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Billie Eilish et Beth Gibbons: deux albums, deux merveilles

Beth Gibbons et Billie Eilish sortent respectivement leur album, très réussi, vendredi 17 mai.
Beth Gibbons et Billie Eilish sortent respectivement leur album, très réussi, vendredi 17 mai. Domino Recording Co Ltd. SPUS/ABACA / USA Today

LE NUC PLUS ULTRA - Un vendredi heureux pour la musique: la superstar américaine de 22 ans livre son meilleur album et la Britannique, qui s'illustra avec Portishead il y a trente ans, sort un grand disque.

Billie Eilish, Hit me Hard and Soft

Annoncé il y a quelques semaines seulement, le troisième album de la jeune Américaine sort dans la foulée des nouveaux disques des poids lourds de la pop Beyoncé et Taylor Swift. À des années-lumière de la production XXL de ces deux méga stars, Billie Eilish oppose une alternative franchement réussie. Ce n’est pas parce qu’elle est devenue une superstar qu’elle a abandonné sa singularité, bien au contraire.

Sur ces nouvelles chansons, la jeune femme creuse ce qui fait son style : une manière d’artisanat soigné confectionné avec son frère. Pourquoi changer une méthode qui a touché tant d’auditeurs, après tout ? Pourtant, en apportant une plus grande sophistication dans les arrangements et les climats, le frère et la sœur signent ce qui est peut-être leur meilleure production.

Sombre, intime et ramassé, le disque fait montre à la fois d’assurance et de vulnérabilité: Billie Eilish n’a assurément ni besoin ni envie de participer à la fête foraine à laquelle ressemble la pop actuelle. Peu de tubes accrocheurs au programme, si ce n’est l’excellent Lunch, ode à l’amour saphique et aux joies du cunnilingus. Pour autant, Billie Eilish ne signe jamais un album complaisant, ne surjouant pas les causettes mais ne cachant pas non plus ses plaies et ses blessures. Ce qui nous la rend plus proche que les divas un peu glacées façon Taylor. Billie Eilish ne vise pas la perfection, et tant mieux. Et, surtout, il y a les chansons. Birds of a Feather est une merveille pop, les ambiances folk de Wildflower, les programmations electro de Chihiro. Et aussi l’arpège mélancolique de The Greatest, et son chant murmuré, dans un souffle, qui se charge soudain d’électricité et de rage à peine contenue. «Je t’aimais et je t’aime encore» y chante-t-elle déchirante. Un superbe album.

Beth Gibbons, Lives Outgrown

Nous avions découvert le timbre sidérant de cette chanteuse majuscule il y a tout juste trente ans, alors que le premier album du groupe Portishead recueillait un triomphe bien mérité. Glory Box, devenu un classique instantané, a remarquablement traversé les années. Outre les trois albums du groupe, artefacts indépassables du mouvement trip hop, Beth Gibbons s’est faite trop rare. En 2002, elle collaborait avec Rustin Man sur le très beau Out of Season. Il y a quelques années, elle avait interprété avec beaucoup de grâce, la Symphonie no3 de Górecki. Lives Outgrown est donc son premier véritable album solo, et c’est une merveille.

Il y a bien longtemps que l’Anglaise a abandonné les rives du trip hop pour s’épanouir dans un folk enraciné et intense. Enregistrées pendant une décennie au rythme d’une par an, ces dix chansons sont autant de petits miracles de délicatesse et de profondeur. À l’approche de la soixantaine, la chanteuse y dresse le bilan d’une vie, avec ses renoncements et son acceptation de l’avenir. La réalisation, superbe, est signée James Ford, collaborateur régulier des Arctic Monkeys. Elle additionne les surprises, et s’avère bien plus complexe qu’on pourrait s’y attendre. Voici un album qui se révèle au fil des écoutes. Beth Gibbons y aborde la tristesse, la mortalité de ses proches, sa ménopause, et le constat que la vie est courte. Un grand disque.

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