un groupement en vue de la préparation de violences contre les personnes ou de destruction/dégradation de biens, rébellion, violence sur personne dépositaire de l’autorité publique ou intrusion dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement scolaire en réunion dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement », a-t-il détaillé.

    Des violences « intolérables » pour la ministre

    De son côté, le rectorat a indiqué que les manifestants ont « bénéficié de l’aide d’étudiants présents à l’intérieur du bâtiment » pour s’introduire. « Des agents publics ont été violemment bousculés et pris à partie », selon la même source. Sur le réseau X, la ministre de l’Enseignement supérieur Sylvie Retailleau a annoncé dans la nuit que le rectorat allait porter plainte suite à ces violences.

    « Plusieurs agents publics ont été violemment bousculés et pris à partie ce soir par un groupe d’individus qui espéraient occuper La Sorbonne », a-t-elle confirmé. « Ces violences sont intolérables : le rectorat va porter plainte sans délais. » « Je le redis : nous privilégions toujours le dialogue, mais nous n’accepterons jamais les blocages. L’escalade est une stratégie inutile. Honte à ceux qui font le pari de l’instrumentalisation », a poursuivi la ministre.

    Plusieurs syndicats étudiants ont réagi. « Des étudiant•e•s sont interpellé•e•s (sic) devant la Sorbonne, d’autres encore enfermé•e•s (sic) à l’intérieur parce qu’ils et elles se mobilisent contre les massacres en Palestine ! Honte à ce gouvernement qui réprime la jeunesse en lutte ! », a fustigé l’Union Nationale des Étudiants de France (Unef) sur X.

    « L’escalade de la violence commence quand les forces de l’ordre sont envoyées sur nos lieux d’études pour empêcher des étudiant•e•s (sic) de se mobiliser », a-t-il également répondu à la ministre, estimant que « le dialogue est rompu à partir du moment où une des parties interdit l’autre de s’exprimer ». De son côté, l’Union étudiante a reproché au gouvernement d’envoyer « les CRS contre les étudiant•es mobilisé•es (sic) pour la paix ». « Il est temps que cesse cette répression ! », a déclaré le syndicat étudiant sur le même réseau.

    « Palestine vaincra »

    Des étudiants avaient annoncé plus tôt dans la journée occuper un amphithéâtre de l’université de la Sorbonne, à Paris, « en solidarité » avec Gaza et « contre la répression des mouvements étudiants » propalestiniens. Près de 80 étudiants avaient pris possession d’un amphithéâtre en fin d’après-midi, « avec des tentes », a indiqué Lorélia Fréjo, étudiante à l’université Paris-1 Panthéon Sorbonne, militante de l’organisation étudiante Le Poing levé, présente devant l’université parisienne avec environ 200 manifestants.

    Sur la porte d’entrée du bâtiment, rue Cujas (Ve arrondissement), un panonceau « Palestine vaincra » et un drapeau palestinien ont été collés. Les forces de l’ordre sont arrivées sur place vers 19h45 et ont commencé à encercler une partie des manifestants.

    Les manifestants présents devant la Sorbonne avaient annoncé attendre d’être rejoints par une autre manifestation de soutien au peuple palestinien organisée en fin d’après-midi place de la République, à Paris, à l’appel notamment de l’association CAPJPO-EuroPalestine. Arborant des banderoles comme « Gaza, stop génocide », ou « Palestine vivra, vaincra », plus d’un millier de personnes, notamment des étudiants, se sont rassemblées à partir de 18h30.

    « Faire pression » sur les gouvernements

    Après une précédente occupation, le 29 avril, par une cinquantaine de manifestants à l’intérieur de la Sorbonne, la police était intervenue pour disperser le rassemblement, à la demande du Premier ministre Gabriel Attal.

    Avec cette nouvelle action, les militants, qui ont scandé des « Rafah Rafah, on est avec toi », entendaient « faire pression » sur les gouvernements alors que l’armée israélienne a déployé des chars mardi dans Rafah et pris le contrôle du passage frontalier avec l’Égypte, dans le sud de la bande de Gaza, coupant l’accès pour l’aide humanitaire au territoire palestinien assiégé.

    « Nous ne pouvons rester silencieux face à l’injustice et à la souffrance. Nous appelons nos universités et notre gouvernement à écouter nos voix et agir en conséquence », ont écrit dans un communiqué les « étudiants des comités Palestine de la Sorbonne ».



    De son côté, le chef du gouvernement Gabriel Attal avait rappelé lundi soir, au dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), sa ligne de fermeté : « Nous n’accepterons jamais qu’une minorité manipulée prétende faire la loi. Personne ne doit empêcher les autres de travailler, d’étudier, de réviser ». Il avait aussi affirmé qu’il n’y aurait « jamais de droit au blocage » dans les universités françaises.

    Des interventions des forces de l’ordre ont également eu lieu mardi devant Sciences-po Paris, à deux reprises, pour disperser des rassemblements propalestiniens. Les sites de l’école parisienne sont devenus ces dernières semaines l’épicentre de la mobilisation étudiante en soutien à la population palestinienne.