Annales de la Congrégation des Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs / | BAnQ numérique
Aller directement au contenu. Aller directement au menu principal.

Annales de la Congrégation des Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs /

1930-1936., Livres, Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs

Saint-Laurent :Congrégation des Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs,1930-1936.

Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs

Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-DouleursReligieuse de Sainte-CroixMarie-de-Sainte-Amélie, soeur, C.S.C., 1851-1922Maurault, Olivier, 1886-1968 , préf.Lalande, Louis, 1859-1944 , préf.

1930, 1936

fre

1930-1936., Livres, Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs
de Sainte-Croix ANNALES DE LA CONGRÉGATION DES Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs QUATRIEME PARTIE 1894-1902 Administration de Mère Marie de Saint-Basile (Suite) ST-LAURENT, P.Q.1936 SA SAINTETÉ LÉON XIII £>a §>atutrlé îGrmt 3CIU a rnnfirmr, béni rt ratifié l'autnttomtr or ttotrr (Uougrégattuu au Qlanaûa.Une Religieuse de Sainte-Croix ANNALES DE LA CONGRÉGATION DES Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs QUATRIÈME PARTIE 1894 - 1902 Administration de Mère Marie de Saint-Basile (Suite) ST-LAURENT, P.Q.19 3 6 I Nihil obslal: Père L.PINEAULT, censor Marianapoli, 29 juin 1935 Imprimatur: ! EM.-ALPH.DESCHAMPS, V.G., ÉV.DE THEXNESIS, auxiliaire de Montréal Montréal, 29 juin 1935.[3 VOUS, ÂMES RELIGIEUSES, QUI VIVEZ À L'OMBRE DES AUTELS, QUI COMPRENEZ LE PRIX DES ÂMES; QUI, POUR EN SAUVER UNE SEULE, SERIEZ PRÊTES À SACRIFIER MILLE VIES; FAITES-vous DONC VICTIMES DE PROPITIATION POUR TANT DE MILLIONS DE PÉCHEURS QUI SE PERDENT, MÊLEZ VOS LARMES À CELLES DE LA MÈRE DES DOULEURS.Mgr Ignace Bourget aux Soeurs de Sainte-Croix DANS LA CROIX DE JESUS-CHRIST CHAPITRE PREMIER SOMMAIRE: 1894 — Un regard en arrière, un peu de statistique — Lettre pastorale sur l'éducation — Récit succinct du zèle de mère Marie de Saint-Basile pour la formation des religieuses éducatrices — Le travail de la première directrice générale des études en faveur de l'instruction — — Moyens employés par la mère supérieure pour aider ses filles à atteindre la perfection de leur saint état.Décès de soeur Marie de Sainte-Albine (Pelletier) et de soeur Marie de Saint-Euphémie (Plourde) — Soeur Marie-de-Saint-Gabriel est nommée maîtresse des novices — M.Patrick Craven donne le maître-autel — Achat de la terre ROCHON — Visite du R.P.Dom Gréa et de l'honorable A.-P.Caron — FONDATION DU COUVENT DE ST-HYACINTHE, New-Bedford, Mass.Il n'est peut-être pas hors de propos de jeter un coup d'ceil rétrospectif sur les dix premières années de l'administration de mère Marie-de-Saint-Basile.Nous avons vu, d'abord, que sa principale sollicitude en prenant les rênes du gouvernement général fut de conserver le véritable esprit religieux dans la communauté, par l'union des coeurs dans la charité.Elle y réussit au moyen de la grâce qui vint toujours à son aide.Les prières sollicitées dans toutes nos maisons pour obtenir une augmentation de sujets et, par suite, l'extension de la Congrégation, ne restèrent pas sans résultats.La preuve irrécusable, nous la trouvons dans les onze fondations nouvelles en huit années.Deux cents postulantes avaient été reçues, quelques-unes seulement ne persévérèrent pas.Par contre, vingt-neuf soeurs étaient descendues dans la tombe.Celles-là, la foi nous l'enseigne, ne sont pas mortes à jamais: elles veillent sur leur famille religieuse.8 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1894 Pour ce qui concerne les bienfaits de la Providence, l'année 1893 a été particulièrement favorisée.Dans toute la province, le beau geste de l'Exposition Colombienne a allumé dans les maisons d'éducation chrétienne et dans les classes intellectuelles un zèle plus ardent encore pour cette oeuvre capitale: "la formation de la jeunesse ».Nos Seigneurs les archevêques et évêques des provinces ecclésiastiques de Québec, de Montréal et d'Ottawa publient une lettre pastorale qui ouvre encore de larges horizons sur les obligations du corps professionnel.Comme notre communauté en fait partie, nous aimerions présenter ce document à nos éducatrices présentes et futures; mais le cadre de nos Annales est limité.Nous donnerons, cependant, les points traités dans cette lettre.1 ° ÉDUCATION DANS L'ÉCOLE — 2° DROITS DE L'ÉGLISE EN MATIÈRE D'ÉDUCATION — 3° HEUREUSE INFLUENCE DE L'ÉGLISE SUR L'ÉDUCATION — 4° BUT DES ÉTUDES CLASSIQUES — 5° L'ÉGLISE, AMIE DU VRAI PROGRÈS.De la lumineuse doctrine contenue dans le développement de ces divers points, nous ne conservons que le dernier paragraphe qui en est la synthèse: « 0 sainte Église catholique, pouvons-nous nous écrier avec saint Augustin, mère véritable des chrétiens, c'est vous qui formez l'éducation du genre humain; vous vous faites enfant avec les enfants, forte avec les jeunes gens, tranquille avec les vieillards, en suivant ainsi les progrès non seulement du corps, mais de l'âme.« Voilà, Nos Très chers Frères, la direction que nous croyons devoir vous donner, pour assurer le bonheur et le salut éternel de vos enfants.Veillez sur eux; éloignez-les des mauvaises compagnies, ne leur permettez jamais des lectures dangereuses.Que votre vie vraiment chrétienne leur prêche constamment l'amour du devoir, l'esprit de sacrifice, la fidélité aux pratiques religieuses, la plus haute probité, le respect de l'autorité.Profitez des secours que l'Église de Dieu vous offre pour développer l'intelligence de vos enfants et former leur coeur.Pour y mieux réussir, respectez l'influence légitime de l'Église en matière d'éducation et ne perdez jamais de vue qu'elle est, de droit divin, la gardienne de l'âme de vos enfants.1894 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX g « Que le bon Dieu répande sur vous et sur vos familles ses plus précieuses bénédictions.Puissent vos chers enfants faire votre joie et votre consolation sur la terre et être plus tard votre couronne dans le ciel!.))1 Pour répondre aux enseignements de cette lettre, enseignements de si grande actualité, mère Marie de Saint-Basile insista davantage sur la formation des ouvrières évangéliques.Soeur Marie de Saint-Alphonse-de-Liguori, alors directrice générale des études, reçut des avis en conséquence; et cette femme intelligente, au coeur ardent, à l'âme apostolique, surveilla avec une délicate attention la mise à exécution du programme d'études récemment élaboré.Les maîtresses devaient attacher une importance capitale à la préparation de leurs classes, religieuses ou profanes; corriger judicieusement les devoirs des élèves, afin de stimuler leur ardeur dans l'ascension vers les sommets intellectuels.Comme la piété et le devoir d'état se tiennent toujours unis, les pensionnaires et les externes trouvèrent un précieux avantage dans l'Apostolat de la Prière, par le « Trésor du Sacré- Coeur », et dans « La Milice du Pape )) par le dévouement des zélatrices.Les parents remarquèrent un changement notable dans la conduite de leurs fillettes.* * L'époque des vacances n'apportait qu'un repos relatif aux maîtresses: la directrice des études organisa des classes de pédagogie, où chacune bénéficiait de l'expérience des consoeurs, et l'initiative personnelle recevait de nouvelles lumières.• Dans la matinée, les jeunes soeurs entendaient une conférence sur la vie religieuse et ses graves obligations, nous l'avons rappelé au chapitre IX.La retraite annuelle interrompait les cours, du 7 au 15 août; mais le 16, les études reprenaient jusqu'au 22 août, jour du départ des missionnaires, selon l'usage d'alors.1 Cette lettre pastorale se trouve dans le Tome Ile des « Mandements et lettres pastorales de Mgr Fabre ».10 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1894 Une fois rentrées dans leur mission respective, les soeurs ne se trouvaient point délaissées; la volumineuse correspondance de mère Marie-de-Saint-Basile prouve, jusqu'à l'évidence, l'intérêt qu'elle portait à ses filles spirituelles.Celles qui épanchaient leur coeur dans celui de leur mère recevaient des conseils aussi sages que fermes.Nous citerons quelques exemples: A une jeune soeur au tempérament vif et brouillon, mais franche et droite, la mère supérieure écrivait: « Votre caractère orgueilleux a donc encore remporté une grande victoire!.Et vous me demandez que faire?.Pauvre enfant, vous en humilier sincèrement auprès de X.et devant Notre-Seigneur, puis, reprendre avec courage et religieusement.Montrez-vous gaie, mais d'une gaîté pleine de réserve, à l'heure des récréations permises.« Ah! chère enfant, la charité! oui, je vous la recommande, ainsi que l'abnégation de vous-même; l'humilité, la soumission, la mortification de votre caractère.« Voilà ce que Dieu attend de vous.Ces vertus ne sont pas au-dessus de vos forces; la grâce de Dieu est là, sachez en profiter, craignez d'en abuser.C'est sérieux!.Ma fille, vous avez de bons désirs; mais n'oubliez pas que tout bon désir demande des efforts, pour le réaliser ».« Pensez donc, ma chère fille, que c'est pour l'amour de Dieu seul que vous avez quitté votre famille; c'est pour lui gagner des âmes, l'âme des enfants, surtout.Cette pensée vous réconfortera et vous rendra la vie plus douce et plus joyeuse.» La mère supérieure écrivait à une récalcitrante: .« Quelques mots aujourd'hui pour vous gronder, car vous le méritez!.Vous êtes où le bon Maître vous veut.et vous n'êtes pas contente?.Que vous faut-il donc?.Je réponds à ma question: plus de générosité, plus d'esprit de sacrifices, plus d'énergie ?.Vous en avez, pourtant, quand il s'agit des choses temporelles, et vous en manquez pour votre sanctification ?Réfléchissez aux bontés de Dieu pour vous.Il vous a tant aimée malgré vos misères, vos faiblesses de chaque jour; et vous serez plus portée à vous dévouer selon les desseins du divin Maître.Si, réellement, vous n'êtes pas heureuse, c'est que vous ne travaillez pas à 1S94 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 11 vaincre votre orgueil.Pensez-y à deux fois, la chose en vaut la peine; votre bonheur éternel dépendra de votre fidélité ».A une autre qui n'avait point mis à la porte de son coeur le pauvre esprit écolier: « Ma fille, vous ne vous plaisez pas dans votre mission ?Vous caressez l'ennui ?Vous comptez les jours ?.Ne comptez plus! .Calculez simplement les grâces sans nombre que le bon Dieu a répandues sur votre vie; ce sera plus pratique pour votre bonheur temporel et éternel.« Non, ma bonne fille, je ne puis pas vous changer de mission, vous passerez à X.toute l'année.C'est la volonté du bon Dieu sur vous.Souvenez-vous que la soumission généreuse à la volonté de Dieu, chaque jour, c'est la sainteté.« Avant de vous quitter, je vous offre un petit bouquet, respirez-en le parfum aussi souvent que possible.Le voici: « Plus la lutte est pénible, plus la récompense sera belle.» Mère Marie-de-Saint-Basile reprenait ses filles sans fausse douceur et sans respect humain.Sa plume devenait éloquente, quand il s'agissait d'encourager une bonne âme dans le travail ardu de la réforme de soi.En mère compatissante, elle ne s'étonnait point des faiblesses humaines et elle prescrivait le remède, infaillible pour qui veut le prendre: la pratique de l'humilité dans l'aveu de ses torts; la fidélité aux menus détails de la Règle; le recours à Dieu dans une prière confiante et résignée.Nous pourrions couvrir des pages de conseils, de reproches ou d'encouragements de la mère supérieure, mais ce que nous venons de dire suffit à prouver le zèle de notre mère.Les Actes de visites, les lettres circulaires visent le même but : « rendre meilleures ».Voici ce que nous extrayons d'un « Acte de visite » de 1894: « Les vertus qui découlent des voeux sont fortement recommandées.Ce rappel fréquent aux saintes obligations de notre vie religieuse entretient la ferveur et la régularité.Sainte Thérèse disait à ses filles : « Soyez les amies de la pauvreté.Tant qu'elle durera, la ferveur sera parmi nous ».A l'instar de notre vénéré Fondateur, mère Marie-de-Saint- Basile revenait souvent sur le point important du silence et plus spécialement du grand silence.Elle aimait à redire : « Dans toutes les maisons religieuses où le silence est fidèlement observé, les autres vertus sont en honneur ».12 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1894 « La charité qui unit les membres d'une communauté ne doit point s'affaiblir.Le Saint-Esprit dit: « Mettez à vos oreilles une haie d'épines et n'écoutez point la langue médisante ».Une religieuse Carmélite disait: « On reconnaîtra souvent de nombreuses qualités dans une personne et on ne les remarquera pas; mais si elle a un défaut, on le voit ».La surveillance des élèves! ce point si important ne passait pas au dernier rang.Dans ses conférences et dans ses écrits, mère Marie-de-Saint-Basile entrait dans tous les détails sur ce sujet et demandait aux maîtresses de s'appliquer à l'étude des caractères afin de venir en aide à leurs élèves dans la correction des défauts.L'esprit de mortification, essentiel à la perfection religieuse et à l'acquisition des vertus solides, trouvait un défenseur éloquent dans la personne de la mère générale.En religion, l'occasion de la pratiquer se présente à chaque instant du jour.« Heureuses, mille fois heureuses, les âmes fidèles à se mortifier!.» « L'humilité est le vrai caractère des enfants de Dieu; et saint Alphonse de Liguori ajoute : « Elle est la base et la gardienne de toutes les vertus ».Donc, pour se rendre à ces grandes leçons des saints, chacune doit mettre tout en oeuvre pour réaliser le but de sa sublime vocation.Non seulement le bonheur dans le temps, mais le salut éternel s'obtient à ce prix.D'après ces avis, les soeurs ne pouvaient se défendre d'aller à Dieu par une autre voie que celle de l'amour et de l'humilité, voie tracée par le Christ lui-même, aux jours de sa vie mortelle.Le temps poursuit sa marche, et, selon son habitude, il a pris au passage des existences précieuses dont la communauté aurait bénéficié pour ses oeuvres.D'abord, soeur Marie-de-Sainte- Albine (Pelletier) meurt à la fleur de l'âge.Qu'il en a coûté à cette jeune soeur pour faire le sacrifice de sa vie! elle voyait devant elle une route bien fleurie, bien longue! elle formait des projets de zèle.Apôtre ?elle voulait l'être dans toute la force du mot.Pauvre petite soeur! Le bon Dieu ne lui laissa que juste le 1S94 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 13 temps de préparer les préludes.Et la grâce vint à point pour lui donner le courage de faire son sacrifice en toute générosité, avant de ne rien commencer.Soeur Marie-de-Sainte-Euphémie (Plourde), qui survécut plus de deux années à sa guérison extraordinaire, entend sonner sa dernière heure.Cette fois, ce n'est pas l'estomac qui a miné sa vie, mais ce sont les poumons.Elle s'endormit calme et paisible dans le baiser du Seigneur qu'elle avait beaucoup aimé et fidèlement servi.Elle remplissait la fonction de maîtresse des novices depuis six ans.Cette pieuse soeur fut toujours une règle vivante.Sa prière était continuelle, mais non au préjudice de son emploi.Sa piété, si bien entendue, elle la communiquait aux autres.Soeur Marie-de-Sainte-Euphémie avait une foi à transporter les montagnes : elle voyait le bon Dieu dans ses supérieures et ne faisait rien que par obéissance.Elle mourut le 22 août 1894.Sa remplaçante dans cette importante et redoutable fonction fut soeur Marie-de-Saint-Gabriel (Fiché), femme d'expérience et de bon jugement, douée de fermeté, fort attachée à nos fondateurs et fidèle gardienne de la Règle.Au cours des vacances, M.et Mme Patrick Craven de New- York, père et mère de soeur Marie-de-Sainte-Claudia, offrirent à la chapelle le don splendide du maître-autel, celui-là même que l'on voit encore aujourd'hui.Ce don est estimé à mille dollars.Le 7 du mois d'août, la messe y fut célébrée aux intentions des généreux donateurs.Ce n'était pas leur première largesse et ce ne fut pas la dernière.A l'heure où nous écrivons ces lignes, tous trois sont disparus.Nous aimons à le croire: celui qui a promis de récompenser un verre d'eau froide, donné en son nom, leur a déjà accordé une félicité éternelle, par les mérites infinis du saint sacrifice, offert chaque matin sur l'autel, don de leur générosité.En cette année 1894, au début de septembre, le conseil général autorise l'achat de la terre de M.Denis Rochon, voisine 14 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1894 de la nôtre et occupant le No 373 du cadastre de la paroisse Saint-Laurent.D'après les procès-verbaux, « la Corporation des Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs » signe l'acte d'achat de cette terre, le 8 septembre.La nouvelle acquisition répondait à un besoin vivement senti; la communauté augmentait graduellement; en conséquence, il faudrait agrandir un jour ou l'autre et pourvoir, par la culture, à l'approvisionnement alimentaire de première nécessité.Mais avant d'en venir à posséder une terre arable, que de broussailles à détruire par le feu! que de travaux d'épierrement! Qui a jamais calculé la quantité de pierres employée au drainage ou à consolider les parois d'un fossé, et tout ce que nous en avons enlevé à notre terre rocheuse!.Après quelques années de durs travaux, le terrain rendait cent pour un.Le 24 novembre 1900, les autorités transportèrent le cimetière des soeurs sur cette terre neuve, devenue généreuse et hospitalière.Depuis 1867, nos soeurs défuntes reposaient à l'ombre de nos grands ormes, tout près de la communauté.Aujourd'hui, leurs ossements, leurs cendres, derniers vestiges de leur être humain, sont déposés dans ce champ nouveau.A cause de la distance, les soeurs ne se rendent plus processionnelle- ment au cimetière, durant la belle saison, pour réciter, chaque lundi, cinq Pater, cinq Ave et le De Profundisl.Par contre, toutes les religieuses aiment visiter ce lieu solitaire pour y prier encore, parcourir les stations du chemin de la croix, en songeant qu'un jour elles dormiront là leur dernier sommeil.Un visiteur de marque honore la communauté: le R.Père dom Gréa, restaurateur des Chanoines Réguliers de l'Immaculée- Conception en France et supérieur général de l'ordre.Il est accompagné du R.P.Supérieur du Nominingue et de l'abbé 1 Aujourd'hui, ces mêmes prières sont récitées le lundi, avant la lecture spirituelle.1894 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 15 Balthasar, son ancien élève, aujourd'hui chapelain des FF.Maristes à Saint-Hyacinthe.Ces personnages distingués sont reçus chez M.le chapelain, où le conseil général va les saluer.Invité à adresser la parole à la communauté réunie, le R.P.dom Gréa donne une touchante peinture des avantages de la vie religieuse et il félicite les soeurs d'avoir reçu la meilleure part et d'être affranchies de la tyrannie du monde.A la fin de septembre, le P.Beaudet, curé, partait pour l'Europe en compagnie du R.P.Renaud, es.a, afin de traiter des affaires importantes, concernant leur congrégation.Le 13 novembre, ils rentraient tous deux de ce lointain voyage, après avoir poursuivi leur route jusqu'à Rome.Les pieux pèlerins obtinrent une audience de Sa Sainteté Léon XIII.Entre autres objets présentés au Saint-Père, pour en obtenir une bénédiction et l'application des indulgences, se trouvait un superbe crucifix.Le R.Père curé l'offrit à la mère générale, en hommage de reconnaissance pour les prières adressées au ciel par les religieuses et leurs élèves, aux intentions des pieux voyageurs.Maintenant, nous aimons voir cette précieuse relique dans les mains de nos chères mourantes.Le 1er décembre des visiteurs distingués arrivent à la communauté: l'honorable ministre des postes, sir A.-P.Caron, accompagné de M.Girouard, député de Jacques-Cartier, du docteur Lachapelle, député d'Hochelaga, de M.Gohier, maire de Saint- Laurent.Ces messieurs sont reçus par M.l'abbé Demers, chapelain, et par le conseil général.Après les premières civilités, ils sont conduits à la salle de réception où un joli programme est exécuté.L'honorable ministre des postes fut très heureux dans sa réponse, en parlant du bien opéré par les institutions religieuses et de leur influence sur les destinées du pays.« Ces maisons d'éducation, » dit-il, « sont autant de foyers d'où rayonnent la religion et la civilisation, éclairées par une bonne et solide instruction ».Cette courte visite, si fortement appréciée, appelait un congé; on l'accorda.Tous ces messieurs se retirèrent emportant, 16 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1894 assurèrent-ils, un bon souvenir de leur passage au pensionnat Notre-Dame-des-Anges.* * * Le 8 décembre, la sainte Église commémorait le 49e anniversaire du dogme de F Immaculée-Conception.Pour la circonstance, M.le chapelain donna un substantiel sermon sur la fête et, avant la bénédiction du Saint-Sacrement, il reçut dans la Congrégation des Enfants de Marie: Mlles Berthe Telmosse, Albina Allaire, Amanda Cléroux, Joséphine Vandale, Anastasie Taille- fer et Nellie Reid.Déjà, cette année 1894 touchait à sa fin: seule, la radieuse fête de Noël irradierait ses derniers jours.Cette joie de l'âme et du coeur passera comme passent tous les terrestres bonheurs.Hélas! qu'il en glisse dans nos mains de ces bonheurs fugitifs! Levons les yeux vers les joies éternelles.* * FONDATION DE SAINT-HYACINTHE, NEW-BEDFORD — L'année 1894 vit une nouvelle fondation dans la Nouvelle-Angleterre.M.l'abbé Antoine Bérubé, curé de la paroisse St-Hyacin- the, fondée depuis trois ans seulement, tenta des démarches auprès du conseil général, dans le but d'obtenir des soeurs résidentes dans le couvent qu'il ferait construire pour les recevoir.Depuis deux ans, il soutenait une école, tenue par deux soeurs de Sainte-Croix de la paroisse du Sacré-Coeur.Elles se rendaient chaque matin, pour enseigner à deux cents enfants des deux sexes, très assidus à leurs classes.Deux maîtresses pour deux cents enfants!.En pareil cas, il faut l'intervention divine pour réussir à mettre quelque chose de pratique dans le coeur et le cerveau du petit peuple.Quel zèle! quelle constance! quelle activité n'a-t-il pas fallu aux institutrices pour réussir à intéresser un tel auditoire! Une éminente éducatrice a écrit dans un ouvrage intitulé: « L'âme de la femme» L'activité de la femme est peut-être une des qualités les plus bienfaisantes pour l'humanité.Nous venons d'en donner une preuve péremptoire.Sans l'activité, sans l'énergie féminine, comment résister à une telle besogne, deux cent cinquante jours par année ?1894 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 17 L'âme sympathique du bon M.le curé le comprenait et il plaida si bien sa cause auprès de la révérende mère générale qu'au mois d'août, il obtenait cinq religieuses pour son école.C'étaient : soeurs Marie-de-Sainte-Catherine-de-Sienne, supérieure, Marie-de-Saint-Camille-de-Lellis, assistante, Marie-de- Sainte-Bibiane, conseillère, Marie-de-Sainte-Antonine, Marie-de- Sainte-Marguerite-de-Cortone.Soeurs Marie-de-Saint-Simon et Marie-de-Saint-Athanase, les généreuses missionnaires des deux années précédentes, ne se trouvèrent point parmi les fondatrices.Ainsi vont les choses dans le champ de l'apostolat.Le 22 août, la nouvelle colonie arrive au couvent du Sacré- Coeur, New-Bedford.Elle est accueillie avec une fraternelle charité; de sorte que les soeurs se trouvent bien chez elles, en attendant leur maison respective.Le pasteur de ia paroisse, fort impatient de connaître ses futures auxiliaires, reçoit leur première visite.La supérieure et ses compagnes emploient ensuite les jours libres à l'achat du mobilier.Au prône du dimanche, à l'instar de ses confrères favorisés comme lui, monsieur le curé laisse éclater son bonheur et sa parole ardente ne suffit point à rendre ses sentiments.Avec une conviction tout apostolique, il expose à ses paroissiens le bienfait de la Providence de placer ainsi leurs enfants sous la garde de la Religion, de les sortir des écoles sans Dieu où tant de jeunes gens ont perdu la foi.La parole du pasteur est entendue!.Le 4 septembre, deux cent soixante-douze enfants sont inscrits.Le curé demande une quatrième religieuse institutrice.Les classes se tinrent d'abord dans le sous-sol de l'église.Ce n'était pas idéal, certes!.Mais les soeurs n'eurent pas trop à souffrir.Les élèves de Saint-Hyacinthe se sont toujours distingués par leur bonne tenue, leur docilité et leur assiduité.Dans le recul des années, nous constatons que cette mission a fourni d'excellents sujets à notre communauté; et deux de nos élèves sont revêtus du sacerdoce.1 1 Une de nos religieuses, poète et écrivain, soeur Marie de Sainte-Rose- line, (Roseline Gagné) a été élève de l'école Saint-Hyacinthe avant d'être étudiante au pensionnat de Saint-Laurent.Soeur Marie de Saint-Alphonse- de-Liguori, alors directrice générale des études, en visite à l'école Saint- 18 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1894 Monsieur le curé Bérubé a toujours été dévoué à son couvent et n'a jamais manqué de témoigner aux religieuses l'attention, les prévenances, le respect dû à ses auxiliaires dans le travail de la formation morale et intellectuelle de la jeunesse.CÉRÉMONIES RELIGIEUSES DE L'ANNÉE 1894 VÊTVRE— le 4 avril: Mlles M.Lapierre S.M.-de-Sain t-Désiré M.Holland S.M.-de-Ste-Françoise-Romaine VÊTVRE — le 25 juillet: Mlles Flora Kennedy S.M.-de-Ste-Paula Ellen Connors S.M.-de-St-Denis Mary McDougall S.M.-de-Ste-Albine Même jour — Voeux temporaires (Cinq ans) S.M.-de-Ste-Rose-de-Viterbe (Duquette) S.M.de-Ste-Philomène (Ainez) S.M.de-St-Louis-de-Gonzague (Murray) S.m.de-Ste-Ludivine (Jette) S.M.-de-Ste-Angéline (Gignac) S.M.-de-Ste-Emérentienne (Farley) S.M.-de-St-Albans (Mailloux) S.M.-de-St-Richard (Roy) S.M.-de-Ste-Alexandrine (St-Aubin) S.M.-de-St-Louis (Painchaud) S.M.-de-Ste-Agathe (Harrington) S.M.-de-Ste-Berthe (Kennedy) Hyacinthe, discerna ce beau talent littéraire et le cultiva.La regrettée soeur Marie de Sainte-Roseline est l'auteur de l'oratorio «Messagers évangéliques» composé pour notre « 75e » en 1923.Ce poème a été harmonisé par soeur Marie de Saint-François-Solano, r.s.c.MOINS VOUS COMPTEREZ SUR VOUS, MES CHÈRES FILLES, PLUS CE DIVIN MAÎTRE VOUS DONNERA DES LU- LIÈRES AVEC SA GRÂCE, POUR GOUVERNER SON OEUVRE.IL NE VEUT QUE DES SUJETS DOCILES, ET IL S'EN SERT POUR CONFONDRE CEUX QUI COMPTENT SUR LEURS TALENTS ET LEUR SAVOIR.Mère M.-des-Sept-Douleurs — — — — — — —— — — — — — — — — — — — - — — —-— — — — — — — — — —- 22 AXXALKS l)K LA Cl )X(!1! l'X! ATK )X [sur, clef du ciel pour vous, nies soeurs, ce n'est que cela: l'amour de Dieu prouvé par une grande fidélité à la Règle, ne cherchez pas ailleurs la sainteté.Ces deux souhaits, je vous les offre dans toute la sincérité de mon coeur sacerdotal.Je prie le bon Dieu de vous les accorder et je vous bénis.Le reste de la journée se passe dans les visites à l'infirmerie, dans des causeries sur le passé.On songe aux chères disparues et la plupart des soeurs prolongent leur séjour à la chapelle, afin que le divin Prisonnier ne soit pas délaissé, en ce jour où il versa pour notre salut la première goutte de son sang.Dès le 2 janvier, mère Marie-de-Saint-Basile envoie dans les établissements sa 14e circulaire.En voici la teneur: /.V CRUCE DOMIXI A'OSTRI JESU CHRISTI Saint-Laurent, le 2 janvier, 1895 Aies bien chères filles, « Les voeux que vous avez formés pour le bien spirituel de notre chère Congrégation et le nôtre en particulier ont été reçus avec une bien vive gratitude.Que vos âmes, en retour, soient inondées de cette paix délicieuse que Jésus est venu apporter sur la terre et qu'elles soient fortifiées par l'abondance des bénédictions célestes! « Que nous réserve 1895 qui vient de sonner à l'horloge du temps?C'est encore le secret de Dieu.Ames religieuses, n'envisageons pas cependant l'avenir avec inquiétude.Notre vie tout entière n'est-elle pas consacrée à Dieu par l'émission des voeux?et ne sommes-nous pas assurées, à l'avance, que chacun des instants qui composent ces douze mois seront marqués d'un sceau divin, si nous nous maintenons dans le sentier tracé par nos engagements sacrés?« Nous comptons déjà, pour plusieurs d'entre nous, de nombreuses années au service de Dieu.Ces années ont-elles produit des fruits de salut?Épouses du Christ, avons-nous correspondu aux grâces qui nous sont journellement prodiguées ?Avons-nous fait le bien que nous devions opérer dans les âmes à nous confiées ?1805 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 23 « Redoublons donc, rues chères filles, de générosité et d'énergie, dans l'accomplissement de nos devoirs religieux.Faisons de nobles efforts, afin d'extirper en nous ces racines du mal qui empêchent la croissance des vertus religieuses.J.es p:.-ion- qui ravagent notre âme, l'affaiblissent et la troublent ne doivent pas, toutefois, la décourager.Dieu n'est-il pas toujours prêt à entendre nos prières et ne trouvons-nous pas, dans la sainte Eucharistie, les grâces nécessaires pour triompher de nos ennemis ?Saint Paul disait: « Je puis tout en Celui qui me fortifie ».« Cultivons, mes chères filles, l'esprit de prière: il est le signe de la sainteté ».Quand vous voyez quelqu'un vivre de prière, dites: Voilà un saint ».(Père Eymard,).On ne se trompe jamais, à ce caractère.La prière est tellement la loi de la sainteté que quand Dieu veut élever une âme à lui, il n'augmente pas ses vertus, mais l'esprit de prière, c'est-à-dire sa somme de puissance.Il la rapproche davantage de lui-même, et voilà le secret de la sainteté.Quelle est notre foi, notre espérance, notre charité ?.« Développons aussi en nous la vie de sacrifice.Dieu, qui veut nous faire acquérir des sommes immenses de mérites, nous donne tous les jours l'occasion de nous sacrifier dans notre esprit, dans notre volonté, dans notre coeur, dans nos affections.Acceptons généreusement ces immolations journalières, et soyons assez amies de nous-mêmes pour faire de ces sacrifices le fécond aliment de notre vie spirituelle.« Prions beaucoup, mes chères filles, les unes pour les autres, afin que cette union de prières fasse descendre sur notre famille religieuse l'abondance des faveurs divines et nous permette d'atteindre le degré de perfection déterminé par Celui à qui nous nous sommes consacrées.« N'oublions pas les âmes de nos chères compagnes parties pour un monde meilleur; demandons à Dieu pour elles le repos éternel, objet de leurs ardents désirs.« Quant à nous, suivons si bien les comptes de notre conscience qu'ils soient prêts à être soumis au Souverain Juge si.dans ses décrets éternels, il choisissait la présente année pour demander, à chacune, raison des grâces spirituelles dont elle a été comblée.24 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 « Veuillez me croire, mes bien chères filles, avec les sentiments de la plus sincère fidélité, Votre très affectueuse mère en N.-D.-des-Sept-Douleurs, Soeur Marie-de-Saint-Basile, • supérieure générale Soeur Marie-de-Saint-Arsène, secrétaire générale.* * Dans les premières semaines de janvier, la communauté reçoit la visite de plusieurs membres distingués du clergé, entre autres, le révérend Père Dom Antoine, abbé mitre d'Oka.Il est d'abord l'hôte de M.le chapelain; le lendemain, 12 janvier, nous le voyons à l'autel pour la sainte messe.Dans la matinée, il entretient le conseil général; ensuite, il donne son temps pour entendre les confessions afin d'aider M.l'abbé Deniers, qui doit s'absenter.* * * De son côté, mère Marie-de-Saint-Basile reprend le cours de ses visites régulières, qu'elle doit faire annuellement.Le 14 janvier, elle part pour l'établissement de Saint-Scholastique, amenant soeur Marie-de-Sainte-Romaine, son infirmière, et soeur Marie-de-Saint-Alphonse-de-Liguori, directrice générale des études.L'inclémence de la froide saison d'hiver, avec ses tempêtes de neige, n'est-ce pas un motif suffisant de la dispenser de ces visites ou, tout au moins, de les retarder?Non! elle va porter à ses filles en Jésus-Christ toutes les consolations qu'elles sont en droit d'attendre.Le fardeau de l'administration d'une congrégation, spécialement à son début, est rendu plus lourd par les menus détails du programme.En biffer un seul?la supérieure générale ne le pouvait.En se rendant responsable d'une seule omission volontaire, non motivée, elle la porterait devant Dieu et devant les générations à venir.ÎS'.I.J DES SOEURS DE SAIXTE-CROIX 25 Les supérieures ont aussi des devoirs sociaux à remplir.Le 4 février, la soeur supérieure se rend à une invitation, faite depuis longtemps par les SS.des SS.NN.de Jésus et de Marie, à leur maison mère d'Hochelaga; soeur Marie-de-Saint-Arsène (Painchaud),secrétaire générale, l'accompagne, ainsi quel'annalis- te et gardienne du musée, soeur Marie-de-Sainte-Amélie (Dugas) ; elles reçoivent la plus cordiale, la plus fraternelle hospitalité.Comme les archives intéressent beaucoup la supérieure générale et la secrétaire, les religieuses mettent sous les yeux des visiteuses tout ce qui peut leur être utile: elles ont admiré l'ordre dans les cahiers et les registres, admirablement tenus.Le soir, au moment du départ, les religieuses d'Hochelaga demandent et obtiennent la permission de garder soeur Marie-de-Sainte-Amélie, deux ou trois jours, pour affaire d'herbier.Le 12 du même mois, mère Marie-de-Saint-Basile et soeur Marie-de-Saint-Théodore (Desjardins), vont visiter le nouveau couvent des Dames du Sacré-Coeur à Montréal.Tandis que notre supérieure générale cause avec madame la supérieure du Sacré- Coeur, ses conseillères et quelques anciennes, soeur Marie-de- Saint-Théodore s'entretient avec sa chère nièce, madame Bourque, ancienne élève de Notre-Dame-des-Anges, devenue religieuse du Sacré-Coeur.Il nous est agréable de faire revivre le souvenir de cette jeune fille, qui a laissé dans notre couvent des exemples admirables de piété et de vertu.En 1893, elle entre au postulat de Kenwood, N.Y.; elle fait son noviciat en France et revient ensuite à Montréal.Après l'émission des voeux de religion, elle s'applique davantage à perfectionner les vertus dont elle avait fait preuve au milieu de nous.Son frère aîné, Jésuite, lui fournit des lumières précieuses pour le grand et sublime travail de la vie intérieure.Plus tard, son autre frère, religieux de l'Ordre de Saint-Dominique, lui dispense les pieux conseils qui aident l'âme à s'élever au-dessus des frivolités humaines en favorisant son ascension vers les régions supérieures.L'excellente jeune soeur ne passa que neuf années en religion.Quand la fleur est épanouie, que sert-il d'attendre pour la cueillir ?.26 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 Les Anges vinrent la quérir, en 1902, au grand regret de sa communauté, qui l'estimait à juste titre.Elle fit une mort de prédestinée.• * * Au cours de février et de mars, la maladie se déclare en plusieurs de nos maisons.Quelques soeurs sont rappelées à la maison mère pour se rétablir complètement: une bonne ancienne, soeur Marie-de-Saint-Léon (Roy), de la mission de Fall-River; soeur Alarie-de-Saint-Cyprien, de New-Bedford; soeur Marie-de- Lorette, d'Alexandria; soeur Marie-de-Sainte-Caroline, de l'académie Saint-Ignace, à Montréal.Outre la peine de voir les santés s'affaiblir, il faut aussi pourvoir au remplacement afin de ne pas surcharger les autres soeurs.Donc, soeur Marie-de-Sainte-Ed- widge (Desautels) se rendra à Fall-River, soeur Marie-de-Sainte- Félicité, à l'académie Saint-Ignace, pour remplacer soeur Marie- de-Sainte-Caroline.Par bonheur, on dit que ces diverses maladies ne conduisent pas à la mort.Deo gratias.Après quelques semaines, les soeurs retourneront dans leurs missions respectives, à l'exception pourtant de soeur Marie-de-Saint-Léon (Roy); son âge avancé lui donne droit à un repos prolongé à la maison mère.Vers la fin du mois, le 20 février, une cérémonie religieuse se déroulait dans le huis clos de notre chapelle; cette fois, le public ne fut pas admis.Le lendemain, ou les jours suivants, les parents pourront venir contempler leur chère enfant sous le costume des « vierges consacrées ».La cérémonie de vêture est présidée par le R.P.Beaudet, as.a, curé de la paroisse, délégué par Sa Grandeur Mgr Fabre.En véritable fils du T.R.P.Moreau, notre Fondateur, le R.P.Beaudet emprunte, dans son sermon, quelques pensées émises par le Fondateur, lors de la première vêture en 1841.Il s'exprime ainsi: .« La novice entre dans la milice sainte: elle se revêt de Jésus-Christ lui-même, comme le veut saint Paul.Et suivant Bourdaloue, elle se revêt de la pauvreté de Jésus-Christ, puisque Isa".DKS SOEURS DE SAINTE-CROIX 27 l'habit religieux est un habit modeste et humble; elle se revêl de la pénitence de Jésus-Christ, puisque l'habit religieux est un habit pénitent.L'habit religieux, c'est une espèce de sacrement, je veux dire un signe sensible des dispositions intérieures et des sentiments invisibles de l'âme religieuse.A cet effet les personnes du sexe ajoutent le voile, ce voile que Tertullien, docteur de l'Église, compare à un bouclier qui doit étouffer les deux désirs de voir et d'être vu.« Le monde regarde l'habit religieux comme un vêtement honorable, en attendant le vêtement de gloire des bienheureux dans le ciel.Les soeurs portent aussi une cordelière: c'est le symbole et le signe de la chasteté et de la régularité des moeurs.Il résulte que les soeurs doivent avoir un grand respect pour leur habit religieux qui, même aux yeux du monde, est un habit d'honneur ».La cérémonie terminée, les nouvelles novices se réjouissent dans l'intimité de la famille religieuse.Puis, le mois de mars nous intéresse particulièrement! Ce mois rappelle des événements extraordinaires.Les saints docteurs ont écrit: « C'est au mois de mars que le monde a été créé : au mois de mars, les eaux du déluge se sont retirées; au mois de mars, le Fils de Dieu s'est incarné; il a souffert, il est mort au jour anniversaire de son incarnation; au mois de mars, la sainte Eucharistie fut instituée et les apôtres consacrés prêtres par le Fils de Dieu ».Le conseil général attendait une faveur extraordinaire, en ce mois de mars, faveur désirée depuis plusieurs années.Cette fois, il implora l'assistance de deux thaumaturges: saint Joseph et saint Antoine de Padoue.Pour assurer le succès de la requête, soeur Marie-de-Saint-Basile demanda à tous les établissements une neuvaine à saint Antoine, neuf mardis consécutifs, avec l'offrande d'un pain chaque semaine, pour les pauvres.Cette neuvaine commença le 4 mars; le 21, la question importante se réglait.Il s'agissait de l'achat d'un terrain sur la rue Mont-Royal, presque en face de l'église du Saint-Sacrement, pour y fonder un pensionnat; le contrat fut signé à la joie de la communauté.28 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 Vraiment! comment pourrions-nous douter de la puissante intercession de nos deux protecteurs?Il restait à l'économe générale de s'occuper activement des plans et de demander des soumissions.* * Le 28 mars, les saintes Reliques sont exposées dans la chapelle avec les pieuses cérémonies d'usage.Le lendemain, dans l'après-midi, un cierge, se repliant sur lui-même par l'action de la chaleur, met le feu à l'autel; une postulante s'en aperçoit et avertit aussitôt soeur Marie-de-Sainte-Eulalie (Malo) qui faisait le chemin de la croix, et soeur Marie-de-Sainte-Julie (Dagenais) ; elles arrivent à temps pour porter secours ; toutes deux eurent bientôt raison du feu qui avait déjà brûlé deux nappes.Les pauvres soeurs ne s'en tirèrent pas sans porter sur les mains des marques de leur zèle à protéger les choses saintes.Instinctivement, notre reconnaissance s'adresse au bon Dieu et à son grand serviteur, le vénéré P.Moreau, notre Fondateur, dont le secours, en pareille occurrence, arrive toujours à point.Un événement important dans l'histoire de Montréal attire l'attention de l'autorité ecclésiastique.Il s'agit du futur Concile provincial, annoncé pour le mois de septembre.Mgr l'Archevêque, désirant obtenir la protection du ciel sur cette importante réunion, sollicite les communautés religieuses de son diocèse d'aider de leurs prières ferventes et surérogatoires.En conséquence, Sa Grandeur désigne à chacune un jour d'adoration devant le Saint-Sacrement exposé toute la journée.Pour les SS.de Sainte-Croix, le 6 avril échoit aux adoratrices; et comme les intérêts spirituels du diocèse se trouvent en jeu, les soeurs se font suppliantes devant la sainte Hostie; elles implorent aussi le secours de l'Esprit-Saint en faveur des Pères du Concile qui traiteront les graves intérêts de la religion et des âmes.Ce mois d'avril amenait la Grande Semaine] Outre les importantes cérémonies liturgiques des jours saints, le dimanche de ls<>.-> DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 29 Pâques réservait aux religieuses une joie spirituelle à nulle autre semblable.Eh quoi! Deux grandes solennités le même jour! la Résurrection du Christ et les Quarante-Heures ?Seigneur, c'en est trop!.La messe d'ouverture est célébrée le samedi saint avec le chant des premiers Alléluias.A ce moment commencent les exquises dévotions; elles se continuent jusqu'au lundi de Pâques.La lumière scintillante des cierges fait ressortir l'or de l'ostensoir; les émeraudes et les rubis resplendissent autour de la blanche Hostie.— « véritable perle » selon l'expression de saint Anselme.Perle divine, rien ici-bas ne peut lui être comparé.Cette perle ne rayonne pas à nos yeux mortels; seule, l'âme remplie de foi perçoit cette lumière incréée.Cette perle?mais c'est Jésus! Jésus anéanti! les coeurs pieux ont compris, ces jours derniers, ce qu'il en a coûté de souffrances, d'humiliations et d'amour à ce divin Sauveur pour devenir notre Hostie! Les heures d'adoration sont consacrées à l'action de grâces et à la réparation; car il y a toujours des coeurs ingrats qui ne savent pas aimer l'Amour, des aveugles volontaires qui refusent de contempler les plaies sanglantes du divin Ressuscité.Pour tous, les âmes pieuses demandent pardon et miséricorde.A la fin d'avril commencent les négociations à propos du pensionnat projeté, sur la rue Mont-Royal.Huit jours durant, les soumissionnaires dont la liste est dressée viennent à tour de rôle examiner et étudier les plans mLs à leur disposition, dans une salle préparée à cet effet.Le 15 mai, les contrats étaient signés entre la Corporation des SS.de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs et MM.Prénoveau et Martineau pour la maçonnerie; M.J.Renaud pour la boiserie et le plâtrage; MM.Lessard et Harris pour la couverture et le système de chauffage et M.Lenoir pour le vitrage et la peinture.M.J.-B.Resther, architecte, ayant préparé les plans et devis se chargea de la direction des travaux.Or, il arriva qu'au milieu de l'ouvrage, M.J.-B.Renaud décéda, au regret de tous; MM.Grothé et Frères furent appelés à signer un nouveau contrat et à continuer l'entreprise.Les 30 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 entrepreneurs travaillèrent avec diligence, car le couvent devait être livré pour la rentrée des élèves, septembre 1896.* * Au cours du mois de mai, le R.Père Nolin, B.J., le grand promoteur de la dévotion au Sacré Coeur de Jésus, venait établir, chez nos pensionnaires, les bases de « La Milice du Pape ».Cette innovation donna lieu à une belle cérémonie dans notre chapelle.Plusieurs élèves, préparées d'avance et désignées par leur bonne conduite, sont admises dans « l'ordre de la Croix »; d'autres, dans celui de « La Tiare », Le R.Père donne une instruction fort intéressante sur la dévotion au Pape.Nous sentons passer dans ses paroles toute la force de son âme d'apôtre et de fils très dévoué de la sainte Église.Quelques jours plus tard, M.le chapelain fait une seconde promotion avec le même cérémonial.A la belle fête de l'Ascension, le 23 mai, s'ajoute celle de la première communion.Les parents des dix-sept petites privilégiées assistent, nombreux, à la sainte messe.Avant et après la communion, M.l'abbé Demers prononce une allocution touchante : les pères et les frères sont visiblement émus, tout comme les mères.Le papa de l'une des fillettes, qui n'a pas assisté à la messe depuis quinze ans, se fait surtout remarquer par son émotion, qu'il ne réussit pas à dissimuler.Les parents se pressent au festin eucharistique à la suite de leurs enfants.Cette scène toujours impressionnante d'une première communion remplit de consolation non seulement les parents et les maîtresses des petites communiantes, mais encore les soeurs de la communauté.Cette fête se clôt par la rénovation des promesses du baptême et la bénédiction du Saint-Sacrement.Comme complément à ce bonheur du 23 mai, Sa Grandeur Mgr E.-C.Fabre, archevêque de Montréal, vient administrer le sacrement de confirmation.Monseigneur est assisté du T.R.Père Français, supérieur général de la Congrégation de Sainte- Croix, du R.P.Geoffrion, supérieur du collège de la Côte-des- Xeiges et de notre chapelain.1895 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 31 Le Saint-Sacrement étant exposé à la chapelle, premier vendredi du mois.La confirmation est administrée dans le plus beau parloir, orné, on ne peut mieux pour la cérémonie.Quelques maîtresses et les plus grandes élèves trouvent place dans la chapelle improvisée.Quoi qu'il en soit du lieu où la fête se déroule, ces jeunes enfants écrivent, en ce jour de la première communion et de la confirmation, la plus belle page de leur vie.• * * Monseigneur nous honore encore de sa visite les 10 et 17 juin.Sa Grandeur aime se reposer quelques instants chez le chapelain avec lequel elle prend le dîner avant de se rendre clans les paroisses voisines.Le 14 juin, religieuses et élèves célèbrent solennellement la patronale de mère supérieure générale.Un beau congé et les examens de fin d'année suivent cette fête.Examens! Congé! Le contraste ne se trouve que dans les mots ; les braves coeurs demeurent quand même dans la joie et la confiance.Le 17 juin, les cours gradué et sous-gradué subissent oralement la première épreuve des derniers examens, en présence de M.l'abbé Joseph Deniers, chapelain, de la supérieure générale, de la directrice générale des études, de la directrice du pensionnat, soeur Marie-de-Sainte-Béatrix-du-Sacré-Coeur : les maîtresses ont de droit leur place réservée.Le combat est rude, car le chapelain est habile lutteur; mais les candidates tiennent ferme et la séance redoutée se termine par des félicitations.Le lendemain, mère Marie-de-Saint-Basile confiait à la poste une lettre circulaire, en réponse aux voeux adressés par ses filles absentes à l'occasion de la Saint-Basile.Voici cette lettre: DANS LA CROIX DE JÉSUS-CHRIST Saint-Laurent, le 18 juin 1S95 Mes bien chères filles, « La vie religieuse nous procure parfois des jouissances et dos consolations bien propres à resserrer les liens de famille entre 32 AXXALES DE LA C'OXCiUKGATIOX les membres d'une même communauté.La fête de Saint-Basile, en distribuant à chacune de nous sa part de joie et de bonheur, apparaît à nos yeux comme une fraîche oasis au milieu du désert aride que nous parcourons sous le regard de Dieu.Notre reconnaissance pour vous ne se mesure pas à de simples paroles ; et nous ne saurions trop vous remercier des ferventes prières et des souhaits affectueux que vous avez fait monter vers le ciel en notre faveur, comme l'encens béni du sanctuaire.« Le fardeau de la supériorité nous découvre chaque jour notre impuissance à diriger les âmes confiées à notre zèle.Aussi, combien sentons-nous le besoin d'une assistance toute spéciale du bon Dieu pour ne pas nous laisser abattre sous le poids d'une telle responsabilité et devenir un obstacle aux desseins de sa miséricorde sur notre Congrégation; veuillez donc continuer de nous venir en aide par vos bonnes prières et partager dans la mesure de votre charité le fardeau de notre charge.« Vous avez donc, mes chères filles, une large part dans les ardentes supplications adressées au Coeur de Jésus, dans le Sacrement de son amour.N'est-ce pas là que doivent converger tous nos désirs de perfection, tous nos efforts dans la pratique des vertus de notre sublime vocation ?Où puiser un plus grand amour de l'humilité, ailleurs qu'au pied du sanctuaire ?Où trouver de plus beaux exemples de charité, de silence, de patience, de douceur, de détachement ?Ces précieuses vertus, nous les demandons chaque jour pour vous, qui nous êtes si chères.« Nous aurons le plaisir de vous souhaiter, dans quelques semaines, une cordiale bienvenue et nous nous réjouissons à la pensée de partager avec vous la vie de famille.Vous vous reposerez des fatigues d'une année de labeurs, tout en préparant vos âmes par la prière à se réconforter dans une fervente retraite.En prévision de ces grâces abondantes, efforcez-vous plus que jamais de sanctifier vos moindres actes par une grande pureté d'intention, une parfaite obéissance à vos supérieures, vous défiant surtout du subtil poison de l'amour-propre qui peut affecter les actions les plus saintes.« Nous recommandons à vos pieuses supplications notre chère Communauté, en particulier nos malades, afin que le bon 1X95 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 33 Dieu leur accorde le bienfait de la santé ou les grâces voulues pour supporter leurs souffrances avec courage et soumission à sa sainte volonté.« Nous sollicitons de nouveau, mes chères filles, vos ferventes prières pour le succès de la construction du pensionnat, rue Mont-Royal.Les recettes de la Congrégation sont si limitées que nous devons réclamer une assistance toute particulière de la divine Providence pour mener cette oeuvre à bonne fin.Evitons les moindres dépenses qui ne seraient pas absolument nécessaires, et que chacune verse sa part de contribution à l'édifice que nous élevons à la gloire de Dieu et à la noble cause de l'éducation.Vous serez ici, le 16 juillet; en attendant le plaisir de nous revoir, je demeure, mes bien chères filles, avec la plus sincère affection, Votre mère toute dévouée en Notre-Dame des Sept-Douleurs, Soeur Marie-de-Saint-Basile, R.S.C.supérieure générale Le 21 juin, la fête du Sacré-Coeur de Jésus est célébrée avec toute la dévotion traditionnelle.Dans la soirée, il y a réception d'Enfants de Marie; les privilégiées du jour sont: Mlles Glaphyre Théoret, Anna Goyer, Eugénie Boisvert, Agnès Gahan, Marguerite Gahan et Astérie Toupin.Que notre digne Mère et la leur, les garde sous son manteau virginal! Une réception d'Anges Gardiens et la sixième promotion dans l'ordre de « La Tiare » suivent celle des Enfants de Marie.En somme, cette journée consolante et belle laisse une heureuse impression: les très saints Coeurs de Jésus et de Marie sont glorifiés dans notre humble sanctuaire, par nos enfants, c'est là une consolation pour notre famille religieuse qui n'ambitionne que la plus grande gloire de Dieu.Dans la nuit qui suivit la fête du Sacré-Coeur les soeurs échappèrent providentiellement à une déplorable catastrophe.34 ANNALES DE LA CONCiKECSATK >N L895 Les ouvriers employés aux travaux de la couverture de l'église commirent l'imprudence de laisser, entre l'église et le couvent, une chaudière pleine de charbons enflammés, et il faisait grand vent.Après la prière du soir, les soeurs, se rendant au dortoir, entendent le pétillement de la houille; elles s'avancent à la fenêtre et voient briller la flamme.Plusieurs soeurs descendent et enlèvent le dangereux récipient, qui eût causé des pertes irréparables.Le lendemain, samedi, les soeurs font éclater leur reconnaissance envers la très sainte Vierge et notre vénéré Fondateur, qui les ont préservées, encore une fois, d'un très grand péril.L'action de grâce, se continue le surlendemain, pendant la procession du Saint-Sacrement organisée à l'intérieur du couvent.Enfin, se lève le jour désiré: la distribution des prix.La séance est présidée par notre digne chapelain, l'abbé Joseph Deniers.A ses côtés, nous voyons les RR.PP.Beaudet, c.s.c, curé de la paroisse, E.Vanier, Hudon et Viau, c.s.c, et quelques ecclésiastiques du collège.Les jeunes filles qui sortent avec honneur de cette fête sont: Ailles Émilienne Benoit, qui reçut la médaille d'or des graduées; celle du cours supérieur est octroyée à Mlles Annie O'Grady, Berthe Telmosse, Albina Allaire, Desneiges Brunet et Bernadette Hébert.Aille Thérèse Alathieu est décorée pour la bonne conduite, la politesse et les bonnes manières.Le président termine cette séance par un magistral discours, dans lequel il exalte le système d'éducation donnée dans cette maison et exhorte les élèves à garder à jamais dans leur coeur les bons principes reçus.Aux finissantes, il souhaite une heureuse traversée sur cette mer houleuse et rageuse sur laquelle elles vont bientôt s'embarquer: « Mesdemoiselles,» leur dit-il avec tout son coeur de prêtre et de père, « sans la Vierge bénie vous ferez naufrage! jetez souvent les yeux sur votre Étoile, enveloppez-vous de ses rayons et ayez confiance; ce n'est pas elle qui vous manquera ».Et nos chères jeunes filles s'en vont le coeur plein de sourires, l'imagination chargée de beaux rêves: elles entrent enfin dans la voie large, dans la vie, qu'elles ont toujours considérée |S!>.-, DES SOEURS DK SAI.VI K-CROI.X ••ir> l'oniiiic une partie de pUnxir.Combien de temps a duré cette partie'!.Aujourd'hui, elles savent que le plaisir n'a guère de consistance; la réalité désenchante la jeunesse irréfléchie! Ave Maris Stella.Les vanaces s'ouvrent; les intéressées profitent d'un peu d'accalmie pour renouer les bons offices entre les communautés soeurs.Dès le premier juillet, soeur Marie-de-Sainte-Véronique, maîtresse de dessin, et soeur Marie-de-Sainte-Amélie firent une promenade d'études chez les bonnes soeurs de Sainte-Anne, de Lachine.Toujours une cordiale réception les attend.La première s'intéresse aux ateliers de peinture, la seconde au musée, deux foyers d'importance pour les visiteuses.Dans l'un et l'autre endroit, elles prennent contact avec ce que les bonnes soeurs de Sainte-Anne mettent à leur disposition.A quelques jours de là, le 7 juillet, trois religieuses de la Congrégation de Notre-Dame: les révérendes mères Saint-Ana- clet, Saint-Georges et Sainte-Olivine visitent notre couvent: elles sont reçues par notre révérende mère générale, soeur Marie- de-Sainte-Béatrix-du-Sacré-Coeur, directrice du pensionnat, soeur Marie-de-Sainte-Amélie, annaliste, et soeur Marie-de-Saint- Alphonse-de-Liguori, préfète générale des études.Tout ce qui peut plaire aux distinguées visiteuses leur est présenté.Le musée d'abord, puisqu'elles désirent en créer un beau pour leur « Monk- land »; le programme d'études est ensuite examiné avec soin.Cet échange mutuel de connaissances pratiques est très profitable entre les membres de diverses communautés enseignantes.Les soeurs de Sainte-Croix éprouvent un réel bonheur à partager leur petit « avoir ».Elles ont tant reçu d'ici, de là!.C'est en resserrant leurs liens que les maisons religieuses mettront leur enseignement bien au-dessus de celui que donnent les institutions non catholiques, lesquelles toutefois ont des avantages pécuniaires supérieurs aux nôtres.Au moment du départ, les aimables et doctes visiteuses se disent enchantées de leur promenade.36 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1S95 Le même jour, trois religieux de Saint-Viateur visitent le musée; ils y apportent une collection de cent trente-six insectes.Ces excellents Frères ont donné plus d'une preuve de dévouement à notre communauté.Celle-ci, de son côté, ne néglige rien pour se rendre utile.Présentement, le pensionnat donne l'hospitalité à deux jeunes filles aveugles.Elles profitent de leur séjour au milieu de nous pour écrire en divers endroits, au moyen du dactylographe, sollicitant une position comme professeur de piano.Ces bonnes demoiselles édifient les soeurs par leur piété et leur constance au travail.Le 8 juillet, s'ouvrent les exercices de la première retraite annuelle; le R.Père Desjardins, s.j., en est le prédicateur.Seulement dix-huit soeurs professes prennent part à cette retraite, car elle est spéciale au noviciat.Elle se terminera, selon la coutume adoptée, en la belle fête de Notre-Dame du Mont-Carmel.En ce même 16 juillet, les soeurs des SS.NN.de Jésus et de Marie, d'Hochelaga, célèbrent le cinquantième anniversaire de leur fondation.Comme notre révérende mère générale ne peut se rendre à Hochelaga, elle délègue soeur Marie-de-Saint-Eugène, assistante générale, soeur Marie-de-Saint-Jean-Baptiste, supérieure à l'académie Sainte-Brigide, soeur Marie-de-Sainte-Flo- rence, supérieure à l'académie Saint-Ignace, et soeur Marie-de- Sainte-Amélie.Cette fête imposante, rehaussée par la présence de cinq archevêques et évêques et une soixantaine de membres du clergé, laissera un souvenir impérissable dans la mémoire des excellentes filles de la pieuse mère Marie-Rose.Toutes les communautés non cloîtrées de Montréal y ont envoyé de nombreux représentants.La messe est célébrée par sa grandeur Mgr E.-C.Fabre, archevêque de Montréal, et Mgr Langevin, O.M.I., évêque de Saint-Boniface, donne le sermon.La fête religieuse terminée, les invités sont priés de passer dans les pièces où se trouvent exposés les travaux scolaires de chacune des sept provinces et ceux de la maison mère.Beau spectacle! Les visiteurs admirent l'esprit de solidarité des soeurs des SS.NN.de Jésus et de Marie comme l'habileté et le bon goût de leurs élèves.A cela, il convient de joindre leur esprit de communauté et leur hospitalité tout à fait fraternelle.1895 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 37 Le lendemain, Monseigneur, notre bienveillant supérieur ecclésiastique, est à Saint-Laurent pour une cérémonie de vêture et de profession.Sa Grandeur donne une courte mais substantielle allocution.Les parents des vingt et une religieuses à l'honneur, assistent nombreux à cette fête, toujours impressionnante et édifiante.Monsieur l'abbé Alphonse Brunet, du séminaire Sainte- Thérèse, devant s'embarquer prochainement pour l'Europe, en tête d'un pèlerinage à Lourdes, vient prendre congé des religieuses et se charger des lettres à déposer aux pieds de la Vierge bénie.Les soeurs sont heureuses d'offrir à ce digne prêtre bienfaiteur l'assurance de leurs plus ferventes prières pour le succès de ce long voyage.Il célèbre la sainte messe dans notre chapelle, aux intentions spéciales de la communauté.Le 23 juillet, il quitte Montréal avec un bon nombre de pèlerins.* * * Comme les travaux des élèves sont encore exposés à Hoche- laga, le 3 août, soeur Marie-de-Sainte-Béatrix-du-Sacré-Coeur, directrice du pensionnat, soeur Marie-de-Saint-Julien, préfète de discipline, s'y rendent à leur tour pour visiter les ouvrages et recevoir de nouvelles inspirations.Elles sont saluées par deux bonnes mères dont la courtoisie et la bienveillance confondent les visiteuses.Après avoir admiré à loisir les beautés, elles reviennent à Saint-Laurent où elles s'efforcent de communiquer leur enthousiasme.L'une a remarqué la méthode de musique expliquée, l'autre, les centaine de cahiers remplis de devoirs pratiques rangés avec goût, méthode et propreté; puis, les travaux à l'aiguille, broderies, tapisseries, etc.Cette diversité d'objets plaît beaucoup.* * * Après ces promenades entreprises dans le but du perfectionnement professionnel, s'ouvre la seconde retraite; le R.P.Desjardins accepte d'être encore le prédicateur des pieux exercices.8 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 Au troisième jour, alors que les esprits et les coeurs sont imprégnés des grandes vérités de la foi: la mort, le jugement, l'enfer, on annonce que l'une de nos soeurs, relativement jeune, soeur Marie-de-Saint-Wilfrid (Ellen Young), recevra le sacrement de l'Extrême-Onction et l'indulgence plénière In articule/ mortis.Cette nouvelle ne surprend personne; la jeune poitrinaire languit à l'infirmerie depuis plusieurs mois; dans le moment, elle est à toute extrémité.Nous pouvons lui appliquer les paroles du saint Évangile, troisième dimanche après Pâques: « Encore un peu de temps et vous verrez votre Dieu, votre Seigneur et votre Epoux )).Le 15 août, se clôture la retraite; le bon Père Desjardins n'a épargné ni son temps ni sa fatigue pour se rendre utile aux âmes.Sa doctrine pleine de lumière et d'onction produira de bons effets.Les retraitantes éprouvent un contentement spirituel qui rayonne sur les figures.Dans le cours de cette heureuse journée, M.l'abbé Joseph Deniers, chapelain, délégué par Mgr l'archevêque de Montréal, reçoit les voeux perpétuels de la jeune mourante.Le surlendemain de cette oblation totale, la jeune vierge s'endort dans le baiser du Seigneur, à l'âge de vingt-quatre ans.Cette chère soeur, entrée au noviciat à seize ans, très pieuse par nature, paraît n'avoir jamais perdu sa première ferveur.Les supérieures éprouvent un regret réel quand elles se voient en face d'une mort aussi prématurée.Mais en levant les yeux au- dessus de nos terrestres misères, dans ce chez-nous du ciel aux éternelles jubilations, le coeur se ressaisit et, s'inspirant de la foi, il répète: Seigneur, vous êtes le Maître de nos destinées.Si dans le jardin de Sainte-Croix se trouvent des fleurs dignes d'orner vos saints parvis, venez Seigneur, venez les cueillir! Le 18 août, la communauté entière est convoquée pour les solennelles assises que l'on est convenu d'appeler « Les Obédiences » : Dans cette séance, la révérende mère générale annonce que la mission de Fall-River est définitivement fermée.Cette nouvelle inattendue provoque de l'émoi dans toute l'assemblée.1895 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 39 Comme il a déjà été parlé de cette affaire, nous la passerons sous silence.Les nominations se trouvant terminées lorsque la nouvelle définitive de la fermeture de Fall-River parvient à Saint-Laurent, les soeurs destinées à cette mission se trouvent sans obédience et le conseil général venait de refuser la mission de Fitchburg, Mass.La supérieure proposée à Fall-River se rend à Fitchburg pour prendre des arrangements avec M.le curé Edmond Gratton.Le pasteur accepte avec empressement la proposition de soeur Marie-de-Sainte-Christine, supérieure, et il est décidé que la maison s'ouvrira.Tout sera prêt en septembre.* FONDATION DE FITCHBURG.— Cette petite ville fut fondée, en 1764, à quelques milles de Boston.Elle est traversée par la rivière Nashua et adossée à de jolies collines qui lui donnent un aspect pittoresque.La population, en 1895, était de trente mille âmes.C'est un centre de chemin de fer; la ville est aussi sillonnée en tous sens par les tramways.Elle possède deux paroisses canadiennes, dont l'une est desservie par les RR.PP.de la Salette.Les paroissiens de lTmmaculée-Conception exultent de bonheur, ainsi que leur curé, à la pensée de pouvoir confier leurs enfants à des religieuses.Les soeurs nommées pour cette mission sont: soeur Marie-de-Sainte-Christine, (Kernan), supérieure; soeur Marie-de-Sainte-Edwidge (Desautels), assistante; soeur Marie-de-Sainte-Louise (Loiselle) ; soeur Marie-de-Sainte-Do- mitilde (Gougeon), toutes quatre destinées d'abord à la mission de Fall-River.Quelques jours plus tard, soeur Marie-du-Cal- vaire (Painchaud), et soeur Marie-de-la-Xativité (O'Brien), vinrent partager les labeurs de l'enseignement.Deux cent trente élèves sont inscrits dès le premier jour.Les classes fonctionnent on ne peut mieux; pasteur, parents, élèves se félicitent de leur ^cole catholique.Mais, hélas! les plus belles choses ont le pire destin; après sept années de généreux labeurs et de prospérité, les religieuses de la mission de Fitchburg, au début prometteur, voient s'éva- 40 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 nouir toutes leurs espérances.Des raisons plausibles leur ont été soumises ; pour couper court à toute explication, nous nous contenterons de citer, à peu près textuellement, l'allocution donnée en chaire par le pasteur, et recueillie dans les chroniqus de la maison: « Le 15 juin, M.le curé Marcoux, successeur de M.Edmond Gratton, le Fondateur, annonce aux paroissiens le départ des SS.de Sainte-Croix et l'arrivée de leurs remplaçantes, « Les Fidèles Compagnes de Jésus ».« Laissez-moi déclarer d'abord, dit le pasteur, que la congrégation des SS.de Sainte-Croix est une institution enseignante de premier ordre et qu'il n'est venu à l'idée de personne de mettre en doute leur dévouement et leur capacité bien reconnus.Aussi, Mgr Beaven, notre évêque, écrivant à Mgr Fabre, archevêque de Montréal à l'occasion de ce changement, s'empresse de dire que de tous temps les soeurs de Sainte-Croix ont donné pleine satisfaction dans son diocèse.Pour ce qui me regarde, je n'hésite pas à dire que ces religieuses ont toute ma confiance, et que leurs écoles aux États-Unis, peuvent être comparées avec avantage à n'importe quelles autres écoles.Je connais en particulier celle d'Adams qui a eu, en peu d'années, un succès remarquable.1 « Les raisons qui ont motivé le départ des soeurs de Sainte- Croix de cette paroisse sont d'un tout autre ordre.La première et principale raison se trouve dans l'intérêt de l'enseignement catholique paroissial des Canadiens de Fitchburg.Pour nous, le couronnement de l'école confessionnelle c'est le High School tenu par nos soeurs avec le programme ordinaire et, de plus, l'enseignement de la religion et des éléments de la littérature française.« Or, les « Fidèles Compagnes de Jésus, » favorisées par des dotations considérables, sont en mesure de donner cet enseignement complet ; et, de fait, elles ont bâti à leurs frais une magnifique maison dans ce but, et elles possèdent le personnel requis pour l'enseignement supérieur.1 L'École d'Adams a été fondée au mois d'août 1889.1895 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 11 « Evidemment, il ne peut être question à Fitchburg de deux High Schools catholiques pour les Canadiens français.Tout ce que l'on peut espérer ici, c'est d'arriver à en alimenter un seul avec les douze cents à quinze cents enfants que l'on peut recruter dans les deux paroisses canadiennes.» Suivent d'autres raisons matérielles et la nécessité d'un HIGH SCHOOL pour répondre aux décisions du congrès de Springfield de l'an dernier.M.le Curé termine en disant: « L'exposé de ce plan a été soumis à Mgr l'évêque de Montréal et à la maison mère de Saint-Laurent.Après consultation des autorités majeures, le conseil général a décidé, avec un désintéressement qui l'honore, d'abandonner son droit acquis dans la paroisse de l'Immaculée-Conception.« Au reste, la Providence a ses vues dans tous les événements, et il s'élèvera une école de plus dans un autre centre canadien des environs; les soeurs canadiennes ne peuvent jamais suffire à toutes les demandes.Mais avant le départ des Soeurs de Sainte-Croix de notre paroisse, nous avons un devoir à remplir, c'est celui de la reconnaissance.Ces soeurs, qui sont ici depuis sept ans, se sont consacrées avec un zèle tout religieux à la formation morale et intellectuelle de nos enfants.Elles n'ont épargné aucune peine pour les faire avancer dans la science et dans la piété.Vous les avez vues à l'oeuvre, vous, paroissiens de l'Immaculée-Conception, et vous comprendrez qu'un froid merci ne saurait suffire à exprimer ce que vous ressentez au fond de vos coeurs.« Demandons alors au Sacré-Coeur de Jésus de répandre ses abondantes bénédictions sur les bonnes Soeurs de Sainte- Croix qui ont pris un soin maternel de la jeunesse de notre paroisse durant sept années et de rendre au centuple à cette cligne communauté le bien inappréciable qu'elle a opéré parmi nous.» En définitive, si la démarche de M.le curé et des paroissiens paraît loyale, à raison des finances, elle n'était pas très patriotique.La fermeture de cette maison occasionna de grands sacrifices aux soeurs qui en subirent l'épreuve.Le coeur s'attache aux âmes pour lesquelles il a souffert.Mais la manière loyale de traiter les affaires adoucit un peu le chagrin.Cette mission a AXXALHS 1)1.; L.\ COX( IK ICC! ATIOX 1895 donné à notre communauté six bons sujets, en sept années.Ce sont nos soeurs: Marie-de-Saint-Jean-Damascène (Loiselle), Marie-du-Bon-Conseil (Raymond), Marie-de-la-Salette (Lavrie), Marie-de-Saint-Valérien (Lafosse) décédée, Marie-de-Saint-Viateur (Bonin), Marie de Saint-Bertrand (Brousseau).1 D'autres jeunes filles sont venues les rejoindre plus tard.De FITCHBURG, les soeurs passent sans transition à SOMERS- WORTH, X.-H.Dans la vigne du Seigneur, les ouvrières de bonne volonté sont accueillies à toute heure.* * * Cette digression nous a éloignées de notre sujet; revenons au mois de septembre.Maintenant la vie régulière reprend son cours normal.Les pensionnaires sont revenues à l'Aima Mater.Les nouvelles postulantes sont plongées dans le silence de la retraite : mère Marie-de-Saint-Basile reprend le devoir consolant des visites officielles.Le 5 septembre, elle part avec l'économe générale pour visiter la maison Saint-Ignace, à Nominingue.Voyage fatigant et dangereux à cette époque; plus de cent vingt milles à parcourir en voiture, à travers les montagnes et les routes pierreuses, dans une monture plus ou moins solide.Cependant, à la pensée qu'elles vont porter là-bas la joie et le bonheur, elles acceptent avec courage les fatigues, les ennuis, les frayeurs des collines escarpées.Leur absence dure huit jours.Entre temps, les RR.PP.Louis- Marie et Etienne, Chanoines Réguliers de l'Immaculée-Conception de Nominingue, arrivent à Saint-Laurent.Ces religieux sont en tournée de quête dans la province pour la construction de leur église.Aujourd'hui, ils sont à la maison mère.Tous deux célèbrent la sainte messe dans notre chapelle.Après le déjeuner, le 1 A l'heure où nous écrivons ces lignes, la première est supérieure localr à la maison mère.1932.I89fi DES SOEURS DE SAIXTK-C'ROIX Y.', R.P.Carrier, c.s.c, professeur au collège, vient tout exprès pour saluer ces religieux avec lesquels il a fait connaissance dans une promenade de vacances dans le Nord.PuLs, les deux Pères visitent la communauté et le pensionnat, accompagnés de deux mères conseillères.Les élèves sont à leur salle de récréation.( 'hez les grandes, le bon père Etienne, se détachant du groupe qui l'accompagne, va s'asseoir à la tribune de la maîtresse et raconte aux demoiselles des traits fort édifiants, entremêlés de récits drolatiques, il provoque une hilarité charmante; le Père distribue des médailles et se retire.Les élèves ont trouvé trop courte cette détente inaccoutumée.Le lendemain, 13 septembre, la révérende mère supérieure rentrait de son voyage ; elle a le plaisir de rencontrer les Pères qui l'attendaient, pour le règlement de quelques affaires importantes.Après s'être remise de ses fatigues, mère Marie-de-Saint- Basile passe chez les pensionnaires.Elle désire leur souhaiter la bienvenue, leur donner de sages conseils relatifs à l'emploi du temps consacré à leur formation intellectuelle et morale.La fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs apparaît ensuite comme pour chasser l'ennui qui naît invariablement dans les premières semaines de l'année scolaire.Religieuses et élèves unissent leurs intentions à la sainte messe, à la sainte Communion.Les maîtresses sollicitent de tout coeur la puissante protection de la Mère des Douleurs, sur le travail à opérer dans le coeur et l'intelligence des écolières.Avec le secours du Ciel, l'année scolaire portera des fruits dans l'âme de cette jeunesse confiante et généreuse.Cette fête amène le congé traditionnel, parfaitement gardé depuis l'origine de l'Institut.En conséquence, le 23 septembre, vers huit heures du matin, onze voitures attendent les élèves pour les transporter à la « Rivière des Prairies », sur une ferme appartenant à M.Gervais Cousineau.Le placement dans les voitures se fait dans un bel ordre et, au témoignage des maîtresses, cette promenade n'enregistre aucun désagrément.Les élèves ont joui de tout: température, bon air, beau site, verdure, fleurs, 1S95 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 15 occasionnées par les scrupules, attribuèrent cet heureux changement à son humble soumission au directeur spirituel, et à sa constance à soutenir la pénible épreuve.Le R.P.Carrier, as.a, chanta son service funèbre.Le premier Concile provincial de Montréal ouvert le 29 septembre se terminait le 9 octobre.A la dernière session publique, toutes les communautés religieuses furent invitées à la cathédrale.Les soeurs de Sainte-Croix furent représentées par l'économe générale, soeur Marie-de-Sainte-Agnès; la secrétaire générale, soeur Marie-de-Saint-Arsène ; la maîtresse des novices, soeur Marie- de-Saint-Gabriel ; et notre doyenne, soeur Marie-de-Bon-Secours.Ces cérémonies de clôture furent grandioses et émouvantes; elles sont contenues en détail dans la Semaine Religieuse de Montréal.1 Les déléguées intéressèrent la communauté durant plusieurs récréations du midi et du soir, elles tenaient à partager leur joie avec les consoeurs moins privilégiées.Le grand événement du premier Concile provincial est terminé; les décisions relatées en détail dans le Xlle tome des circulaires de Mgr Fabre, page 131, concernant « La Presse », « Les abus de la presse », « Des droits de l'Église et de l'État à l'égard de la presse », « Des devoirs des fidèles à l'égard de la presse ».Sous le regard de Dieu et avec l'assistance de son esprit, les questions traitées sont de nature à affermir de plus en plus notre foi dans l'observation des lois divines et dans le respect de la discipline ecclésiastique.Maintenant, nous tournons nos regards vers notre famille religieuse pour laquelle le Dieu de toute bonté et miséricorde prépare de nouvelles grâces, de nouvelles lumières ajoutées aux grands moyens de sanctification.Il s'agit du deuxième Chapitre 1 Nos 12, 13, 14, 15 septembre et octobre de la présente année.41» AXXALES DE LA CONGRÉGATION lSOf) général.Mère Marie-de-Saint-Basile l'annonce dans la 16e circulaire.Nous la reproduisons intégralement: /.V CRUCE DOMINI NOSTRI JESU CHRISTI Saint-Laurent, 27 octobre 1895 Mes bien chères filles, En vertu de l'article 22 des Constitutions, la présente lettre circulaire convoque pour les derniers jours du mois de juillet prochain le Chapitre général de notre Congrégation.Ces assises solennelles, au cours desquelles s'élaborent et se décident les questions vitales d'une communauté, doivent être pour nous l'occasion de redoubler de ferveur afin de nous préparer saintement à ce grand oeuvre de la réorganisation de notre famille religieuse.L'Église dans sa sollicitude, attache une telle importance à ces réunions que, dès les premiers siècles du christianisme, elle en établissait la coutume et la consignait dans ses lois directives.En 1215, Innocent III sanctionnait le décret par lequel le Concile de Latran déclare « obligatoire la tenue des Chapitres généraux », et le Concile de Trente ratifiait plus tard cette décision, en la confirmant d'une manière encore plus énergique.Ce désir si nettement exprimé de la part de notre Mère la sainte Église; le besoin que nous ressentons d'étudier la marche de notre Institut; les graves questions qui seront débattues au cours des diverses séances; les lourdes responsabilités qui pèsent sur les Capitulantes, nous imposent à toutes le devoir, la nécessité d'implorer l'assistance divine, afin que l'Esprit-Saint préside à nos délibérations, nous inspire un zèle ardent pour l'accroissement du règne de Dieu dans les âmes et la sanctification des oeuvres qui nous ont confiées.Comme vous le savez, du reste, nous travaillons actuellement à la codification de nos règles afin de former un statut homogène, clair, précis, qui puisse favoriser l'expansion de la vie religieuse dans la communauté.Pour conduire cette oeuvre à bonne fin, nous vous engagions, au mois d'août 1890, et aux vacances dernières, à prendre note des observations et corrections que vous 1S95 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 47 ingériez utiles au bien de la Congrégation.Veuillez donc nous transmettre, avant le 1er janvier prochain, le résultat de vos recherches et considérez comme un devoir de répondre aux pressantes sollicitations que je vous adresse aujourd'hui.Vos remarques seront transmises au Chapitre général, qui les discutera et les pèsera avec une scrupuleuse attention.La supérieure générale désigne ensuite les points des Constitutions à consulter et recommande d'envoyer, avant le 8 juillet, les documents spécifiés.Et elle continue: Prions, mes bien chères filles, pour le succès du Chapitre général, et ajoutons à ce que prescrit la règle 12e, (3e partie), des oeuvres de mortification, la fidélité à nos devoirs, afin que Dieu maintienne dans la voie de ses conseils cette chère communauté qu'il a protégée jusqu'ici d'une façon si miséricordieuse.Nous nous recommandons aussi instamment à votre charité, fermement convaincue que l'aumône de la prière suppléera à l'insuffisance de notre administration et nous rendra moins indigne de la charge qui repose si lourdement sur nos épaules.Je demeure, mes bien chères filles, dans les sentiments d'une religieuse affection, Votre mère dévouée en Notre-Dame des Sept-Douleurs, Soeur Marie-de-Saint-Basile, supérieure générale Soeur Marie-de-Saint-Arsène, secrétaire générale Après la lecture de cette lettre, il ne restait plus qu'à se livrer à la prière, abandonnant tout le succès du Chapitre au soin du divin Esprit.Le 17 du même mois, les bulletins de vote sont revenus à la maison mère.La communauté se réunit de nouveau pour le dépouillement du scrutin.Le résultat est proclamé séance tenante, le voici: Soeur Marie-de-Saint-Gabriel, maîtresse des novices, soeur Marie-de-Sainte-Thérèse, supérieure de la maison de Vergennes, Vt., sont les députées au prochain Chapitre général.Choix M'aiment judicieux, étant donnée la capacité des deux élues; femmes d'expérience et fortement attachées à l'esprit de nos 48 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 fondateurs; toutes deux ont vécu plusieurs années au berceau religieux de l'Institut, au Mans, France.Cette importante question des députées étant réglée, mère Marie-de-Saint-Basile reprend la visite des établissements, tandis qu'à la maison mère les soeurs se dévouent à l'amélioration du terrain pierreux et couvert de broussailles qu'est la terre « Rochon ».Les ardentes travailleuses tracent d'abord une allée faisant suite à celle du verger et de même largeur.Les employés creusent une tranchée que l'on remplit de pierres des champs; cette tranchée servira de drainage.Des plaines rouges sont plantées; le gazon est semé; peu à peu tout grandit, tout reverdit, tout fleurit et nous avons, tout à côté du cimetière, un superbe bocage ombragé, où les soeurs en vacances peuvent s'asseoir pour étudier, tout en respirant un air pur.Le silence n'est interrompu, de temps à autre, que par le chant des oiseaux et le bruissement de la brise dans la verte ramure.Ce bocage tranquille et salubre reçoit l'appellation de « PARC SAINTE-ANNE ».Les courageuses soeurs qui ont le plus contribué au succès de l'entreprise sont: soeurs Marie-de-Sainte-Romaine, Marie-de- Saint-Léonard-de-Port-Maurice, Marie-de-Saint-Marcel, Marie- de-Saint-Césaire, Marie-de-Sainte-Aurélie et tant d'autres consoeurs ont donné un coup de mainsl Nous voudrions voir leurs noms écrits sur les arbres dont nous sommes si fières aujourd'hui.A l'heure où nous écrivons ces lignes (1932) deux des ardentes travailleuses du « Parc Sainte-Anne» reposent tout près, à l'ombre des arbres qu'elles ont plantés.Les survivantes subissent les infirmités de la vieillesse et bientôt, trop tôt, elles iront rejoindre leurs devancières.Depuis 1895, que de religieuses sont venues se promener ou s'asseoir à l'ombre des érables rouges qui montent toujours leur tête vers le ciel!.Afin que l'histoire primitive du « Parc Sainte- Anne » ne reste pas inconnue aux générations futures, nous en avons tracé l'abrégé dans ces pages.PARC SAINTE-ANNE 1S9.5 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 51 CÉRÉMONIES RELIGIEUSES DE L'ANNÉE 1895 VÊTURE— le 20 février: Mlles Marie Renaud S.M.-de.-S.-Alice Léocadie Lalonde S.M.-de-S.-Valentine Anastasie Lachapelle S.M.-de-S.-Adéline Rose-de-Lima Chartrand S.M.-de-S.-Flore Azilda Boisvert S.M.-de-S.-Matthieu Adèle Bélanger S.M.-de-S.-Amable Elisabeth Lacombe S.M.-de-S.-Urbain Virginie Bolduc S.M.-de-S.-Philippe VÊTURE — le 17 juillet: Mlles Malvina Dufort S.M.-de-S.-Azélie Catherine Kennedy S.M.-de-S.-Emmeline Christine Kennedy S.M.-de-S.-Ethelbert Julia Dineen S.M.-de-S.-Edith Angélina Trembla}^ S.M.-de-S.-Hermine Eugénie Boisvert S.M.-des-Neiges Délia Bédard S.M.-de-S.-Collette Marie Gagnon S.M.-de-S.-Constance VOEUX TEMPORAIRES (cinq ans) même jour: S.M.-de-S.-Josephine (Miller) S.M.-de-S.-Clarisse (Roussel) S.M.-de-S.-Honorine (Marois) S.M.-du-Mont-Carmel (Lorrain) S.M.-de-S.-Florentine (Campeau) S.M.-de-S.-Alphonse-Rodriguez (Fortier) S.M.-de-S.-Ambroise (Charbonneau) S.M.-de-S.-Aimé-de-la-Croix (Loiselle) S.M.-de-S.-Octave (Charron) S.M.-de-S.-Jacques (Tierney Si VOUS VOULEZ ÊTRE DE VRAIES FILLES DE NOTRE- DAME DES SEPT-DOULEURS, VOUS SEREZ HUMBLES, CHARITABLES, VOUS GARDEREZ LE SILENCE.UNE FILLE DE LA MÈRE DES DOULEURS FAIT PÉNITENCE, NON SEULEMENT POUR ELLE-MÊME, MAIS POUR TOUT LE MONDE.R, P.Moreau CHAPITRE TROISIÈME SOMMAIRE: 1S96—-Esprit de prière de la supérieure générale —• Décès du R.P.Beaudet — Visite du R.P.Estevenon — Une soeur malade — Cérémonie religieuse — Jubilé d'argent de la mère maîtresse des novices — Le R.P.Dion, as.a, supérieur et curé —Décès de soeur Marie-du- Saint-Nom-de-Jésus (Plourde) — Événements divers — Le mois de mai — Visite de Mgr Langevin — Première Communion — L'abbé Brunet — L'abbé Gaboury — Circulaire de Mgr Fabre — Le chanoine Bruchési et l'inspecteur Brault — Exposition des travaux scolaires — La fête des prix — LE PENSIONNAT SAINT-BASILE — Professeurs d'anglais et de diction — Mgr Fabre, sa visite canonique — Le Chapitre général — — Dernières réunions des vacances — Embarras financiers — La Presse et le pensionnat Saint-Basile — Bénédiction de la maison et de la chapelle — Visite de l'honorable Alphonse Desjardins — Mgr Lorrain — Lettre de Mgr Fabre au Cardinal Siméoni — Départ de l'abbé Joseph Demers — Le nouveau chapelain — Décès de soeur Marie-de- Saint-Charles (Toupin) — Maladie de Mgr Fabre — La supérieure générale à l'archevêché — Pieuse mort de Mgr Fabre, archevêque de Montréal.« La prière est notre arme efficace notre grand appui, notre richesse, notre port de refuge, notre place de sûreté ».(SAINT JEA\- CHRYSOSTOME) Douze années se sont écoulées depuis que mère Marie-de- Saint-Basile tient les rênes de l'administration générale; les faits relatés dans les chapitres précédents démontrent la vitalité de la Congrégation.D'où procède cette vie ?De moyens humains ?— Nullement ! Les communautés doivent vivre surtout dans le domaine surnaturel, hors de là, peu de chances de succès.La révérende mère générale possédait à un degré rare l'esprit de prière, don précieux qu'elle reçut de son éducation maternelle, et qui progressa dans la vie religieuse.Mais, lorsqu'elle sentit peser sur ses épaules le 56 ANNALES DE LA CONGRÉGATION lourd fardeau de la supériorité, sa prière prit la forme d'une supplication ardente, sans mièvrerie ni sentimentalisme.La pensée de saint Jean Chrysostome placée en tête de ce chapitre, elle la réalisa au cours de sa vie.Sa piété, cependant, ne lui liait ni les mains ni la volonté.Mère Marie-de-Saint-Basile était autoritaire elle voulait, elle commandait, il fallait.A cette autorité si nécessaire à celle qui dirige une communauté nombreuse se joignait le coeur sympathique d'une mère.Elle enseignait à ses filles spirituelles, pour les encourager dans leur sainte vocation, que tout devient prière à l'âme pure unie à Dieu par la volonté: travail, repos, souffrances morales ou physiques, tout compte devant le Dieu bon que nous servons; et la prévoyante mère conseillait à ses filles d'offrir leurs oeuvres à Notre-Seigneur, pour la prospérité temporelle et spirituelle de notre famille religieuse.En outre, la sainte Eglise, le Saint- Père, nos évêques, nos prêtres, nos parents, nos bienfaiteurs, ont toujours eu une large part dans nos oeuvres pieuses.La piété est utile à tout et nécessaire en tout temps et pour tous.* * Aussi bien, dès le début de cette année 1896, elle devint plus utile que jamais.Une épreuve inattendue frappa notre famille religieuse; pour la supporter d'un coeur généreux, il fallait une grâce de force, attirée dans les âmes par la prière.Laissons parler les chroniques: « Le 13 janvier vers dix heures du matin, les cloches de l'église paroissiale annoncent la mort du T.R.P.Philippe Beaudet, c.s.c, curé de Saint-Laurent, et supérieur provincial de Sainte-Croix.En moins de quinze jours, la mort a brisé cet homme fort, plein d'énergie et de courage.On avait pensé qu'il dompterait le mal; mais, ayant atteint les bornes de sa vie, il partit.Le bon Dieu le rappelle au moment où son église, pour laquelle il a tant travaillé, allait recevoir son complet achèvement.Du ciel, il verra se dérouler la fête préparée par son zèle, aux paroissiens de Saint-Laurent.Il pourra dire au souverain Juge, sans figure de langage: « Le zèle de votre maison m'a dévoré ».La Semaine Religieuse de Montréal a consacré deux beaux articles à la mémoire de ce digne Pasteur.Toute la paroisse le pleure, DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 57 il était surtout le secours du pauvre, le père de l'enfant délaissé.Notre communauté lui doit une large part de reconnaissance, non seulement comme curé de la paroisse, mais surtout comme conseiller judicieux, dans nos affaires les plus importantes.Sa dépouille mortelle fut exposée dans la petite chapelle latérale de l'église, dite « chapelle du Rosaire ».Les soeurs s'y rendirent sans interruption et prièrent avec ferveur pour l'âme du regretté Pasteur.Le 16 janvier, la cérémonie des funérailles offrit l'aspect imposant d'une apothéose.Monseigneur notre archevêque chanta le service funèbre; une centaine de prêtres et religieux, venus de partout, occupaient le sanctuaire; la nef, remplie à sa pleine capacité, offrait un spectacle attendrissant.Soixante- quinze soeurs trouvèrent place dans la tribune, réservée aux élèves externes.Depuis trente-six ans, le bon Père Beaudet repose au cimetière du collège, tout à côté de celui de la paroisse.Sa tombe n'est pas oubliée; et sa mémoire reste en bénédiction, car les parents racontent à leurs enfants les traits de vertus de leur saint curé; c'est ainsi que ce regretté Père continue à vivre de génération en génération.Notre Congrégation lui paie un trop faible tribut de gratitude, en imprimant son nom dans les pages de notre histoire.Le R.P.Estevenon, supérieur des religieux du Saint-Sacrement, nous honora d'une visite, le 24 janvier.Son but était d'obtenir de la révérende mère générale la permission de tenir un bazar dans notre pensionnat en construction, en face de leur couvent.Il va sans dire que le R.Père reçut une réponse affirmative et cordiale.La supérieure générale le conduisit clans la communauté, le noviciat et le pensionnat.Cette première visite du distingué Père laissa une heureuse impression; sa physionomie calme et recueillie reflète l'âme d'un saint religieux.* * * Monsieur l'abbé Deniers, notre chapelain, tombe malade à son tour; ne pouvant remplir les fonctions du saint ministère, OS ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1890 il est remplacé, temporairement, par le R.P.Portelance, B.J.Le 30 janvier, le médecin prescrit à son patient un repos complet dans sa famille.Le R.P.E.DESJARDINS, S.J., vient partager le travail de son frère en religion.En février, soeur Marie-de-Sainte-Amélie (Dugas) a le plaisir de recevoir deux de ses amies de coeur: Soeur Eulalie-de- Mérida et soeur Laurent, des SS.NN.de Jésus et de Marie; les bonnes soeurs demeurent trois jours avec nous.Le temps est employé à causer de sciences naturelles ou littéraires: rien de plus exquis pour ces femmes intelligentes.Le 11 février, une cérémonie religieuse amenait à Saint- Laurent Sa Grandeur Mgr Gravel, évêque de Nicolet.Mgr Fabre le déléguait à sa place, afin de lui faire connaître notre communauté; la circonstance semblait favorable à ce dessein.Mais elle ne le fut pas du tout: aussitôt après la cérémonie, Monseigneur est appelé en toute hâte dans une autre direction; alors il promet de revenir le plus tôt possible.Vers la même époque, Mgr Fabre annonçait sa visite canonique pour le 12 février.Soudain des circonstances incontrôlables le contraignirent de remettre cette visite au mois d'août.Les soeurs furent réellement peinées de ce contretemps.Le 3 mars de cette année 1896, la soeur maîtresse des novices atteignait le vingt-cinquième anniversaire de sa profession religieuse; les novices le savaient et se préparaient à célébrer aussi dignement que possible ce jubilé d'argent.Pour réussir dans leurs pieux desseins, elles devaient agir clandestinement et obtenir du secours.La bonne infirmière se mit de connivence avec les assistantes du noviciat, et voilà la pauvre soeur maîtresse contrainte d'accepter trois jours de repos à l'infirmerie dont elle ne croit pas avoir besoin.Cependant, elle se soumet en esprit d'obéissance.1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 59 Aussitôt, la salle du noviciat est décorée.Les récréations sont employées à l'exercice d'une pièce lyrique, composée par une novice, soeur Marie-de-Sainte-Maximilienne, employée au pensionnat.Cette pièce rappelait les phases mémorables de la vie de la chère Jubilaire, soeur Marie-de-Saint-Gabriel.Même son angélique patron, dont la fête tombe en mars, se trouvait mêlé aux figurantes.Il arriva que le 3 mars au soir, la soeur maîtresse, bien reposée, parut au milieu de son heureux troupeau.Elle faillit perdre sa bonne contenance à la vue du décor et à l'audition de la musique.La soirée fut des mieux réussies; les novices ont vécu des heures délicieuses.La tradition rapporte que c'était plaisir d'entendre les exclamations naïves de la chère Jubilaire: « Comment ont-elles pu préparer cela, sans que je m'en aperçoive! » ou encore: « Ah! bon, je comprends maintenant les airs mystérieux, les allées et venues inaccoutumées!.Oh! les chères novices, comme je vais les gronder, etc.Bref! cette soirée restera mémorable, et les nombreuses survivantes (en 1932) en parlent encore à coeur joie! * * Le successeur du R.PèreBeaudet, curé décédé, se présentait au parloir le 18 mars, pour sa première visite.La supérieure générale et son conseil saluèrent avec bonheur le R.P.Dion, nouveau provincial de Sainte-Croix.Il arrivait de Rome, où il remplissait la fonction de procureur général de sa Congrégation; le R.Père est accompagné des RR.PP.Geoffrion, McGarry, Larochelle et du bon Frère Aldéric, le dernier survivant des fondateurs de 1847.Après les premières civilités, ces religieux sont invités à passer à la salle commune où les attendent professes, novices et postulantes.Le bon Père, naturellement doué du don de la parole, agrémenté d'une diction parfaite, intéresse son auditoire par les récits pieux ou historiques concernant la Ville éternelle, et la splendeur des cérémonies qui s'y déroulent.L'horloge annonce que le révérend Père a causé longuement.Mais le temps n'a pas duré pour les soeurs avides de l'entendre encore.Mère Marie-de- 60 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1896 Saint-Basile conduit les distingués visiteurs à l'infirmerie, tandis que le bon Frère Aldéric, c.s.c, reste à la salle où les chères Anciennes, nombreuses encore à cette époque, s'informent de tous les Pères et des Frères qu'elles ont connus autrefois.Les soeurs sont heureuses d'entendre que le vénérable Jubilaire de 1888, le R.P.Rézé, célèbre la sainte messe chaque matin, et qu'il conserve encore toutes ses facultés.Le cher Frère confie aux soeurs que le nouveau provincial est absolument sympathique à notre communauté et qu'il s'efforcera de continuer les pieuses relations du regretté Père Beaudet.Le recul des années a pleinement justifié cette assertion.Cette visite est immédiatement suivie de la fête du chapelain, le 19 mars.Mais le 29, la note change et comme elle est triste! Une jeune soeur de neuf années de vie religieuse, et sur laquelle les supérieures fondaient, à juste titre, les plus belles espérances, malade depuis le mois de janvier, demande en ce jouràrecevoir,et dès le matin, les derniers sacrements.Elle se sent affaiblir rapidement et elle redoute les surprises de la mort; les infirmières en sont stupéfaites.Le médecin, appelé, conseille de ne pas la contrarier; on accède à sa demande.Tout le reste du jour, elle garde l'idée de sa fin prochaine.A six heures du soir, elle reçoit le Saint- Viatique et à sept heures, l'Extrême-Onction.Ses désirs sont comblés, il ne lui reste plus qu'à attendre l'arrivée de l'Époux.Soeur Marie-du-Saint-Nom-de-Jésus (Plourde), vierge sage, est toute prête et ne se préoccupe pas du dernier appel.Elle entretient librement ses compagnes qui l'entourent; elle parle du bonheur de mourir religieuse.Puis, voyant des larmes couler: « Quoi! vous pleurez mon bonheur?».La mourante continue son édifiant entretien jusqu'au moment où, fermant les yeux, on crut qu'elle allait dormir.Oui, elle dormait, l'angélique jeune soeur; elle dormait le sommeil de la mort, doux et paisible comme celui de l'enfant dans les bras de sa mère.Avec combien de raison cette mort fut une surprise pour les soeurs! Si tous les membres d'une communauté sont précieux, quelle perte ne fait-elle pas lorsque l'un d'eux, doué de grands talents rehaussés de toutes les vertus religieuses, tombe à la fleur de l'âge?.Soeur Marie-du-Saint-Nom-de-Jésus, née Zélia Plourde élève du pensionnat, a toujours enseigné dans les classes supé- 1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX (il Heures, mais son existence trop courte ne lui a pas permis de donner toute sa valeur intellectuelle.Humble et sans prétention aucune, elle paraissait s'ignorer.Néanmoins, auprès de ses élèves, dans le silence de sa classe, elle donnait l'illusion de la maturité de l'âge.Elle n'avait que vingt-cinq ans et enseignait depuis sept ans.Mgr Baunard l'eût volontiers surnommée « jeune vieillard ».Cette mort prématurée nous remet en mémoire cette pensée que l'on trouve dans le prophète Isaie, Ch.XXXVIIIe: « Dieu coupe ma vie comme un tisserand coupe sa toile, et pendant que ma trame se développe encore, Dieu la déchire! Je suis né ce matin; le soir vient et je vais mourir! O Seigneur, est-ce donc cela la vie ?Est-ce pour cela que je suis né ?» Le Père Gratry répond à cette plainte: « Heureux ceux qui ont entendu, dès leur jeunesse, l'harmonie grave et en ont compris le sens austère ».Notre jeune soeur parut de tout temps entendre et comprendre l'inéluctable leçon de la mort.C'est pourquoi elle la salue avec allégresse.Le 31 mars, son service funèbre est chanté.Que de larmes versées près du pauvre cercueil, pendant le Libéra!.Petite prédestinée, rappelée au ciel au printemps de ta vie religieuse, complète là-haut ce que tu n'as pu accomplir durant ton court pèlerinage.Soutiens, au milieu du monde, les âmes de jeunes filles à qui tu as enseigné les grands principes de la morale chrétienne!.Le mois d'avril s'annonce assez chargé d'événements.Dès le premier jour, M.le chanoine Cousineau, de l'archevêché, souffrant depuis quelques semaines, vient demander des soins et du repos à notre communauté.Avec quel bonheur elle accède au désir d'un ami si dévoué à ses oeuvres.Le 4, samedi saint, l'ouverture des Quarante-Heures dans notre chapelle.Le 7, le R.P.Dom Antoine, abbé mitre de la Trappe d'Oka, nous fait l'honneur d'une visite.Le 14, Monsieur le chanoine Cousineau retourne à l'archevêché, très reconnaissant des soins reçus et bien remis de ses fatigues.Le 19, soeur Marie-de-Saint-Charles (Toupin), sérieusement malade depuis plusieurs mois, reçoit les derniers sacrements et CL' ANNALES DE LA CONGRÉGATION l'indulgence in articulo mortis; elle se prépare à mourir.Cependant, dans les desseins de Dieu, la malade devait attendre près de sept mois encore, avant d'entrer dans le « Chez-nous » du ciel.Le 23, M.l'abbé Brunet, professeur du collège Sainte-Thérèse, passe la journée au couvent et réunit quelques maîtresses pour des leçons spéciales.Le même jour, la communauté, les pensionnaires, les élèves externes offrent leurs voeux de fête au digne Père provincial et curé, à l'occasion de sa patronale.Sa révérence paraît très sensible aux hommages offerts par cette jeunesse, la paroisse de demain.Puis, le mois de mai se lève dans toute la beauté du printemps.C'est une fête de trente jours que l'Église célèbre en l'honneur de notre divine Mère.La nature vient au secours de notre pauvreté: pour chanter notre Reine, pour la louer et la bénir, elle nous donne sa chaleur, sa verdure, ses fleurs; et dans nos grands arbres, le gazouillis perpétuel des oiseaux redit la joie commune.La soleil anime tout, il change la couleur de la terre et des idées, écrivait Marie Jenna.Mgr Langevin, archevêque de Saint-Boniface, entrait à la communauté pour une visite hâtive mais amicale.Sa Grandeur est reçue au salon de l'évêque par mère Marie-de-Saint-Basile, soeur Marie-de-Saint-André et soeur Marie-de-Saint-Alphonse-de- Liguori, préfète des études.Au grand regret de toutes les soeurs, Monseigneur ne peut se rendre à la salle commune; il ne trouve que quelques instants disponibles.Il présente d'abord l'objet de sa visite: « Ma révérende mère, je viens vous supplier de me donner des soeurs pour mon diocèse; » et le bon évêque expose, d'une manière attendrissante, les grandes misères de son troupeau, au point de vue des écoles catholiques.Hélas! point d'ouvrières! Dans le moment, le refus s'impose et la supérieure générale regrette ne pouvoir acquiescer à de si nobles désirs.M.le curé Gaboury de la paroisse du Sacré-Coeur, New- Bedford, Mass., arrive à Saint-Laurent le 8 mai.Pris de douleurs 1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 63 rhumatismales au cours de sa visite, il est contraint de se mettre au lit en arrivant, sans même prendre de nourriture.Après plusieurs heures d'un traitement énergique, il éprouve un mieux sensible.Alors, il veut voir les soeurs réunies à la salle de communauté; il passe dans les rangs et dit un bon mot à chacune.La supérieure générale le conduit au pensionnat, où les élèves lui font une jolie réception.Enchanté de tant de démonstrations à son égard, il promet trois médailles d'or comme récompenses de fin d'année.Ensuite, il retourne à Montréal et il se retire àl'Hôtel-Dieu, jusqu'à complète disparition de son malencontreux rhumatisme.Le conseil général, de concert avec Mgr Fabre, avait fixé l'ouverture du Chapitre général au 1er août.En conséquence, soeur Marie-de-Saint-Basile écrivit dans les établissements pour demander des prières ferventes afin d'obtenir de l'Esprit-Saint toutes les lumières nécessaires, dans cette grande question des intérêts spirituels et matériels de notre Congrégation.La fête de Notre-Dame du Sacré-Coeur voit la congrégation des Enfants de Marie s'augmenter de quatre membres.Ce sont Mlles Léa Lamoureux, Marie-Anne Boisvert, Hortense Cyr et Eudoxie Godin.Selon la bonne coutume, maîtresse et élèves préparent de jolis cadeaux et offrent des félicitations; puis au souper, des fleurs ornent la table des nouvelles congréganistes réunies aux anciennes; pendant la veillée, des amusements d'un nouveau genre réjouissent le personnel du pensionnat.Ces fêtes intimes, toutes parfumées de simplicité et de bonheur réel, sont inoubliables.Plus tard, dans la vie, un bon souvenir réconforte: lui seul survit au malheur.Au mois de juin, il n'est question que d'examens et d'exposition de travaux scolaires et manuels.Les visiteurs arrivent, nombreux.Certains se demandent comment les jeunes étudiantes peuvent réussir à confectionner tant de morceaux.Le secret se trouve dans l'emploi sérieux des minutes disponibles.L'habitude 64 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 18% contractée au couvent de l'économie pratique de toutes les heures du jour sera d'un grand secours pour la jeune fille devenue reine du foyer, et même dans la vie religieuse.Monsieur le chapelain, homme judicieux,ne ménage pas ses éloges; et nous savons que sa droiture, sa franchise ne lui permettent pas de complimenter sans de justes raisons.Il présida la fête des prix le 23; il aimait poser sur la tête des finissantes la couronne méritée, au prix de généreux et constants efforts.Six religieux de Sainte-Croix occupaient les fauteuils principaux.Il serait fastidieux de donner le Palmarès, nous nous contenterons de nommer les généreux donateurs des prix pour matières spéciales: l'honorable Alphonse Desjardins, sénateur et président de la banque Jacques-Cartier, l'abbé Joseph Deniers, M.le curé Gaboury, trois médailles d'or, ainsi qu'il l'avait promis, MM.Grothé, Dufresne et W.Legault, gérant de la banque de Ville-Marie.Les élèves décorées sont: Mlles Léona Saint-Maurice, Bernadette Hébert, Desneiges Brunet, Albina Allaire; elles reçoivent la médaille d'or des graduées et un diplôme de cours commercial.Mlles Anastasie Taillefer, Bertha Tassé et Ernes- tine Lauzé, la médaille du cours supérieur et le diplôme d'école modèle.Mlles Margaret Gahan, Ludovic Précourt et Dulcinie Lizotte reçoivent la médaille de conduite et de politesse.Mlles Bernadette Hébert et Annie Phelan, la médaille d'instruction religieuse.Mlle Blanche Vallières, médaille d'or pour musique vocale.Mlle Rosa Deguire, médaille pour économie domestique.Mlles Isabelle Mathieu et Léona Saint-Maurice, médaille pour peinture et dessin.Il resterait à mentionner: la musique instrumentale, la gymnastique, la sténographie et l'élocution, le progrès remarquable en cette dernière branche de l'enseignement a été fortement loué par le président, dans son discours ; la musique instrumentale et le chant ont aussi reçu de chaleureux applaudissements.L'année scolaire se ferme sur de consolants souvenirs; car les élèves, — à peu d'exception près — se sont toujours distinguées par leur 1S96 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 65 politesse et leur bon esprit.Le lendemain 24 juin, le pensionnat est désert.* * * Les vacances de 1896 offrent une perspective particulière, à raison de la tenue du Chapitre général en juillet.Néanmoins, le programme ordinaire n'est pas changé: la première retraite s'ouvre le 8 juillet au soir, sous la direction du R.P.Prétot, O.M.I., elle se termine le seize.Le 17, quatre soeurs se rendent au futur pensionnat Saint- Basile, afin de prendre possession de la maison, répondre aux visiteurs et préparer l'ouverture des classes, annoncée pour le 2 septembre.Les gardiennes sont: SS.Marie-de-Saint-Julien, Marie-de-Saint-Etienne, Marie-de-Sainte-Félicité et Marie-de- Saint-François-de-Borgia.Le 19 juillet, deux professeurs de langue anglaise: Mmes Baird et Toomy, membres d'un comité catholique aux États- Unis, passent deux semaines avec nous et donnent, sans vouloir accepter aucune rétribution, un cours d'enseignement pratique, ainsi que l'on enseigne dans les écoles de la grande République; elles se sont dévouées comme s'il se fût agi de leurs propres intérêts.Ces dames sont aimables et de bonne compagnie.Et, que dire de leur obligeante charité?Les maîtresses de français continuent de suivre les cours de diction pendant les vacances.Monseigneur préside une cérémonie de vêture et de profession le 29 juillet et il donne le sermon.Le soir Sa Grandeur est l'hôte de M.le chapelain.Demain, la messe sera célébrée par Monseigneur et, dans la matinée, aura lieu l'ouverture de la Visite canonique.Dès huit heures du matin, Monseigneur est au salon; il reçoit d'abord les Capitulantes, puis les soeurs, par rang d'ancienneté, jusqu'à la dernière postulante.Quelle bonté! quelle condescendance! s'enfermer ainsi des heures durant, par une chaleur tropicale!.ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1895 Monseigneur revoit de nouveau les membres du Chapitre général réunis, après quoi, il prend congé de la communauté jusqu'aux élections que Sa Grandeur veut bien présider.Le Chapitre a poussé les affaires avec célérité, de sorte que, selon le désir de Mgr l'archevêque, les exercices de la clôture sont à l'ordre du jour.Le 4 août, Monseigneur revient à la communauté avec M.le chanoine Cousineau et le R.P.Dion, provincial de Sainte-Croix; ils seront les scrutateurs durant l'élection de la supérieure générale et de ses assistantes.Après cette dernière séance capitulaire, l'assemblée se rend à la chapelle où Monseigneur proclame les nouvelles élues, comme suit: Supérieure générale: 1ère assistante générale: 2ème assistante générale: 3ème assistante générale: 4ème assistante générale: Mère Marie-de-Saint-Basile Soeur Marie-de-Sainte-Madeleine Soeur Marie-de-Saint-André Soeur Marie-de-Saint-Arsène Soeur Marie de-Saint-Romuald Ces cinq offcières ont siégé au Chapitre; les autres capitulantes sont: Soeur Marie-de-Saint-Eugène Soeur Marie-de-S.-Jean-Baptiste Soeur Marie-de-Sainte-Agnès Soeur Marie-de-Saint-Antonin Soeur Marie-de-Saint-Gabriel Soeur Marie-de-Sainte-Anne Soeur Marie-de-Sainte-Thérèse Soeur Marie-de-S.-Béatrix-du-S.- Soeur Marie-de-Saint-Cyprien Soeur Marie-de-Saint-Paulin [C.Deux jours après cet événement, toujours très sérieux pour une congrégation, s'ouvrent les exercices de la seconde retraite.Comme la précédente, elle sera prêchée par le R.P.Prétot, O.M.I.Dans cette retraite, le révérend Père soutient sa réputation d'habile prédicateur, aussi docte qu'agréable.Maintenant, les beaux jours sont passés! Adieu, le calme de la solitude, le repos de l'âme, seule avec Dieu! Adieu les charmes de la vie de famille! La pensée de retourner auprès des enfants qui attendent que nous leur rompions le pain de l'intelligence 1896 DES SCKl'HS DE SAINTE-CROIX 67 et du coeur restera une compensation au sacrifice de quitter la maison mère.Les obédiences sont distribuées le 17 du mois d'août; plusieurs postes sont acceptés en esprit de renoncement, mais la grâce de Dieu est toujours là pour soutenir et fortifier les courages.Qui sait si les coeurs endoloris, mais résignés, n'opéreront pas une plus grande somme de bien que les plus consolés ?Avant le départ des maîtresses, la directrice générale des études, soeur Marie-de-Saint-Alphonse-de-Liguori, les rassemble pour une conférence, qu'elle considérait comme le couronnement des classes d'été.Après avoir communiqué ses désirs sur la manière d'interpréter le programme scolaire, elle termine par quelques avis sur la partie essentielle de la culture féminine: le coeur et l'intelligence.« Tout ce que nos jeunes filles apprennent dans les livres, dit-elle, est purement théorique et laisse peu de traces dans le cerveau.Quand l'écolière lit ou étudie, sa mémoire seule est en exercice: il s'y trouve très peu de substance pour l'âme; cependant, c'est à l'âme qu'il faut songer.Une fois sortie de l'école, un jour se lèvera — trop tôt peut-être — où la jeune fille, accablée par des croix de toutes sortes, déçue dans ses espoirs les plus caressés, angoissée par des séparations douloureuses, sera navrée.Oh! c'est alors qu'il lui faudra recourir aux pensées de la foi.Mais si on ne lui a pas suffisamment enseigné l'inéluctable loi de la souffrance, celle du coeur, ou celle de l'âme; si on ne lui a pas montré le Christ persécuté, en dépit des merveilles opérées pour son peuple; si on ne lui a jamais appris à contempler la Vierge des Douleurs, souffrant dans son âme des peines qu'aucune créature humaine n'endurera jamais; en un mot, sans la science de la Religion qui fortifie, éclaire et soutient, que deviendra la pauvre écolière ?Une fois entrée dans sa vocation et que s'abattront sur elle les douleurs semées sur le chemin de la vie, ne se désespérera-t-elle pas ?Il nous faut donner un enseignement baigné de foi, d'espérance et d'amour.Avec ces secours surnaturels et son intuition naturelle, la femme se place au degré supérieur.Avec la largeur de ces idées, la pénétration de son esprit, même avec un moindre bagage de physique ou de mathématiques ou de philosophie, cette femme devient plus intelligente et plus utile à son foyer que celles de ses compagnes qui ont poussé leurs études 68 ANNALES DE LA CONGRÊGATH >X 1890 jusqu'à l'Université, mais dont la conscience n'est pas formée.Appliquons- nous à donner à la société de ces femmes précieuses qui se font de plus en plus rares!.Pour atteindre ce noble but, travaillons, envers et contre tout, à la formation des consciences.! Ces quelques suggestions jetèrent un peu de lumière; le personnel enseignant se retira bien disposé à s'en servir dans l'occasion.* * * Ensuite, la révérendre mère générale explique les divers points de la discipline religieuse arrêtés en Chapitre général.Le décret sera envoyé dans les missions; du reste, il sera placé dans les nouvelles Constitutions.Nous apprenons avec plaisir que, dorénavant, les quatre assistantes générales et la maîtresse des novices porteront le titre de « Mère », afin de porter les soeurs à conserver une confiance respectueuse envers l'autorité.Les Règles, revues, corrigées, refondues, sont envoyées à Rome, pour être définitivement approuvées, si la Sacrée Congrégation de la Propagande le juge opportun.A propos des Constitutions, Monseigneur avait écrit à son Eminence le Cardinal Siméoni, préfet de la Sacré Congrégation de la Propagande: Eminentissime Seigneur, Votre Eminence a par devers elle les Règles des SS.Maria- nites de Sainte-Croix de Montréal.Je suis heureux d'apprendre qu'elle veut bien prendre en considération la demande qui lui a été faite d'approuver l'Institut des mêmes Soeurs Marianites, ainsi que leurs Règles avec les changements et additions qui y ont été introduits.Il n'est peut-être pas hors de propos de donner à Votre Eminence de nouveaux renseignements sur cette communauté.Depuis leur séparation d'avec la maison de France, les Soeurs Marianites de ce diocèse ont marché dans les voies du progrès sous le rapport spirituel et au point de vue temporel.L'esprit dominant dans la communauté est la charité.Le noviciat augmente rapidement, et les qualités religieuses dont les Marianites donnent l'exemple, ainsi que leurs succès 1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 69 dans l'enseignement, attirent chez elles bon nombre d'excellents sujets.Elles augmentent de beaucoup leurs établissements, et elles ont maintenant des couvents dans les diocèses de Toronto, d'Ottawa, Burlington, Manchester, Hartford, Ogdensburg, Providence, Sherbrooke et dans le vicariat apostolique de Pontiac; elles en avaient déjà dans le diocèse de Kingston.C'est là, la meilleure preuve que l'on puisse fournir de la haute estime dont elles jouissent auprès de Nos Seigneurs les évêques.Aussi ces derniers ont-ils fait l'éloge de leur bon esprit, de l'excellence de leur enseignement, particulièrement de celui du catéchisme et de leur docilité.Tout cela semble démontrer clairement que la Providence continue à veiller sur cette marche de l'institut, et qu'il y a lieu de croire que la séparation d'avec le Mans ne sera pas désavantageuse, mais au contraire, permettra aux Marianites de Montréal de rencontrer d'une manière plus efficace les besoins du pays, tout en se développant d'une manière frappante.1 (Signé) EDOUARD CHARLES, archv.de Montréal * * * Cette année 1896 vit des jours bien sombres, et l'administration générale en souffrit la toute première.Les affaires matérielles n'étaient point du tout rassurantes, il fallut rien moins que saint Joseph pour régler l'épineuse question; elle se régla d'une façon extraordinaire: la bonne et secourable Providence intervint et les grosses craintes s'évanouirent.La plus considérable et la plus coûteuse entreprise de cette époque fut la construction du pensionnat Saint-Basile, rue Mont-Royal.Nous donnons sur cet établissement quelques notes recueillies dans les journaux de de l'époque.La Presse publiait un fort bel article sur la situation géographique et donnait une description alléchante de ce beau plateau 1 Copiée en 1900, aux archives de l'archevêché de Montréal, par soeur Marie-de-Saint-Arsène, sec.gén.de la communauté.70 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1896 du Mile-End avec son abondance d'air salubre que lui fournissent et la montagne et le fleuve.Le même journal félicite les architectes du travail intelligent qu'ils ont exécuté et de la note juste qu'ils ont donnée à leur construction: « Les lignes régulières de la façade, les vastes proportions qui unissent l'élégance à la solidité, la symétrie qui harmonise les différentes parties de la structure, tout cet ensemble, en un mot, qui repose l'oeil et donne le goût d'une beauté sévère, atteste le talent consciencieux et laborieux qui a voulu fournir une oeuvre d'art et se créer des titres justement mérités ».Suivait la description de l'intérieur de l'édifice pourvu de toutes les améliorations modernes et, finalement, l'historique de la Congrégation de Sainte-Croix depuis 1847.Les éloges reçus ne dispensaient point de payer l'énorme dette!.Celles d'entre les soeurs qui ont suivi de près les travaux de cette construction, savent que M.l'abbé Joseph Deniers, chapelain et mère Marie-de-Saint-Basile ont contribué tous deux, dans une large mesure, au succès de l'entreprise.Le 20 août, la supérieure préposée pour cet établissement, soeur Marie-de-Saint-Antonin (Williams), arriva au couvent à la tête d'une petite colonie: soeur Marie-de-Sainte-Brigitte (Ellis), assistante, soeur Marie-de-Saint-Stanislas-Kostka (For- tier), soeur Marie-de-Sainte-Mélanie (Pariseau), soeur Marie-de- Saint-Joachim (Lemay), soeur Marie-de-Sainte-Rose-de-Lima (Copping), soeur Marie-de-Sainte-Candide (O'Grady) soeur Marie-de-Sainte-Antonine (Vermette), soeur Marie-de-Sainte- Angéline (Gignac), soeur Marie-de-Sainte-Honorine (Marois), soeur Marie-de-Sainte-Maximilienne (Lizotte), soeur Marie-de- Sainte-Elodie (Roy), Soeur Marie-de-Saint-Clément (Leblanc), soeur Marie-de-Sainte-Edith (Dineen), soeur Marie-de-Saint- Philippe (Legault), soeur Marie-des-Neiges (Hamel), soeur Marie-de-Sainte-Constance (Gagnon), soeur Marie-de-Saint- Amable (Bélanger), soeur Marie-de-Sainte-Colette (Bédard).Avant même l'installation complète des soeurs, les visiteurs, affluèrent au nouveau pensionnat: prêtres, amis de la communauté, religieux et religieuses, collaborateurs dévoués et sympathiques à l'oeuvre, distribuèrent force félicitations et formulèrent des voeux de succès à la future maison.Des laïques distingués offrirent aussi leurs hommages aux nouvelles éducatrices.1S96 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 71 La bénédiction de la maison se fit le 2 septembre par M.le curé Lesage, de la paroisse de l'Enfant-Jésus; trois prêtres l'accompagnaient.La révérende mère générale, la supérieure de la maison et toutes les soeurs réunies au parloir reçurent M.le curé qui souhaita la bienvenue à la communauté dans sa paroisse; puis il commenta les prières liturgiques pour la bénédiction d'une maison nouvelle.L'allocution terminée, M.le curé, ses assistants et les soeurs parcoururent la maison en récitant le miserere.Le 3 septembre, les classes s'ouvraient pour recevoir les élèves pensionnaires, les externes payantes et non payantes.Les débuts furent modestes: c'était le grain de sénevé.Dans le recul des années, nous avons vu que le grain de sénevé s'est éner- giquement développé.Il a étendu sa large ramure; à son ombre, de nombreuses jeunes filles ont trouvé le pain de l'intelligence et du coeur.Nombreuses aussi celles qui, de plus, ont fondé un foyer où règne le calme de l'éducation virile et chrétienne.Elles ont appris jadis, ces mères, à l'école des filles de la Mère des Douleurs, à envisager la souffrance sous ses multiples formes et à lui sourire.Le divin Maître s'est plu à se choisir des épouses dans ce jardin fermé de Saint-Basile, mais ouvert aux bienfaisants rayons de l'Ostensoir d'or.Plus de vingt-cinq jeunes filles se sont consacrées à Dieu.Les premières: soeur Marie-de-la-Provi- dence (Berthe Moquin), soeur Marie-de-Saint-Cyrille-de-Rome (Renée Rémillard).M.le Grand-Vicaire Bourgeault, en l'absence de Mgr l'Archevêque, bénit la chapelle de Saint-Basile, le 14 septembre; la révérende mère générale s'était rendue dès la veille pour assister à la cérémonie.Soeur Marie-de-Bon-Secours (Leduc) et soeur Marie-de-Saint-Ignace (Vallée) l'accompagnaient.Tout le cérémonial de cette bénédiction se trouve relaté dans le procès- verbal ci-après.« L'an de Notre-Seigneur mil-huit cent quatre-vingt seize, le quatorzième jour de septembre, en la fête de l'Exaltation de la sainte Croix, l'une des fêtes patronales de la communauté, nous soussigné, Florent Bourgeault, vicaire général de Mgr l'Archevêché de Montréal et administrateur du diocèse durant l'absence de Sa Grandeur Mgr Edouard-Charles Fabre, en visite « ad Limina », nous nous sommes transporté au couvent des 72 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1S96 soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs, en la paroisse de l'Enfant-Jésus du coteau Saint-Louis, en compagnie de M.Georges Denis Lesage, curé de la paroisse, avons béni l'autel de la chapelle du couvent, sous le vocable de « Saint-Basile », docteur de l'Église, donné comme titulaire de la maison par Mgr l'Archevêque; nous avons béni les ornements sacerdotaux et le linge destiné au culte divin, avons offert pour la première fois, dans la chapelle, le saint sacrifice au seixième anniversaire de notre ordination sacerdotale, avons distribué la sainte communion aux vingt-deux religieuses présentes à cette célébration des saints mystères et avons déposé le saint sacrement dans le tabernacle, pour y être continuellement conservé à la plus grande gloire de Dieu et avec toute confiance, en la protection de la Mère des Sept-Douleurs.Fait à Montréal les jour, mois et an que dessus.(Signé) F.BOURGEAULT, V.G., et administrateur G.-D.LESAGE, ptre curé.La cérémonie terminée, M.le Grand-Vicaire témoigne hautement du plaisir qu'il éprouve d'avoir été appelé à présider cette fête.Il visite toutes les pièces de la maison, adresse des paroles aimables et encourageantes aux élèves dans leurs classes, et se retire en souhaitant succès et prospérité à l'oeuvre commencée.Soeur Marie-de-Saint-Antonin (Williams), supérieure locale, femme intelligente et expérimentée dans l'art de diriger la jeunesse et d'administrer les biens, conduisit sagement l'oeuvre naissante.La révérende mère générale pouvait compter sur la représentante fidèle qu'elle avait choisie.En somme, ce pensionnat a vu des jours prospères; il s'est tracé une voie d'honneur parmi les établissements du genre, et une génération de femmes sérieuses a été formée dans son enceinte bénie, nous l'avons dit plus haut.A l'heure où nous écrivons ces lignes, la Providence a changé ses destinées; de 1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX pensionnat, il a passé, en 1926, à l'état "d'école paroissiale", au grand regret de la communauté.1 Le 23 septembre, l'honorable Alphonse Desjardins fait une visite au pensionnat Notre-Dame-des-Anges.Pour son propre plaisir, il demande à être conduit dans les classes sans avertir les maîtresses; cette promenade, dit-il, me reporte à mes vieilles années de collège et ça me fait du bien.Ce distingué personnage a presque toujours occupé des postes éminents soit à la mairie de Montréal, soit au parlement, soit au sénat.Mais h fameuse monture de la politique n'est pas solide, et il est tombé en juin dernier avec le gouvernement conservateur.Sans trop le laisser paraître, il ressentait une peine en son coeur; pour se consoler, ou se rajeunir, il aimait revenir sur sa lointaine jeunesse.En 1896, il est président de la banque Jacques-Cartier.Son ami, M.Tancrède Bienvenu, gérant de la même banque, l'accompagne.M.notre chapelain les présente à la révérende mère générale et à soeur Marie-de-Sainte-Béatrix-du-Sacré-Coeur, directrice du pensionnat; toutes deux font les honneurs de la maison.Le 28 du même mois, une autre visite vient réjouir tous les coeurs: Sa Grandeur Mgr Lorrain, évêque de Cythère et vicaire apostolique de Pontiac, a pu se dérober un moment à ses nombreuses occupations pour venir nous causer une agréable surprise.Accompagné de M.le curé Leblanc, de Saint-Martin, et de l'abbé Deniers, Monseigneur accepte, sur l'invitation de la révérende mère, de visiter le pensionnat, les élèves étant en classe.Le minutieux intérêt qu'il témoigne à tout ce qu'il voit porte partout la joie, tant aux maîtresses qu'aux écolières toujours friandes de nouveau.Sa Grandeur appelle sur chacune les bénédictions célestes et se retire après avoir promis un pieux souvenir aux soeurs pour le succès de leur apostolat.1 Cette école, sous le vocable de Notre-Dame du Très Saint-Sacrement, est florissante avec ses vingt classes.De 1926 à 1933, quinze jeunes filles ont embrassé la vie religieuse, dont huit pour notre Communauté.74 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1896 Sa condescendance s'est portée jusqu'à demander la liste de ses co-paroissiennes, (Saint-Martin de Laval) et de toutes celles qui, à Saint-Martin, ont travaillé à l'oeuvre de l'éducation, pour se les rappeler fréquemment.Le mois du Saint-Rosaire s'ouvre sous la perspective d'un grand sacrifice: notre dévoué chapelain annonce à la communauté qu'il a cessé d'avoir juridiction pour confesser.Quelle surprise! Son départ est fixé au lendemain, le 2 octobre.A cette occasion, mère Marie-de-Saint-Basile lui remet, au nom du conseil général et de la communauté entière, la lettre ci-dessous transcrite intégralement : "Monsieur le Chapelain, "La reconnaissance nous fait un devoir, au moment de votre départ, de rappeler à notre coeur les actes multiples de votre ministère au milieu de nous.Les sept années de vie sacerdotale que vous nous avez données, avec un dévouement qui ne s'est point ralenti, laissent de bien précieux souvenirs dans cette maison.Comme Notre-Seigneur, vous y avez passé en faisant le bien.Aussi, voyons-nous avec un profond sentiment de regret se terminer parmi nous un apostolat que le temps rendait de plus en plus fructueux et cher."N'avez-vous pas été pour nous un père, un conseiller, un ami véritable ?Votre attention ne s'est-elle pas portée sur tous les points ?Nous n'avons qu'à nous féliciter de l'intérêt que vous nous avez témoigné en toute circonstance."Outre les fonctions du saint ministère que vous avez remplies avec tant d'exactitude, tous vos moments de loisir nous ont été consacrés.Vous avez répondu avec empressement à toutes sortes de questions, agrandi le cercle d'opération de la communauté, excité les bons mouvements dans les études et ouvert de plus vastes horizons dans les arts, les sciences et les lettres."Mais que dire de ce long et patient travail entrepris pour la correction de nos saintes Règles?Ah! c'est bien là, surtout, que vous avez montré votre complet dévouement à notre communauté.Celle-ci n'oubliera jamais la main bienfaisante qui ne 1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 75 s'est point lassée, afin de rendre digne des plus grands respects le C ode de la vie qui lui est propre."Agréez les hommages de notre vive gratitude, vénéré Père chapelain; agréez aussi l'assurance de nos prières; à la vie et à la mort, nous voulons que notre mémoire vous soit fidèle.Veuillez emporter avec vous cette promesse qui vous dédommagera un peu, nous osons l'espérer, des sacrifices que vous vous êtes imposés pour nous." Suit la formule finale.La vie de l'abbé Demers parmi nous, nous le montre familier de la doctrine de l'excellent M.Mollevaut, supérieur de Saint- Sulpice et directeur du T.R.Père Moreau.Il disait aux prêtres dont il était chargé au séminaire d'Issy: « Un homme, une fois prêtre n'est plus à lui; son temps n'est plus à lui; ses études ne sont plus à lui; mais aux âmes qu'il est appelé à sauver.» Dans le travail sérieux que M.Demers s'est imposé pour la refonte de nos Règles, il a pris contact avec notre vénéré Fondateur; il s'est inspiré de son esprit et s'est efforcé de le conserver clans ce code de vie religieuse qu'il nous préparait.La lettre précédente dit expressément son zèle pour la perfection des âmes consacrées; et, avec les années, nous avons compris et apprécié davantage le bien spirituel qu'il a accompli dans notre communauté.Les adieux se font à la chapelle en deux sermons; il a voulu confesser tout le personnel avant son départ, même jusqu'aux plus petites élèves.Puis, il a visité le cimetière, il s'est agenouillé sur la tombe des soeurs qu'il avait préparées à la mort.Il s'est rendu dans les champs, il a revu le verger, le jardin; partout il s'est montré paternellement intéressé.Immédiatement après cette visite, le conseil général descendit au salon pour un dernier adieu; quelques soeurs du pensionnat et de la communauté se joignirent aux mères du conseil.« M.le chapelain est pâle et triste, note la chronique, il parle très peu, contrairement à son habitude.Il ne lève pas les yeux.Enfin! on entend: « Au revoir, mes soeurs,» et il part; la voiture l'attend à la porte.Il est conduit à Longueuil, chez les SS.des SS.NN.de Jésus et de Marie.Aujourd'hui, M.Demers est 70 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1896 descendu dans la tombe, mais il vit encore pour celles d'entre les soeurs qui ont eu le privilège de recevoir sa forte direction.Dans la soirée de ce même jour, 2 octobre, M.l'abbé Pierre Châtillon, nouveau chapelain, arrive au couvent pour y exercer ses fonctions.Aussitôt, la révérende mère générale le conduit à la salle où sont réunies toutes les soeurs.Comme nous sommes au premier vendredi du mois et que nous fêtons les saints Anges, le chapelain prend cette coïncidence pour sujet de son instruction.Puis, il rappelle les sept années de M.Demers au milieu de nous et termine en disant: « Priez que nous puissions continuer une oeuvre en si bonne voie de perfection.» Onze jours plus tard, le nouveau chapelain préparait à la mort, d'une manière immédiate, notre chère soeur Marie-de- Saint-Charles (Toupin), malade depuis deux ans; elle reçut ce jour-là l'extrême-onction pour la seconde fois.Le 17, elle rendait son âme à Dieu, avec une confiance toute filiale.Une maladie de poitrine lui avait permis de regarder la mort en face et d'y songer sérieusement, pour en éviter les surprises; aussi bien, elle se trouva prête quand l'Époux l'appela.L'huile ne manquait pas dans sa lampe; d'après ses pieuses dispositions, nous pouvons l'affirmer.Sa résignation fut sans repentance; à l'âge de trente-quatre ans, la vie est belle, mais elle en fit le sacrifice pour Dieu, puisque c'est Lui qui l'appelait.La chère soeur n'avait donné que quatorze ans à la communauté, elle trouvait bien minime la part de son travail.Elle se serait plus tôt consolée, si elle eût connu cette assertion d'un pieux auteur: « Un grand devoir s'encadre parfois très bien dans une petite vie: l'espace est en nous ».Cependant, soeur Marie-de-Saint-Charles, comme tous les humains, eut ses humaines faiblesses.Sa longue maladie lui permit de se pénétrer d'une vie intérieure plus intense par le détachement des créatures: elle accepta la douleur avec une 1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 77 patience qui n'a jamais faibli.Jusqu'au dernier jour, elle conserva son calme, sa tranquillité devant la mort, comme s'il se fût agi d'une chose ordinaire.Nous savons, pourtant, qu'il lui en coûta beaucoup de mourir.Vers la même époque, mère Marie-de-Saint-Basile reçut une nouvelle désolante au sujet de Mgr Fabre, en route pour Rome, en compagnie de M.l'abbé Dubuc.A Paris, Monseigneur fut saisi d'un mal étrange.Son compagnon, et les médecins consultés, lui conseillèrent de retourner à Montréal le plus promp- tement possible.Sa Grandeur rentrait le 23 novembre à son palais épiscopal, atteinte d'une maladie presque incurable et l'on conservait peu d'espoir de guérison.La révérende mère supérieure et la maîtresse des novices se rendirent à l'archevêché, le 3 décembre.Comme elles furent frappées de la physionomie souffrante de Monseigneur! Agenouillées, elles demandent une bénédiction spéciale pour la communauté et le noviciat, et assurent Sa Grandeur que des prières sont récitées pour la conservation de notre archevêque; à cet effet, ajoute la révérende mère, je viens d'envoyer une circulaire dans toutes les maisons de l'Institut.« Ah! c'est bien, répond Monseigneur, merci!.Vous avez un nouveau chapelain?c'est un bon priant.» L'entretien n'a duré que deux minutes, mais le regard n'a cessé d'être tout à fait paternel.Le soir de ce même jour, notre révérende mère entrait en retraite.Le 5, une dépêche de l'archevêché la mandait immédiatement.Elle partit avec mère Marie-de-Saint-Arsène, secrétaire générale.Introduites auprès de l'auguste malade, il annonce que, la veille, il a reçu l'extrême-onction et remercie des prières adressées au Ciel en sa faveur; puis, Monseigneur exprime le désir d'un entretien privé avec la supérieure générale.Le 8 décembre, selon le désir de l'archevêque mourant, le saint Sacrement est exposé dans toutes les églises et chapelles de l'archidiocèse.Une visite inattendue apporte dans le couvent une diversion à la tristesse commune: M.l'abbé Demers revient pour la 78 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1896 première fois, le 16 décembre.Il demande au parloir les mères conseillères, la mère maîtresse et la supérieure du pensionnat.Il soulage son coeur en causant de ses ennuis et il montre un attachement sincère à notre communauté.Plusieurs soeurs ont le privilège de le rencontrer à l'atelier des Enfants Jésus, tenu par soeur Marie-des-Anges (Cousineau).Invité à passer au pensionnat, il refuse absolument, il éloigne toutes les émotions; néanmoins, il garde un bon souvenir des élèves.* * * Les grandes solennités de fin de décembre sont assombries par la triste perspective de la mort imminente de notre vénérable archevêque: toutes les pensées se tournent vers lui, et avec tant de raisons! Le 31 décembre, on nous dépêche: « Monseigneur est mort hier, à onze heures dans la nuit.» Il faut donc se rendre à l'évidence! Cette lugubre nouvelle blesse tous les coeurs, attriste tous les fronts.Les soeurs désireraient passer des heures entières devant le tabernacle, afin de se ressaisir et prier à leur aise pour le regretté disparu.On nous répète que sa louange est dans toutes les bouches; les protestants eux-mêmes ne cessent de l'exalter.Monseigneur n'avait point d'ennemi personnel et sa mort est un deuil pour tous.Notre communauté de Sainte-Croix pourra toujours évoquer son souvenir, comme celui d'un père tendrement dévoué à toutes ses oeuvres, puisqu'il a été notre supérieur ecclésiastique tout le temps de son épiscopat.Sa dernière visite à Saint-Laurent date du Chapitre général.Monseigneur se montra alors si gai, si jovial, contrairement à son habitude, que les soeurs ne purent s'empêcher de dire: Vraiment! Monseigneur pressent sa mort, il n'a jamais paru si gai!.Tout de même, nulle ne songeait à prendre au sérieux ce pressentiment, le voyant si plein d'énergie et, en apparence du moins, si plein de santé.Quand la précieuse dépouille fut exposée en chapelle ardente, les soeurs se rendirent nombreuses à la chambre mortuaire, pour y présenter leurs pieux suffrages et leur profond respect.Ce tribut de reconnaissance envers Mgr Fabre restera dû à 1896 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 79 jamais; réellement, nous sommes insolvables envers lui, ainsi qu'envers Mgr Bourget.Leurs noms, à tous deux, vivent et vivront dans l'âme de notre Congrégation reconnaissante.Les journaux annoncent au pays entier la disparition du grand archevêque de Montréal.La Semaine Religieuse, en particulier, dans plusieurs numéros, exhale la douleur, la tristesse du personnel de l'archevêché et de tout le diocèse.En première page du numéro, 2 janvier 1897, nous lisons: « Le sacrifice est consommé ! le diocèse a perdu son premier pasteur, nous avons perdu un père, le plus tendre et le meilleur des pères.0 Dieu ! que votre volonté soit faite.C'est la première parole qui vient aux lèvres, au milieu de notre grande douleur, en présence du corps inanimé du bien-aimé et saint archevêque qui, durant sa vie tout entière, n'eut rien tant à coeur que d'accomplir la volonté divine.(»a barbe.On m'a bien traité, mais je ne suis pas guéri ».Le conseil général reçut aussi M.l'abbé Desrosiers, chapelain chez les soeurs du Bon-Pasteur; M.le curé de Keeseville et d'autres prêtres des États-Unis; des religieuses de la Présentation de Saint-Hyacinthe, dont l'une, soeur M.-de-l'Enfant-Jésus, est parente de mère M.de Saint-Gabriel, maîtresse des novices.Ces dernières passèrent toute la journée avec nous et visitèrent la maison et ses dépendances.Le 29 du mois d'août, M.l'abbé Bertrand, vicaire à la paroisse Sainte-Brigide, à Montréal, annonçait à la mère générale que Mgr Bruchési le nommait chapelain de notre communauté.Ce prêtre était relativement jeune, trente-cinq ans; mais il avait déjà exercé le saint ministère durant- sept années chez les soeurs de la Providence, dans trois de leurs établissements.En tous cas, il était l'envoyé de Dieu; il fut le bienvenu.Son prédécesseur, M.l'abbé Delinelle, nous quittait le 1er septembre, pour la maison de Lorette à St-Martin, chez les SS.du Bon-Pasteur.Ce digne prêtre laissa après lui un touchant souvenir de piété et d'exactitude en tout ce qui concernait son ministère sacré, il a toujours été un sujet d'édification.Sa prédication, cependant, ne fut pas goûtée; M.Delinelle paraissait porter soixante-quinze ans d'âge, bien qu'il n"en eût que soixante- six.Le 3 septembre, le nouveau chapelain reçut les hommages de la communauté; les pensionnaires rentrées de la veille lui font une jolie réception.M.l'abbé Bertrand, par ses bonnes paroles et ses aimables réparties, gagna la confiance des élèves et tout marcha pour le mieux.Il inaugura son ministère, en prêchant la retraite des postulantes.Ces aspirantes à la vie religieuse venaient à Sainte-Croix faire l'essai de la vocation à laquelle elles se sentaient appelées.Le 7, dans une cérémonie spéciale, la communauté, par la voix du prêtre, les admettait au postulat.156 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 189S Chacune portait un cierge allumé, symbole de sa foi et de sa charité.é * * Vers la mi-septembre, une jeune soeur atteinte d'une maladie de poitrine, depuis quelques mois, se trouvait réduite à un degré de faiblesse extrême; elle seule, la petite malade, ne paraissait pas avoir conscience de son état: « Je me sens un peu fatiguée, voilà tout; » et elle riait aimablement des frayeurs de ses compagnes et du vieux médecin.Comme elle n'avait pas encore gardé le lit, elle fut toute surprise d'entendre ses infirmières la prier de s'y mettre, afin de recevoir l'Extrême-Onction.Sans ajouter foi à l'opportunité de cette prudence, soeur Marie-de-Sainte-Edith se laisse faire, comme une petite enfant; sa figure est souriante et quelque peu incrédule.En l'absence du chapelain, on envoie chercher le bon Père curé qui procède à la triste cérémonie.Ceci se passait dans la matinée.Au cours de l'après-midi, ses compagnes vinrent la voir, et chacune de lui donner de pieuses commissions pour le ciel.Elle promit de se souvenir d'elles; elle assure aussi qu'elle prendra bien soin de ses deux jeunes soeurs, encore au milieu du monde; et la mourante parle du paradis d'une manière touchante.A deux heures et trente, on vient lui annoncer que toute sa famille est au parloir.« Aidez-moi à mettre mon habit religieux, dit-elle, avec fermeté, je vais aller les consoler ».Mais son courage la trahit, et elle s'assied dans le fauteuil.Les infirmières pressentent le dénouement fatal; M.le curé est rappelé, lui donne une dernière absolution.La mort approche; on la remet au lit avec mille délicatesses.La révérende mère générale récite les prières des agonisants, auxquelles toute la communauté présente répond avec attendrissement.Bientôt, la jeune mourante exhale son dernier soupir, à peine perceptible.Soeur Marie-de-Sainte- Edith (Julia Dineen) entrait dans le royaume du bonheur où la mort a perdu son empire.Elle comptait à peine vingt-quatre ans d'âge.Sa famille, dans l'angoisse, l'attendait toujours au parloir.Quelle nouvelle apportera-t-on, enfin ?Le R.P.McGarry, es.a, se charge du triste message.Il descend au parloir et s'exécute 1S98 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 157 en montrant le ciel, sans prononcer un mot.Ce geste de foi est compris.Mais aucune parole ne peut calmer la douleur des parents, en ce triste moment.Ils sont tous invités à revenir le lendemain prier et se réconforter auprès de la bien-aimée défunte; soeur Marie-de-Sainte-Edith est exposée dans le parloir des élèves.La famille Dineen avec ses amis se rendirent fidèlement.Tout se passa d'une manière très édifiante.Près de ce pauvre cercueil, on versa des larmes amères, avec des prières ferventes.Tous s'encouragèrent mutuellement.La nudité de cette chambre mortuaire, le triste cercueil de bois noir firent une heureuse impression sur le coeur de ces braves Irlandais, à qui la fortune permettait un plus somptueux décor.Ils ne voient plus rien de si grand dans la religion que la mort d'une religieuse.Le père, tout en larmes, confie à une soeur: « J'ai perdu la plus aimée de mes bien-aimés enfants, mais dans mon chagrin, j'ai lieu de me réjouir puisque ma Julia est morte religieuse de Sainte-Croix ».La communauté entière regretta cette jeune soeur.Nulle ne la connaissait autrement que douce, souriante, charitable, et d'une obéissance remarquable.L'excellente famille Dineen a fourni des élèves distinguées à notre pensionnat Notre-Dame-des-Anges, durant dix-neuf années.En outre, elle est regardée, comme bienfaitrice à cause de ses dons généreux, ou à la maison mère ou au pensionnat Saint-Basile.* * * Le troisième dimanche de septembre ramenait la fête patronale de la Congrégation.Dans l'après-midi de ce beau jour survint un événement extraordinaire.Tout le personnel de la maison, religieuses et élèves, se trouvait réuni à la chapelle pour le sermon et la bénédiction du Très Saint-Sacrement; quelques personnes arrivées trop tard pour entrer à la chapelle restèrent au parloir.Or, voilà que bientôt, au commencement du sermon, s'élève un orage effroyable.Une seule personne n'en parait pas émue, c'est le prédicateur qui continue comme s'il se fût parlé à lui-même.Au dehors, les arbres se tordent, la pluie tombe en torrents, les vitres se brisent et l'on n'entend plus que les gémissements de la tempête.Ainsi, les éléments 158 ANNALES DE LA CONGRÉGATION l.V.K déchaînés couvrent la voix du prêtre, de telle sorte que, le calme revenu, en interrogeant toute l'assistance, on ne put recueillir du sermon que ces mots du texte : « Est-il une douleur semblable à ma douleur ?» Ce sermon et la contenance ferme du prédicateur ont servi du moins à prévenir une panique parmi les élèves.Hommes, femmes et enfants, encore au parloir, croyaient à un cyclone et récitaient pieusement le chapelet.Le lendemain, le soleil se lève radieux comme pour éclairer le triste spectacle que les champs offrent à nos regards.Les vergers et les jardins sont jonchés de branches, de feuilles et de fruits.Les belles pommes, toutes criblées, ne valent plus rien pour la provision d'hiver.Or, ces fruits, ne pouvant être conservés, sont envoyés dans quatre de nos maisons où le besoin est le plus pressant.Donc, cette fois encore, « A quelque chose, malheur est bon ».* * * Dans les derniers jours de septembre, des visiteurs distingués arrivaient à la communauté; tel M.l'abbé J.-B.-H.-Y.Milette, curé de la paroisse St-Louis-de-Gonzague, à Nashua, et un autre, M.l'abbé Filion, curé d'une paroisse du Manitoba, sollicitait des soeurs pour tenir son école; M.l'abbé Gauthier, de l'archevêché de Montréal, et M.le chanoine Martin visitaient le pensionnat; MM.les abbés Daignault et Foucher, le premier, chapelain au Précieux-Sang, l'autre à Villa-Maria, prirent le dîner chez le chapelain, et montèrent dans les classes dans le cours de l'après-midi; soeur Marie-de-Saint-Jean-Berchmans les accompagna.M.l'abbé Roméo Lamarche, chapelain des Dames du Sacré- Coeur, au Sault-au-Récollet, commençait les exercices de la retraite des élèves, le 25, pour la terminer le 29, en la fête de saint Michel, archange.Les élèves ne dissimulèrent pas leur contentement et de leur prédicateur et d'elles-mêmes.Cet homme de Dieu possédait le don de transformer les volontés les plus rebelles.Ses sermons furent de véritables bijoux, non seulement au point de vue littéraire, mais surtout au point de vue moral et dogmatique; le jeune auditoire a été pris par cette parole douce et 1898 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 159 pénétrante, autant qu« par l'éloquence entraînante du prédicateur.g * * Dans ce même mois, une jeune novice, soeur Marie-de-Saint- Jean-d'Avila (Florentine Duplessis) avait été remise à sa famille, au mois d'août, pour cause de santé.Elle sollicita sa réadmission dans la communauté afin d'y mourir, car ses forces diminuaient rapidement.Cette petite soeur de dix-huit ans avait compris déjà que la vie religieuse est le vestibule du ciel.Son noble et pieux désir ne pouvait pas ne pas se réaliser.Elle fut ramenée en ambulance, le 22 septembre; deux médecins l'accompagnaient.Le 25, elle recevait le saint viatique, puis, avec toutes les formalités voulues, elle émettait les voeux perpétuels, comme elle le demandait avec instance.M.l'aumônier présidait cette cérémonie en présence du conseil général et de quelques soeurs réunies dans la chambre de la mourante.La jeune soeur Marie- de-Saint-Jean-d'Avila n'attendit pas longtemps le ciel, qu'elle entrevoyait depuis plusiqurs mois.Le 5 octobre, elle s'éteignait doucement, paisible et souriante; rien de plus consolant et de plus édifiant à contempler que cette petite soeur dans les bras de la mort.L'avant-veille du trépas de la malade, une compagne se rendant à son heure d'adoration lui demanda, à un moment où la chère patiente endurait des douleurs intolérables: « Quelle faveur dois-je demander pour vous à Notre-Seigneur ?» Après un moment de réflexion, elle répondit: « Que sa volonté soit faite! » Cette réponse donnait une haute idée de sa vertu d'abandon.Elle redisait souvent à sa mère maîtresse, mère Marie-de- Saint-Gabriel, « Je ne crains qu'une chose, c'est de laisser paraître de l'impatience ».Il n'en était rien; les soeurs se plaisaient à la visiter, pour admirer la sérénité de son front et la candeur de sa belle physionomie.Cette jeune soeur, — pourquoi ne pas dire cette enfant ?— avait atteint en cinq mois les sommets de la sainteté.La longueur de la vie ne se mesure pas au nombre des années, mais à l'intensité de l'amour.Elle a aimé le Christ, elle a souffert, et beaucoup, pour son amour.Excellente musicienne, elle a su utiliser les harmonies mises en elle par Dieu; et, malgré les diffi- 160 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 189$ cultes, elle a réussi à accorder son instrument terrestre aux instruments divins.Sa lyre vibrera dans l'éternité avec celle des anges.Petite épouse de Jésus, prie et chante là-haut pour la Congrégation qui a préparé ton coeur à jouir éternellement de l'amour.* * * Une religieuse de la Providence, soeur Marie-du-Sacré-Cceur, âgée de soixante-seize ans, récemment venue de l'Orégon, arrive à Saint-Laurent avec sa nièce, soeur Marie-Edmond, de la maison mère de Montréal.La vénérable missionnaire est la tante de soeur Marie-de-Sainte-Denise (Pariseau) de notre Congrégation et soeur Marie-Edmond est la soeur de dette dernière.Il serait superflu de souligner le bonheur de cette réunion.La tante et la nièce passent quelques jours à Saint-Laurent.Les soeurs sont charmées de la simplicité, jointe à l'esprit éminemment supérieur de la bonne mère.La majeure partie de sa vie s'est écoulée dans la lointaine contrée de l'Orégon, où elle retournera en avril prochain.Son plus grand plaisir est de communiquer, à qui veut l'entendre, le fruit de sa longue expérience.Elle prie notre révérende mère générale de lui accorder la faveur d'amener avec elle soeur Marie-de-Sainte-Denise, pour quelques jours, afin de lui enseigner à fabriquer les crucifix et les bonbons.La permission fut accordée avec plaisir; plus tard, la communauté constata que cette industrie rendait de grands services.* * * Depuis le 4 juillet, la mort, l'impitoyable mort, a fauché quatre victimes dans nos rangs et nous ne sommes qu'au 13 octobre.Les soeurs réfléchissent aux impénétrables secrets de Dieu.Deux jeunes soeurs, encore tout embrasées des grâces de leur profession religieuse, sont mortes après une sérieuse préparation.Par contre, deux vénérables anciennes sont frappées soudainement et succombent au premier coup.Celle qui disparaît aujourd'hui, soeur Marie-de-Saint-Joseph (Mélanie Gaucher), souffrant depuis plusieurs semaines de maux de tête atroces, n'avait cependant pas cessé de suivre la communauté.Le 1898 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 161 11, elle assistait encore à la récréation commune et avait pris ses repas au réfectoire.Les infirmières consultèrent le médecin; celui-ci examina le cas et n'y trouva, chose étonnante, rien de grave.Les compagnes remarquèrent, pourtant, l'air abattu de la chère soeur; elle ne marchait qu'avec peine, mais on la connaissait si énergique.Le 12, elle ne se sentit pas la force de se rendre à l'oraison du matin; le midi, elle gardait encore le lit.Aux soeurs qui la visitèrent elle avoua: « Oh, oui, que je souffre!» Ce sont les dernières paroles recueillies sur ses lèvres.Quelques instants après, elle fut trouvée étendue par terre, sans connaissance.Le médecin n'épargna rien pour la ramener.Tout fut inutile ! La malade venait de tomber dans un sommeil léthargique, auquel devait succéder la mort.Le lendemain, le 13, la chère soeur se trouvait encore dans le même état; l'aumônier lui donna l'absolution, conditionnellement, et lui administra l'Extrême-Onction.A midi, une attaque d'apoplexie foudroyante trancha le fil de ses jours.Soeur Marie-de-Saint-Joseph mourut dans la cinquante- septième année de son âge et la quarante et unième de sa vie religieuse.Elle a vécu en communauté, dans l'exercice d'une charité, d'un dévouement sans repos ni trêve.Née le 27 mars 1841, elle entrait au postulat le 19 juin 1858, à l'âge de dix-sept ans.Elle émit les voeux perpétuels, le 22 mai 1860.Elle vécut cinq années, sous la bienfaisante direction de notre T.H.Mère Marie-des-Sept-Douleurs, ce qu'elle estimait comme une des grandes grâces de sa vie religieuse.Cette mort accabla les soeurs de surprise; elles ne purent se convaincre de la réalité.Elles croyaient toujours la voir arriver en récréation, gaie, causeuse et aimable.Hélas! quel avertissement! Le Maître l'a dit: « Vous ne savez ni le jour ni l'heure! Veillez donc et priez!» La regrettée soeur appartenait à une famille distinguée de la bonne société montréalaise.Des dépêches furent envoyées dans les endroits où nous connaissions des membres de sa famille.Tous se rendirent sans retard; une de ses soeurs, seulement, consentit à jeter un dernier regard sur celle qui l'avait tant aimée: madame Roy, de Sainte-Geneviève, qui affectionnait cette soeur aînée comme sa mère.Les autres membres de la famille n'osèrent contempler la morte; ils préféraient conserver dans leur souvenir 162 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1898 l'image de cette figure ouverte et affable avec laquelle ils étaient toujours accueillis.Soeur Marie-de-Saint-Joseph avait conquis l'estime et la sympathie des soeurs dès les premiers jours de son arrivée au couvent.Elle poussait la condescendance si loin! elle cherchait continuellement à se rendre serviable, selon son expression.Elle ne savait pas refuser un service; aimable en conversation, délicate dans ses procédés, très originale, mais non fatigante, sa compagnie plaisait à toutes.Tous les postes lui convenaient; les travaux manuels comme l'enseignement du piano.Nombreuses encore sont les soeurs qui l'ont connue (1933); chacune lui garde un bon et affectueux souvenir.Le lendemain de ce décès, M.l'abbé Lavigne, curé de Cohoes, États-Unis, venait demander des soeurs pour sa paroisse.La supérieure se voit dans l'impossibilité d'accéder à sa demande, à cause des pertes récentes que la communauté a subies, et des engagements nombreux auxquels il faut faire honneur.Le 1er novembre, à la messe de la grande solennité de la Toussaint, le R.P.Sava, rédemptoriste, donne le sermon sur le ciel.Combien encourageant le tableau céleste qu'il place sous nos yeux; ce beau ciel, où tous les repentis et les pardonnes sont admis en la compagnie de la Mère de la pureté, des Agnès, des Louis de Gonzague et des Jean-Berchmans.« Beaucoup de péchés sont remis à ceux qui ont beaucoup aimé!» En la fête de Saint-Wilbrod, patron de notre supérieur ecclésiastique, c'est grande réjouissance à la maison mère et au pensionnat: ce qui n'empêche pas le héros du jour de rassembler le conseil général pour la révision du Coutumier.La séance est longue, très longue et ce ne sera pas la dernière.Aussi bien, c'est un travail qui demande de la prière et de la réflexion, avant de le livrer à l'imprimerie.Le R.P.Louis Lalande vint à la maison mère, vers la fin de novembre; il voulut bien accepter de monter à la chapelle, pour adresser la parole aux élèves et aux soeurs réunies.Dans une agréable causerie, il montra la nécessité de former son coeur et 1898 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 163 d'acquérir l'énergie de caractère.Par un heureux choix de paroles et d'exemple, le R.Père suspend à ses lèvres l'attention de son auditoire et réveille dans les coeurs les bons souvenirs de la dernière retraite prêchée aux religieuses.Le S décembre amenait au couvent l'abbé Elie Auclair, de la paroisse Saint-Jean-Baptiste de Montréal; il donna une instruction fort éloquente sur la dévotion à Marie-Immaculée.Ce sermon précéda la réception de cinq nouvelles congréganistes de la sainte Vierge et la bénédiction du très Saint Sacrement.Les congréganistes de ce jour furent: Mlles Héléna Prévost, Léa Bastien, Marie-Louise Marion, Maria Lapierre et Geneviève Péloquin.Cette fête du 8 décembre 1898 a laissé une heureuse impression, puisque les témoins en parlent encore comme d'un événement récent.1 * * * Durant son séjour en France, le R.P.Dion s'était créé de bonnes et fidèles amitiés.C'est ainsi que le 12 décembre, il recevait la visite de M.Larue, curé d'Alençon, France.Ce digne prêtre, en promenade au Canada, ne pouvait manquer de visiter un de ses meilleurs amis, dans la personne du R.Père curé.Ce dernier eut l'amabilité de le présenter aux soeurs.Nous le voyons d'abord le matin à l'autel, où il célèbre la messe de communauté; après son déjeuner, il visite la maison, les jardins, etc; il donne partout l'impression charmante d'un profond savoir, joint à une aimable simplicité.Devant les soeurs professes et les novices, il cause du Fondateur de notre Institut, qu'il a connu et dont la réputation, en France, est celle d'un saint.Au pensionnat, il entre dans chaque classe; il bénit les élèves et les exhorte à se munir d'armes très fortes, afin de soutenir plus tard les combats encore insoupçonnés que leur réserve l'avenir.Qui sait?.Lui-même, le bon curé d'Alençon, ne se doutait guère, en ce temps-là, de la célébrité qui rejaillirait un jour sur la petite ville industrielle dont il était le pasteur, grâce à la sainteté d'une jeune 1 La congrégation des Enfants de Marie au pensionnat Notre-Dame- des-Anges fut introduite en 186/5, sous le supériorat de Mère Marie de Sainte- Léocadie.Les premières agrégées furent: Mlles Léonora Dillon, Elmina Labelle, Marie Deguire, Eugénie Piché, Sarah Dillon.164 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1898 paroissienne, la grande petite sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus.Le couvent de Saint-Laurent s'honore d'avoir reçu dans ses murs l'un des curés d'Alençon.Après ces consolantes visites reparaît la Croix: la maison de Saint-Louis-de-Gonzague, Nashua, est affligée par la maladie de soeur Marie-de-Sainte-Angèle-de-Mérici, supérieure.Une dépêche télégraphique l'annonce par ces simples mots : « Soeur supérieure gravement malade ».Aussitôt, l'économe générale et la soeur pharmacienne se rendent sur place.Elles y passent une semaine.Chaque jour, la maison mère reçoit des nouvelles fort variables: « Elle est mieux».le lendemain: « Elle est plus mal».de sorte que la révérende mère vit dans des inquiétudes mortelles.Enfin le 24 décembre, les deux déléguées ramènent la malade, mais dans un état désespéré.Son retour fut providentiel; le médecin de la communauté comprit le genre de sa maladie, il trouva les remèdes à administrer, et il put la remettre sur pieds.La chère soeur ne recouvra pas une santé parfaite, loin de là; mais elle vécut encore quatre années, dont trois dans la charge de supérieure.Ses souffrances, à peu près continuelles, lui valurent un accroissement de mérites que le ciel, nous n'en saurions douter, lui révéla dès son arrivée là-haut, le 2 février 1914.* * * Fidèle à sa promesse de venir célébrer la messe dans notre chapelle, M.l'abbé Larue se trouva chez M.l'aumônier le 24 décembre.Après le chant solennel de « Minuit, chrétiens,» la chorale chanta la messe composée par notre chère soeur Marie-de- Sainte-Thérèse (McMahon).Cette jolie messe ne pouvait être mieux rendue.Soeur Marie-de-Saint-Bernard (Dagenais), n'épargna aucune fatigue pour obtenir un succès tout à la gloire du divin Enfant.Immédiatement après la grand'messe, le célébrant quitta la sacristie en toute hâte, nous en fûmes étonnées; c'est que ce bon Français voulait se procurer le plaisir de constater, de ses yeux, 1898 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 165 l'édifiant spectacle d'une église remplie au Canada et des nombreux communiants à cette belle solennité.Sa curiosité, bien légitime, est satisfaite en entrant dans l'église paroissiale, et son âme sacerdotale en est profondément émue.« Oui, dit-il, il y a de la foi dans votre beau pays.Ah! notre pauvre France!" Dans l'après-midi de Noël, le R.P.McGarry, es.a, prêcha le sermon en anglais; comme l'assistance aimait entendre cette voix sympathique qui pénétrait les âmes pour les faire monter à Dieu! L'année civile se terminait au couvent par un acte religieux : la retraite du mois.Ce jour fut entièrement consacré à l'inventaire spirituel; il convenait de revoir son budget.De toute nécessité, il faut que les recettes l'emportent sur les dépenses.Gare à la faillite ! Une large part du temps fut réservée à des prières pour tous ceux qui nous sont chers: parents, élèves, bienfaiteurs, prêtres, tous ceux, en un mot, qui se sont recommandés à nos prières.Ensuite, toutes de s'endormir en paix et d'attendre l'an nouveau.CÉRÉMONIES RELIGIEUSES DE L'ANNÉE 1898 VÊTURE — le 6 janvier: Mlle Marie Taillefer S.M.-de-S.-François-Régis VÊTURE — le 22 mars : Mlles Dulcina Cantin S M.-de-S.-Adrienne Robertine Caron Hélène Carrière Florestine Duplessis Héléna Beauséjour Laura Chartrand.S.M.-de-S.-Didace S.M.-de-S.-Gustave .S.M.-de-S.-Jean-d'Avila .S.M.-de-l'Incarnation S.M.-de-l'Ange-Gardien VÊTURE — le 21 juillet: Mlles Edith Dulin S.M.-de-S.-Félix-de-Valois M.-O.Morin S.M.-de-S.-Ernest M.-Anna Thomas S.M.-de-S.-Victor C.McCormick S.M.-de-S.-Robertine Isabelle Mathieu S.M.-de-S.-Jean-Gualbert 166 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1S98 VOEUX TEMPORAIRES — même jour: S.M.-de-S.-Edouard (MacDonald) S.M.-de-S.-Maurice (Wadsworth) S.M.-de-S.-Hilaire (O'Grady) S.M.-de-S.-Jean-de-Matha (Thérien) S.M.-de-S.-Ignace-de-Loyola (Waddell) S.M.-de-S.-Augustin (Baulne) S.M.-de-S.-Berthilde (Sanche) S.M.-de-S.-Imelda (Farly) S.M.-de-S.-Albertine (Brodeur) S.M.-de-S.-Gérard (Cusson) S.M.-de-S.-Edwin (MacDonald) S.M.-de-la-Présentation (Mathieu) S.M.-de-S.-Philippe (Bolduc) S.M.-de-S.-Urbain (Lacombe) S.M.-de-S.-ColIette (Bédard) S.M.-de-S.-Aldéric (Ouimet) VOEUX TEMPORAIRES—le 15 août: S.M.-de-S.-Bruno (Lebeau) S.M.-de-S.-Matthieu (Boisvert) S.M.-de-S.-Amable (Bélanger) S.M.-de-S.-Constance (Gagnon) ayant déjà prononcé les voeux pour une année, les renouvellent pour quatre ans.S.M.-de-S.-Clément ayant déjà fait des voeux pour trois ans, les renouvelle pour deux ans.VOEUX PERPÉTUELS — le même jour: S.M.-de-S.-Elmire (Thérien) S.M.-du-Bon-Pasteur (Monette) S.M.-de-S.-Isabelle (Précourt) S.M.-de-S.-Irène (Martel) S.M.-de-S.-Clotilde (Brunelle) S.M.-de-S.-Herminie (Bergevin) S.M.-de-S.-Antonine (Vermette) 1898 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 167 S.M.-de-S.-Honoré (Montminy) S.M.-de-S.-Catherine-de-Ricci (Côté) S.M.-de-S.-Cécile (Brodeur) S.M.-de-S.-Caroline (Carrière) YÊTTJRE —le 20 décembre: Mlles Marie Ruel S.M.-de-S.-Laurent-Justinien.Emma Custeau S.M.-de-S.-Georgina Octavie Perrault S.M.-de-Ste-Louise-de-Savoie Victoria Larue S.M.-de-Ste-Esther Alida Dufort S.M.-de-St-Florent Délia Lachapelle S.M.-de-St-Hermas Margaret O'Brien S.M.-de-S.-Marguerite-de-Cortone Flora MacDonald S.M.-de-St-Wilbrod Janet Chisholm S.M.-du-Précieux-Sang Rosa Godin S.M.-de-St-Pierre-Damien Virginie Cantin S.M.-de-Ste-Juliette Fébronie Chaussé S.M.-de-Ste-Lucille Angélina Laberge S.M.-de-Ste-Céline Joséphine Lemelin S.M.-de-St-Agathange Cordélia Chartrand S.M.-de-Ste-Êlise Marie-Rose Thériault S.M.-de-St-Théotiste Albertine Poitras S.M.-de-St-Octavien Même jour — Voeux perpétuels — S.M.-de-Ste-Adèle (Gignac) Même jour — Voeux pour deux ans — S.M.-de-Ste-Monique (Shaw) Le 30 décembre — Voeux perpétuels — S.M.-de-St-Louis (Painchaud, malade) VOTRE MISSION EST DIFFICILE ET LABORIEUSE, ELLE DEMANDE UN GRAND ESPRIT D'ABNÉGATION ET DE DÉVOUEMENT, AVEC UNE FORCE D'ÂME INÉBRANLABLE.ATTENDEZ TOUT CELA DU CIEL PAR LA PRIÈRE FERVENTE ET LA MORTIFICATION.R.P.Moreau CHAPITRE SIXIÈME SOMMAIRE: 1899—Le premier janvier — Mère Marie-de-Saint-Basile envoie sa 24e circulaire — Décès de soeur Marie-de-Saint-Louis (Painchaud) — Visite de Mgr Bruchési — Centième anniversaire de naissance du T.R.P.B.Moreau—-Erreur à relever — Achat d'une imprimerie et d'un outillage de reliure.FONDATION DE LA MAISON DE SAINT-ANTOINE A NEW- BEDFORD — Fête de vêture et de profession religieuse — Examen du nouveau « Coutumier », par M.le Supérieur — FONDATION DE LA MAISON SAINT-GEORGES, Manchester — Nos pensionnaires au Windsor pour une représentation cinématographique — La cabane à sucre — Visiteurs et fêtes du mois de mai — M.le Supérieur — Mgr Bruchési — Grand'messe, le 14 juin — Fin de l'année scolaire — La Saint- Jesn-Baptiste — Triduum préparatoire à la fête du Sacré-Coeur — Visite de Mgr Bruchési — Le nouveau « Directoire spirituel » et le « Coutumier» — Allocution de Mgr Bruchési au cours de la retraite annuelle.FONDATION D'ADAMS, Mass.— Entrée de quarante postulantes — Retour de M.le supérieur d'un voyage aux Etats-Unis — Retraite des élèves — Maladie et mort du R.P.Rézé — Une visite à l'école normale de la C.N.D.— Visites de personnages distingués: Mgr Légal, Mgr Gravel — Étude des plans de la future construction — Mgr Decelles préside une cérémonie religieuse.« Une nouvelle année, c'est une page blanche.Saints Anges, qu'y écrirez- vous ?.» Sans soulever le voile de l'avenir, l'administration générale entre avec confiance dans la série des jours que donnera le Seigneur.« Votre providence, Père, gouverne tout.» (Sap.xiv, 3.) Alors, pourquoi craindre ?Les paroles de paix que l'aumônier adresse à la communauté, en guise de voeux, nous engagent également à la confiance.Il ne souhaite pas les jouissances de la terre, mais la paix intérieure, la paix de l'âme, la paix du coeur, la paix promise à toute âme de bonne volonté.172 ANNALES DE LA CONGRÉGATION lv Un peu plus, les novices, dans leur exubérance juvénile, eussent entonné aussitôt le Gloria in excelsis Deo, et in terra pax hominibus bonae voluntatis.Elles ont appris de l'abbé Perreyve: « Quand on chante, la prière a plus de feu, la foi plus de vigueur, l'espérance plus d'ailes ».Allons, les jeunes, accordez votre lyre en ce premier de l'an, que votre âme monte jusqu'à Dieu.Chantez notre confiance, chantez nos espérances, chantez nos croix probables, et bénissez-les harmonieusement.Chantez même nos misères spirituelles, et la miséricorde descendra sur nous.Dieu comprendra, car Dieu comprend toujours.* * * Dans les premiers jours de janvier, la pensée de mère Marie- de-Saint-Basile se tourne vers ses filles missionnaires.Elles aussi ont envoyé l'expression de leur respect, de leur filial attachement à la maison mère.En retour, et comme gage de son affection maternelle, la révérende mère générale dépêche, par le premier courrier, sa vingt-quatrième circulaire.Nous en extrayons quelques passages: « Mes bien chères filles, « Nous avons reçu avec reconnaissance, l'expression de vos souhaits à l'occasion du nouvel an, ainsi que l'assurance des prières ferventes que vous faites monter vers le Ciel pour notre bonheur.Ces voeux, formés au pied du tabernacle et confiés à Notre-Seigneur dans une sainte communion, nous obtiendront les grâces et les secours dont nous éprouvons un si grand besoin.« Que nous réserve la présente année ?C'est le secret du bon Maître.Cependant, malgré cette incertitude de l'avenir, nous pouvons présager que la nouvelle année nous ménage de puissants secours, dans l'ordre spirituel et dans l'ordre matériel.Cette inconnue vient à nous avec son cortège de croix et de peines; il ne faut pas en douter, mais consolons-nous: « La croix acceptée de bon coeur, et portée courageusement, est la voie la plus directe pour arriver à Dieu.» Efforçons-nous donc, mes bien chères filles, de mériter cette assistance divine par une fidélité 1S99 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 173 plus grande à toutes nos saintes obligations, une générosité plus ardente à nous combattre nous-mêmes et à déraciner de nos coeurs tout ce qui s'oppose au règne de Jésus-Christ.« Pour bien vivre, il faut bien prier,» nous dit saint Augustin.Demandons, les unes pour les autres, cet esprit de prière dont étaient pénétrés les saints en répandant leur âme devant Dieu.Kedoublons de ferveur et de régularité dans nos exercices de piété et conjurons le Sauveur de nos âmes de prêter une oreille favorable à nos besoins de chaque jour.Supplions-Le de ne point nous tenir compte des mille et une distractions qui viennent trop souvent, hélas ! interrompre nos entretiens avec Lui.« Appliquons-nous plus que jamais à l'esprit de sacrifice et d'abnégation.Faisons de généreux efforts pour pratiquer constamment l'aimable et douce charité et donner l'exemple du support mutuel dans les rapports journaliers les unes avec les autres; conditions essentielles pour goûter les joies si pures de la vraie vie de communauté.« Aimons et demandons souvent dans nos prières, mes bien chères filles, l'esprit de recueillement et d'union à Dieu.Et, comme moyen assuré d'y parvenir, apportons une grande fidélité à l'observation du silence; évitons plus que jamais les sorties et ne paraissons au parloir que pour une absolue nécessité.« Prions aussi les unes pour les autres, afin que cette union de la prière fasse descendre sur toute notre famille religieuse l'abondance des grâces célestes qui nous permettent d'atteindre le degré de perfection, déterminé par Celui à qui nous nous sommes consacrées, au saint jour de notre profession ».L'épreuve probable, entrevue dans la présente circulaire, apparut bientôt: dès le début de l'année, le Seigneur réclama une victime dans la personne d'une jeune religieuse, soeur Marie-de-Saint-Louis, née Julie Painchaud.Atteinte depuis six mois d'une maladie de poitrine, la malade sentant ses forces décroître, demanda à être administrée.L'aumônier, devant s'absenter pour quelques jours, jugea prudent ne pas différer, et le désir de la chère soeur se 174 ANNALES DE LA CONGRÉGATION réalisa le jour même.Mais le bon Dieu prolongea son attente du ciel jusqu'au 23 janvier.Quelle édification n'a-t-elle pas donnée, durant ces trois semaines.Elle n'eut plus de pensée que pour « le repos en Dieu,» elle ne parlait que du ciel.Lorsque les crises de faiblesse devenaient trop fortes, elle se réjouissait encore: « Je vais donc mourir », et sa joie débordante la fatiguait à tel point que la mère supérieure l'engagea à se calmer.En fille obéissante, elle se soumit à l'instant et reprit son beau calme ordinaire.Dès le début de la maladie, la chère soeur connut son état désespéré ; elle ne s'en effraya point et se résigna de tout coeur à la sainte volonté de Dieu.Pourtant, n'aime-t-on pas la vie à vingt-six ans ?Le vaste champ de l'apostolat est ouvert.De nombreux enfants nous attendent.Aux objections, elle répondait: « Dieu est le Maître, s'il me rappelle, c'est qu'il n'a pas besoin de mes services.Ainsi, partons! Oui, partons.Soeur Marie-de-Saint-Louis avoua à ses soeurs religieuses, soeur Marie-de-Saint-Arsène, alors secrétaire générale, et à soeur Marie du Calvaire: « Je serais inconsolable, si je revenais à la santé ».D'un caractère peu expansif, elle se montra gaie pendant sa maladie et recevait avec un bon sourire toutes celles qui venaient la visiter.Au mois de décembre, elle avait prononcé ses voeux perpétuels.Cet acte, considéré comme un second baptême, lui donnait pleine et entière confiance d'entrer au paradis aussitôt après sa mort.Elle demandait souvent à la sainte Vierge de la venir chercher, afin que le temps ne lui permît point d'altérer la pureté de son coeur, dans la prolongation de son exil.Elle se confessait souvent et communiait tous les jours.Sa paix habituelle et son sourire, à tout et à toutes, permettaient de croire que les combats intérieurs n'effleuraient pas sa belle âme.Néanmoins, la veille de sa mort, elle confia à notre révérende mère: « Le démon me dit que le bon Dieu m'a abandonnée».La sympathique mère eut bientôt trouvé, dans son coeur maternel, des paroles de foi rassurantes.Le calme se prolongea jusqu'à 1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 175 la dernière heure de son dernier jour.Le lendemain, elle expirait confiante et tranquille: sa mort rendit un écho fidèle de sa vie.C'était le 23 janvier, jour des Epousailles de la sainte Vierge.Soeur Marie-de-Saint-Louis avait toujours eu des attentions particulières pour deux compagnes d'infirmerie: Soeur Marie-de- Sainte-Justine (Dagenais) et soeur Marie-de-Sainte-Ernestine (Montminy).Ces deux dernières, s'étant momentanément rétablies, tandis qu'elle-même descendait rapidement vers la tombe, elle en concevait une sorte de chagrin, tant elle désirait se les associer pour monter au ciel.Aujourd'hui, elles sont réunies.La journée sombre de leur vie est terminée; toutes trois rayonnent dans la Patrie.* * * Le 24 janvier, Mgr Bruchési honorait la communauté d'une visite officielle de nouvel an.Toutes les filles de Notre-Dame des Sept-Douleurs sentirent les vibrations de la voix d'un père au milieu d'elles, lorsque Monseigneur leur parla des beautés de la vie religieuse.Entré au couvent à une heure assez avancée dans la soirée, il resta l'hôte de M.l'aumônier pour la nuit; le lendemain matin, les soeurs le virent à l'autel pour la sainte messe.Au cours de la matinée, Monseigneur se rendit chez les élèves : toutes les harmonies s'unirent pour le recevoir: le piano, le chant, les fleurs même se trouvaient de la partie.De l'adresse présentée, une idée se détacha: « Nous voulons être pour vous, Monseigneur, un bouquet sans épines ».— Eh bien! répondit Sa Grandeur, je n'en vois pas, au milieu de ces roses odorantes et de ces oeillets magnifiques.Votre souhait se réalise en ce moment.Vous êtes bien inspirées, mesdemoiselles, ne laissez pas croître les épines autour de vous; montrez-vous toujours aimables, douces, obligeantes, ce sera pour votre bonheur personnel et pour celui de votre entourage ».L'archevêque du vaste diocèse de Montréal, si occupé pourtant, causa plus de vingt minutes avec cette jeunesse écolière, toujours avide de l'entendre.Comme souvenir de cette visite, 176 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1890 Monseigneur accorda un beau congé.Et, selon le dernier conseil du vénéré Visiteur, les élèves se réjouirent dans le Seigneur.Le 11 du mois de février rappelait aux filles du R.P.Moreau le centième anniversaire de sa naissance (1799-1899).Son fils et digne successeur dans le gouvernement de la Congrégation, le T.R.Père G.Français, écrivit à sa communauté, donnant un résumé de quelques pensées édifiantes et probablement inédites ; les voici: « Le T.R.P.Moreau réussit toutes ses grandes entreprises par une droiture rigide dans les négociations, une fermeté à défendre son oeuvre que rien ne lassait, une intelligence vive et profonde des questions, une puissance inouïe de travail et surtout, par une pitié admirable qui a eu ses côtés et ses heures vraiment héroïques.« Au milieu de ses multiples occupations qui appelaient sa vigilance, toutes à la fois, il trouvait le temps de prêcher des retraites et des stations avec le plus solide succès et de suffire seul à une très vaste correspondance.« Théologien d'une doctrine sûre et profonde, orateur de premier ordre, missionnaire d'un zèle aussi avisé qu'entraînant, éducateur d'une expérience consommée, prêtre dans toute la force du mot, religieux d'autant plus versé dans les intimes secrets de la spiritualité qu'il les lisait dans la pratique journalière de sa vie; homme d'une foi admirable, d'un coeur tendre et généreux; il n'est pas étonnant, qu'ayant tous ces vrais mérites, il ait rencontré tant de contradictions et se soit vu réservé à la plus poignante des épreuves.« Son oeuvre, répandue à travers le monde, se résumait dans cette communauté de Sainte-Croix, où tout avait surgi sous sa main, comme par miracle.Il y avait là, dans cette oeuvre de Sainte-Croix, depuis plus de trente ans, année par année, jour par jour, heure par heure, le fruit de sa pensée, de son coeur, de son âme, de sa vie entière, lentement mûri et réalisé au prix d'un labeur opiniâtre; et.tout s'écroula devant ses yeux.1S99 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 177 « Semblable à Jérémie sur les ruines de Jérusalem, il voulut s'asseoir là, en dehors, il est vrai, mais au moins en face, et tout près de ce sol et de ses murailles, qui lui redisaient tant de travaux accomplis, tant d'angoisses noblement souffertes et tant d'espérances désormais brisées.« La mort termina sa vie, une grande vie d'apôtre.Son corps repose dans le modeste cimetière de Sainte-Croix, sur un coin de cette terre qu'il ne voulut jamais quitter, ni du regard, ni du coeur.Estimons-nous heureux de compter parmi les fils d'un tel père et efforçons-nous de lui ressembler un peu, dans la pratique de ses nobles vertus religieuses.» Ce souvenir du vénéré Fondateur nous permet de relever une erreur bien involontaire entrée dans le chapitre IVe du 1er volume des Annales.Il est écrit: Mlle Gascoin, {Mère Marie-des Sept-Douleurs), n'avait jamais vu, ni entendu parler du Père Moreau, etc.Il faudrait lire : Mlle Gascoin n'était pas fixée sur le choix de la communauté où le bon Dieu l'appelait.Inspirée de suivre une mission que prêchait à LARCHAMP le Père Moreau, elle s'en vint dans ce petit bourg, chez son oncle maternel, M.Victor Chardon.En suivant cette retraite, elle s'ouvrit de ses désirs et incertitudes au R.P.Moreau qui la prit sous sa direction et la décida à venir au Mans.Ce qui suit, au volume I, est exact.1 * * * A la fin de janvier, le conseil général jugea opportun de procurer à la maison mère une IMPRIMERIE, dont le besoin se faisait sentir depuis plusieurs années; et il ajouta, en guise de complément indispensable, tout l'outillage d'un atelier de RELIURE.L'installation se trouvait au complet, le 18 février.Or, deux religieux des Clercs de Saint-Viateur, les bons Frères 1 Ce détail intéressant nous a été fourni par Mlle Rosalie Gascoin, nièce de la T.H.M.Marie-des-Sept-Douleurs, en avril 1933.Cette demoiselle demeure à Montenay, France.178 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 Mercure et Corriveau, vinrent communiquer aux soeurs le « comment s'y prendre », avec un dévouement admirable.Un TYPOGRAPHE vint ensuite enseigner aux soeurs comment procéder pour la composition.Soeur Marie-de-Sainte-Geneviève (Joli- coeur) en aura la charge première, et soeur Marie-de-Saint- Gustave (Carrière), novice, sera son aide.Le 1er mars, le typographe choisi, M.Amédée Desrochers, entrait en fonction et commença, ce jour-là même, l'impression du nouveau COUTUMIER.A l'heure où nous écrivons ces lignes, la première directrice de l'imprimerie est encore à son poste, soit trente-deux années, (1931) moins la courte interruption de dix mois.Son aide a passé les vingt-trois belles années de sa jeunesse religieuse en face des « casiers », ou de « la presse ».Elle a rempli son emploi avec un soin, un zèle, une perfection qui n'ont pu être surpassés.L'affaiblissement de sa vue a contraint les supérieures de la changer d'office.M.Lafrance, vendeur de la RELIURE, a présidé à l'installation et tout fut prêt pour le 1er mars; il donna les premières leçons.La direction de la reliure échut à soeur Marie-de-Saint- Léonard-de-Port-Maurice (Boudrias), et son aide fut soeur Marie- de-Saint-Pierre-Damien (Godin).La directrice de l'atelier, femme d'une habileté rare, crut bientôt s'en tirer sans le secours de M.Lafrance.Malgré le pauvre outillage, elle réussit à livrer un travail satisfaisant; la perfection vint plus tard, avec le perfectionnement du système.* * * FONDATION DE LA MAISON DE ST-ANTOINE, A NEW-BEDFORD — En l'année 1896, M.l'abbé Hormisdas Deslauriers, prêtre canadien, ancien élève du collège Sainte-Thérèse-de-Blainville (Terrebonne), devenu curé de la paroisse Saint-Antoine, à New- Bedford, obtint du conseil général deux religieuses pour tenir son école paroissiale.Les privilégiées choisies, pour cette oeuvre d'abnégation, furent soeur Marie-de-Saint-Athanase (MacDo- nald) et soeur Marie-de-Sainte-Augustine (Lizotte).Elles devaient passer la nuit à notre maison du Sacré-Coeur et la journée à l'école.Le voyage se faisait en tramway, matin et soir.Plus 1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 179 de trois cents élèves se présentèrent, dès le début de l'année.Trois institutrices laïques furent adjointes.L'année scolaire suivante (1897-98), SS.Marie-de-Saint- Paulin (Cédras) et Marie-de-Sainte-Berthe (Kennedy) sont ajoutées comme maîtresses d'anglais, et soeur Marie-de-Saint- Benoît (Cardinal), maîtresse de français.Cette année encore, elles voyageront matin et soir.A peu près le même nombre d'écoliers et d'écolières s'inscrivent au registre.Tous sont disposés, on ne peut mieux, à recevoir les enseignements des religieuses.Les fréquentes visites de la supérieure de la maison du Sacré-Coeur, soeur Marie-de-Sainte-Christine (Kernan), les stimule et les encourage.Ces enfants aiment leurs maîtresses et leurs méthodes de présenter la science; la classe de catéchisme est suivie avec entrain et constance.Les élèves se préparent à la réception des sacrements d'une manière très édifiante.M.le curé Deslauriers suit de près ses jeunes ouailles, sa paroisse en herbe.Il les encourage par des récompenses dont la gent écolière est toujours avide.Dès la première année, il avait fait préparer par les soeurs un arbre de Noël, bien chargé.Quelle perspective pour les jeunes! Les bontés et les délicatesses du pasteur permettaient au personnel enseignant d'oublier un peu le pauvre local dans lequel s'exerçait leur zèle, au prix de nombreux sacrifices.L'année scolaire 1898-99 s'ouvrit dans les mêmes conditions.Du personnel de l'année précédente, il ne restait que soeur Marie- de-Saint-Benoît et Marie-de-Sainte-Augustine.SS.Marie-de- Sainte-Sophie (Campbell) et Marie-de-Saint-Grégoire (McGill- vray), jeune soeur, arrivaient toutes deux comme maîtresses d'anglais.La supérieure du Sacré-Coeur, soeur Marie-de-Sainte- Christine, fut transférée à Alexandria, Ontario, au grand regret de ses soeurs; soeur Marie-de-Saint-Firmin (Copping), la remplaça.Le succès des années précédentes avait attiré les élèves; le nombre se chiffre, cette fois, à trois cent quatre-vingt-cinq le premier jour de la rentrée.Quatre religieuses ne peuvent jamais suffire à pareille tâche; une dame Bessette, ci-devant institutrice au Sacré-Coeur, à Saint-Hyacinthe et à Saint-Antoine, New-Bedford, avant l'arrivée des soeurs, leur est adjointe.Elle 180 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 se charge de la classe de catéchisme préparatoire à la première communion.Cette excellente chrétienne mérite par sa piété, son courage et son zèle, tous les éloges décernés à la femme forte des Saints Livres.Enfin en janvier 1899, le bon curé loue, provisoirement, sur la rue Nye, une maison pour les soeurs.Dans le but de faciliter l'aménagement de la résidence, M.le curé accorde quinze jours de vacances.Le 4 janvier, bien que tous les meubles ne fussent pas entrés, les chères voyageuses quittent l'hospitalière maison du Sacré-Coeur, emportant le meilleur souvenir des consoeurs qui les ont traitées avec tant de délicatesse et de charité.Désormais, elles vivront chez elles.Il n'y a pas encore de supérieure officielle, mais l'attente ne sera pas longue.Entre temps, soeur Marie-de- Sainte-Zéphirine, de la maison de Saint-François-Xavier, Nashua, est appelée à se joindre aux soeurs; et elle fera valoir son talent dans l'art culinaire et dans le soin du ménage.On lui fait une belle réception.Le 6 janvier, maîtresses et élèves ont le plaisir et l'honneur de saluer le R.P.Louis Lalande, s.j., de Montréal, occupé à prêcher des missions dans la ville de New-Bedford.Afin de donner à sa visite une note apostolique, le bon Père entretient les élèves du grand devoir des enfants envers leurs parents, leçon féconde que plusieurs n'ont pas oubliée.Le 9, le personnel est au complet.La supérieure, soeur Marie- de-Saint-Ephrem (Barrette), arrive à la mission, pour remplir la fonction de mère auprès des soeurs et des élèves.Les soeurs peuvent s'en donner à coeur joie, elles ne sont plus orphelines.Sous l'oeil maternel, elles se dévoueront, elles se récréeront et.elles prieront.Dans les jours qui suivent, M.le curé vient saluer sa première supérieure, lui souhaiter la bienvenue et lui exprimer toute sa satisfaction du beau et fructueux travail accompli par les soeurs, auprès des enfants, depuis vingt mois.Ces éloges sont bons à entendre mais ne suffisent pas pour mener à bien la grande oeuvre de la formation intellectuelle et morale de la jeunesse.Le local où se tiennent les classes n'est pas du tout hygiénique: les maîtresses y laisseront une partie de leur santé; et elles devront attendre vingt-trois années avant de trouver une amélioration, c'est-à-dire, avant de posséder une école digne de ce nom.1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 181 Les soeurs eurent la consolation de recevoir la visite de Mgr Grouard, évêque d'Athabaska-Mackenzie; et combien, maîtresses et élèves l'apprécièrent.Ils écoutèrent avec autant d'émotion que d'édification les récits héroïques des courageux missionnaires de l'Ouest canadien.Cinq mois sont à peine écoulés, depuis l'installation des soeurs dans leur maison provisoire, qu'on les sollicite de passer dans une autre plus vaste et plus appropriée à la vie religieuse.Rien n'est stable sous le soleil, nous le savons.Un déménagement au milieu des classes n'est pas facile à organiser; mais il faut en prendre son parti.Les heures de la nuit y seront employées.Cette fois, le séjour dans le nouveau couvent durera aussi longtemps que la pauvre école.Comme une large compensation, et pour la consolation des religieuses, JÉSUS aura son tabernacle, il se constituera le Prisonnier d'AMOUR de celles qui acceptent, pour Lui, tous les genres de privations.Avec le divin Maître, la vie devient douce, si nous voulons bien accorder notre volonté à la sienne, toujours adorable et bienfaisante.Le déménagement se fit en mai, la bénédiction de la chapelle en juin.Peu à peu, à pas lents, s'améliorèrent les deux bâtisses: l'école et le couvent; aujourd'hui, tous deux sont considérables et beaux.Le nouveau couvent et la nouvelle école, l'un construit en 1922, l'autre en 1923, cadrent admirablement à côté de la splendide église, la plus belle de la Nouvelle-Angleterre.Monsieur l'abbé Hormisdas Deslauriers, curé-fondateur, décéda le 19 juin 1916, en la solennité de Saint-Antoine de Padoue.Au mois de juillet, l'abbé Louis-Arthur Marchand, ci-devant curé de la paroisse Saint-Matthieu, à Fall-River, succéda à M.le curé Deslauriers.C'est sous son administration que furent bâtis le couvent et l'école, selon les plans tracés par son prédécesseur.Tous deux avaient compris le rôle que joue « la beauté», dans l'oeuvre de la formation religieuse et intellectuelle de la jeunesse catholique.L'année qui suivit la fondation, trois jeunes filles se présentèrent au noviciat de Saint-Laurent: Mlles Régina Deniers, Clarisse Pothier et L.Caillé.Elles sont encore en pleine activité au moment où nous écrivons ces lignes; nous les connaissons sous les noms religieux de SS.Marie-de-Saint-Pacifique, Marie-de- 182 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 Saint-Hormisdas et Marie-de-Sainte-Clémentine.Aujourd'hui, trente jeunes filles de cette paroisse Saint-Antoine ont embrassé la vie religieuse, dont vingt pour notre communauté.Le terrain est favorable; l'oeuvre du curé-fondateur se continue et elle est prospère.Les deux premiers pasteurs de cette édifiante paroisse auraient raison de chanter avec le Psalmiste: « Seigneur, j'ai aimé votre maison et le lieu où réside votre gloire ».* * Au pensionnat de Saint-Laurent, les élèves entrevoyaient le 7 mars, et elles aspiraient à lui donner de l'éclat, selon une coutume établie depuis quelques années.Mgr Bruchési renversa, à son insu sans doute, tous les beaux projets, s'étant offert à la révérende mère générale pour présider la Vêture et la Profession, qu'il fixa au 7 mars; il devança ainsi la confirmation.Or, les trois cérémonies supplantèrent la séance littéraire, préparée en l'honneur du docteur angélique, saint Thomas d'Aquin.Par compensation, les élèves assistèrent à la cérémonie.Elles ne se familiarisaient point avec ce genre de fête, leur admiration grandissait chaque année.La présence du pontife, le chant si grave et si solennel, le dialogue impressionnant échangé entre l'officiant et les aspirantes, tout cela remue jusqu'au profond de l'âme.Monseigneur donna le sermon; il paraphrasa, avec le talent oratoire que tout le monde admet, la formule des voeux.Les pensionnaires en furent touchées et le tableau que l'orateur présenta à son auditoire inspira aux élèves un respect encore plus grand pour leurs maîtresses, les véritables épouses mystiques du Christ.Le même jour, M.le chanoine Martin commence l'examen du « Cérémonial » qui doit être livré à l'impression et il visite les deux nouveaux ateliers; il complimente et souhaite bon succès.FONDATION DE SAINT-GEOHGES, MANCHESTER — Sur les instances réitérées du bon M.le curé Davignon, de la paroisse St-Georges, à Manchester, N.H., mère Marie-de-Saint-Basile déléguait, le 15 mars, quatre religieuses pour préparer les enfants ÎMI'.I DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 183 à la première communion, c'étaient SS.Marie-de-Saint-Eugène (Bérubé), Marie-de-Saint-Robert (Cardinal), Marie-de-Saint- Alcxandra (McDonald) et Marie-de-Saint-Honoré (Montminy).Elles quittèrent la maison mère vers huit heures du matin et le soir, à cinq heures, elles descendaient à destination; M.le curé les reçut à la gare.Deux voitures mises à la disposition des fondatrices les conduisirent au presbytère.La réception fut telle qu'on devait l'attendre de la cordialité, de la bienveillance et de la charité du distingué curé.Sans attendre au lendemain, il fallut visiter tout ce qui tenait le plus au coeur du pasteur: l'église, l'école, le couvent; tout était bien disposé et dans un ordre parfait.Des dames généreuses mirent à contribution leur intuition naturelle et les soeurs trouvèrent les choses belles et convenables à la vie religieuse.Le couvent fut béni le lendemain.C'était une résidence privée située en face de l'école et convenablement aménagée pour un couvent temporaire.Près de quinze jours passèrent avant de voir les classes s'ouvrir.Le dimanche qui suivit l'arrivée des soeurs, dans la paroisse, M.le curé, au nom des paroissiens, souhaita la bienvenue à celles qui venaient se dévouer pour le bonheur de leurs enfants; bienvenue délicate et cordiale, accompagnée des meilleurs souhaits pour le succès de l'oeuvre! Du haut de la chaire encore, il promit aux soeurs aide et protection, en toute circonstance; nous savons aujourd'hui qu'il n'a jamais forfait à sa parole.Les jours accordés aux fondatrices avant l'ouverture des classes, durent être employés à terminer l'aménagement de la maison, à la lingerie de la sacristie, et à l'achat de tout ce qui entre dans l'ameublement d'une chapelle.Il fallait compter aussi avec les visites à recevoir.Quelles bonnes sympathies les religieuses n'ont-elles pas rencontrées dans leur nouveau champ d'apostolat! Evêques, prêtres, religieuses et citoyens distingués les comblèrent de délicatesse.Au jour convenable, les soeurs se rendirent à l'évêché, situé à huit minutes de leur couvent.Mgr Bradley les reçut avec la douce bienveillance et l'aimable simplicité qui le caractérisaient.Toujours, le pieux et charitable évêque donna, aux soeurs 184 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 de Sainte-Croix, les lumières de sa noble intelligence et la sympathie de son grand coeur.Les classes s'ouvrirent le 3 avril.Après l'audition de la sainte messe, célébrée à l'intention du personnel enseignant et enseigné, les élèves, pour la plupart, accompagnés de leurs parents, se présentèrent à l'école.Cette réunion de petits et de grands occasionna un tel brouhaha que les prêtres, témoins, se dirent: « Comment les soeurs vont-elles s'en tirer ?» La supérieure prit l'initiative, elle fit d'abord parler la clochette et elle-même demanda le silence; le calme se rétablit peu à peu; alors, les maîtresses se mirent en devoir d'enregistrer.Deux cent quatre- vingt-dix élèves, garçons et filles, sont inscrits à cette première heure.Deux jours plus tard, on en comptait trois cent vingt.Six classes sont formées.M.le curé demanda l'aide de maîtresses laïques.Un tel nombre d'élèves dépassait toutes les espérances, puisqu'il ne restait plus que trois mois, à peine, pour la fin de l'année scolaire.En réalité, les soeurs n'attendaient que de jeunes enfants.Le 8 mai, le nombre s'élevait à trois cent quatre- vingt-seize.A cette date, un bazar avait été organisé; les enfants invités s'y rendirent tous, et dans un tel ordre que les gens sortaient de leur résidence pour voir défiler cette longue théorie de jeunes.Leur excellente tenue dans la salle attira l'attention des dames qui s'exclamèrent: « Que font donc les bonnes soeurs pour obtenir de tout ce monde turbulent un tel changement en quelques semaines ?On ne reconnaît plus les enfants.et les mères sentaient des larmes mouiller leurs paupières.« Ah! la religion, répétaient quelques-unes, c'est cela qu'il nous faut!» Le mois de septembre vit s'accroître le nombre des maîtresses; et la population écolière se chiffra à six cent vingt et un.Il fallut ajouter des maîtresses laïques.En janvier, une recrue de trois religieuses arrivaient à Saint-Georges; elles remplacèrent les séculières, à la satisfaction du curé et des parents; tout marcha admirablement.« Votre Providence, Père, gouverne tout ».M.le curé Davignon, le distingué fondateur, et soeur Marie- de-Saint-Eugène la fondatrice, sont depuis longtemps descendus 1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 185 dans la tombe; mais leur oeuvre prospère, et leurs noms sont écrits dans les coeurs, ils ne seront pas oubliés.Des événements de toute nature marquent la série des jours écoulés, de mars à la fin d'avril.Ce sont d'abord les fêtes de l'aumônier, de saint Joseph, des saintes Reliques durant huit jours; puis la semaine sainte, les fêtes pascales, les Quarante- Heures; enfin, les élèves se rendent à la salle du Windsor, à Montréal, pour assister à une représentation cinématographique.La vue des photographies animées de Sa Sainteté Léon XIII rend les pensionnaires heureuses au delà des expressions ordinaires: « Nous avons vu le Pape, il nous a souri et nous a donné sa bénédiction!» leur émotion est bien sincère et bien vive.Cette soirée est enregistrée dans le carnet, à la page des heures bénies.A quelques jours de là, le R.P.Estevenon, supérieur des religieux du Saint-Sacrement, sur le point de partir pour Paris, où se tiendra le Chapitre général de sa congrégation, nous ménage l'agréable surprise d'une visite.La gardienne du musée, en riche philatéliste, lui présente un cadeau de quarante mille timbres que le bon Père désire utiliser au profit du luminaire de son église.* « Au pays de l'érable », tous les amis de la tire sont attirés, en avril, vers la cabane à sucre.Nos pensionnaires éprouvent bien le même charme.Mais où trouver la clef qui ouvrira la cage à tous les oiseaux ?Le règlement inflexible ne cédera pas!.M.l'aumônier, dans sa bonté compatissante, tranche la question.Nous n'irons pas à la cabane, mais la cabane viendra à nous.M.Bertrand, possesseur d'une érablière dans la paroisse du Saint-Esprit (Montcalm), apporte à son frère, notre aumônier, une quantité considérable de toques, prêtes à être dégustées.Le tout est partagé entre le pensionnat et la communauté.Pour un moment, tout le monde se croit transporté à la sucrerie où la tire est délicieuse.Maternelle attention de la Providence! 186 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 Les bonnes choses sont pour les saints; on nous l'a répété, il n'y a pas un an.* Le mois de mai, le mois le plus beau, favorise les touristes; ainsi, la communauté eut l'honneur de recevoir une quinzaine de prêtres, ou du Canada ou des États-Unis.Ces messieurs furent les bienvenus, chez nous.Prêtres dévoués dans les paroisses où nous avons des établissements, ils nous apportent de bonnes nouvelles de nos soeurs et de leurs rudes travaux d'apostolat.Durant ce mois encore, le pensionnat goûte les fêtes de l'âme; telles, la première communion et la retraite des finissantes le 19 mai; celle-ci se termine le jour de la Pentecôte.Les jeunes filles entrèrent avec confiance dans la solitude.Elles espéraient recevoir la lumière pour l'orientation de leur vie; notre aumônier se fit le porte-parole du Verbe divin, durant ces trois jours.Depuis, les années ont passé! et nous rencontrons les adolescentes de jadis, ou revêtues d'un habit religieux, ou reines couronnées d'enfants dans un foyer chrétien, ou engagées dans le célibat, adonnées à des oeuvres sociales.L'homme n'est pas le maître de sa voie, disent les saints Livres.Le 28 mai, M.le supérieur, accompagnant Mgr l'Archevêque dans ses visites pastorales, profite d'un moment disponible; il le passe avec nous.Le soir, avant la bénédiction du Saint- Sacrement, il donne un beau sermon sur la sainte Vierge.Le 3 juin, Mgr Bruchési, en visite à la paroisse de St-Laurent, procure aux soeurs le plaisir d'une courte visite.Tout se passe sans apprêt intimidant, comme en famille.Monseigneur trouvant plusieurs soeurs réunies dans une salle, y entre et cause paternellement avec elles.Il revoit mère Marie-de-Saint-Gabriel, maîtresse des novices, qu'il a rencontrée au Mans, alors qu'il était séminariste, et que mère Marie-de-Saint-Gabriel, la petite Canadienne, comme on l'appelait là-bas, enseignait la musique au berceau religieux: « Qui nous aurait dit alors, lui dit Monseigneur, que vous deviendriez maîtresse des novices, et moi, votre archevêque?Ah! comme le bon Dieu garde bien ses secrets!» La causerie dura environ vingt minutes; elle se termina, comme bien l'on pense, par une bénédiction paternelle.1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 187 Au parloir, Monseigneur se trouva en face des pensionnaires, revêtues de leur uniforme et en belle tenue.Une fillette, ayant reçu la mission de complimenter le digne prélat, s'acquitte le mieux possible de sa tâche.Monseigneur répondit avec son amabilité ordinaire et il insinua délicatement quelques conseils relatifs aux vacances; elles viennent à toute vitesse.et il termina en disant: « Demandez, mes enfants, à votre directrice de vous permettre de prendre le congé que Monseigneur vous donne».La directrice de répondre: « Monseigneur, les classes seront suspendues jusqu'à ce soir ».Il était trois heures.Les élèves s'amusent de ce congé généreux et comprennent la pensée de leur directrice: demain commencent les examens, précurseurs de la fin de l'année scolaire.Comme les ouvrages à l'aiguille, les tricots et tous les travaux classiques et artistiques sont exposés dans les parloirs toute la semaine, on voit le long défilé de dames, mères ou soeurs de nos élèves, ou amies de la communauté ; chacune devise sur tel ou tel article.Tant mieux! du choc des idées naît la lumière.Les maîtresses notent les remarques avec plaisir, car, dit-on, l'exposition est digne d'intérêt.Le 14 juin se lève.Dès six heures et demie une grand'messe est chantée; il y a communion générale.Par une libéralité sans précédent, la Saint-Basile permet une licence complète; les soeurs professes et les novices peuvent causer ensemble, même dans les corridors.Tout se passe religieusement, soulignent les chroniques, et, conséquence naturelle, les coeurs sont dans la joie.Le soir, une séance des mieux réussies termine cette fête au bonheur si doux! La révérende mère elle-même a goûté des consolations peu ordinaires.C'est un repos pour son coeur: elle remercie, elle félicite, et elle admire le dévouement filial et le bon esprit.Maintenant sonne l'heure des adieux.Nos pensionnaires nous quitteront demain, le 21 juin; après avoir tant reçu au cours de l'année scolaire, l'esprit et le coeur se doivent de dire: « Merci » à M.l'aumônier, à la mère supérieure, aux maîtresses; les coeurs s'expriment avec une douce émotion.Le programme de la distribution des prix, peu chargé, mais agréable, procure à l'assistance distinguée, un joyeux retour 188 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 sur le cher passé, déjà lointain, pour la majeure partie des témoins.1 Les médailles d'or pour l'instruction religieuse furent obtenues par Mlles Hortense Cyr et Nellie Kingsley; Mlle Joséphine Déranleau obtient la médaille d'or pour politesse et bonnes manières; Mlle Thérèse Guertin, médaille d'or pour le piano, Mlle Alzéa St-Pierre, pour le dessin au crayon; plusieurs autres médailles et de beaux prix sont décernés aux méritantes.Le discours de l'aumônier, président, est assez bref.La veille, après avoir reçu les adieux et les mercis des pensionnaires, il avait laissé parler son coeur de prêtre, en distribuant à son jeune auditoire des avis relatifs à la saison périlleuse des vacances.LA SAINT-JEAN-BAPTISTE La sainte Liturgie renvoie la solennité de cette fête au dimanche suivant.Mais, dans notre communauté, en considération de la vénérée mère assistante qui porte ce beau nom, nous chômons aujourd'hui même.Des cantiques religieux et nationaux ont réjoui les âmes, durant la sainte messe, et toutes les soeurs offrent une bonne et fervente communion, pour la vénérable mère à qui la majeure partie de la communauté doit sa formation religieuse.Puis, au réfectoire, un autel minuscule est dressé pour y déposer la statue de saint Jean-Baptiste, enguirlandée de fleurs et de feuilles d'érable.Le Deo Châtias donne la note d'une causerie fort animée.La bonne mère que nous fêtons aujourd'hui a droit à nos affectueux hommages.Dès l'aurore, nos bons anges ont pu inscrire, à son crédit, les oeuvres pieuses que nous offrons à Dieu pour la consolation de ses vieux jours.C'est le bouquet de ses anciennes et reconnaissantes novices.Dans la solennité du dimanche suivant, la paroisse s'est surpassée dans ses démonstrations religieuses et nationales.Les nombreux chars allégoriques, décorés avec un goût artistique, représentaient au naturel les divers corps de métier des premiers temps de la colonie.Le char du collège: Jacques Cartier s'empa- 1 Les parents assistent à cette fête; désormais, en pareille occurrence, les élèves jouiront de la présence de ceux qui leur sont chers! 1S99 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 189 rant du sol, attira l'attention générale.Pour cette circonstance exceptionnelle, la communauté reçut l'autorisation de sortir pour voir le défilé, tout en demeurant sur le terrain du couvent.* * Les 28, 29, 30 juin sont consacrés à un triduum préparatoire à la fête du Sacré-Coeur.Ces prières sont demandées d'abord, par Sa Sainteté Léon XIII, dans sa lettre encyclique du 25 mai dernier.1 Or, Mgr l'archevêque dans une lettre pastorale, adressée au clergé de son diocèse, appuie les sublimes et surnaturelles intentions du Saint-Père et insinue cette belle pensée: « Continuez, mes très chers frères, à rendre à Notre-Seigneur, le culte qu'il a lui-même sollicité dans ses révélations à la bienheureuse Marguerite-Marie.Inspirez-en l'amour et enseignez-en la pratique à vos enfants.Allez à ce Coeur tout-puissant et miséricordieux avec la plus entière confiance; que vos fautes mêmes ne vous en éloignent point, il est le trésor de toutes les grâces; en Lui, vous trouverez force, lumière et pardon ».Le mois de juin terminé s'ouvre le programme invariable des vacances.Dès le premier juillet, Mgr l'archevêque, se rendant à Saint-Eustache, fait une halte au couvent.Le conseil général descend au salon, pour saluer Sa Grandeur et les prêtres qui l'accompagnent.Cette délicatesse de notre digne prélat ne surprend personne, et la communauté, mise au courant, se réjouit de cette bienveillance.Les 2, 3 et 4 juillet arrivent les missionnaires novices.Les études organisées, les préparatifs aux retraites et à la fête de vêture ou de profession composent l'emploi du temps et, comme il est court! les jours nous échappent.A l'ouverture de la première retraite, mère Marie-de-Saint- Basile distribue aux soeurs le nouveau « Directoire Spirituel », et le « Coutumier ».Les jours de grand recueillement que pro- 1 Le XHIe volume des mandements, page 148.190 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 cure la récollection annuelle favoriseront l'étude attentive des nouveaux codes.Monsieur le supérieur se met à la disposition des soeurs retraitantes pour la confession et la direction.Le 13 août, Monseigneur revient à la maison mère, pour donner aux soeurs une instruction spéciale.Les chroniques en ont conservé un fidèle résumé; nous sommes heureuses de le reproduire ici, afin de prolonger, à travers les générations, la doctrine consolante et lumineuse du vénéré Père de nos âmes.Mes bien chères filles, « Je considère comme un devoir de ma charge de venir vous adresser quelques mots, à vous, religieuses de mon diocèse, qui êtes en retraite.Avec quel empressement je me mettrais à la disposition de chacune d'entre vous, si mes occupations n'étaient pas aussi multipliées pour écouter vos désirs et vos confidences.« Je vous remercie, au nom de la sainte Église, mes chères filles, de votre dévouement et de vos services à la cause de la jeunesse chrétienne; l'an dernier, à peu près à cette époque, munies des grâces de la retraite, fortes de lumière et de courage, vous vous mettiez toutes à la disposition de l'obéissance: les unes sont restées à la maison mère, les autres se sont rendues à des distances plus ou moins grandes, mais pour y exercer le même zèle, le même apostolat.Oui, fortes de vos résolutions et des suaves paroles de l'Époux céleste, paroles que jamais bouche humaine ne vous avait dites, vous vous êtes élancées à la conquête des âmes et livrées au rude labeur de l'instruction des enfants.Et vous venez maintenant rendre compte de votre mission au bon Dieu; vous lui ouvrez votre coeur.Oh! oui, faites- lui bien connaître et vos pensées et vos désirs, et vos paroles et vos actes.Le divin Maître, après avoir entendu les apôtres lui raconter leurs travaux, leur dit: « Venez à l'écart et reposez- vous un peu ».C'est ce que vous faites, depuis quelques jours, mes chères filles.Voyez bien, examinez si, en vous dépensant pour les autres, vous ne vous êtes pas oubliées vous-même; car, même en travaillant pour Dieu, il arrive quelquefois que l'on néglige ses intérêts éternels.N'est-ce pas ce que semble exprimer Notre-Seigneur, quand il adresse à Marthe, ce reproche: « Marthe 1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 191 Marthe, vous vous préoccupez de beaucoup de choses; or, une seule est nécessaire.» Pourtant, Marthe préparait un festin à Jéaus.peut-être mettait-elle en cela trop d'empressement, peut-être manquait-elle aussi de vues surnaturelles.« Nous sommes ainsi faits: peu à peu, nous nous négligeons.Voyez une horloge, si l'on n'en remonte les poids, le mouvement cesse, et c'est la mort.Ainsi en est-il de chacun de nous: séculiers, prêtres, religieux, évêques, nous avons besoin de retraite.Saint Bernard écrivait à un pape: « Au milieu des occupations qui vous assiègent n'oubliez pas votre propre sanctification ».« Mes chères filles, voici quelques points sur lesquels vous pourrez fixer vos résolutions.D'abord, efforcez-vous de développer toujours l'esprit surnaturel en vous-même, agissant sous l'oeil de Dieu et n'ayant d'autre intention que celle de plaire à votre divin Epoux.C'est extraordinaire comme nous nous recherchons nous-mêmes sans le savoir.« En second lieu, pénétrez-vous bien de l'esprit d'obéissance; soyez prêtes à exercer n'importe quel emploi, à vous soumettre à n'importe quelle supérieure, fût-elle plus jeune que vous, dépourvue de talent, de vertu et de tout don extérieur.La parfaite religieuse est celle qui est parfaitement obéissante.L'Évangile rapporte qu'après la Transfiguration, les apôtres ne virent plus que Jésus seul.Quel sens magnifique nous pouvons donner à cette parole, relativement à l'obéissance! l'âme vraiment obéissante ne voit que Jésus dans ses supérieurs, ses Règles et ses Constitutions.Faisons une comparaison, mes chères filles; lorsque vous approchez de la sainte table, vous ne faites pas attention si l'hostie que le prêtre dépose sur votre langue est entière dans son ensemble, régulière dans sa forme, immaculée dans sa blancheur, vous ne songez qu'à adorer Dieu qui se donne à vous.De même aussi, c'est Dieu qui se voile dans la personne de vos supérieures.« Obéissez donc avec joie et amour, à l'imitation de Jésus- Christ qui s'est fait obéissant jusqu'à la mort de la croix.Mais si les inférieures doivent l'obéissance à leurs supérieures, celles-ci de leur côté doivent être pleines de bonté, de douceur, de charité à l'égard de leurs soeurs: être supérieure, c'est être mère.Chères supérieures, vous devez être les servantes de vos soeurs, travaillez sans cesse à leur bonheur et à leur sanctification: vous n'êtes 192 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 supérieures que pour cela.Notre-Seigneur n'a-t-il pas dit: « Je suis venu pour servir et non pour être servi ».Sans doute, il est de votre devoir d'avertir, de reprendre, de corriger vos inférieures; mais faites tout cela avec bonté.Dans vos avis et corrections, ayez égard aux caractères et demandez-vous souvent: « Comment dois-je procéder pour le plus grand bien de cette âme qui m'est confiée.Notre-Seigneur n'a pas rompu le roseau à demi-brisé; il n'a pas éteint la mèche qui fumait encore.Rappelez- vous que la bonté triomphe de tout: là où tous les autres moyens ont échoué, elle est victorieuse.Vous avez lu, dans l'Evangile, qu'un jour les apôtres demandèrent à Notre-Seigneur de faire descendre le feu du ciel sur les habitants d'une ville.Il leur fut répondu: « Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes ».Que les supérieures demandent donc la bonté, la douceur, la patience et que les inférieures demandent les mêmes vertus pour leurs supérieures.« Ayez à coeur, mes chères filles, la grande, belle et douce charité fraternelle.On disait des premiers chrétiens: « Voyez donc comme ils s'aiment ».C'était parce qu'ils avaient été les disciples de Celui qui a triomphé du monde par un acte d'amour.Qu'il serait doux et consolant de pouvoir dire de vous toutes: « Voyez donc comme elles s'aiment ».Appliquez-vous à savoir souffrir les petites contrariétés de chaque jour.Dans le monde, en général, on souffre plus et l'on sait mieux souffrir que dans les communautés.Ah! s'il vous était donné d'entendre les confidences des âmes! comme des martyres, elles ne laissent échapper leur secret qu'au moment de rendre le dernier soupir, et bien souvent elles l'emportent dans la tombe! Que de femmes satisfont à toutes les exigences de leur position, ayant toujours le sourire aux lèvres, et néanmoins la douleur les torture!.Sachez supporter, mes chères filles, les souffrances occasionnées par la vie commune, par la différence des caractères et les assujettissements de la vie religieuse.« Saint Jean-Berchmans était un grand saint, et cependant, il faisait consister toute sa sainteté dans la pratique de la vie commune; pour les pénitences corporelles, on va au-devant du cilice et de la discipline, bien que ces pénitences ne soient pas 1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 193 toujours aussi méritoires que les premières.Sachez oublier et pardonner: par là, vous serez très agréables à Dieu.» « Ayez un soin particulier de conserver l'esprit de la maison mère et le souvenir des enseignements que vous y avez reçus.Que vos parloirs, vos réfectoires ressemblent à ceux de la maison mère; pas de luxe, aucune superfluité dans ce qui est à votre «sage.Enfin, mes chères filles, fuyez le monde et soyez d'une grande réserve dans vos rapports et votre correspondance avec les séculiers, avec les religieux et même avec vos élèves.« Je termine cet entretien, en vous donnant deux petites règles de conduite, plus faciles à énoncer qu'à pratiquer, mais qui feront votre bonheur, si vous y êtes fidèles: 1° Ne jamais rien dire ni faire qui soit de nature à faire de la peine ; 2 ° pardonner toujours les torts que l'on pourrait avoir envers vous.» « Puissiez-vous, en sortant de ces jours de prière et de recueillement, ne plus voir que Jésus, en toute choses, en tous lieux et en toutes circonstances ! Que cette belle parole serve de bouquet spirituel à votre retraite: « Ils ne virent plus que Jésus seul!.» Cet entretien impressionna beaucoup les soeurs; d'autant plus qu'elles remarquaient une profonde émotion dans la voix et une grande tristesse sur les traits de leur bon archevêque.Son coeur, nous dit-on, venait d'être transpercé par un événement déplorable.Que le Seigneur Jésus lui soit en aide; nous avons prié pour lui!.Les exercices de la retraite annuelle, se terminaient le 15.Quelle semaine riche en lumières venues de toutes parts! Le R.Père Leclerc, rédemptoriste, avait droit à une large part du mérite dans le bien opéré: l'onction de sa parole, sa doctrine claire et précise, ses connaissances du coeur humain avaient tenu les soeurs sous le charme de sa parole et provoqué des élans généreux vers les hauteurs.Pendant la récréation, les soeurs se communiquèrent leurs sentiments, et toutes se crurent capables d'affronter les plus généreux sacrifices.Attention! .pas si vite! .la nature n'est pas morte, encore qu'elle ait reçu de bons coups! Plaçons notre espoir de persévérance en la force de la grâce ! En rien moins que cela ! 194 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 Le R.P.Leclerc présida la cérémonie qui se déroulait dans l'après-midi et il donna le sermon.Il prit pour texte ces paroles de nos saints Livres: « Mon Epouse, garde-moi ta fidélité jusqu'à la mort: et moi, un jour, je déposerai sur ton front la couronne de vie ».Le doux bonheur de la retraite fut suivi des obédiences.Les sacrifices nombreux, sans altérer le bonheur de l'âme, assombrirent les physionomies.Treize supérieures changeaient de poste, mais le bon Dieu ne change pas, Il est toujours prêt à nous secourir.Le 22, il ne restait plus de missionnaires à la maison mère et le vide était grand ! Cependant, la visite de plusieurs membres de diverses congrégations, jointe aux préparatifs de l'année scolaire, occupèrent avantageusement les journées.Dans ces rencontres de religieuses, comme il est agréable de causer amicalement de l'oeuvre commune que poursuivent les communautés enseignantes: l'éducation et l'instruction de la jeunesse.D'autres sont venues à nous dans un but charitable, nous faire part de leur savoir en l'art culinaire ou médicinal.En tous cas, visites fructueuses, entreprises non pour tuer le temps, mais pour l'utiliser, au profit du prochain.* * Dans la grande nomination des obédiences, la communauté apprend que deux maisons s'ouvriront en septembre : l'école paroissiale de Saint-Edouard, rue de St-Vallier, à Montréal, et l'école d'Adams, Mass.Pour cette année, les trois soeurs de Saint- Edouard résideront au pensionnat Saint-Basile, rue Mont-Royal, et elles se rendront à leur école en tramway, chaque matin.L'an prochain, le couvent sera bâti.FONDATION D'ADAMS — Le 22 août s'ouvrait, à Adams, Mass., sur la demande de M.le curé Triganne, l'école paroissiale, sous le beau vocable de « Notre-Dame-des-Sept-Douleurs », titulaire de la paroisse.La colonie se composait de six religieuses: soeur Marie-de- Sainte-Christine (Kernan), supérieure; soeur Marie-de-Saint- Athanase (McKinnon), assistante; soeur Marie-de-Saint-Alban (Mailloux), conseillère; soeur Marie-de-Saint-Octave (Charron); 1*99 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 195 soeur Marie-de-Saint-Pierre-d'Alcantara (Campeau); et soeur Marie-de-Sainte-Adèle (Gignac).Elles quittèrent Montréal, le 22 août, au matin; et, le soir, elles descendaient à la gare de Troy, N.Y., pour y prendre le train qui devait les conduire à North-Adams.Une épreuve les y attendait: le train venait de partir! Sans se laisser décontenancer, elles cherchèrent un gîte pour la nuit.Après information, elles se dirigèrent vers le couvent des SS.de Ste-Anne, qui leur offrirent la plus religieuse et la plus cordiale hospitalité.Le lendemain, elles continuent leur voyage; à dix heures de la matinée, elles arrivent à North-Adams, sans autre incident.Mme Triganne, vénérable mère du curé, les reçut pour les conduire à Adams, par tramway.Après une demi-heure, elles atteignaient le lieu désigné pour leur apostolat.Monsieur le curé et son vicaire, M.Gobeil, leur souhaitèrent la bienvenue.Le pasteur ouvrit aux fondatrices les portes du couvent.Un bijou de résidence, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur.Les bonnes soeurs ne furent pas peu étonnées de gravir les escaliers, sur des tapis de velours capitonné.Un moment, elles craignirent, en songeant au voeu de pauvreté.Le pasteur les rassura, puisqu'il se chargeait de tout.Toutefois, les tapis de velours finirent par disparaître.L'ameublement est bon, solide, mais non luxueux.Les prêtres conduisirent ensuite les soeurs à l'école, bel édifice, digne de l'oeuvre de haute portée morale qui s'accomplira dans ces murs.L'architecture de l'église honore la générosité des paroissiens, qui ont su donner à Jésus-Christ un temple convenable.Cette ville d'Adams fut séparée de North-Adams par un acte législatif, en 1878.C'est une ville manufacturière, située au nord-ouest de l'état de Massachusetts, dans le comté de Berkshire.Elle est remarquable par sa situation pittoresque *ur la rivière Hoosac et entourée de montagnes.Des touristes qui ont visité la Suisse appellent Adams: « La Suisse en miniature ».La paroisse de Notre-Dame des Sept-Douleurs se trouve au pied du mont Greylock.Cette montagne s'élève à trois mille pieds au-dessus du niveau de la mer; elle est la plus haute de l'État.La population est de treize mille habitants, dont deux mille Canadiens français; la langue anglaise domine.Adams 196 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 possède deux belles églises catholiques.De 1871 à 1882, la paroisse canadienne ne possédait pas de prêtres résidents.Le premier qui s'y établit fut M.l'abbé Charbonneau; il bâtit son église en 1887 dans un site idéal, et son presbytère en 1890.Le pieux et zélé ministre mourut en 1893.Ses restes mortels reposent sur le terrain de l'église; un joli monument en marbre garde ses cendres.Monsieur l'abbé L.-O.Triganne lui succéda et continua les oeuvres commencées.Le nouveau pasteur comprit bientôt le besoin pressant d'une école catholique pour la formation de la jeunesse.Ainsi que dans tous les centres canadiens de la Nouvelle-Angleterre, il s'agissait de sortir les enfants de l'école neutre, afin de leur inculquer les sublimes croyances de notre religion et les ineffables mystères de notre foi, religieusement combinés avec l'enseignement de la langue française.Les bons Canadiens français ne manquèrent pas d'envoyer leurs enfants à l'école catholique.Dès les premiers jours, trois cent quatre-vingts élèves sont inscrits.Le nombre se trouva trop considérable pour quatre maîtresses: M.le curé engagea aussitôt des maîtresses laïques.Le couvent et l'école furent solennellement bénits par Sa Grandeur Mgr Thomas Beaven, évêque de Springfield, assisté de plusieurs prêtres.Le 20 septembre, M.le curé célébra la première messe dans la chapelle des religieuses; ce fut le couronnement de toutes les consolations du fondateur.Bientôt les visiteurs, religieux et civils, catholiques et protestants affluèrent.Ce sont d'abord MM.les curés des paroisses voisines, c'est le maire de la ville; c'est le surintendant des écoles publiques; ce sont des religieuses étrangères; ce sont des dames de la haute société; etc.Le nouveau attire l'attention.Les élèves d'Adams, garçons et filles, remarquablement doués, répondirent, en général, au beau dévouement des maîtresses; et leur connaissance des langues française et anglaise, acquise à l'école paroissiale, leur traça une voie honorable dans n'importe quelle position.Selon le dicton populaire, et réel, connaissant deux langues, ils valaient deux hommes.L'école d'Adams n'a connu, pour ainsi dire, que des jours prospères.1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 197 La supérieure-fondatrice, soeur Marie-de-Sainte-Christine (Kernan), se donna tout entière à la direction des classes, et elle s'y connaissait.Elle savait aussi qu'un bon facteur du succès est la vigilance, et elle veilla.La supérieure passait chaque jour dans les classes et s'enquérait du travail des élèves.Elle encourageait, elle exhortait, elle reprenait, selon le cas.Après de trop longues années, on vit enfin poindre les premières vocations sacerdotales et religieuses.Dans cette ville manufacturière se dressait devant les jeunes filles un obstacle invincible à la vie de sacrifice; le plaisir d'amasser de l'argent, pour jouir et se toiletter.Que de fois nous avons entendu: « Mais, voyez donc, je gagne quinze ou vingt dollars par semaine; je ne puis pas laisser cela pour m'en aller au couvent!.» Que de jeunes filles, pourtant pieuses et intelligentes, n'ont jamais voulu répondre à l'appel divin, malgré leur attrait, afin de ne point perdre la monnaie qui tombait dans leur bourse chaque semaine.Les premiers élèves devenus prêtres furent MM.les abbés Silvio Desautels, Alfred Milette, Rosario Cantin ; et les premières religieuses entrées dans notre communauté sont: Mlles Dora et Stella Taupier, (SS.Marie-du-Carmel et Marie Réparatrice) (deux soeurs), Georgiana Denault, Cécile Desnoyers, Gertrude Lebleu; en religion, elles sont désignées sous les noms respectifs de soeurs Marie-de-Sainte-Iréna, Marie-de-Sainte-Cécile- de-Rome, Marie-de-Sainte-Gertrude-de-Flandres.Les uns et les autres jouent un noble rôle dans la sphère où les a placés la divine Providence.Des citoyens honnêtes, sortis de l'école paroissiale, occupent des positions importantes dans la société.En somme, la maison d'Adams envisage l'avenir avec confiance, soutenue par la médiation constante de la Mère des Douleurs.L'auguste patronne veillera sur ses filles bien-aimées, aussi longtemps qu'elles lui resteront fidèles.* * * Revenons à la maison mère.Une recrue de postulantes, plus nombreuse que jamais, puisqu'elle se chiffre à quarante, réjouit et console les autorités.La directrice du pensionnat 198 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 souhaite la bienvenue à cent vingt et une élèves.C'est aussi une marche ascendante.Mère Marie-de-Saint-Basile partage ses consolations avec les chères missionnaires; dans chacune de ses lettres, elle prie les supérieures de remercier le bon Dieu de ce qu'il daigne jeter les yeux sur notre humble Institut.Et elle annonce également que le jeûne prescrit dans les premières Règles pour la vigile de Notre Dame des Sept Douleurs est supprimé; elle en donna la raison, la voici: « la majeure partie de la communauté ne pouvant faire abstinence se trouve donc dans l'impossibilité de jeûner.Les soeurs y suppléeront par d'autres mortifications, après s'être entendues avec leur confesseur.» Dans la soirée de notre fête patronale, M.le supérieur fit une apparition à la maison mère nous le voyions pour la première fois, depuis la rentrée des élèves.C'est qu'il revenait d'un long voyage dans la Nouvelle-Angleterre, où il avait visité les couvents et les écoles de Sainte-Croix.Ce bon Père donne de grands éloges des soeurs missionnaires, il loue leur zèle et leur dévouement auprès des enfants confiés à leur soin.Les classes remplies dans quelques endroits, plus qu'à leur pleine capacité, n'empêchent pas les maîtresses d'être gaies, souriantes et douces.Mais la santé.la santé!.Les supérieures s'en préoccupent! Alors, la petite soeur va tranquillement à sa tâche.Les curés, ajoute-t-il, aiment les soeurs de Sainte-Croix, ils admirent leur simplicité, leur ardeur au travail et leur esprit de sacrifice.« Et cela est vrai,» affirme-t-il, sur un ton légèrement moqueur, « plus on les connaît, plus on les estime ».Ce compliment, bien dirigé, amuse beaucoup les soeurs sans les rendre plus fières.Dans la soirée, le R.Père Crevier, c.s.c, donne la bénédiction du Saint-Sacrement; il la fait précéder d'une instruction sur notre auguste patronne.Il prend pour texte: « 0 vous qui passez par ce chemin, voyez s'il est une douleur semblable à ma douleur.» Après avoir parlé du martyre de la très sainte Vierge, le prédicateur s'adresse aux enfants et il leur dit que « leurs parents souffrent quelque chose de semblable, dans une certaine mesure, en s'imposant de pénibles séparations, pour le bonheur de ceux et celles qu'ils chérissent plus qu'eux- mêmes ».Les postulantes et les élèves, encore sous le coup des 1S99 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 199 récents adieux à la maison paternelle, ne peuvent retenir leurs larmes.Les maîtresses ne trouvent pas tout à fait leur compte dans ce dénouement pathétique.Elles se voient contraintes de recommencer leur rôle de consolatrices, exercé le jour de la rentrée.Patience, mes soeurs, demain, congé!.Les larmes sécheront.Il en fut ainsi.Oh!.la durée des larmes d'enfants! Les jeux, les rires et les chansons remplirent ce jour passé sous la verdure, dans les champs et au bord des ruisseaux.Les espiègles, les boute-en-train ne donnèrent pas de loisir.Donc, adieu l'ennui! Le 24 septembre, une pénible nouvelle parvint à la communauté : « Le R.Père Rézé est très malade au collège Notre-Dame- des-Neiges.» En l'absence de la révérende mère générale, mère Marie-de-Saint-Jean-Baptiste accourt aussitôt visiter le vénérable vieillard, dont l'histoire est si intimement liée à celle de notre Congrégation.Elle amène soeur Marie-de-Bon-Secours et soeur Marie-de-Sainte-Eugénie, celles qui ont le plus particulièrement connu le vénéré Père.Le malade les reçoit avec une joie sincère; il parle du passé, et, dit-il, « si je reviens à la santé, j'irai encore une fois à Saint-Laurent.» Hélas! il ne revint pas à Saint-Laurent.Quatre jours plus tard, le 28 septembre, il rendait sa belle âme à Dieu.De 1849 à 1869, le R.Père Rézé fut notre « excellent supérieur ».Les deux premiers volumes de nos Annales en parlent avec un éloge sincère, mais pas toujours égal à son mérite.Depuis neuf ans, le vénérable religieux avait pris sa retraite dans sa communauté, pour se préparer aux années éternelles; il laisse la réputation d'un saint et fervent prêtre.Sa mémoire, comme celle du juste, sera longtemps en vénération parmi ceux qui l'ont connu.Le 2 octobre Mgr Racicot, officiait aux funérailles dans l'église Saint-Laurent.Les soeurs professes et novices y assistaient, en hommage de respect et de reconnaissance.Avant l'absoute, Mgr le grand Vicaire fit l'éloge du défunt, en des termes précis, mais de manière à prendre d'emblée toutes les sympathies.Ce même jour, Monseigneur se rend au couvent; visite courte, mais combien appréciée.200 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1899 Le 9 octobre, dans notre chapelle, un service solennel était chanté pour l'âme du bon P.Rézé.Le R.Père Dion, as.a, officiait, assisté du R, Père Lecavalier et de l'aumônier.Plusieurs religieux et Frères de Sainte-Croix se rendirent pour le suprême hommage rendu au vénéré défunt.La chapelle portait un décor de deuil délicat et approprié à la circonstance.Après la triste cérémonie, mère Marie-de-Saint-André, conseillère générale, soeur Marie-de-Saint-Jean-Berchmans, directrice des études, soeur Marie-de-Saint-Alphonse-de-Liguori, soeur Marie-de-Saint-Sébastien et quelques soeurs du pensionnat vont rencontrer mère Marie-de-Saint-Basile, à Montréal, à son retour d'un long voyage.Ensemble, elles se rendent à l'école normale de la congrégation Notre-Dame, pour visiter les travaux scolaires, préparés pour l'exposition de Paris.Les ouvrages sont d'une grande beauté.Ce que les soeurs ont vu les dédommage du temps employé pour se transporter à la ville; la réception a été très cordiale.Le 31 octobre, la révérende mère générale, la directrice générale des études, et soeur Marie-de-Sainte-Amélie se rendaient au pensionnat de Lachine, dans le but de causer de plan d'études, et aussi pour y entendre le beau chant de la Toussaint et du jour des morts.Elles furent l'objet de toutes sortes d'attention de la part des mères conseillères,— la supérieure générale étant en Alaska.La supérieure du pensionnat conduisit les visiteuses chez les élèves qui se montrèrent fort gentilles et donnèrent une haute idée de leur formation dans une courte séance, préparée par chaque cours.Ce voyage fut avantageux sous plusieurs rapports et resserra les liens qui unissaient déjà la communauté de Sainte- Croix à celle de Sainte-Anne, Lachine.Mgr BOURGET.— Les membres de notre communauté n'ignorent pas que notre vénéré père Moreau et Mgr Bourget sont 1899 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 201 nés tous deux en l'an 1799, le premier, le 11 février, et le second, le 30 octobre.Donc cette année 1899 marque leur centième anniversaire de naissance.Dans une lettre circulaire des plus touchantes, Mgr Paul Bruchési, deuxième successeur de l'illustre défunt, rappelle les vertus et les oeuvres admirables accomplies par ce dernier, au cours de son glorieux et fructueux épiscopat.C'est à l'occasion de cet anniversaire que Mgr l'archevêque de Montréal propose au clergé, aux fidèles et aux communautés religieuses d'élever un monument à « celui qui a fait le diocèse de Ville-Marie.» O force et gloire de l'église de Montréal, nous vous devons à Mgr Bourget »., souligne Mgr Bruchési.« L'hon- norer, perpétuer sa mémoire, n'est-ce pas, par conséquent, reconnaître et bénir en lui cette action surnaturelle ?» La noble proposition de Monseigneur d'élever un monument fut acceptée avec empressement de tout le diocèse et notre administration générale offrit son humble obole.Depuis plusieurs années donc, le monument proposé, pour honorer la mémoire de Mgr Bourget, enrichit la terrasse de la basilique de Montréal.Monsieur le supérieur ne refuse point l'invitation de se rendre au couvent, le 6 novembre, pour y recevoir les compliments de fête, à l'occasion de sa patronale, le conseil général profita de sa présence pour traiter d'affaires importantes et lui soumettre le projet d'une nouvelle construction.PREMIER JUBILÉ D'OR.— L'événement le plus saillant de l'automne est sans contredit le premier jubilé d'or, célébré à notre maison mère, le 16 novembre 1899.Il y a cinquante ans, ce jour même, notre bonne soeur Marie- de-Bon-Secours prononçait les voeux perpétuels de religion, à Sainte-Marie, Indiana, Etat de l'Illinois.La chère mère Marie-du-Sauveur, première supérieure et fondatrice à Saint-Laurent, avec la permission du vénéré Fondateur, avait amené avec elle, à l'Indiana, en 1849, soeur Marie- 202 ANNALES DE LA CONGRÉGATION IS'JO de-Bon-Secours (Leduc) la troisième postulante canadienne, de 1847.Près de quatre mois après son arrivée à Sainte-Marie, la novice émettait les voeux perpétuels.C'était donc, ce grand anniversaire que la communauté célébrait avec une pompe extraordinaire.La chapelle était décorée avec beaucoup d'élégance; le chiffre « 50 » brillait sur les autels et sur les colonnes, de gracieuses chaînes dorées ornaient le sanctuaire et festonnaient les jubés.Le soleil resplendissant jouait dans cette brillante parure.Pendant la bénédiction du St-Sacrement, les rayons lumineux se reflétèrent sur l'ostensoir, sur les fleurs et sur les guirlandes d'or.Le bon Dieu lançait un rayon de plus sur le beau jour qu'il avait fait pour son épouse.La grand'messe fut chantée à neuf heures, par M.le Supérieur, accompagné de diacre et sous-diacre.La vénérée jubilaire occupait un prie-Dieu entre la révérende mère générale et l'assistante générale.Au moment de la communion, elle renouvela ses voeux, d'une voix ferme et intelligible: « Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ».« Moi, soeur-Marie-de-Bon-Secours (Esther Leduc), renouvelle et confirme de tout mon coeur les voeux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance que j'ai faits à mon Dieu, il y a cinquante ans, sous la protection de Notre-Dame des Sept-Douleurs.« Il m'est doux de proclamer, ô Seigneur, que votre joug est suave et votre fardeau léger.Je n'ai qu'un regret, en ce jour, c'est de n'avoir pas fait davantage pour répondre à la grâce de ma vocation.Daignez me pardonner mes négligences passées et m'accorder la faveur de vous être à jamais reconnaissante et n• • * * Le mois de décembre amena un deuil; notre chère soeur Marie-de-Sainte-Adélaïde (Lanoix), très souffrante depuis plusieurs mois, rendit son âme à Dieu le 2, vers dix heures du soir.1 Le CERCLE n'a pas cessé d'exister depuis sa fondation.Il est maintenant beaucoup plus considérable, puisque les élèves des cours universitaires en font partie, si elles remplissent les conditions exigées pour les connaissances littéraires et orthographiques.260 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1900 La garde de nuit, soeur Marie-de-Sainte-Denise (Pariseau), veillait auprès de la malade, quand elle s'aperçut, d'après certains symptômes, que la fin approchait.En toute hâte, elle prévint la mère supérieure, puis le prêtre; ce dernier n'eut que juste le temps d'administrer l'Extrême-Onction à la mourante et de lui donner l'indulgence in articulo mortis.Le dénouement de cette maladie fut bien prompt, mais non imprévu.Soeur Marie- de-Sainte-Adélaïde parut toujours, aux yeux de tous ceux qui la connurent, une religieuse exemplaire, partout et en tout temps, fidèle à sa Règle et à son devoir.Comme maîtresse de classe ou dans l'office de supérieure locale, elle se montra incessamment religieuse selon le coeur de Dieu; jugement droit, caractère ferme, mais d'une bonté de mère, humble et charitable.Ses anciennes élèves qui liront ces lignes, ou ses subordonnées, ou ses compagnes, attesteront la vérité de notre assertion.Heureuses celles qui emportent dans la tombe l'éloge sincère de toute une communauté: n'est-ce pas une espérance de réception miséricordieuse auprès du souverain Jugé ?« Viens, bonne et fidèle servante, entre dans la joie de ton Seigneur, sois toute à Lui pour l'éternité ».Le 6 décembre, le pensionnat recevait la visite de M.Lippens, inspecteur d'école.De retour d'un voyage à Paris, il sacrifiait quelques heures de son temps précieux pour nous parler de l'exposition universelle à laquelle le gouvernement du Canada l'avait délégué.Il nous décrivit si bien la grande capitale que l'on put s'y croire transportées.M.Lippens était un savant mathématicien, doublé d'un philosophe.Ses connaissances profondes et méthodiques et son rare talent d'observation le rendaient propre à la mission que lui confiait le gouvernement.Ce monsieur connaissait notre Congrégation, à titre d'inspecteur des écoles, comme voisin de notre couvent de Varennes, et comme professeur de mathéma- 1900 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 261 tiques et de calligraphie à notie maison mère durant les cours d'été; il nous fut toujours dévoué."-•»•• * Le 8 décembre, la congrégation des Enfants de Marie reçut une nouvelle recrue; cette réception compléta la joie spirituelle que procure toujours la fête de notre Mère Immaculée.Les heureuses privilégiées sont: Mlles Clara Labine, K.Smith, C.Cléroux, C.Jasmin.M.l'aumônier prononça le sermon et M.le Supérieur donna la bénédiction du Saint-Sacrement.Un jubilé !.notre ancienne maison de Varennes, la troisième sur la liste des fondations, est en liesse, ce 17 décembre.Il s'agit du jubilé d'argent sacerdotal de M.le curé François-Régis Bonin.Mère Marie-de-Saint-Jean-Baptiste, assistante générale, et soeur Marie-de-Sainte-Florence, se dirigent vers Varennes pour participer à la joie commune.Durant la séance donnée par les élèves, l'auditoire voit se dérouler les oeuvres du jubilaire et les principaux théâtres de son action sacerdotale paraissent aussi sur la scène.Après une ondée de compliments, le jubilaire voulut prendre sa revanche; il se leva et renvoya aux aimables espiègles tous les éloges dont il se trouvait baigné.« Je vous félicite, mesdemoiselles les figurantes, du rôle que vous avez joué à l'occasion de mon jubilé; vous venez d'étaler devant mes confrères, devant les religieuses et devant mes amis une série de qualités que je n'ai pas et que vous aimeriez trouver en moi ?Vous dites les vérités avec beaucoup de tact ; seulement, celui qui les reçoit doit faire machine en arrière, afin de chercher le vrai.Il lui faut connaître la façon d'intervertir les pensées; de tout, je vous pardonne et vous remercie.« Je loue cordialement les maîtresses de leur dévouement à la cause de l'éducation de la jeunesse; et, ce soir, je me permets de m'approprier une belle parole d'un évêque des États-Unis.Il disait dernièrement: « De toutes les communautés de mon 262 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1900 diocèse, ce sont les SS.de Sainte-Croix qui donnent la plus belle instruction et forment le mieux les enfants à la pratique des vertus domestiques ».Ainsi se vengea le vénérable héros du jour.Les soeurs répliquèrent en silence: A DIEU SEUL, HONNEUR ET GLOIRE.* * Le vent est aux JUBILÉS: Mgr Beaven, évêque de Spring- field, Mass, célébrait son jubilé sacerdotal, le 19 décembre.La communauté de Sainte-Croix se trouvait représentée par soeur Marie-de-Sainte-Christine (Kernan) et soeur Marie-de-Saint- Narcisse (Toupin).Les élèves de l'école Saint-Joseph du Sacré- Coeur donnèrent une jolie réception et offrirent au Jubilaire une bourse de vingt-cinq dollars ($25.00).Le 21 décembre, le vieux couvent de Saint-Scholastique célèbre son jubilé d'or.Enfin, l'ancienne mission voit des jours dorés ! M.le curé Hétu témoigne une grande reconnaissance envers les soeurs pour le bien inappréciable — ce sont ses paroles — opéré dans la localité, par leur entremise.Il engage les paroissiens, les chefs de famille, à remercier le bon Dieu, avec lui, des bénédictions du ciel répandues sur cette institution, aux débuts si pénibles.Bon nombre de jeunes filles de cette paroisse, ajoute-t-il, sont religieuses aujourd'hui; un plus grand nombre sont mères de famille et répandent dans le monde la bonne édification et la fidélité au devoir.En cette circonstance, Mme J.-B.Clément, ancienne élève et mère de soeur Marie-de-Sainte-Delphine, de notre Congrégation, offrit au nom des « Anciennes » une bourse de soixante dollars ($60.00) en pièces d'or, comme gage de reconnaissance et de piété filiale.La supérieure du couvent, soeur Marie-de- Sainte-Elisabeth-de-Hongrie (Dugas), remercie avec son grand coeur, les dames présentes; et toutes les religieuses conservèrent de ce jubilé le plus consolant souvenir.Redisons encore et toujours: GLORIA TIBI DOMINE.A l'occasion du Jubilé de cette maison, qui a coûté tant de sollicitudes à la T.H.Mère Marie-des-Sept-Douleurs, et tant d'abnégation à ses filles, nous sommes heureuses d'ajouter aux fêtes de Sainte-Scholastique un extrait de lettre, écrite par la 1900 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 263 digne Mère à l'une de ses filles en mission dans cet établissement; la lettre porte la date suivante: « le 22 décembre 1882 ».« Voilà bientôt la grande fête de Noël! Quelle occasion de nous ranimer clans le service de Dieu! J'ai lu dans l'imitation du Sacré Coeur: La croix est pour les grands courages, le Thabor, pour les favoris; mais vous qui êtes faible, et qui ne méritez pas les grandes faveurs de votre Maître, tenez-vous à la crèche et tâchez de croître avec l'Enfant-Jésus.Tenez-vous bien humble et bien petite, comme il convient à votre profession.» Pourquoi ne formerions- nous pas de ces paroles édifiantes, le bouquet spirituel de tous les Noëls de notre vie et de ce jubilé?.Les fêtes passées, se lève la radieuse aurore d'un jour qui ne passe pas dans l'Église du Christ-Jésus: Noël! Les élèves se préparent à retourner dans leurs familles.Lors de leur dernière entrevue avec l'aumônier, M.Moulin, elles entendent de sa bouche ce souhait généreux: « Mesdemoiselles, je vous souhaite de voir la fin du XXe siècle])) Pour un souhait généreux, c'en est un, assurément! Dans les années éternelles, il serait de mise, où cent ans n'est qu'un point! M.le supérieur ecclésiastique arriva le 27 décembre, pour l'examen canonique des novices et des postulantes: Mère Marie- de-Saint-Basile profita de l'occurrence pour lui offrir les voeux de la Congrégation.Dans sa réponse, Mgr Martin exhorta les soeurs à reconnaître les libéralités de Dieu à leur égard: « Vous êtes les privilégiées, dit-il.Bien que votre nature ne soit pas différente de celle des personnes du monde et que vous ayez vos misères, vos faiblesses même, le bon Dieu vous accorde des faveurs extraordinaires.Cultivez, je vous prie, la reconnaissance envers Dieu.Sachez lui dire un loyal et filial merci pour chaque bienfait reçu.« Adonnez-vous à la pratique de la charité parfaite; réjouissez- vous des succès de vos compagnes; partagez leurs peines et leurs deuils.Si une compagne vous surpasse par son intelligence ou par ses qualités de coeur, reconnaissez en elle le don de Dieu et réjouissez-vous-en.Vous êtes à la maison mère; d'ici 264 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1900 doivent partir des rayons de lumière et de chaleur qui se propageront dans toute la Congrégation, par le bon exemple.Rivalisez de zèle pour avancer dans l'amour de Dieu et la fidélité à la sainte Règle.» La dernière nuit de l'an 1900! cette nuit, fin de siècle, se passe à la chapelle en présence de l'Hostie sainte, exposée à nos adorations, selon le désir de Sa Sainteté Léon XIII.Notre famille religieuse n'a qu'un coeur, qu'une âme et qu'une voix pour implorer de Jésus, Roi immortel des siècles, d'accorder son pardon au monde entier, son immense miséricorde pour le siècle passé; puis, sa force, sa grâce abondante, sa lumière pour le siècle qui se lève, avec l'année nouvelle.CÉRÉMONIES RELIGIEUSES DE L'ANNÉE 190!) VÊTURE— le 29 mai: Mlles Alice Prévost S.M.-de-S.-Aimé-de-Jésus Mary-M.McDonald S.M.-de-S.-Patricie Jane McDonald S.M.-de-S.-Etheldred Bernadette Daoust S.M.-de-S.-Alberta Thérèse Kennedy.S.M.-de-S.-Elisabeth-de-Portugal Julianna Robert S.M.-de-S.-Augusta Délia Girard S.M.-de-S.-Vital Flora McCulloch S.M.-de-S.-Ignace Hélène Comtois S.M.-de-S.-Léonide Délima Desjardins S.M.-de-S.-Désiré Eustelle Dufort S.M.-de-S.-Gérasine Hélène Sirois S.M.-du-Couronnement Florestine Lafond S.M.-de-S.-Alphonsine Agnès Brisebois S.M.-de-S.-Lin VOEUX TEMPORAIRES — le 23 juillet: S.M.-de-S.-Julienne S.M.-de-S.-Hilda (Fortier) .(Reed) 1900 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 265 S.M.-des-Séraphins (Robert) S.M.-de-S.-Jean-Chrysostome (Grenier) S.M.-de-S.-Oswald (Morris) S.M.-de-S.-Euphémie (Bombardier) S.M.-de-S.-François-Régis (Taillefer) S.M.-de-S.-Adrienne (Cantin) S.M.-de-S.-Didace (Caron) S.M.-de-S.-Gustave (Carrière) S.M.-de.-l'Incarnation (Beauséjour) S.M.-de-S.-Félix-de-Valois (Dulin) S.M.-de-S.-Victor (Thomas) S.M.-de-S.-Robertine (McCormick) S.M.-de-S.-Jean-Gualbert (Mathieu) S.M.-de-S.-Ernest (Morin) VOEUX PERPÉTUELS—le 15 août: S.M.-de-S.-Joséphine (Miller) S.M.-de-S.-Clarisse (Roussel) S.M.-de-S.-Honorine (Marois) S.M.-du-Mont-Carmel (Lorrain) S.M.-de-S.-Florentine (Campeau) S.M.-de-S.-Alphonse-Rodriguez (Fortier) S.M.-de-S.-Aimé-de-la-Croix (Loiselle) S.M.-de-S.-Octave (Charron) S.M.-de-S.-Jacques-le-Majeur (Tierney) S.M.-de-S.-Aglaé (Montminy) S.M.-de-S.-Constant (Machildon) S.M.-de.S.-Hildegarde (Ravenelle) S.M.-de-S.-Martine (Boudreau) S.M.-de-S.-Clément (Leblanc) SOUFFRIR?.C'EST LE PARTAGE DES SAINTS SUR LA TERRE, C'EST CELUI QU'A CHOISI NOTRE-SEIGNEUR; CAR LUI AUSSI A EU SES TRAÎTRES PARMI LES SIENS.QUE TOUTES CES VOIES ET CONDUITES DE LA PROVIDENCE SUR LES SAINTS SONT ADMIRABLES ET NOUS NE DEVONS JAMAIS NOUS EN SCANDALISER.La T.H.M.Marie-des-S.-Douleurs CHAPITRE HUITIÈME SOMMAIRE: 1901—Circulaire de mère Marie-de-Saint-Basile, précieux conseils — Sermon de M.l'abbé Moulin, le 6 janvier — Notre filleule: la paroisse de Saint-Michel-des-Saints — L'influenza — Cérémonie religieuse — Maladie et mort de la reine Victoria, 1ère — Extension du jubilé — Décès de soeur Marie-de-Sainte-Mathilde (Desautels).II Une surprise.Fête de l'aumônier — Visite à Magog — Travaux de démolition — Maladie et décès de Soeur Marie-de-Sainte-Hortense — Confirmation, Mgr Bruchési, messe, réception chez les élèves — Zèle généreux des soeurs — Les Quarante-Heures — Succès encourageants dans l'imprimerie et la reliure — Le mois de Marie — Première communion — Décès de soeur Marie-de-Sainte-Ernestine — Exposition des travaux scolaires — La Saint-Basile transférée au 17 juin — Les ouvriers sont de la fête — La distribution des prix — La retraite — Cérémonie religieuse.III Décès de Soeur Marie-de-Sainte-Marthe (Chalifoux) — Visite de deux soeurs de Sainte-Croix de l'Indiana — Cours de pédagogie au Mont- Sainte-Marie — Circulaire de la supérieure générale — Visites et visiteurs — Un nouveau prêtre — Don généreux de Mme Breen — Décès d'une novice — Les fêtes du mois de septembre — M.le supérieur au noviciat — Grand congé — Maladie de soeur Marie-de-Saint-Thomas- d'Aquin (Tourangeau) — Retraite des élèves.IV Mère Marie-de-Saint-Basile en visite officielle — M.le supérieur rentre d'un voyage aux États-Unis — Décès de S.M.-de-Saint-Thomas-d'Aquin — Fête du supérieur ecclésiastique — Son allocution aux soeurs — Le 21 novembre célébré solennellement — Deux religieuses des SS.NN.de Jésus et de Marie — Réception d'enfants de Marie — Cérémonie de Vêture et de profession religieuse, Mgr Bruchési et Mgr Decelles chez les élèves — Mgr Bruchési chez les soeurs professes —• Baptême et confirmation d'une élève.270 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 Avec la présente année, mère Marie-de-Saint-Basile entrait dans la dix-huitième de son administration.Il lui était donc naturel de supposer que, bientôt, elle déposerait le fardeau de la responsabilité.Néanmoins, elle ne se départit point de son zèle accoutumé.Dans sa vingt-cinquième circulaire, datée du 15 janvier 1901, elle écrit à ses filles: « Dans la nuit du 31 décembre, nous avons prié l'Hôte divin du tabernacle d'être la lumière de vos intelligences, la force de votre volonté, l'amour de vos coeurs.Ah! si Jésus est le centre de votre vie, comme elle sera heureuse cette année qui commence! Cultivons en nous l'esprit de foi, efforçons-nous de voir Dieu en tout et partout, dans les peines comme dans les joies; dans les souffrances physiques ou morales; dans les contrariétés de chaque jour et dans les sacrifices que le bon Dieu nous demande.Soyons persuadées que si nous vivons cet esprit de foi, la pratique de nos obligations nous deviendra facile; la charité, le silence, l'humilité, l'obéissance, vertus si chères au divin Epoux, nous serviront de moyens pour nous élever jusqu'à Lui!» Ensuite, la révérende mère prie toutes les soeurs de vouloir bien communiquer au conseil général, pour le premier septembre prochain, les remarques ou modifications qu'elles aimeraient présenter au sujet de nos Constitutions, du Coutumier et du programme d'études.Ces remarques seront étudiées par le conseil général et soumises à l'examen des capitulantes; puisque, après la Chapitre général, les Constitutions seront envoyées au Saint-Siège avec une supplique, pour l'approbation définitive.Dans la même circulaire, mère Marie-de-Saint-Basile communique à ses filles l'épreuve financière qui vient d'affliger la communauté.Elle escompte, cette fois encore, la bonne Providence qui aidera à sortir de l'impasse.Elle termine en demandant d'instantes prières pour la sainte Eglise si persécutée! « Pour le Vicaire de Jésus-Christ, dit-elle, implorons force, lumière, santé, afin qu'il puisse continuer longtemps encore à défendre ses droits sacrés contre les sectaires qui, dans leur folie, voudraient l'anéantir.Prions aussi beaucoup les unes pour les autres: l'union de nos prières fera descendre sur toute notre famille religieuse l'abondance des grâces célestes, et nous per- 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 271 mettra d'atteindre le degré de perfection déterminé par Celui à qui nous nous sommes consacrées.Tenons prêts les comptes de notre vie spirituelle; si nous sommes appelées, cette année, à les présenter à Celui qui juge les justices mêmes, nous paraîtrons devant Lui avec confiance ».Ainsi s'épanchait le coeur de notre mère au début de l'année.Pour donner suite à cette lettre, elle profita des quelques jours de vacances en janvier pour réunir les maîtresses.Elle les exhorta à prendre grand soin de l'âme des enfants: « Mes filles, leur dit-elle, en substance, soyez très particulières pour l'enseignement de la religion à tous les degrés.Je viens de lire qu'un enfant de huit ou dix ans, avec sa petite science de catéchisme, eût pu confondre les sages de la Grèce.Elle insista également sur l'étude des langues; mais appuya davantage sur la formation morale: « Le caractère et ses défauts non corrigés, dit-elle, amènent le trouble et la désunion dans les familles.Enseignez à vos élèves à s'aimer chrétiennement, à se supporter, à se pardonner leurs fautes de surprise, à s'entr'aider.Inspirez-leur l'amour, la pitié et le respect pour les pauvres.Vous enseignez le dessin ?la peinture ?— apprenez à vos enfants à ne tracer que des lignes droites, dans leur vie sociale et familiale, et à ne peindre que des beautés dans leur vie morale.» Ce respect, cette science du beau et du bien, mère Marie-de- Saint-Basile voulait qu'ils fussent appliqués dans la vie de communauté.A la suite d'une incartade envers quelques soeurs anciennes, elle rappelle énergiquement, à une jeune soeur, ce point de nos règles où il est dit : « On entourera de soins et d'égards les chères anciennes qui ont blanchi sous le joug du Seigneur ».Elle engage les soeurs à se souvenir que, depuis les époques les plus reculées, Dieu exige des hommes ces mêmes égards pour les vieillards: Quand le Seigneur commanda à Moïse de choisir dans Israël, pour l'aider, soixante-dix hommes sur lesquels il répandrait les dons du Saint-Esprit, il ajouta: « Choisis ceux que tu crois être les anciens du peuple ».« Mes filles, choisir les anciens du peuple, c'était donner la préférence à Vexpérience sur l'inexpérience, à la sagesse sur l'irréflexion; à la charité sur l'amour de soi.Ne dites donc pas: « Cette soeur est trop âgée pour remplir 272 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 telle ou telle fonction.Laissez cette décision aux supérieures: la charité, la sagesse, la prudence, sont leurs guides ».« Vous préférez les jeunes ?alors, soyez toujours assez jeunes pour obéir affectueusement à l'autorité légitime, sans raisonner jamais.Dites toujours à l'instar de notre vénéré Fondateur: Si je souffre en obéissant, un jour viendra où je recueillerai dans la joie les fruits de cette humble soumission.« Puis, souvenez-vous que, si le bon Dieu vous réserve l'honneur de vieillir, vous tiendrez aussi à être respectées ».Ensuite, elle rappelle au souvenir de ses filles une instruction donnée à la communauté par M.le chanoine Martin, dans laquelle il s'exprimait ainsi: « Marchez toutes dans cet esprit de foi et de charité, vous estimant les unes les autres! Comme le bon Dieu jetterait sur votre communauté un regard de complaisance et la bénirait avec effusion! Les chères anciennes qui ne peuvent plus porter le poids du jour et de la chaleur prient beaucoup, et obtiennent des grâces précieuses pour la Congrégation.Respectez-les, aimez-les, ces vénérables mères, comme vous respectez et aimez vos mères selon la nature! » Dans la même séance, mère Marie-de-Saint-Basile attire l'attention des soeurs sur le siècle qui se lève et que sa Sainteté Léon XIII a voulu consacrer par une grand'messe, célébrée à minuit, le 1er janvier, chez tous les peuples catholiques; pour le bonheur et la sanctification des âmes.« Mes filles, nous avons notre tâche à remplir pour la gloire de Dieu ; en action de grâces de la vie que ce bon Maître nous conserve, employons, pour son amour, tous les instants qui nous seront accordés ».* * Le 6 janvier, M.l'abbé Moulin donne à la communauté une fort belle instruction, où il commente ces paroles des mages: « Nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus pour l'adorer ».Il serait édifiant de citer le sermon en entier.Gardons au moins la première phrase.« Mes chères soeurs, dit-il, nous n'avons pas été moins favorisées que les prémices de la gentilité.La première prière apprise sur les genoux de notre pieuse mère, la première visite à Jésus caché dans le 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 273 tabernacle, la première leçon de catéchisme, la première confidence au ministre de Jésus-Christ, la première communion, la consécration à Marie, ce sont autant d'étoiles lumineuses que le bon Dieu a fait luire, pour nous attirer à son amour ».Ces paroles sont ensuite appliquées aux diverses phases de notre vie et, en tous points, il faut reconnaître les miséricordes et les tendresses du Seigneur.± * * Dans le même mois de janvier, la révérende mère générale recevait une lettre pressante de M.l'abbé A.Carrières, curé de la paroisse Saint-Michel-des-Saints.Dans cette lettre, il sollicitait des ornements sacerdotaux et le linge nécessaire au culte divin.Le bon curé possédait les titres voulus pour se constituer mendiant puisque, depuis la retraite sacerdotale du mois d'août 1990, notre communauté avait l'honneur d'être la « marraine » de sa paroisse.Aussitôt, ordre est donné d'adresser une caisse à la pauvre filleule.Cette caisse, généreusement garnie, fut expédiée et le pasteur la reçut avec bonheur.Après cette charité, l'épreuve de la maladie fit son apparition: l'influenza terrassa fortement neuf de nos chères anciennes et bon nombre de novices et de postulantes.Parmi les soeurs professes, la santé de soeur Marie-des-Oliviers (Bousquet) en fut à jamais compromise, les poumons furent pris par la consomption, et durant près de trois années elle souffrit d'un affaiblissement général, tout en rendant d'appréciables services à la communauté.Celles que la maladie avait épargnées se dévouèrent, avec un zèle admirable, à peinturer les châssis neufs de la bâtisse en construction.Les plus assidues au travail furent: SS.Marie-de- Saint-Hyacinthe, Marie-de-Saint-Cyrille, Marie-de-Saint-Léo- nard-de-Port-Maurice, Marie-de-Saint-Césaire, Marie-de-Sainte- Romaine et Marie-de-Saint-Marc ; les deux dernières laissèrent le pinceau pour secourir les infirmières; les malades étant devenues trop nombreuses.L'épidémie atteignit plus de trente soeurs, elle pénétra même au pensionnat où une dizaine d'élèves furent atteintes.La mort, cependant n'osa toucher personne.Soeur Marie-des-Anges (Cousineau), vénérable jubilaire, se trouvait 274 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 aussi parmi les plus malades: son état causa beaucoup d'inquiétudes.En somme, le premier mois du nouveau siècle se montra généreux dans l'envoi des épreuves.Dieu en soit béni! Enfin, en guise de consolation, le bon Dieu nous ramène notre bon supérieur ecclésiastique, retenu depuis un mois à l'archevêché pour cause de maladie.Des affaires importantes à traiter avec le conseil général l'appellent à Saint-Laurent.Il se fait un plaisir de visiter toutes les malades, il les bénit, puis il donne, à cinq heures, la bénédiction du Saint-Sacrement.C'était le 27 janvier.Le lendemain, 28, nous entendons lire au réfectoire, pour la première fois, la nécrologie de notre T.H.Mère Marie-des-Sept- Douleurs, décédée le 29 janvier 1900.En cet anniversaire douloureux, une fête de vêture et de profession se déroule dans notre chapelle.Nous comptons au choeur une vingtaine de membres du clergé.Quarante soeurs en cérémonie, ce qui amène une affluence considérable de personnes; M.le chanoine Racicot préside et donne le sermon.Il prend pour texte ces paroles du Deutéronome, Ch.26 — « Souvenez-vous que vous avez choisi le Seigneur pour qu'il soit votre Dieu, et que le Seigneur vous a choisi pour que vous soyez son peuple ».L'éloquent prédicateur prouve que ces paroles trouvent leur application dans l'acte de l'émission des voeux: «La vocation, c'est l'appel de l'amour de Dieu à l'amour de l'homme.La profession religieuse est la réponse de l'amour de l'homme à l'amour de Dieu ».Noble réponse, digne d'une grande âme! * * * Vers le même temps, une nouvelle pénible arrive de l'Angleterre au Canada.Notre illustre souveraine, Sa Majesté la reine Victoria, a été appelée à Dieu le 22 de ce mois, à six heures et cinquante minutes du soir.Depuis l'annonce de sa dernière maladie, les yeux et les coeurs de ses millions de sujets se tenaient fixés sur le château d'Osborne.Dans toute l'étendue de son immense royaume, des prières montèrent, vers le ciel, en faveur de l'illustre malade.Le nombre de ses jours touchait à leur terme et la bonne reine, la très bonne reine Victoria, tomba sous 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 275 la faulx de l'impitoyable mort.Cette sinistre faucheuse ne respecte ni les sceptres ni les couronnes royales ou impériales.Les princes et les chefs d'État ont adressé à l'illustre famille leurs sincères sympathies; mais nul message ne parut plus touchant que celui de Sa Sainteté Léon xin, le vénérable nonagénaire du Vatican; message faisant écho au deuil de la nation anglaise.Peu de morts ont causé dans le monde entier autant d'émotions, autant de profondes sympathies que la disparition de l'illustre et bien-aimée souveraine.Notre Saint-Père le Pape daigne rappeler, avec gratitude, ce que cette reine, d'une croyance, en apparence, du moins, différente de la nôtre, avait fait pour la liberté de l'Église catholique, dans son immense empire.Mgr Baunard, dans son magnifique ouvrage Le vieillard ou la vie montante, s'exprime ainsi à propos de cette grande reine: « Je me souviens que pendant les derniers jours de Sa Majesté la reine d'Angleterre, impératrice des Indes, les bulletins de l'agonie de la gracieuse reine, expirant après un long et glorieux règne, à l'âge de quatre-vingt-deux ans, m'étonnaient et m'émouvaient d'une étrange pitié.C'était pendant la guerre des Boërs.Chaque jour, on lisait invariablement dans les dépêches anglaises: «La reine pleure, elle pleure sans cesse.Serait-ce que sur le trône, il est plus difficile de mourir que dans le cloître et sous le chaume ?» Les religieuses qui liront ces lignes répondront avec chaleur à la question du vénérable Mgr Baunard: Oui, dans nos cloîtres, que la mort est douce!.« Le long règne de Victoria 1ère a vu passer bien des hommes et des choses.C'est une belle page de l'histoire d'Angleterre qui finit.Son fils, Albert-Edouard, prince de Galles, lui succéda et son règne fut des plus paisibles.Il régna par la bonté envers son peuple, par le respect de la justice et du droit, par l'amour de la paix, par le progrès de l'unité religieuse, rêve du glorieux Pontife, Léon xm.» * * * Le 30 janvier, une fête pieuse réunit le pensionnat à la chapelle.Le R.P.Nolin, jésuite, enrôlait soixante-quinze élèves dans les cinq premiers grades de la milice du Pape.L'ardent apôtre du Sacré Coeur ne pouvait se défendre de donner en cette 276 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 occasion une instruction forte et solide; pour cette fois, il choisit « Le renoncement chrétien » qui conduira à la sainteté.Comment, dit-il, les catholiques ne cherchent-ils qu'à jouir, quand ils ont toujours sous les yeux un chef couronné d'épines et couché sur une croix?Ce pieux parallèle, cette pensée de foi, prise entre tant d'autres, frappèrent sensiblement les jeunes élèves mêmes et les nouvelles miliciennes se mirent aussitôt à l'oeuvre, pour pratiquer le renoncement attaché à la vie de pensionnaire.Le 2 février, les soeurs entendirent la lecture du commentaire de la circulaire de Mgr l'archevêque, relativement à l'extension du jubilé.Ce jubilé, début du xxe, siècle a été célébré solennellement l'année dernière (1900), dans la Ville éternelle, et Sa Sainteté Léon xm accorde cette même faveur au monde entier.Sa Grandeur, Mgr Bruchési, transmit aux fidèles de son diocèse, les paroles du Saint Père, à l'occasion de ce Jubilé : « On compte, dit le Pape, non pas un petit nombre d'hommes, mais jusqu'à des centaines de milliers, appartenant à toutes les nations, qui, avec joie et avec une grande ardeur, ont profité avec empressement, de la faculté de gagner la précieuse indulgence; et il est hors de doute que beaucoup d'âmes se sont, à l'occasion de ce jubilé, purifiées par un repentir salutaire et se sont renouvelées par la pratique des vertus chrétiennes.Nous avons donc raison de penser qu'un nouvel et puissant élan de foi et de piété s'est répandu en tout lieu, partant de la source et du centre de la foi catholique.» Puis, Monseigneur continua d'énumérer les fruits bénis de ce nouveau jubilé; et il exposa les conditions sine qua non, pour le gain de la précieuse indulgence.La bonne nouvelle fut reçue au couvent avec action de grâces et les soeurs se disposèrent à puiser à plein coeur dans l'inépuisable trésor.Le 3 février, après la bénédiction du Saint-Sacrement, l'aumônier entonna le Veni Creator pour l'ouverture du Jubilé.Quelques jours plus tard, une lettre adressée de notre maison Saint-Albans, Vermont, annonçait que soeur Marie-de-Sainte- 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 277 Mathilde (Desautels) se trouvait retenue au lit; mais rien n'indiquait que le mal fût grave.Voilà, cependant, que le 11 février, vers une heure et trente minutes, le téléphone annonce le décès de la chère soeur; bien grande fut la surprise à la maison mère!.Le lendemain, 12 février, une grand'messe fut chantée au couvent de Saint-Albans, pour le repos de l'âme de la défunte.La dépouille mortelle fut ensuite conduite à la gare et dans le cours de la journée, le cercueil arrivait à Montréal sous la garde du curé de Saint-Albans.Mère assistante générale et l'économe générale se portèrent à sa rencontre.Le service funèbre fut célébré le lendemain à la maison mère.La chère soeur a passé quarante-six années dans la Congrégation, toujours occupée à l'enseignement, jusqu'aux derniers dix jours de sa vie.Elle fut la première élève pensionnaire de 1847, et la première élève postulante en 1854; car les premiers sujets entrés au noviciat ne furent pas des élèves de chez nous.A l'occasion de cette mort, le conseil général décida qu'à l'avenir les honoraires de messes que chaque établissement doit verser au décès d'un membre de la Congrégation soient versés à l'économe générale et cette dernière offrira aussitôt un trentain grégorien pour la défunte.— II — UNE SURPRISE! le 14 février, vers six heures du soir, on sonne à la porte de l'aumônerie.La portière, un peu craintive, n'ouvre pas sans le conventionnel : « Qui est là ?» — « Des étrangers, répond une voix inconnue, pouvez-vous les loger?» Entr'ouvrant la porte à l'aide de la chaînette de sûreté, soeur Marie-de-Saint-Joachim (Lemay) croit voir une soutane; rassurée, elle ouvre: « Entrez, messieurs, dit-elle, toujours craintive cependant.Les messieurs entrent précipitamment, tout emmitouflés, et se dirigent à pas pressés vers la patère, sans dire mot; ils y déposent leur chapeau, leur sac de voyage, etc.; alors la soeur portière, ébahie, reconnaît Mgr l'archevêque.Elle se jette à genoux, aux pieds de Sa Grandeur qui riait de 278 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 tout coeur; son compagnon, M.l'abbé Cousineau, curé de Saint-Eustache, riait davantage.Un souper est préparé à la hâte pour ces aimables visiteurs; ensuite, Monseigneur monte à l'infirmerie bénir les malades, il s'informe avec bienveillance de l'état de chacune et félicite notre bonne soeur Marie-de-Sainte-Marthe, de ses quatre- vingt-trois ans qu'elle terminera demain.Sa Grandeur descend à la salle de communauté où se trouve tout le personnel de la maison.Après avoir formulé des voeux de bonheur et de sainteté pour chacune des soeurs, Monseigneur raconte l'étrange réception qu'on vient de lui faire à la porte d'entrée; il s'en amuse de grand coeur.Il dit aussi sa visite inattendue dans la salle de récréation du pensionnat de Saint- Martin, et durant un quart d'heure il égayé tout le monde.Avant le départ, nos pensionnaires veulent aussi saluer leur archevêque ; à cette fin, les maîtresses les font monter au parloir.Monseigneur cause paternellement avec les demoiselles; elles sont à l'aise tout à fait avec ce bon Père, qui pose plusieurs questions d'actualité; les petites sont interrogées sur la vocation; Monseigneur prend plaisir à les embrouiller et y réussit, ce qui l'amuse beaucoup.Puis il quitte ce jeune monde, heureux du bonheur prodigué; il bénit les élèves et leur accorde un congé.En sortant du parloir, Monseigneur dit aux soeurs qui l'accompagnent: « Vos élèves sont charmantes! » Notre voiture est à la porte, et les distingués visiteurs sont conduits à l'archevêché; avant de partir, ils ne nous disent pas adieu, mais AU REVOIR.Avant la fin de février, les élèves chômèrent l'anniversaire de l'ordination sacerdotale de M.Moulin, notre aumônier.Naturellement, il n'aime pas être fêté; mais pour son ordination il consent, avec l'espoir, ou plutôt la certitude que nous prierons pour lui.« En retour de vos prières, je vous promets un mémento spécial à la sainte messe, afin que vous serviez toujours le divin Maître avec générosité et que la Congrégation soit de plus en plus prospère.» Or, le 28, les chanoines Martin et Cousineau, quatre religieux de Sainte-Croix et trois prêtres séculiers, pre- 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 279 naient le dîner avec M.l'aumônier.La gaîté, la bonne humeur, ne s'absentent jamais de ses bonnes réunions de confrères dans le sacerdoce.* * Dans la première semaine de mars, la révérende mère se vit dans la pénible nécessité de disperser dix de nos anciennes sexagénaires et septuagénaires, en prévision de l'ancienne construction qu'il faut démolir.Elles sont envoyées dans nos diverses maisons de la ville et de la campagne, voire même jusqu'à Saint- Albans.En les gardant ici, le peu d'espace que nous pouvons leur offrir leur occasionnerait des souffrances.Nous les voyons partir avec regret; elles-mêmes ont le coeur gros, nous comprenons bien leur chagrin.Il est pénible de déraciner les vieux chênes! Peux semaines durant, il ne fut question que de changements d'obédiences, de déplacements, de transports de meubles; tout le monde est à l'étroit.Mais, il faut faire contre fortune bon coeur.Dans tout ce va-et-vient, il se trouve de la gaîté.Chacun en prend aisément son parti et tout marche, on ne peut mieux.Le 18 mars, les déménagements sont à peu près terminés, la vieille maison est vide! Les ouvriers commencent leur oeuvre de démolition; comme c'est triste!.* * • Le pensionnat n'a pas à souffrir de ce brouhaha, et les élèves finissantes subissent leur premier examen, en présence de M.l'aumônier, de mère Marie-de-Saint-Basile et des premières autorités du pensionnat.Huit matières sont au programme; ce ne sont, cependant, que les préliminaires.Il reste encore beaucoup à voir, mais le courage et la préparation des étudiantes sont à la hauteur de la situation.* * L'épreuve actuelle de la maison mère est la pénible maladie de soeur Marie*-de-Sainte-Hortense (Breen) ; la pauvre ancienne endure des souffrances indicibles avec un courage admirable.280 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 « Mes souffrances, dit-elle, me sont une source de mérites et de bénédictions.De cette manière, je travaille plus efficacement pour ma communauté; car ma nature n'y trouve aucune satisfaction.Mon Jésus! j'unis mes souffrances aux vôtres.» Enfin! le bon Dieu mit un terme à sa longue agonie.Le 6 avril, ses forces déclinantes laissent entrevoir le dénouement fatal.On récite près d'elle les prières des agonisants et soeur Marie-de-Sainte-Chantal (Haie), suggère à la mourante, dans sa langue maternelle, les aspirations les plus propres à soutenir la confiance en la divine miséricorde.L'aumônier vient la voir souvent, il lui donne l'absolution et il la bénit à plusieurs reprises.A deux heures et quarante-cinq minutes de la nuit; la vénérable soeur s'endort pour s'éveiller dans l'éternelle lumière.Notre chère soeur Marie-de-Sainte-Hortense décédait à l'âge de soixante- six ans.Elle naquit le 4 mars, 1835, à Killarney, Irlande.Elle a passé quarante-sept ans dans notre Congrégation, à laquelle elle se dévoua avec une affection toute filiale.La chère soeur nous laisse de bons souvenirs de son amabilité, de sa franche gaîté et de sa simplicité.Son esprit de foi, qu'elle tenait de sa race, était remarquable.Il lui fallut, en vérité, une foi robuste, pour persévérer dans une communauté canadienne, elle qui n'entendait pas notre langue française, à son entrée au noviciat.Notre regrettée soeur était arrivée au postulat en septembre 1854, avec l'une de ses soeurs.Trois ans plus tard, sa mère avec une autre de ses filles vinrent les rejoindre.Elles prirent toutes quatre l'habit religieux, mais une seule a persévéré, soeur Marie- de-Sainte-Hortense.La dépouille mortelle de la chère défunte resta exposée dans la chambre mortuaire pour le saint jour de Pâques, (7 avril).Par surcroît, le temps est sombre; les joies de la Résurrection sont mêlées de tristesse.Les traits de la morte reflètent le bonheur et nous remémorent ces paroles de Mgr de Ségur: « S'il est bon de travailler pour Jésus-Christ, il est meilleur de souffrir pour Lui.» Le prédicateur de la fête pascale fit une délicate allusion à la mort de la vénérée sexagénaire, dont les restes mortels sont encore au milieu de nous.Il s'exprima ainsi: « Sur cette terre, les plus grandes douleurs coudoient les plus grandes joies.Hier, 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 281 à peine les cloches avaient-elles fait entendre leur joyeux carillon, qu'un glas funèbre retentit dans les airs et annonça qu'une soeur de Sainte-Croix, après avoir enduré d'indicibles souffrances, avec une patience admirable, venait de quitter la terre.Elle laisse à sa famille religieuse l'exemple d'une parfaite soumission à la volonté de Dieu.Quand les épreuves, les afflictions se présentent, acceptons-les avec une amoureuse résignation et, un jour, nous chanterons avec Jésus glorieux un ALLÉLUIA sans fin.» Les funérailles de notre chère soeur furent suivies de la visite de Mgr Bruchési, pour la confirmation de dix-sept jeunes pensionnaires.Vers huit heures du matin, Monseigneur entrait à la chapelle.Sa Grandeur donna d'abord une allocution, dont voici la substance.« Après sa résurrection, Notre-Seigneur apparut à Madeleine et l'appela par son nom: « Marie ».Elle répondit: « Bon Maître! » Notre-Seigneur connaît aussi chacune de vous, par son nom, il vous parle un langage que vous connaissez bien, mes chères enfants; Il éclaire votre intelligence, Il entoure vos jeunes années d'une tendre sollicitude; dans quelques instants, Il vous enverra son Esprit-Saint avec tous ses dons.« Vous avez besoin de piété, de science, de force, pour résister aux ennemis de votre salut.Vous rencontrerez des luttes auxquelles vous ne pensez pas maintenant; plus tard, vous trouverez qu'il est difficile de rester fidèle au bon Dieu: prenez votre petit coeur, donnez-le à Jésus, lui disant: « Il est à vous, mon Dieu, prenez-en bien soin! » « Quand le Saint-Esprit descendra en vous, Jésus y viendra avec le Père éternel; vous serez en quelque sorte divinisées.Dieu vivra en vous! Oh! qu'il est bon, ce divin Maître! Il vous aime, aimez-Le donc de toute votre âme.» Le saint sacrifice de la messe fut célébré immédiatement après la confirmation, par Monseigneur, assisté par les RR.PP.Dion et Meehan, c.s.c, et de M.l'abbé Saint-Denis, son secrétaire.Après le déjeuner, il y a réception chez les élèves.A dix heures et trente, Monseigneur se rend à la salle du pensionnat, 282 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 où sont réunies les soeurs professes, les novices et les postulantes.Faisant allusion à sa visite du 14 février au soir, Sa Grandeur dit à notre révérende mère en souriant : « Nous sommes mieux reçus chez vous le matin que le soir.» Puis, Monseigneur nous entretient de ses consolations: « Les stations quadragé- simales font un bien immense dans ma ville épiscopale; les processions du Jubilé sont des plus édifiantes! On a vu trois mille hommes, pieux et recueillis, défiler dans les rues, se rendant aux églises stationnales.Mais, ajoute Monseigneur, cette belle médaille a son revers, et j'éprouve un profond regret en constatant que les théâtres et les mauvaises lectures font un tort considérable aux citoyens.Je me console de tous ces désordres en visitant mes communautés religieuses si ferventes.Ce sont, pour moi, des Béthanies où je me trouve en compagnie des fidèles amies du Sauveur.» L'heure de quitter la maison mère sonne trop tôt, et le carrosse conduit notre digne prélat à l'archevêché.Monsieur l'abbé Moulin, originaire de France, voulut se procurer le plaisir d'entailler les érables qui entourent le couvent.Il admirait ce don généreux et cette délicatesse du Créateur dans l'eau délicieuse que nous fournit l'érable au printemps.Il se chargea de recueillir le liquide sucré et fidèlement, chaque soir, il l'apportait à la bonne soeur Marie-de-Saint-Antoine-de- Padoue.Au moyen d'un feu ardent, alimenté par le bois de l'érable, l'eau se réduisait en un sirop doré qui réjouissait le diligent aumônier.Il eût goûté plus de bonheur à le partager avec ses parents et amis d'outre-mer, car tous les étrangers envient le sirop, produit de notre arbre national.Le printemps ramène les beaux jours; les froids rigoureux disparus, les ouvriers reprennent les travaux de maçonnerie, interrompus depuis l'automne.Huit ouvrières s'offrent généreusement à recueillir les lattes des vieux murs démolis et elles 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 283 les attachent en paquets de cent.Notre chère soeur Marie-de- Saint-Hyacinthe se charge de redresser les clous qui serviront à^la construction nouvelle, matière d'économie, sans considération de l'ennui et de la fatigue.Mais voilà que la fête des Quarante-Heures vient apporter un repos bienfaisant.Pour l'âme pieuse, les heures passées au pied de l'ostensoir sont un peu le ciell La grande croix de lumière, entre deux ancres qui ornent le sanctuaire, semble dire à toutes les filles spirituelles du bon Père Moreau, notre fondateur: « Mettez votre espérance dans la croix de Jésus!» « Le salut est dans la Croix ».Cette grande fête passée, les vaillantes ouvrières reprennent leurs travaux du dedans et du dehors; Soeur Marie-de-Saint- Césaire, soeur Marie-de-Sainte-Eudoxie et soeur Marie-de-Sainte- Perpétue se chargent de l'embellissement du « Parc Ste-Anne » : tracer des allées, ordonner le charroyage de la terre, planter des érables.Soeur Marie-de-Sainte-Romaine se réserve un jardinet de plantes médicinales attenant à ce parc, et l'entretient elle-même; pour un travail pratique, c'en est un! Nous avons déjà parlé, au cours de ce volume, de l'imprimerie et de la reliure, introduites dans nos ateliers.Aujourd'hui, toutes deux offrent le résultat de leurs premiers essais, parfaitement réussis, dans le volume: Explication des Evangiles des dimanches et des fêtes de l'année, destiné aux soeurs enseignantes et dont les questionnaires ont été préparées par soeur Marie-de-Saint-Jean-Berchmans, directrice générale des études.Les maîtresses saluent avec respect et bonheur le petit volume, non seulement parce qu'il est I'ÉVANGILB, mais aussi pour le service qu'il rendra dans la préparation de la classe de religion; et encore, parce qu'il est de chez nous.Et voici le mois de mai ! La nature sort de son long sommeil, les arbres reverdissent, les oiseaux reviennent égayer nos bocages 284 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 et.les soeurs travaillent; elles se hâtent, car bientôt viendront les vacances et pour cette heureuse époque, il faut toujours du nouveau et du beau à présenter à nos missionnaires; ceci pour le coeur.Voici pour l'âme: dans son sermon d'ouverture du mois de Marie, l'aumônier rappelle d'abord l'origine de ce mois béni.Pour nous, enfants fidèles du R.Père Moreau, nous ne devons pas oublier qu'il a été, au Mans, un des ardents propagateurs de cette belle dévotion, dans les collèges et les couvents.Le prédicateur compare ce mois à une fête prolongée en l'honneur de Marie.« Or, dit-il, dans une fête, on fait des compliments et on présente un bouquet.Quel compliment ferons-nous à notre auguste Mère ?L'Ave Maria ?Le Memorare ?Le Salve Regina?Le Sub Tuuml L'Ave Maris Stella?Les Litanies?— Mais oui, de tout cela, nous composerons notre compliment; et pour notre bouquet, cueillons la fleur des vertus de pureté, d'humilité, de mortification, d'obéissance, etc.Nous l'offrirons à notre Mère, et comme elle reconnaîtra bien ces fleurs favorites! » Le prédicateur rappelle à l'assistance attentive la touchante histoire de l'illustre Coriolan, vaincu par sa mère Véturie.« Une mère, continue-t-il, remplit quatre fonctions auprès de ses enfants: elle les nourrit, elle les surveille, elle les console, elle les réconcilie.Marie, notre divine mère, exerce admirablement ces fonctions à notre égard.Nous ne l'appellerons jamais en vain à notre secours.» Il termine son allocution en félicitant les Enfants de Marie de s'être organisées de telle sorte que leur Congrégation est représentée chaque matin à la sainte Table.Le 23 mai, c'est la première communion de douze jeunes élèves! Ces enfants ont apporté une préparation singulièrement remarquable à ce grand acte.L'une d'elles demanda à retourner à la chapelle après son déjeuner, parce que, prétexte-t-elle, l'action de grâce est trop courte.J'ai encore bien des choses à dire à Jésus.Après avoir raconté à son petit troupeau l'histoire de l'hermine de Bretagne, l'aumônier lui suggère de prendre pour 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 285 devise: « La mort plutôt que la souillure.» Puissent ces enfants ne l'avoir jamais oubliée.* : _ * * La belle température favorise le travail des ouvriers et M.le supérieur se rend à Saint-Laurent deux fois par semaine; il surveille, il aime stationner sur le chantier et dire de bonnes paroles aux rudes travailleurs.Pour cette construction, notre carrière est exploitée, sous la direction de M.Joseph Joannette, de Cartierville; les travaux avancent rapidement et les manoeuvres font un ouvrage solide.1 * * * La dernière réunion des élèves pour la lecture des notes mensuelles de mai offre, cette fois, un caractère spécial.Soit que les bons anges aient inspiré de fortes résolutions, soit que la promesse de récompenses par l'aumônier ait fasciné les élèves, toujours est-il, que cinquante-deux élèves ont conservé la note excellente.Ce succès crée chez les écolières un enthousiasme sans précédent.M.l'aumônier et mère Marie-de-Saint-Basile assistent avec toutes les maîtresses.Chez les grandes: Mlle Laurenda Raymond reçoit « L'album de la Croix de Paris », illustré; Mlle Laura Cousineau « Les Evangiles des dimanches », commentés; chez les petites, Mlle Églantine Dufort a pour partage Les Quatre Evangiles en Un Seul.La jeune Mildred Wall est tout heureuse de son livre Le petit oiseau de Jésus.Une récréation extraordinaire suit cette réunion.Les écolières, grandes ou petites, comprirent mieux, ce jour-là qu'une bonne volonté, aidée de la grâce, peut opérer des merveilles.* Ce mois de juin vit disparaître une soeur relativement jeune, notre bonne et douce soeur Marie-de-Sainte-Ernestine, née Sara Montminy.Elle souffrait depuis plusieurs mois de 1 La construction mesure 243 x 60.286 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 la phtisie pulmonaire.Mais la malade gardait encore l'espoir de quelques semaines de vie.Le 7 juin, les infirmières jugèrent prudent de la transporter à la chambre des mourantes, voisine de la chapelle, appelée « chambre de Saint-Joseph ».La malade s'y rend sans aucune aide.Durant la nuit, elle trouve assez de force pour se lever, s'asseoir dans le fauteuil, où elle espère reposer mieux.Le lendemain, elle marche encore seule dans sa chambre pour se soulager; car elle est fatiguée du lit.Mais le 9 juin, vers cinq heures et trente du soir, l'aumônier vint lui faire une visite, et remarquant les symptômes d'une fin prochaine, il l'avertit qu'il va lui administrer les derniers sacrements.« Je vais donc mourir ?» murmura la patiente, en tenant les yeux au ciel, comme pour offrir aussitôt le sacrifice de sa vie.A peine notre consoeur eut-elle reçu l'indulgence in articulo mortis que notre révérende mère commence la récitation des prières des agonisants et celles de la recommandation de l'âme.Les prières terminées, la jeune soeur expire paisiblement.Cette mort si douce, si religieusement résignée, répand un parfum d'édification.De toutes les bouches s'échappent des paroles de louanges à l'adresse de celle qui vient de partir pour le ciel.La chère soeur quitte la terre à l'âge de trente et un ans, après onze années seulement de vie religieuse; mais des années remplies, ou par l'apostolat de l'enseignement, auprès des jeunes filles, ou par l'apostolat de la souffrance morale et physique.Soeur Marie-de-Sainte-Ernestine fut une religieuse exemplaire, gardant sa Règle dans les menus détails; elle fut encore une compagne aimable, douce et charitable.Ses supérieures surent l'apprécier et elle laissa des regrets parmi ses compagnes et ses élèves.Une de ses soeurs, religieuse dans notre Congrégation, l'avait devancée dans l'éternité, soeur Marie-de-Saint-Honoré.Nous en avons parlé dans les pages précédentes; deux autres de ses soeurs lui survivent pour pleurer son départ et prier pour elle: soeur Marie-de-Sainte-Aglaé et soeur Marie-de-Saint- Arthur.La première, en mission aux États-Unis, ne put lui 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 287 adresser un dernier adieu.La seconde se trouvait présente pour consoler la famille.Le jour des funérailles de la chère soeur, le 11 juin, notre naturaliste, soeur Marie-de-Sainte-Amélie, dont le bureau est fixé à la Pointe-Saint-Charles, académie Saint-Jean-l'Évan- géliste, Montréal, depuis les travaux de construction, arrive au pensionnat, à la grande joie des maîtresses et des élèves des cours gradués, français et anglais.Elle vient leur aider à terminer leur herbier, commencé depuis un an.Dans la soirée, sept jeunes filles sont admises dans la Congrégation des Enfants de Marie.Ce sont Mlles Laudia Thérien, Angela MacDonald, Hermine Michaud, Azilda Lancourt, Rose-Anna Bonin, Philomène Brossoit et Lilian Côté.A ces adolescentes, nous aimons adresser ces paroles de Bossuet: « Vous voulez être Enfants de Marie?Prenez sur vous la Croix de Jésus; robuste doctrine qu'il faut traduire en actes.» Cette fête fut la dernière de l'année scolaire, elle en présageait la fin.L'exposition des travaux manuels: tricot, couture, rapiéçage, fleurs en cire, peinture à l'huile, dessin au crayon et à l'aquarelle, cahiers de devoirs, herbiers, etc., attirèrent les amateurs, huit jours durant; et il en vint de toutes les communautés, maîtresses et élèves! A cette occasion, M.Robitaille, frère de l'ex-lieutenant- gouverneur, fait don, à soeur Marie-de-Sainte-Amélie, d'une collection de volumes très appréciables Le naturaliste canadien, par l'abbé Provencher.Le 14 juin, neuf élèves sont promues au 6e degré de la Milice du Pape, l'Ordre de la Croix.Ce sont: Mlles Thérèse Guertin, Héléna Prévost, Albertine Grothé, Myra Kent, Isabelle Lecourt, Corinne Vaillancourt, Corinne Sénésac et Lillian Côté.M.l'aumônier donne en cette circonstance une allocution sérieuse sur le devoir de la jeune fille chrétienne.« Dans sa famille, elle doit être l'ange du foyer; dans sa vie privée, elle doit faire rayonner la vertu autour d'elle; dans la vie sociale, il faut qu'elle soit un modèle de charité, de bonté et d'amabilité.» 288 AXNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 En outre, les élèves du pensionnat entendent, le 17 juin, sur la demande de la directrice, soeur Marie-de-1'Assomption, une conférence inoubliable sur les devoirs de la jeune fille qui songe à préparer son avenir.Cette conférence est donnée par M.le chanoine Martin, supérieur ecclésiastique, venu à Saint - Laurent pour la fête de mère Marie-de-Saint-Basile, renvoyée au 17 juin, puisque la fête du Sacré-Coeur tombait le 14.Le conférencier place sous les yeux de son auditoire, les devoirs de la jeune fille concernant la vie religieuse, si elle en éprouve l'attrait; concernant la vie conjugale, si elle se croit appelée au mariage.Cette causerie, des plus pratiques, a éclairé les jeunes, sur des points obscurs jusque là, et elles s'en réjouissent.Après le dîner, apparaît au programme de la fête de la révérende mère générale un item tout nouveau.Les contremaîtres, avec leurs ouvriers, se rendent au parloir et après avoir offert leurs respectueux hommages à l'héroïne du jour, ils lui présentent une bourse de cinquante-cinq dollars.M.le supérieur, présent, remercie au nom de mère Marie-de-Saint-Basile, et félicite ces messieurs de leur travail, de leur union, de la bonne entente qui règne parmi eux.Ils acceptent avec bonheur d'assister à la bénédiction solennelle du très Saint Sacrement.Il leur arrive si peu souvent d'entendre les hymnes et les cantiques chantés au couvent!.L'année scolaire touche à sa fin.La fête des prix se déroule le 21 juin; elle est présidée par M.le chanoine Martin; à ses côtés, figurent M.l'aumônier, quatre religieux de Sainte-Croix et M.Lecours, curé de la Longue-Pointe, et les parents des élèves.Le diplôme des cours gradués, français et anglais, sont distribués, avec la médaille d'or qui l'accompagne, à Mlles Alber- tine Grothé, Clara Gosselin, Héléna Prévost, Myra Kent et Thérèse Guertin.Le discours du distingué président réalisa ce que nous en attendions.L'idée dominante est celle-ci: « Mesdames, confiez le soin du ménage à vos grandes filles, qui vous arriveront les bras chargés de volumes dorés.Enseignez-leur la manière de faire de la bonne soupe, à cuire de la bonne viande et à raccommoder le linge, ainsi qu'elles l'ont appris au couvent.Enseignez-leur à 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 289 garder toujours la réserve et la modestie qui les ont rendues si aimables et si belles au pensionnat.En un mot, modelez-les à votre image et ressemblance ».Une salve d'applaudissements suivit ces paroles.Les parents et les élèves se retirèrent le bonheur au coeur; le devoir accompli rend toujours heureux.Les vacances sont ouvertes!.Les chères missionnaires ne viendront pas à la maison mère, puisque nous ne pouvons les loger convenablement; mère Marie-de-Saint-Basile fait allusion à leur absence, quand elle écrit: « Les vacances seront moins belles que par le passé, puisque nous serons privées du plaisir de vous revoir toutes et de jouir, pendant quelques semaines au moins, de la vie de famille ».Elle ajoutait: « Faisons généreusement le sacrifice que Dieu demande de part et d'autre, et offrons-le-lui, afin d'obtenir pour tous les membres de la Congrégation, les grâces spirituelles et temporelles dont ils ont un si grand besoin.Les semaines et les mois passeront rapidement, puis, juillet 1902 nous réunira de nouveau dans la chapelle de Xotre-Dame des Sept-Douleurs, agrandie et embellie ».Le 8 juillet, s'ouvrait la retraite annuelle, prêchée par le R.P.Ruhlman, jésuite.Son auditoire se composait de deux cent trente-quatre professes, novices et postulantes.Cette retraite du docte et pieux prédicateur porta des fruits remarquables.Les supérieures regrettèrent davantage l'absence de tant de missionnaires, dont plusieurs n'auront même pas de prédicateur.Pourtant le Saint-Esprit est toujours là pour soutenir, éclairer et fortifier les bonnes volontés; Il suppléera à tout.Il le peut! Il le veut! Il est bon! La clôture de la retraite se termine par une cérémonie religieuse, présidée par Sa Grandeur Mgr Bruchési.Cinq postulantes prirent le voile blanc, dix-sept novices prononçaient les voeux temporaires et dix-neuf jeunes soeurs émettaient les voeux perpétuels.290 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 Le R.P.Dion, c.s.c, provincial, donna le sermon.Il prit pour texte ces paroles de l'Évangile de saint Luc: « Celui qui aura quitté pour moi son père, sa mère, ou ses champs, recevra le centuple dans le temps et, dans le siècle à venir, la vie éternelle ».En s'adressant aux parents d'abord, puis, aux nouvelles élues, il commenta ce passage avec tant d'éloquence que les larmes coulèrent de bien des yeux.Longtemps, bien longtemps après, on rappelait encore le souvenir de cette prédication.Selon son habitude, la cérémonie terminée, Monseigneur se rendit à la salle commune, où il apprit que les obédiences se donneraient prochainement.Alors, Sa Grandeur parla ainsi aux soeurs professes: « Mes filles, vous partirez bientôt pour vos différentes missions.Quel que soit le lieu où vous serez placées, rappelez- vous que vous trouverez toujours le bon Dieu.Soyez persuadées que sa grâce ne vous fera pas défaut: Il sera toujours prêt à vous recevoir, à vous soutenir, à vous encourager ».Effectivement, deux jours après cette agréable visite, les soeurs recevaient leur mandat pour la prochaine année scolaire: Allez! Enseignez!.les âmes des jeunes vous attendent! Elles partirent, les généreuses missionnaires, et racontèrent à leurs compagnes moins favorisées les consolations et les joies des vacances.III Le jour même du départ des missionnaires, le 22 juillet, une vénérable ancienne, soeur Marie-de-Sainte-Marthe (Chali- foux) reçut les derniers sacrements.La chère soeur ne souffrait d'aucune maladie reconnue; elle mourait de sénilité: la lampe manquait d'huilel.Elle fut remplie de joie en apprenant que la mort était proche.« Oh! que je suis contente, je croyais que le bon Dieu m'avait oubliée ».Elle ne cessa de soupirer après le ciel.« Mon Dieu, quand donc viendrez-vous me chercher?» Les douleurs physiques firent une apparition, et elle les accepta comme elle le fit toute sa vie.« Mon Dieu, comme vous le voudrez! » Ce fut l'unique plainte qu'elle exhala.La vénérable soeur attendit encore huit jours; et le 30 juillet, vers une heure et dix minutes du matin, un changement notable se produisit.La gardienne de nuit donna le signal; et tandis que les soeurs réci- 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 291 taient les prières des agonisants, la mourante s'endormit du sommeil des justes.En paraissant devant son Dieu, elle eût pu dire comme sainte Thérèse d'Avila: « Seigneur, il est bien temps de nous voir! » Née à Sainte-Rose (Laval), le 15 février 1818, soeur Marie-de- Sainte-Marthe comptait quatre-vingt-trois ans d'âge et quarante et une années de vie religieuse.Son emploi de réfectorière lui avait facilité l'union à Notre-Seigneur.Elle vécut toujours en la présence de Dieu; et à l'instar de nos vénérables anciennes, elle suivit la vie commune jusqu'à la fin de ses jours.En agissant ainsi, la chère soeur désirait plaire à Dieu, puis édifier les soeurs; par conséquent, les porter au bien.Par intuition, elle savait qu'édifier est d'une sérieuse gravité, puisque, d'après le R.P.Giraud, « Pratiquer la vie commune, c'est procurer la vraie prospérité de l'Institut ».1 Le 10 du mois d'août, nos chères soeurs Marie-de-Saint- Cyrille (Rodrigue) et Marie-de-Sainte-Claudia (Craven) célébraient leur jubilé d'argent de profession religieuse.Tout se passa dans l'intimité de la famille.Avec elles, nous remerciâmes le Seigneur des grâces répandues sur leur vie, durant ce quart de siècle.Toutes les consoeurs désirèrent, pour ces deux bonnes âmes, cinq fois cinq ans, encore.Le recul des années nous a appris que les voeux se sont réalisés: toutes deux ont célébré leur JUBILÉ D'OR.Présentement, la première est retenue à l'infirmerie, par un commencement de paralysie (1933); la seconde est descendue dans la tombe, depuis le 19 février 1931.Le 12 août, les religieuses eurent le plaisir de recevoir deux soeurs de Sainte-Croix de Notre-Dame-du-Lac, Indiana; mère Marie-Lucrétia, supérieure à Salt-Lake, et soeur Marie-de-Sainte Eugénie, de la maison de Notre-Dame-du-Lac.Toutes deux arrivaient d'Ottawa, où elles avaient passé quelques jours au 1 De l'esprit de sacrifice dans l'état religieux, page 3S3.292 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 monastère du Précieux-Sang.Elles ne voulurent pas quitter le Canada, sans visiter les soeurs de Sainte-Croix, à Saint-Laurent.La première, retenue à la ville pour affaires urgentes, ne put accompagner soeur Marie-de-Sainte-Eugénie ; cette dernière arriva avec une soeur tourière du Précieux-Sang.Soeur Marie-de-Sainte-Eugénie, d'origine française, enseignait sa langue depuis vingt-quatre ans, à Notre-Dame-du-Lac.Sa présence au milieu de nous réjouit tout le monde.Les plus anciennes surtout, trouvèrent une grande similitude de caractère avec notre chère soeur Marie-de-Saint-Bernard (Jolly), décédée en janvier 1875: même gaîté, pleine d'expansion et d'amabilité envers toutes et chacune des religieuses.Le passage rapide de cette bonne soeur éveilla bien des souvenirs; souvenirs heureux et pénibles tout à la fois! Ce n'est pas d'un seul coup, ni par la longueur du temps, que l'on efface de pures et saintes amitiés, formées au pied de la Croix, et cimentées avec le sang du coeur, par le sacrifice.Le lendemain, soeur Marie-de-Saint-André, conseillère générale, et soeur Marie-de-Bon-Secours, doyenne de la communauté, reconduisirent les aimables visiteuses à la ville.Quels délicieux moments a vécu, soeur Marie-de-Bon-Secours, avec cette ancienne, compagne de l'Indiana!.En a-t-elle évoqué des souvenirs!.Comme elle s'est informée des personnes et des choses, rencontrées durant les trente années de son séjour à Bertrand, ou à Notre-Dame-du-Lac.Ces joies ont passé, comme passent toutes les choses instables de ce monde!.Durant cette visite, la bonne soeur tourière du Précieux-Sang se montra d'une simplicité charmante.Elle intéressa les soeurs en les entretenant de nos anciennes élèves entrées dans leur monastère: Mlles Mathilde Massue, de Varennes (soeur du Divin-Coeur); Anne Chaussé (soeur St-Louis de Gonzague) et Mlle A.French, qui n'avait pas encore revêtu l'habit de l'institut.A peu de jours de là, des cours de pédagogie sont inaugurés au Mont Ste-Marie, sous la haute protection de Mgr Bruchési.Ces cours serviront d'orientation au corps enseignant.La direc- 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 293 trice générale des études, soeur Marie-de-Saint-Jean-Berchmans et douze religieuses y assistèrent, durant les huit jours que durèrent les cours.* * * „ Le 20 août, la trentième lettre circulaire de mère Marie-de- Saint-Basile porta dans tous les établissements un compte rendu des événements divers, survenus depuis le mois de juin.Ce fut une compensation à tout ce que les pauvres missionnaires ont perdu des belles fêtes et des salutaires avis, par leur absence de la maison mère.Les vertus propres à affermir l'esprit de notre sainte vocation sont énumérées dans cette lettre: obéissance, charité, esprit de pauvreté, ordre par l'entretien du linge, esprit religieux dans les conversations et la tenue, la discrétion dans sa conduite et dans ses paroles, l'esprit de clôture, ne sortant pas sans une nécessité absolue, application à l'étude, pour les soeurs enseignantes, à quelque degré que ce soit, et fidélité au programme d'étude.Dans la même lettre, mère Marie-de-Saint-Basile appuie fortement sur le soin que toutes les soeurs doivent apporter à la correction de leur langage, sans -préciosité pourtant, mais un langage conforme aux règles de la grammaire, de la politesse et du savoir-vivre.Elle appuie également sur la manie de gesticuler en parlant: « On se croit obligée, dit-elle, d'indiquer à ses interlocuteurs la hauteur, la largeur et la profondeur, il faut tendre le bras, et indiquer, de l'index, le lieu dont on parle.C'est une impolitesse Et ces mouvements sont disgracieux avec le costume religieux.Les demandes de récréation à table sont limitées; les soeurs sont priées de ne pas insister pour obtenir plus que la Règle ne permet.La zélée mère supérieure termine en priant Notre- Dame des Sept-Douleurs de bénir ses avis et celles qui les recevront, en esprit de religieuse soumission.Puis, au revoir, à l'été prochain!.La maison mère, aux murs élargis, se fera accueillante pour recevoir toutes ses filles.* * Mère Marie-de-Saint-Basile profite de la saison des vacances pour visiter, avec l'économe générale, les diverses institutions 294 ANNALES DE LA CONGRÉGATION* 1901 avoisinant la nôtre, et cela, dans le but d'améliorer, s'il y a lieu, les divisions intérieures de la bâtisse qui s'élève assez rapidement.La visite de nombreux membres du clergé et de diverses communautés religieuses apporte une heureuse diversion, au mois d'août plus spécialement.Le 28, M.le supérieur, dont la santé se rétablit, retrouve son zèle accoutumé; il arrive à Saint-Laurent avec M.l'abbé Gauthier; M.le Supérieur reste au couvent pour traiter d'affaires urgentes, le lendemain, avec le conseil général.Le 30, un nouveau prêtre de Sainte-Croix, enfant de la paroisse Sainte-Rose, le R.P.Albert Vanier, frère de notre chère soeur Marie-de-Sainte-Élisabeth, célèbre une de ses premières messes dans notre chapelle.Il a pour servant son frère, Philéas Vanier, novice de la même communauté, lequel prononcera ses voeux le 8 septembre prochain.Les religieuses, amies de cette brave famille, sont heureuses de recevoir une bénédiction du nouveau prêtre et de féliciter l'élu et ses parents du choix de Jésus, pour élever leur fils à la dignité de ministre de l'Évangile.A la fin du mois d'août, saint Joseph, notre premier économe général, apporte à sa protégée, soeur Marie-de-Saint-Romuald, par l'intermédiaire de Madame Breen, mère de soeur Marie-de- Sainte-Hortense, décédée, la jolie somme de cinq cents dollars: Cette bienfaitrice ne mérite-t-elle pas toute notre reconnaissance?Ce don, arrivant à l'époque d'une construction aussi importante, nous paraît envoyé du ciel; oui, saint Joseph veille sur nous!.Que la charitable dame soit bénie!.L'année scolaire 1901-02 s'annonce on ne peut mieux: plus de cent trois élèves arrivent au pensionnat.Vingt jeunes filles font leur entrée au postulat, pour l'essai de leur vocation; bienvenue à toutes et souhaits de bonne formation religieuse pour les aspirantes.Dans la soirée de ce même 4 septembre, M.le Supérieur et M.le chanoine Dauth visitent la communauté et ses dépendances: le cimetière, et les jardins si bien entretenus par les chères soeurs Marie-de-St-Marc, Marie-de-St-Cyrille, Marie-de-St-Léonard-de- Port-Maurice.Cette dernière s'occupait principalement des 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 295 massifs.Tout est bien! Les fleurs et les légumes rivalisent de beauté.Ce soin du jardin, veuf de toutes mauvaises herbes, dénote un travail actif et vigilant.* * Les mois de septembre et d'octobre arrivent avec leur ciel gris; il est assez rare à cette époque que la communauté n'ait pas à enregistrer ou quelque maladie grave ou quelque mortalité, parmi les soeurs.En cette année, une novice, soeur Marie-de- Sainte-Noémi (Elise Massé), retenue à l'infirmerie depuis quelques semaines, reçoit du médecin la pénible nouvelle que son mal est incurable.Pénible?non, la malade entrevoit le ciel.rien de pénible en cela! Elle demande donc et obtient sans peine la permission de prononcer les voeux de religion avant de mourir.Le 6 septembre, le R.P.Dion, supérieur provincial de Ste-Croix, recevait la consécration définitive de la mourante, en présence de l'aumônier, de la révérende mère générale et de quelques soeurs; elle prononça sa formule d'une voix intelligible et avec les accents d'une émotion facile à comprendre.Maintenant, elle ne parle plus que de mourir, d'aller se jeter dans les bras de Notre-Seigneur, avec la robe blanche de son second baptême.Elle remercie toutes les soeurs qui la comblent de soins maternels, elle promet de prier pour la communauté.Le surlendemain, son âme pure s'envolait au ciel ainsi que la petite âme d'un nouveau baptisé.N'est-ce pas l'enseignement de la sainte Eglise ?La profession religieuse est un second baptême.Il y a un an à peine, cette jeune fille, venant de l'Assomption, comté de Témiscouata, sollicitait la faveur d'être admise aux épreuves du noviciat.Durant son postulat, elle avait donné des marques d'une intelligence d'élite; les autorités la classaient au nombre des sujets prometteurs.Les desseins de Dieu ne sont pas les nôtres; peu importe; « ce que Dieu fait est bien fait ».# * La fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs se lève par une température idéale.Les coeurs exultent de joie.Pour la grand'- 296 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 messe, c'est M.le chanoine Vaillant, de l'archevêché, que nous voyons à l'autel, assisté de M.l'aumônier et du R.P.Martel, c.s.c.Le chant est superbe, la bonne soeur Marie-de-Saint-Ber- nard (Dagenais) servit aux âmes religieuses un véritable régal dans le choix des cantiques à la Reine des Martyrs.Dans la soirée, M.le supérieur vint partager avec nous les joies de la famille, il se rendit aussi au noviciat.Les nouvelles postulantes attirèrent surtout son attention.Il les appela, les fit asseoir devant lui et leur parla avec une bonté toute paternelle: « Mes enfants, leur dit-il, dans la carrière que vous avez choisie, il faut vous attendre à beaucoup d'ennuis, de dégoûts, de tentations; mais ne vous découragez pas.Croyez-vous que vos devancières n'ont pas, parfois, versé quelques larmes ?On ne vous demandera pas d'éteindre les sentiments qui sont en vous; si, déjà, vous aviez oublié vos parents, je vous dirais: « Mes enfants, vous n'avez pas de place ici; car la vie religieuse n'est pas une vie sans coeur ».Seulement, que le souvenir de ceux que vous aimez dans le monde ne vous détourne pas trop de la pensée de Dieu dans vos exercices de piété.« Le meilleur moyen de chasser l'ennui, c'est de vous mettre tout de suite au devoir, d'être bien gaies, dissipées même en récréation, mais ne criez pas.surtout, mettez-vous bien chez vous.Du moment que vous êtes admises dans la communauté, vous en devenez les enfants gâtées.On vous demandera peu, mais ce -peu vous paraîtra beaucoup; car il s'agit de renoncer à votre volonté propre.Au noviciat, la balance penche toujours du côté de la mère maîtresse.Vous aurez beau entasser raison sur raison on vous dira: «Ma fille,faites ce que je vous dis, pas autre chose ».« Dès votre réveil, un sacrifice se présente; bien qu'à cette saison, le soleil se fasse plus paresseux, la cloche, toujours à l'heure fixe, ne manquera pas de vous éveiller à cinq heures.Au couvent, il y a toujours une soeur au bout de la corde.« Vous aurez encore à reformer votre caractère, et ce n'est pas un petit travail que d'accepter les tribulations, la croix, les épreuves, que Dieu réserve à ses futures épouses.Comme vous le 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 297 constatez, mes enfants, je ne vous présente pas la vie religieuse sous un aspect riant.J'aurais tort de le faire parce qu'il y a bien des épines, la partie consolante et très enviable dans votre belle vocation, c'est qu'à la fin de la vie, les épines se changent en roses.S'il est parfois dur de vivre en communauté, les bonnes religieuses trouvent qu'il est bien doux d'y mourir.« Efforcez-vous, mes petites soeurs, d'acquérir les vertus de votre saint état, afin que cette communauté, fervente jusqu'ici, le soit encore dans deux ans, dans dix ans, dans trente ans, alors que vous serez toutes professes, et toujours bien disposées à travailler à la gloire de Dieu et au salut des âmes.» Cette exhortation si pratique et d'une si grande actualité se donnait dans le huis-clos du noviciat.A la chapelle, M.Chevrier, prêtre de Saint-Sulpice, prononçait le sermon sur la fête du jour.Le prédicateur développa ces paroles de l'Imitation de Jésus-Christ: « C'est par beaucoup de tribulations qu'il nous faut entrer dans le royaume des cieux ».Il commenta d'une manière claire, précise et convaincante les points suivants: « La souffrance est nécessaire, elle est le cachet de la prédestination et le sceau des âmes d'élite ».« Les plus lourdes croix sont les plus aimées.Sans la souffrance pas de mérites.Pour être méritoire, la souffrance doit être acceptée avec abandon à la volonté divine.Les saints, qui savent apprécier cette perle divine, vont jusqu'à la demander avec transport.Le plus parfait est de recevoir la croix avec joie, amour et reconnaissance.« La souffrance est une école de vertus; elle enseigne l'humilité, à force à'humiliations; la patience, à force de tortures; la charité, en nous apprenant à nous dépenser pour nos semblables ; le détachement, en brisant nos affections les plus chères.Heureuse l'âme que Dieu place à cette rude école!.» La fête se prolongea, dans un congé à nul autre pareil: c'était le 23 septembre ; les pensionnaires et leurs maîtresses se rendirent à Cartierville, par la voie des tramways; là, des voitures les attendaient pour les conduire à Bordeaux, chez MM.G.Coutlée et Audry, parents de quelques élèves.Rien n'a manqué au plai- 298 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 sir, tant les dames ont entouré de délicatesses et de prévenances les joyeuses écolières! * * Cette délicieuse journée n'eut pas de lendemain: la mort planait sur l'infirmerie ; notre chère soeur Marie-de-Saint-Thomas- d'Aquin (Tourangeau), très souffrante d'un cancer, recevait l'Extrême-Onction et le Saint-Viatique, par mesure de prudence.Les fortes douleurs que supportait la pauvre malade eussent pu amener une faiblesse de coeur et causer la mort.Quand on lui annonça les derniers sacrements, elle en éprouva une joie réelle.Cette jeune soeur, qui n'avait gardé dans son coeur d'autres amours que celui de sa famille et de son couvent, et qui n'avait connu d'autres chemins que celui de l'église et de l'école, ne pouvait appréhender de paraître devant son juge; elle attendait le ciel en toute confiance.IV Au mois d'octobre, mère Marie-de-Saint-Basile continue ses visites régulières.Le 14 octobre, elle quittait Saint-Laurent avec soeur Marie-de-Saint-Jean-Berchmans, la directrice générale des études, pour la maison de Redford, dans l'État de New- York.Le même jour, M.le supérieur rentrait d'un voyage auxÉtats- Unis où il avait visité les établissements de Keeseville, Redford, Adams, Vergennes et St-Albans.Bien que notre révérende mère soit absente, il fait part de ses impressions à la communauté.Son compte rendu est réellement consolant: un bon esprit règne partout; MM.les curés estiment beaucoup leurs auxiliaires pour la formation des enfants.« Nos religieuses, avouent-ils, savent répondre aux besoins de la jeunesse ».Cette déclaration est agréable à entendre, mais voici deux lacunes sur lesquelles M.le supérieur attire l'attention des soeurs: 1° les vocations sont peu nombreuses; ne pourrait- on pas les cultiver davantage ?Lorsqu'une maîtresse de classe croit découvrir un germe de vocation, chez une de ses 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 299 élèves, elle doit lui porter une attention spéciale, bien que discrète; l'engager à terminer son cours et lui donner des avis sages et prudents qui éclairent la jeune fille, la confier à la supérieure et à son directeur de conscience ; 2 ° Un autre point, à mon avis, continue M.le supérieur, c'est que les maîtresses devraient obliger les enfants à parler français pendant les récréations, afin qu'ils gardent leur langue.En dehors de l'école, ils ne manqueront pas d'occasions de parler l'anglais.Mes soeurs, n'oubliez pas le principe: « Qui garde sa langue, garde sa foi ».A son retour, mère Marie-de-Saint-Basile écoute avec consolation le compte rendu de la visite de notre supérieur ecclésiastique, que ses conseillères sont heureuses de lui transmettre.* * * Le 3 novembre, nous avons le chagrin d'inscrire un nouveau nom au nécrologe: notre chère soeur Marie-de-Saint-Thomas- d'Aquin vient de terminer son martyre de plusieurs mois.Après la sainte messe, son âme purifiée par les sacrements, par sa patience et son admirable résignation, malgré les morsures atroces du cancer, son âme, croyons-nous, jouira bientôt de la béatitude céleste.La chère soeur, née Mathilde Tourangeau, vit le jour à Yarennes (Verchères); elle entrait au noviciat à l'âge de dix-huit ans.Douée d'un beau caractère, aimable et très joviale, elle savait être sérieuse à son heure.Rien ne lui coûtait, elle se lançait à toutes les tâches, nous pouvions la surnommer « l'entraîneuse du noviciat ».A peine la besogne annoncée, elle était prête; d'un signe de la main: « Venez », les compagnes suivaient.Avec la même ardeur, elle se portait aux exercices de piété; sa foi vive lui montrait Dieu en tout et partout.A la prière récitée près de son lit d'agonie: « Partez de ce monde, âme chrétienne, au nom du Dieu tout-puissant,» elle obéit promptement: il lui tardait tant de jouir de son Dieu!.Aux funérailles, sont présentes: sa soeur religieuse, soeur Marie de Saint-Lucien, R.S.C, et ses deux soeurs de Varennes, Mlles Julie et Joséphine, et quelques membres de sa famille.Les deux demoiselles Tourangeau offrent à notre révérende mère 300 AXXALES DE LA CONGRÉGATION 1901 la somme de cinquante dollars, en témoignage de reconnaissance, et elles ajoutent les honoraires d'un trentain grégorien.Cette famille Tourangeau est inscrite depuis longtemps, parmi les bienfaiteurs de notre couvent de Varennes.Le mois de novembre amène la fête patronale du dévoué supérieur ecclésiastique; les pensionnaires et les soeurs lui ont offert des compliments, des fleurs et des prières.En retour, il présente aux soeurs professes une allocution plus précieuse que les fleurs: c'est un bouquet impérissable, dont nous voulons parfumer nos Annales pour le bénéfice des générations à venii ; nous reproduisons intégralement: « Mes soeurs, je compte beaucoup sur le secours de vos prières, pour m'aider à remplir ma mission au milieu de vous.Sans la bénédiction du Ciel, nous pouvons faire un peu de bruit, peut- être, mais nous ne serons que des cymbales retentissantes.Prions donc chaque jour les uns pour les autres.Ce matin, pendant le saint sacrifice de la messe, j'ai prié pour la révérende mère générale, les conseillères générales, les supérieures locales, les malades, en un mot pour chacune de vous.Au mémento des morts, je ne pouvais oublier celles qui ne sont plus.Je vous engage, mes soeurs, à être généreuses envers vos défuntes; vous accomplissez les prescriptions de la Règle au sujet des suffrages, mais ce n'est là qu'un simple acte de justice; votre affection pour vos soeurs décédées doit vous porter au delà, et à ne jamais exclure leur souvenir de vos oeuvres satisfactoires : prières, sacrifices, travail quotidien; elles vous rendront un jour ce que vous aurez fait pour elles.« Vous toutes qui jouissez encore de la vie, rappelez-vous que vous avez quitté le monde pour mieux vous sanctifier, et le meilleur moyen d'arriver à la perfection, c'est la fidélité aux saintes Règles et à toutes les observances.« En avançant en âge, il est facile de se faire illusion; on peut se croire près du but, tandis qu'on en est encore loin.Oui, mes soeurs, vous aurez toujours besoin de vivre dans la pratique de la pénitence, du sacrifice et de l'abnégation.L'esprit de dévoue- 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 301 ment qui règne dans la communauté est admirable; mais n'oubliez pas, en vous dépensant pour les autres, le soin de votre propre sanctification.Quand l'âge et les infirmités ne vous permettront plus de vous livrer à une vie active, vous consacrerez votre temps à la prière; et n'allez pas croire, alors, que vous êtes des membres inutiles.Oh! non, les anciennes religieuses qui vivent dans une union intime avec Dieu sont des paratonnerres; elles attirent sur la Congrégation les bénédictions du ciel.« Il est un fait que je constate avec bonheur: dans la communauté, les malades sont l'objet d'une tendre et active charité.On n'épargne à leur égard ni peines, ni fatigues; les soins, tels qu'on les donne ici aux malades, sont le véritable cachet du bon esprit qui anime votre Congrégation.« Dans quelques mois, mes soeurs, vous sortirez de l'état de gêne dans lequel vous vivez présentement et vous habiterez de vastes pièces où vous chercherez en vain des ornements.Votre nouvelle maison frappe par son esprit austère; par contre, elle se distingue par sa solidité; ainsi doit être une demeure de religieuses.Puissiez-vous, mes soeurs, parvenir toutes à une vertu solide et vous pénétrer de plus en plus de l'esprit de simplicité et de pauvreté, esprit de votre maison mère sur laquelle doivent se modeler toutes vos autres maisons ».Tel est le bouquet d'immortelles conservé en souvenir de la Saint-Wilbrod, célébrée le 7 novembre 1901.Quelques jours plus tard, les grandes élèves se mettent en frais de donner à la fête du pensionnat (21 novembre) un éclat inaccoutumé.Soeur Marie-de-l'Assomption, directrice, acquiesce à ce noble désir.Après avoir procuré à l'âme sa large part, par l'assistance à la sainte messe, la sainte communion et les cantiques mélodieux, elles préparent pour le dîner un banquet de gala.Il s'ouvre à midi, aux accords des violons et des mandolines.A ce banquet sont gracieusement invitées : la révérende mère générale, soeur Marie-de-Saint-André, la directrice générale des études et tout le personnel enseignant.Le réfectoire est gra- 302 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 cieusement orné, les tables, bien garnies, sont décorées de fleurs et lorsque toutes ont pris leur place désignée, Mlle Maria Bris- sette, présidente des Enfants de Marie, et son assistante, Mlle Katie Smith, donnent lecture des remerciements de trois membres distingués qui n'ont pu se rendre à l'invitation.Dans l'après-midi, à cinq heures, il y a une instruction.Le prédicateur, s'adressant aux Enfants de Marie, les engage à suivre l'exemple de leur céleste Mère; il les met en garde contre l'amour-propre et les plaisirs mondains.« Ne cédez jamais à la tentation d'y goûter, ne fût-ce qu'une seule fois.C'est assez pour causer la mort à votre âme, aujourd'hui si belle et si pure.Dans les familles chrétiennes, les plaisirs honnêtes ne manquent pas.On ne veut pas faire de vous des trappistines, mais des jeunes filles modèles et sérieuses.« Profitez bien de votre séjour au pensionnat pour détruire, ou tout au moins, pour affaiblir votre respect humain.Il est cause de tant de naufrages dans la vertu.Oui, mesdemoiselles, guerre sans relâche au respect humain!» Pour clore cette belle journée, une soirée récréative a été préparée par les élèves, sans le secours des maîtresses: tout le personnel enseignant est invité.Le succès dépasse l'attente, les figurantes ont présenté de tout: du sérieux, du comique, des pièces de morale, des récits instructifs; c'est une soirée, comme les jeunes filles judicieuses et cultivées savent en préparer.Le programme se termine à neuf heures, par un réveillon servi au réfectoire.La joie continue dans un sommeil paisible et des rêves dorés.A la Sainte-Catherine, deux religieuses des SS.NN.de Jésus et de Marie, d'Hochelaga: soeur Alexandrine et soeur Joséphine, avec cinq de leurs graduées, passent l'après-midi au couvent.Les religieuses sont invitées à visiter la maison neuve et le pensionnat, nos graduées amusent agréablement les jeunes visiteuses.Dans ces aimables rencontres, de jeunesse à jeunesse, il se forme parfois des liens sérieux qui se conservent à travers la vie et font du bien.Quelle douce et rare chose qu'une amitié fidèle, pieuse et durable! Ce que nous savons, c'est que le 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 303 souvenu- de ce 25 novembre vit encore dans le fond de certains coeurs.* * Le 8 décembre procurait à quelques élèves un bien grand bonheur.Mlles Blanche Prévost, Rose Léonard, Hélène Deschamps, Teresa Doyle, Emma Cléroux, Marie-Louise Joron plaçaient leur jeunesse et leur vie sous la bannière de la Vierge Immaculée.Dans l'allocution prononcée à l'occasion de cette fête, le prédicateur fit un heureux rapprochement avec le jour de leur première communion et celui de leur entrée dans la Congrégation des Enfants de Marie.Il s'exprimait ainsi: « Il fut un jour, encore assez près de vous, mes chères enfants, jour d'ineffables joies, où vous receviez pour la première fois le pain eucharistique, puis, au soir de cette belle journée, vous vous agenouilliez au pied de l'autel de Marie pour redire à cette bonne Mère: « Je me consacre à vous à jamais ».Ce soir, votre consécration est plus solennelle, vos engagements sont plus graves et vous obligent à imiter de toutes vos forces les vertus de votre sainte Mère.Que votre piété virginale brille d'un vif éclat; et toujours, toujours, fuyez le péché, même véniel volontaire.Si vous êtes fidèles à remplir les engagements que vous venez de contracter, soyez assurées que la Vierge très pure protégera, bénira vos études et éloignera de vous les dangers qui se rencontrent sur le chemin de la vie et, un jour, elle vous introduira dans le ciel.» * * Le 11 décembre M.l'abbé Moulin, aumônier, ouvrit les exercices de la retraite préparatoire à la vêture et à la profession.Cette fête solennelle revêtit en cette année un éclat inaccoutumé.Deux évêques nous honoraient de leur présence: nos Seigneurs Bruchési et Decelles, évêque de Saint-Hyacinthe.Ils arrivèrent dans l'après-midi du 19 décembre et furent reçus par le conseil général.Un quart d'heure plus tard, les augustes prélats entraient dans la salle de réception : Mlle Maria Brissette présenta l'adresse de bienvenue, interprète des sentiments qui se pressaient 304 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 dans les coeurs; car une telle visite marque un grand jour dans la vie des jeunes pensionnaires.L'adresse terminée, quelques petites s'avancent vers Monseigneur Bruchési et lui confient dans un langage enfantin: Monseigneur, nous vous aimons beaucoup; si vous nous aimez autant, voulez-vous nous donner un congé ?La demande est exaucée sans retard.Mgr Bruchési adressa aux élèves des paroles de bienveillance, dont son coeur est toujours rempli.Mgr De- celles ajouta des mots spirituels et pleins d'à-propos.Ensuite les deux évêques entrent dans les rangs: signal d'un complet désarroi; adieu les rangs symétriques!.Les petites spécialement, comme une vague, déferlent sur les bons évêques qui se montrent on ne peut plus paternels.Finalement, Mgr Bruchési demande une déclamation.Mlle Armandine Cadieux se présente et récite « Le Pater de saint François de Sales ».Durant plusieurs semaines, il ne fut question, dans les heures de détente, que de la visite et de l'affabilité des deux évêques.Dans l'après-midi, se déroulait à la chapelle l'imposante cérémonie de la vêture et de la profession; Mgr Bruchési présida la fête et Mgr Decelles occupait un trône spécial.Monseigneur l'évêque de Saint-Hyacinthe était amené à Saint-Laurent, pour honorer de sa présence sa chère filleule, soeur Marie-des-Archan- ges (Cécile Dansereau), admise à la profession temporaire, avec douze compagnes.MM.les curés J.-B.-H.-V.Milette de Nashua et Charles Milette de Magog, oncles maternels de la jeune soeur, remplissaient les fonctions d'assistants; une vingtaine de prêtres prirent place au choeur.La nef se remplit à sa capacité.Mgr Bruchési donna le sermon: «Venez, suivez-moi», ces trois paroles de Notre-Seigneur furent développées par l'orateur, avec toute l'éloquence que nous lui connaissons.Il fit passer devant l'auditoire la belle page d'Évangile où il est parlé de la vocation des Apôtres et de la nôtre.Il démontra que Notre-Seigneur se sert encore aujourd'hui des mêmes moyens pour attirer à Lui les âmes privilégiées qu'il destine à une mission particulière dans son Église.Mgr Decelles donna la bénédiction du Saint- Sacrement.Le soir, Sa Grandeur Mgr Decelles retourna à Montréal avec les autres prêtres, après une visite au collège; Mgr Bruchési 1901 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 305 revint au couvent et demeura l'hôte de l'aumônier pour la nuit.Le lendemain, Monseigneur célébra la messe de communauté; après son déjeuner, il visita les malades; et le reste de la matinée, il reçut au salon les soeurs qui désiraient ses lumières et ses conseils.Pendant la récréation du midi, Monseigneur poussa la condescendance jusqu'à se rendre chez les ouvriers pour les bénir et causer avec eux.On eût dit un bon père au milieu des siens.Ces braves chrétiens se souvinrent longtemps de la condescendance de leur évêque.Ce jour-là, encore, Monseigneur fit des heureux.Sa Grandeur revint chez les soeurs professes, au cours de l'après-midi du 20 décembre, et leur parla avec sa douceur et sa charité coutumières.Nous extrayons de son bienveillant entretien les avis les plus pratiques.Monseigneur annonce aux soeurs qu'il n'a pas l'intention de faire la visite pastorale dans le moment; cette fois, il ne verra que les soeurs qui auraient quelque chose à lui communiquer ou à lui demander.Puis, Sa Grandeur continue: « Je me propose de faire la visite pastorale, à la fin de janvier ou au commencement de février.Cette visite s'ouvrira d'une manière solennelle selon le Rituel, avec la croix et la bénédiction, le chant des psaumes, la visite des autels, comme on le fait pour la visite pastorale dans les paroisses.» Sa Grandeur indique ce que chaque soeur devra préparer, à savoir : des notes écrites que Monseigneur lira, et la soeur donnera les explications nécessaires; de cette manière, les choses se feront vite et au contentement de chacune.Monseigneur exhorte à la charité, à la discrétion et annonce qu'il convient de préparer le Chapitre général par la prière, la mortification et un abandon absolu à la bonne Providence.« Rappelez-vous, ajoute- t-il, ces paroles de Notre-Seigneur : « Ne craignez pas, petit troupeau, de quoi pourriez-vous vous inquiéter lorsque Dieu se charge de vos plus chers intérêts?» Et ces autres paroles sur lesquelles sainte Thérèse aimait à s'appuyer dans les circonstances difficiles: « Dieu sait tout, il peut tout et il m'aime ».« Maintenant, mes filles, vous est-il permis de vous entretenir du prochain Chapitre général?Oui, sans doute, pour des points à modifier dans les usages de la communauté.Vous pouvez, par exemple, comme on vous l'a demandé, faire des observations 306 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1901 sur les Constitutions, examiner ensemble ce qu'il y aurait de mieux à faire pour tel point, dont la pratique laisse à désirer, et soumettre ces questions au Chapitre général.» De la salle, Monseigneur se rendit à la chapelle pour conférer le sacrement de Confirmation à Mlle Fannie Bailey, âgée de seize ans.Elle avait été baptisée privément, le matin, par M.l'aumônier.Elle recevra la sainte communion le jour de Noël, à la messe de minuit.Sa Grandeur quitta la maison mère à deux heures et trente minutes.Le souvenir de sa visite s'imprima fortement dans les mémoires et, de là, dans notre histoire.En guise d'étrennes, mère Marie-de-Saint-Basile envoya dans tous les établissements une copie de cette substantielle allocution.Elle réjouit, éclaira et consola les chères missionnaires.CÉRÉMONIES RELIGIEUSES DE L'ANNÉE 1901 VÊTURE—le 29 janvier: Mlles M.Bossé S.M.-de-S.-Séraphie C.Taillefer S.M.-de-S.-Jean-Baptiste-de-la-Salle E.Massé S.M.-de-S.-Noémie A.McDonell S.M.-de-S.-Donalda A.Baillargeon S.M.-du-Sauveur C.McCormick S.M.-de-S.-Thècle L.Cadieux S.M.-de-S.-Clémentine C.Vanier S.M.-de-S.-Elisabeth M.Lachapelle S.M.-de-S.-Joseph-de-la-Croix R.Demers S.M.-de-S.-Pacifique C.Thériault S.M.-des-Cinq-Plaies M.L.Corbeil S.M.-de-S.-Anthime H.Poitras S.M.-de-S.-Laure D.Carrière S.M.-de-S.-Césarie M.Châtillon S.M.-de-S.-François-Xavier A.Gingras S.M.-de-S.-Léopold VOEUX TEMPORAIRES — le même jour: S.M.-de-S.-Raymond-de-Pennafort (Lachapelle) S.M.-de-S.-Jean-d'Avila (Goyette) DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 307 S.M.-de-S.-Esther (Lame) S.M.-de-S.-Pierre-Damien (Godin) S.M.-de-S.-Juliette (Cantin) S.M.-de-S.-Céline (Laberge) S.M.-de-S.-Agathange (Lemelin) S.M.-de-S.-Elise (Chartrand) S.M.-de-S.-Théotiste (Thériault) VOEUX PERPÉTUELS — le même jour: S.M.-de-S.-Ambroise (Ouimet) S.M.-de-S.-Augustine (Lizotte) VÊTURE — le 17 juillet: Mlles B.Raymond S.M.-du-Bon-Conseil B.Egan S.M.-de-S.-Guillaume d'York A.Bergeron S.M.-de-S.-Constantin H.Bergeron S.M.-de-S.-Magloire VOEUX TEMPORAIRES — le même jour: S.M.-de-S.-Laurent-Justinien (Ruel) S.M.-de-S.-Georgina.(Custeau) S.M.-de-S.-Louise-de-Savoie (Lachapelle) S.M.-de-S.-Marguerite-de-Cortone (O'Brien) S.M.-de-S.-Wilbrod (MacDonald) S.M.-de-S.-Marcelline (Sanche) S.M.-du-Précieux-Sang (Chisholm) S.M.-de-S.-Florent (Dufort) S.M.-de-S.-Lucille (Chaussé) S.M.-de-S.-Mildred (Kennedy) S.M.-de-S.-Victorine (Robert) S.M.-de-S.-Célestine (Lévesque) S.M.-des-Chérubins (Michaud) S.M.-de-S.-Octavien (Poitras) S.M.-de-S.-Mathias (Desjardins) S.M.-de-S.-Valérien (Lafosse) 308 ANNALES DE LA CONGRÉGATION VÊTURE — le 19 décembre : Mlles G.Richard L.Larue C.Horan E.Comptois.M.Harrington.A.Robert M.McCormick.R.-L.Gaudet.C.Gauthier.M.McDonell.E.Martel G.Duval P.Perreault A.Valiquette .R.-M.Gadbois.S.M.-de-S.-Jude S.M.-de-S.-Omer S.M.-de-S.-Ida S.M.-de-S.-Hugues S.M.-de-S.-Héléna S.M.-de-S.-Godefroy S.M.-de-S.-Rita S.M.-de-S.-Agnès-de-Jésus S.M.-de-S.-Judith S.M.-de-S.-Philippe-Bémti .S.M.-de-S.-Emmanuel S.M.-de-S.-Emery S.M.-de-S.-Elzéar S.M.-de-S.-Zacharie .S.M.-de-la-Résurrection VOEUX TEMPORAIRES—le même jour: S.M.-de-S.-Joseph-Calasanz (Lauzé) S.M.-des-Archanges ^Dansereau) S.M.-de-l'Ascension (Boucher) S.M.-de-S.-Alda (Dubé) S.M.-de-S.-Conrad (LapierreJ S.M.-de-S.-Sara (Lanctôt) S.M.-de-S.-Jeanne (Richard) S.M.-de-S.-Marcella (Brodeur) S.M.-de-S.-Joseph (Laporte) S.M.-de-Lourdes (Robert) S.M.-de-S.-Charles-Borromée (Deranleau) S.M.-de-S.-Emérence (Cyr) S.M.-de-S.-Guillaume (Forget) S.M.-de-S.-Janvier (Belisle) VOEUX PERPÉTUELS—le même jour: S.M.-de-S.-Donatien (Valiquette) VOULEZ-vous RÉUSSIR PLEINEMENT DANS L'ART DE FORMER LES ENFANTS À LA VERTU?TRAVAILLEZ, SACRIFIEZ-VOUS ET PRIEZ AVEC FOI ET CONFIANCE.FIXEZ VOS REGARDS SUR VOTRE DIVIN MODÈLE ET NE LAISSEZ PAS AFFAIBLIR EN VOUS LA GRÂCE DE VOTRE VOCATION.T.R.P.Moreau CHAPITRE NEUVIEME SOMMAIRE: 1902 —• Les voeux de M.l'aumônier — La lumière électrique dans le couvent — Mgr Bruchési aux États-Unis — Messe à l'infirmerie — Salle de communauté transformée en chapelle —• Mère Marie-de-Saint- Basile annonce la visite pastorale de Monseigneur — Le 18 février, Mgr Bruchési arrive au couvent — Allocution, réception chez les élèves — Monseigneur au pouvoir électrique, puis dans les salles de récréation — Le lendemain, Sa Grandeur se rend dans les classes — Dix-septième anniversaire de prêtrise de l'aumônier — ACTE de visite de Monseigneur l'archevêque — Visite de trois religieuses de la Congrégation Notre-Dame — Fêtes de saint Joseph et de saint Gabriel.II LE FEU! LE FEU! — Le déménagement — Religieuses de la Sainte- Famille et de la Providence donnent des leçons — Vendredi saint — Pâques — Élection des députées — Visiteurs —• L'académie Laurier — JUBILÉ d'argent sacerdotal du R.P.Dion, c.s.c.— Visite de Mgr Gauthier, archevêque de Kingston — Maladie de soeur Marie-de-Sainte- Catherine-d'Alexandrie , sa mort — Demande de fondation — Une longue corvée — Quelques bienfaiteurs — JUBILÉ sacerdotal de M.Hétu — La fête de saint Basile — Une fête pour nos employés — Visite de Mgr Lorrain — Le R.P.Nolin — Mgr Racicot — La fête des prix — Ouverture du Chapitre général par Mgr Bruchési —• Le nouveau conseil.Selon l'usage traditionnel la supérieure générale et son conseil se rendent chez M.l'aumônier, à la première heure convenable, pour lui offrir leurs hommages et leurs voeux de bonne aimée.Quelques minutes plus tard, M.l'abbé Moulin, aumônier, entrait dans la salle commune.Mère Marie-de- Saint-Basile se fit l'interprète de toutes; elle formula des souhaits sincères, remercia le bon Père de son zèle délicat et prudent dans la conduite des âmes et lui exprima notre désir de voir son séjour se prolonger au milieu de nous.M.l'aumônier répondit à peu près en ces termes.« Ma révérende Mère, je vous remercie des bienveillantes paroles que vous m'adressez; 312 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 je vous souhaite, et à vous toutes, mes soeurs, une bonne et sainte année.Le prêtre est un peu comme les religieuses, il quitte tout pour suivre l'appel divin et se dévouer au salut des âmes confiées à ses soins.<( Lorsque je suis arrivé au milieu de vous, je ne vous connaissais pas; mais mon désir était de vous faire le plus de bien possible.S'il n'est pas dans mes attributions de m'occuper de vos affaires temporelles, je puis dire que je m'intéresse beaucoup à votre sanctification et à vos progrès dans la vertu.Ce matin, à la sainte messe, que j'ai dite pour votre communauté entière, j'ai demandé au bon Dieu de vous bénir, de bénir vos oeuvres et vos missionnaires qui se dévouent avec tant de générosité.« Cette année sera pour vous, mes soeurs, une année des plus importantes; j'ai donc un souhait tout spécial à vous adresser.Je l'emprunte à Notre-Seigneur Jésus-Christ: « Mon Père, qu'ils soient un comme vous et moi nous sommes Un.» Que l'esprit d'union et de charité continue à régner parmi vous, et le voeu de Notre-Seigneur se réalisera en votre faveur.» Ces paroles étaient une allusion au Chapitre général qui se tiendrait en juin prochain.Un Chapitre général dans une communauté est un événement de haute importance; il convient de le préparer avec l'assistance du Saint-Esprit.Des visiteurs nombreux, des changements d'obédience occupèrent une partie du premier mois de l'année.Le 13, mère Marie-de-Saint-Basile adressa dans les missions sa 29e circulaire.Nous en extrayons la pensée suivante : « « Il y a quelques jours, M.notre supérieur ecclésiastique nous disait: « Mes soeurs, voulez-vous être heureuses en communauté ?Attachez-vous de plus en plus à l'observation de vos saintes Règles, et efforcez-vous de vivre dans la paix et l'union.» Mes bien chères filles, je ne puis rien dire de mieux que ces paroles.Oui, puissiez-vous remplir toujours avec un redoublement de courage et de générosité, les promesses faites à Dieu, au jour béni de votre profession religieuse; surtout, oh! surtout, puissiez-vous vous bien aimer les unes les autres, supportant avec calme et douceur les contrariétés journalières et, 1902 DES SOEURS DE SAIXTE-CRO IX 313 pardonnant du fond du coeur, celles que l'on pourrait vous causer.Et si nous sommes fidèles à tous nos devoirs, si la charité règne parmi nous, bonne, joyeuse et sainte sera la nouvelle année.L'événement le plus saillant de ce mois de janvier 1902, c'est l'installation de la lumière électrique dans le couvent.Le 14, les lampes à pétrole sont distribuées comme à l'ordinaire, à l'heure de l'étude, au pensionnat.Les maîtresses, seules, sont prévenues que la lumière électrique fera son apparition lorsque les élèves, inclinées sur leurs livres, seront absorbées dans leur travail.Le secret est bien gardé, afin de ménager une surprise pour constater l'effet; l'aumônier, la supérieure et plusieurs maîtresses libres se placent, en spectateurs.Le coup réussit, on ne peut mieux: des oh!.des ah!.des applaudissements retentissent dans toutes les pièces.Alors, adieu l'étude!.Il s'agit de jouir de l'apparition lumineuse].Cette amélioration plaît autant aux maîtresses qu'aux élèves.Quelle corvée que ce nettoyage journalier d'une centaine de lampes et plus, suivi de la distribution dans les appartements! Sans compter que la lumière électrique est de beaucoup supérieure à l'autre.Hélas!.0 instabilité des choses humaines!.Où donc est l'enthousiasme provoqué par l'apparition de la première lampe à pétrole succédant, en 1864, à l'antique et vénérable chandelle de suif?.Tout passe!.et, tout se perfectionne.* * * Vers la fin de janvier, la supérieure générale communique aux soeurs professes les bonnes nouvelles reçues de quelques maisons des États-Unis.D'abord de Springfield, Mass., on écrit: « Mgr Bruchési, en voyage de santé aux États-Unis, nous honore d'une visite.Sa Grandeur arrive à l'improviste et entre par la porte de l'école, conduit par M.le curé et accompagné de M.l'abbé Georges Gauthier, de l'archevêché de Montréal.1 1 L'abbé Georges Gauthier est aujourd'hui archevêque-coadjuteur de Montréal (1933).314 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 M.le curé amène les distingués visiteurs dans une classe où la supérieure, soeur Marie-de-Sainte-Thérèse (McMahon), présidait un examen.Il est facile de se représenter la joyeuse surprise occasionnée par l'arrivée soudaine de tels visiteurs.Monseigneur s'en amuse beaucoup.Il se rend dans toutes les pièces et cause avec les élèves selon sa coutumière aimable simplicité; il adresse de bonnes paroles aux maîtresses, et.c'est déjà l'adieu!.Cette visite, trop rapide, jette un voile de tristesse sur toutes les physionomies.Quoi! c'est tout?Déjà parti?.et les maîtresses retournent à leur classe le coeur gros.Il eût été si doux de causer quelques moments de plus, avec notre archevêque; nous le savons si intéressé à nos oeuvres.Et de notre chère maison mère, n'aurait-il pas eu quelque chose à nous dire ?.La maison d'Adams reçoit aussi la même visite extraordinaire.Cette fois, Monseigneur est annoncé et une jolie réception a été préparée: morceaux de piano, chant et adresse.Monseigneur remercie et donne de précieux conseils sur l'importance de la formation morale et intellectuelle; et la conversation s'engage, entre Monseigneur l'archevêque de Montréal et son jeune auditoire.M.le curé Triganne est présent, de même l'abbé Georges Gauthier, ainsi que le vicaire de la paroisse et soeur Marie-de-Sainte-Christine (Kernan), supérieure.Les élèves sont tout yeux et tout oreilles, afin de bien saisir la question de l'évêque.« Allons! dit Monseigneur, qui veut faire une soeur?» Trente mains se lèvent, garçons et filles.«Qui veut faire un prêtre?» Les mêmes mains se lèvent, de nouveau, et Monseigneur et les messieurs de rire à plein coeur.Aux garçons, seulement: « Qui veut faire un évêque?» Tous seront évêques.Encore aux garçons: «Qui veut faire une soeur?» Hélas, le nombre a diminué de beaucoup: il n'y en aura qu'une dizaine! De l'école, Monseigneur et sa suite retournent au presbytère.Après le dîner, Monseigneur revient au couvent s'entretenir avec les soeurs des choses de Montréal, puis, la supérieure le conduit dans toutes les pièces.Sa Grandeur admire la propreté et le bon goût qui a présidé à cette construction.Ensuite, il se met à la disposition des soeurs qui désirent ses pieux conseils.La charité, la condescendance, la touchante bonté de notre I 1902 DES SOEURS DE SAIXTE-CROIX 315 archevêque, ne surprennent personne.Durant plusieurs années, les témoins privilégiées racontèrent aux nouvelles venues, et dans tous les détails, la visite extraordinaire de Mgr Bruchési.Mère Marie-de-Saint-Basile parle aussi de la visite canonique de Mgr Harkins, évêque de Providence, dans nos trois maisons de New-Bedford: Sa Grandeur a suivi à la lettre le cérémonial de notre « Directoire spirituel »; Monseigneur accorde aux soeurs une audience privée, il visite les classes en compagnie de MM.les curés et des supérieures respectives.Sa Grandeur félicite les religieuses de la bonne discipline qu'elle remarque partout et de l'esprit religieux dont chacune est animée.En fait, le noble et charitable visiteur a remarqué que les maîtresses ont besoin d'être animées d'un zèle généreux: les salles de classe sont ou trop exiguës ou trop vastes; dans le premier cas, les élèves sont entassés et manquent d'air; dans l'autre, la maîtresse fatigue sa gorge et épuise ses poumons; donc, les santés se détruisent.Monseigneur a tout compris à première vue, et c'est ce qui provoque son admiration.Si la paternelle sympathie du premier pasteur du diocèse ne remédie pas au mal, elle apporte une consolation dans les privations inhérentes à la vie de missionnaire.* * Le 2 février, une délicatesse du bon Dieu réjouit nos chères malades: à cause des travaux d'agrandissement faits à notre chapelle, la nouvelle salle de communauté est aménagée pour toutes les cérémonies du culte.C'est là que la sainte messe sera célébrée chaque matin.Donc, nos malades ne pourront jamais s'y rendre! Pour obvier à cette grande privation, le Ciel intervient encore.En cette fête de la Purification, le R.Père Leblanc, as.a, professeur au collège Saint-Laurent, célèbre dans une pièce de l'infirmerie sur un minuscule autel.Les chères privilégiées du royaume de la souffrance en ressentent une douce consolation.La même faveur se renouvellera le dimanche, le mercredi et le vendredi de chaque semaine, grâce aux bons 316 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 religieux de Sainte-Croix, toujours prêts à se déranger pour le bien des âmes.* * * Le 8 février, soeur Marie-de-PAssomption, directrice du pensionnat, invite le R.Père Nolin, S.J., à enrôler dans les différents degrés de la « Milice du Pape » soixante élèves préalablement préparées.Les pieux souvenirs de la retraite de septembre, prêchée par le même bon Père, reviennent à l'esprit et les récipiendaires goûtent un double bonheur envié par leurs compagnes.Mère Marie-de-Saint-Basile invite le bon Père à passer à la salle de communauté, pour y donner une conférence spirituelle; il entre à l'heure convenue.« Mes soeurs, dit-il, votre mère supérieure m'a fait grand plaisir, en m'invitant à vous adresser la parole.Comme c'est l'heure de votre lecture spirituelle, je vous donnerai un sermon en trois points ».Voici quelques pensées recueillies par les auditrices: « La perfection, dans la vie spirituelle, est comparée à un édifice que l'on élève; cet édifice sera solide si ses fondements reposent sur le roc; au contraire, il s'écroulera bientôt, si ses assises ne s'appuient que sur le sable.De même, si l'édifice de notre perfection ne s'élève pas sur des bases solides, il sera renversé au premier vent de la tempête, au premier souffle de la tentation.Le véritable fondement, c'est Jésus-Christ; lui-même est la pierre angulaire de la sainte Église.« L'âme religieuse est appelée épouse de Jésus-Christ et elle l'est réellement.Or, une épouse doit s'appliquer en tout à plaire à son époux.Ainsi, l'âme consacrée à Dieu doit sans cesse avoir les yeux fixés sur son époux, Jésus, être attentive au moindre signe de sa volonté, et retracer en elle les vertus dont II est le parfait modèle.L'imitation de Jésus-Christ est donc l'essence de la perfection religieuse.» Avant de se retirer, l'ardent apôtre du Sacré-Coeur engage les soeurs à rester fidèles au TRÉSOR, à ne pas le considérer comme une minutie: « C'est un moyen efficace, ajoute-t-il, pour augmenter la perfection de la charité, par la pureté de.s intentions ».1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 317 Dans la soirée du même jour, le chemin de la croix est érigé dans la chapelle, fraîchement restaurée; point d'autre cérémonie que la lecture du décret de Monseigneur de Montréal permettant l'érection.M.l'aumônier bénit les croix selon la formule du Rituel.Le 12 février, mère Marie-de-Saint-Basile annonce à la communauté que Mgr Bruchési ouvrira la visite pastorale le 19 du courant.Heureuse nouvelle! comme toutes les soeurs lui font un chaleureux accueil!.Les désirs ne sont pas déçus.Le 19 au soir, alors que la communauté est réunie à la chapelle pour la visite au Saint-Sacrement, la vieille cloche, notre chère vieille cloche, alors encore dans sa cage aérienne, sonne à toute volée pour annoncer l'arrivée de Monseigneur, le visiteur canonique.Le conseil général descend aussitôt pour souhaiter la plus respectueuse et la plus cordiale bienvenue à celui qui vient à nous comme le représentant du Christ Jésus.Le R.Père Dion, supérieur provincial de Sainte-Croix, et deux de ses religieux, viennent présenter leurs hommages à Monseigneur, et M.l'aumônier les retient pour le souper.Monseignear profite de la récréation du soir pour arrêter, avec notre révérende mère générale, l'heure des diverses cérémonies de la visite pastorale.Le lendemain, tout est prêt.La chapelle a revêtu sa fraîche toilette blanche; les autels sont ornés de lis et de verdure sur lesquels brille le nouveau luminaire électrique; dans la nef, l'uniforme blanc des élèves contraste avec le sombre voile des soeurs professes; c'est une autre parure, et non la moins élégante.A six heures et demie, entrée solennelle de Monseigneur à la chapelle, Sa Grandeur est accompagnée des RR.Pères Dion, Hébert et de M.l'aumônier.La confirmation de quinze petites pensionnaires qui n'ont pas encore fait leur première communion précède la sainte messe.La cérémonie terminée, l'archevêque, au pied de l'autel, prononce YIntroibo ad altare Dei; les soeurs sont saisies d'une vive émotion, la circonstance est solennelle, le profond silence de la chapelle remue les coeurs.Bientôt, les cantiques pieux se 318 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 font entendre et aident la prière à monter vers le Dispensateur des grâces et des bénédictions.L'ouverture de la Visite a lieu à huit heures et demie.De nouveau, la communauté se rend au pied de l'autel.Monseigneur, en rochet et en camail, agenouillé dans le sanctuaire, récite le Vent Sonde Spiritus et se lève pour la récitation des prières indiquées au « Directoire spirituel ».Ensuite, le vénéré prélat entretient les soeurs du prochain Chapitre général.Comme la Congrégation n'est pas encore divisée en provinces, Monseigneur indique la conduite à tenir en pareille occurence.Il a écrit à Rome pour solliciter des directions précises, il a même proposé une manière d'agir.La Sacrée Congrégation a répondu aussitôt; Monseigneur engage les soeurs à se soumettre humblement à tout ce qui sera décidé par cette suprême autorité, que nos désirs soient réalisés ou non; et le docte visiteur continue ainsi: « Mes Filles, « Je viens au milieu de vous faire ma visite pastorale.Cette visite est un temps de grâces et de bénédictions; alors se réalise particulièrement cette parole de Notre-Seigneur: « Là où plusieurs seront assemblés en mon nom, je serai au milieu d'eux.» En tout temps, l'évêque a le pouvoir d'accorder quarante jours d'indulgences, mais à l'occasion de la visite pastorale, il peut accorder une indulgence plénière que vous pourrez gagner l'un de ces jours, d'ici à dimanche, moyennant les conditions ordinaires, c'est-à-dire, confession, communion et prières aux intentions du Souverain Pontife.« La visite pastorale, la foi nous le dit, c'est comme le passage de Notre-Seigneur dans la personne de son représentant : « Comme mon Père m'a envoyé, je vous envoie ».L'évêque, en qualité de prêtre parfait, a tous les pouvoirs; c'est au nom de Notre- Seigneur qu'il prie, qu'il parle, qu'il console.« Le divin Maître a dit cette parole, belle entre toutes: « Venez à moi, vous tous qui souffrez, et je vous consolerai ».Par un miracle de sa puissance et de son coeur, Jésus-Christ donne à son représentant le pouvoir d'opérer des merveilles.Pendant la visite pastorale, ce n'est pas moi qui vous parlerai, c'est Jésus-Christ.Aussi fera-t-Il lui-même son oeuvre, nous 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 319 ne ferons que Le remplacer; c'est Lui qui éclaire les esprits, relève les volontés, console les coeurs.« Mes Filles, ce n'est pas dans la vie de communauté que se rencontrent les grandes douleurs.Pour en juger, il faut avoir reçu les confidences des personnes du monde; vous ne connaissez pas leurs peines et vous ne les connaîtrez jamais: les vôtres sont légères en comparaison des leurs.Vous avez vos croix, il est vrai, car, même en communauté, il faut souffrir.Une vie sans croix n'est pas une vie religieuse, ce n'est pas même une vie chrétienne.Le bon Dieu permet que nous ayons des croix, afin que nous nous approchions de Lui: ce sont les croix qui nous sanctifient.Parfois, elles paraissent lourdes à la faiblesse de notre nature; et il n'est pas étonnant qu'alors nous éprouvions le besoin d'épanchement et de consolation.Jésus lui-même, au jardin de Gethsémani , va trouver ses trois apôtres privilégiés: Pierre, Jacques et Jean.Il leur a dit qu'il souffrait, qu'il était triste jusqu'à la mort.Jésus voulait nous montrer par là qu'il est permis, dans les peines, d'aller chercher force, consolation et courage.« Je vais toutes vous voir, mes soeurs, même les novices et les postulantes.Les jeunes diront peut-être: « Je n'ai rien à dire ».Savez-vous, mes Filles, que ces simples mots ont leur signification?Si vous n'avez rien à dire, c'est que tout va bien.Alors, vous êtes des enfants gâtées, des enfants que le bon Dieu traite avec des confitures.Venez!.vous n'aurez pas d'examen à passer.La visite vous fournit l'occasion de recevoir la bénédiction de votre archevêque.» Après cette allocution, Monseigneur se rend au salon et voit les soeurs privément, jusqu'à l'heure du dîner.Dans l'après- midi, les malades reçoivent la même faveur.La réception chez les élèves se donne à cinq heures.La salle est décorée de gracieux festons de lierre, des tentures blanches et vertes, des feuillages dispersés, ici et là.C'est le printemps en février!.Les armes de Monseigneur figurent au fond de la pièce; de chaque côté, les dates 1855-1878, 1897- 1902; et le souhait de bienvenue: Benedictus qui venit in nomine Doinini, apparaissent enguirlandés de verdure; le tout illuminé d'ampoules électriques.Le programme consiste en un morceau 320 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 d'orchestre, des souhaits de bienvenue par sept fillettes; un chant et une offrande de fleurs naturelles.Le clou de la fête, dit-on, c'est l'hommage que rendent à Monseigneur trois personnages allégoriques: « La Religion, l'Éducation, la Patrie ».Ces personnages, représentés par trois jeunes filles, rappellent à Sa Grandeur les époques les plus mémorables de sa vie.Les sentiments de vénération, d'amour et de reconnaissance y jouent un rôle prépondérant.Trois couronnes de fleurs en cire, oeuvre de soeur Marie-des-Anges (Cousineau) et de soeur Marie- de-Saint-Luc (Taillefer) lui sont présentées.La première, formée de roses, symbolise sa jeunesse; la deuxième, de lis, symbolise sa carrière épiscopale ; la troisième laisse supposer à Sa Grandeur les joies durables que la terre ne saurait produire: elles ne croissent que dans les célestes parterres.La réponse du distingué Prélat fut ce que nous devions en attendre.Il relève le programme de point en point, avec une délicatesse exquise.Les trois personnages allégoriques et les trois couronnes attirent plus spécialement son attention.Comme nous sommes au 2J février, jour anniversaire de l'élection de S.S.Léon xm, Monseigneur parla avec enthousiasme de cet heureux événement de 1878, dont il a été le témoin privilégié.Quelle causerie intéressante! Après le souper, M.l'aumônier conduit Monseigneur au « pouvoir électrique,» la supérieure générale et l'assistante, quelques religieux s'y rendent aussi.Monseigneur désire examiner la dynamo et les nouvelles machines.Suivant le désir du mécanicien, l'archevêque de Montréal imprime le mouvement au plus gros engin.Puis il demande qu'on lui indique l'interrupteur du courant électrique.Il le fait jouer en disant: « Attendez! les élèves vont en avoir du plaisir! et durant quelques secondes, la lumière dans les salles de classes disparaît et reparaît tour à tour.Les maîtresses et les élèves n'y comprennent rien; quelques-unes croient au mauvais fonctionnement des machines.Le plaisir présumé ne se dévoile que lorsque on apprend que le beau tour a été joué par Monseigneur.Toutes en sont flattées et s'en amusent.Bientôt après, une autre surprise: Monseigneur et sa suite, arrivent soudainement, à la salle des grandes.La joie éclate.Le bon archevêque s'assied à la tribune 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 321 de la maîtresse et cause comme un père avec ses enfants.Les jeunes filles sont à l'aise et répondent sans gêne aux distingués visiteurs.Avant de quitter la salle, Monseigneur exprime un désir: « J'aimerais entendre un morceau d'élocution.Qui est prête ?» Mlle Armandine Cadieux n'est jamais prise au dépourvu, elle se présente, et, avec naturel et simplicité, déclame l'intéressante prose (( Le cheveu prussien ».Ce fut le point final de cette soirée, belle et agréable entre toutes.Elle se grava dans la mémoire des pensionnaires et fut souvent rappelée dans les conversations.Le lendemain, à la suggestion de la directrice générale des études, soeur Marie-de-Saint-Jean-Berchmans, Monseigneur parcourut toutes les classes.Les élèves s'étant appliquées de toute la force de leur volonté à écrire la ronde et la gothique, les maîtresses proposèrent aux élèves, à l'occasion de la visite pastorale, de préparer une phrase courte relatant un fait, un geste de la vie écolière, ou sacerdotale, ou épiscopale de leur archevêque.Il en fut ainsi, et dans toutes les classes, les tableaux noirs se trouvaient décorés de petites phrases écrites en la forme désirée.Or, voilà Monseigneur condamné à lire avant de retourner dans ses appartements, un abrégé historique des trois plus belles périodes de sa vie.Cette récréation, aussi intéressante que pratique, amusa le condescendant visiteur.Dans cette visite, les élèves externes ne sont pas oubliées; et Monseigneur daigne accepter la réception préparée.Sa Grandeur écoute les compliments des fillettes, comme s'il se fût agi d'entendre des universitaires.Suivent les remerciements, les félicitations, les avis et une récréation où l'évêque pose des questions sur l'histoire nationale.Les jeunes élèves se trouvent vraiment honorées et elles ne dissimulent pas leur bonheur; comme elles ont raison!.Il n'en faut pas davantage pour rendre heureuse cette jeunesse.En ce geste paternel de notre archevêque, nous avons vu réapparaître la délicieuse scène de l'Évangile: « Laissez les petits enfants venir à moi!» A cinq heures et demie de la soirée, les audiences étant terminées, Monseigneur réunit de nouveau le conseil pour examiner 322 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 l'état financier de la maison mère.A la fin de la séance, Sa Grandeur assure notre révérende mère et ses assistantes de son entier dévouement aux intérêts de notre Congrégation.La visite canonique se termine à sept heures; toute la communauté est convoquée à la chapelle.Monseigneur parle ainsi: « Mes filles, avant de terminer la visite pastorale, je veux vous entretenir quelques instants.Je vous ai vues l'une après l'autre, vous êtes venues à moi avec l'esprit de foi et la confiance dont vous étiez capables; vous m'avez dit avec simplicité ce que vous croyez utile au bien de votre communauté.J'emporterai de cette visite, comme de celle de vos autres maisons, le meilleur souvenir.Une preuve nouvelle m'a été donnée de la bénédiction de Dieu sur vous: toutes vos oeuvres, je le vois, sont prospères.Les évêques et les prêtres sont heureux de vous rendre les plus beaux témoignages.« Dans quelques mois, vos Constitutions seront soumises à Home, afin d'être définitivement approuvées.Je suis sûr que NN.SS.les évêques, au service desquels vous vous consacrez, donneront de grand coeur leur approbation à ce sujet; je joindrai avec bonheur la mienne à la leur.« Vous faites du bien, mes soeurs, la sainte Église trouve en vous de précieux auxiliaires.Je suis heureux de constater qu'ici, comme dans celles de vos maisons, que j'ai visitées, il n'y a aucun abus à réformer.Cela veut-il dire qu'il n'y a rien à améliorer ?Non, la perfection n'est pas de ce monde; mais vous devez être contentes et remercier Dieu qui maintient parmi vous la ferveur, la piété et la générosité, vertus qui font les véritables servantes du Seigneur.« Votre Chapitre général se tiendra en juin prochain.A ce sujet, soyez dans une grande paix d'âme.Car le bon Dieu veille sur vous; et comptez sur mon entier dévouement.J'interromprai mes visites pastorales pendant quatre ou cinq jours, s'il le faut, afin d'assister à toutes les séances capitulaires.Dans les circonstances, votre Chapitre revêt un caractère de particulière importance; il s'agit de la révision de vos Constitutions, puis des élections générales.Priez beaucoup; demandez au bon 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 323 Dieu que toutes les choses tournent à sa gloire et au bien des âmes.» Cette précieuse allocution est suivie des prières du « Directoire spirituel ».Monseigneur ouvre ensuite le tabernacle et la chorale du noviciat entonne le Tantum ergo.Ainsi se termina cette première visite pastorale de Monseigneur notre archevêque, par la bénédiction de Jésus-Hostie et celle de son auguste représentant.A huit heures du soir, notre voiture va reconduire Monseigneur à l'archevêché; il laisse après lui le plus réconfortant souvenir.Nous avons la certitude de trouver toujours en notre archevêque un coeur de père attentif à nos intérêts, ou spirituels ou temporels.La visite canonique n'a duré que trois jours entiers, mais combien remplis! * * Le 24 février, M.le supérieur vient visiter les travaux de construction; il trouve les ouvriers bien diligents, tout avance rapidement, à sa grande satisfaction.Comme il aime partager toutes nos joies et nous faire partager les siennes, il annonce avec plaisir que Monseigneur est très satisfait de sa visite à notre maison mère.Du 24 au 27 février, mère Marie-de-Saint-Basile se rend dans nos couvents de Montréal; elle en revient pour la fête de M.l'aumônier.Le programme de cette fête est tout à fait bien.Les adresses sont présentées, en français par Mlle Maria Brissette et en anglais par Mlle Teresa Doyle.Une corbeille, composée de dix-sept roses, symbolisant les dix-sept années sacerdotales écoulées, est offerte par Mlle Berthe Frappier.Des pièces symboliques rappellent les vertus du prêtre de Dieu.M.l'aumônier est ému jusqu'aux larmes; son coeur sensible ne peut les dissimuler.Il éprouve même de la difficulté à remercier, lui dont la parole est si facile.La messe, à l'occasion de cette fête, est exceptionnellement solennelle.Toute la journée se ressent du bonheur matinal.324 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 A la veillée, M.l'aumônier envoie son gramophone chez les élèves, ce qui leur procure une soirée amusante et reposante.* * A la fin de février, mère Marie-de-Saint-Basile éprouve une grande consolation, à la lecture des rapports envoyés par NN.SS.les évêques: Mgr Bradley, évêque de Manchester, et Mgr Tierney, de Hartford, après leur visite pastorale dans nos couvents de leur diocèse respectif.De toutes ces bonnes choses, rendons gloire à Dieu!!! Le mois de mars se lève, et dès les premiers jours, notre céleste pourvoyeur ajoute à ses libéralités: il exauce nos prières et nous accorde le succès d'une affaire importante.Le 7, mère Marie-de-Saint-Basile communique à la communauté l'Acte de visite de Mgr Bruchési.Une copie textuelle en est tirée par nos soeurs de l'imprimerie et distribuée dans chaque établissement de la Congrégation.Donc, nous n'avons pas à en parler ici, puisque les précieux avis peuvent être lus, par chaque soeur, dans sa mission respective.Ces conseils de perfection, dictés par notre premier pasteur valent d'être médités et vécus.Nous lisons au livre des Proverbes: « C'est un rayon de miel que la parole du Sage » ; ce sage, pour nous, n'est-ce pas notre archevêque ?Goûtons sa doctrine et gardons-la toujours.* * Revenons à la vie ordinaire.Les travaux de construction touchent à leur fin.Aujourd'hui, l'ascenseur à l'électricité fonctionne pour la première fois.De cette urgente amélioration, bénéficieront les vieilles jambes qui auraient à gravir cinq étages.L'installation de l'électricité est examinée par M.Larue, sulpi- cien, professeur de sciences au séminaire de Montréal; il l'approuve en tous points.Le 18 mars, le conseil général reçoit l'agréable visite de quatre religieuses de la congrégation Notre-Dame: mère Saint- 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 325 Calixte, première assistante générale; mère Agnès-de-Jésus, dépositaire générale; mère Thomas-de-Jésus, dépositaire à Villa- Maria et soeur Saint-Andéol, maîtresse d'ouvrage manuel.Elles parcourent la nouvelle bâtisse avec beaucoup d'intérêt.C'est une faveur pour nous de recevoir ces bonnes mères, car le souvenir de leur supérieure générale de 1847 — la bonne mère Sainte-Madeleine — a créé chez nous un courant ininterrompu d'estime et d'affection pour cette noble communauté.Oui! la charitable mère Sainte-Madeleine vit dans notre histoire et dans nos coeurs.Nous voudrions en parler encore, mais les heures nous échappent.Il y a tant à dire, quand on rappelle les vieux souvenirs du temps jadis.Le lendemain, le soleil se lève radieux, pour éclairer le jour que le Seigneur a fait, à la gloire de son père adoptif.L'aumônier aime aussi saint Joseph; et, le voulant honorer, il joue toutes les notes que lui permet la rubrique.Avant le salut solennel du très Saint-Sacrement, il donne une instruction sur la fidélité de saint Joseph; il prend pour texte ces paroles de Notre-Seigneur : « Ma fille, donne-moi ton coeur ».Si vous entendez intérieurement cette voix de Jésus, hâtez-vous de correspondre à la grâce ; et comme le tuteur de Jésus, détachez-vous de la terre pour ne plus aimer et servir que Dieu seul.Le texte, habilement et pratiquement développé, préparait les âmes à la fête du lendemain, celle de l'archange Gabriel.Le céleste messager parla à la vierge de Nazareth, elle comprit, se soumit et elle sauva le monde.La fête de l'Archange amenait celle de la mère Maîtresse, mère Marie-de-Saint-Gabriel (Piché).Ce jour-là, l'atmosphère du noviciat se trouvait saturée d'un bonheur juvénile.Le respect filial et la reconnaissance religieuse comblèrent la bonne mère de prières, d'abord, prières ferventes inscrites dans une gerbe spirituelle.En outre, une somme de cinquante dollars est offerte pour aider à l'aménagement de la nouvelle salle du noviciat.La mère maîtresse remercie avec émotion et félicite ses blanches colombes de leur générosité.Elle exprime le regret de ne pas trouver autour d'elle la volière en entier.Il se trouve des « voiles blancs », missionnaires, et leur absence projette un nuage sur l'assemblée.Néanmoins, les coeurs sont là, ils parlent éloquem- ment dans des lettres, messagères des plus beaux sentiments; 326 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 et la joie règne partout.C'est l'hiver! mais cette fervente jeunesse trouve le secret de se créer un printemps, en dépit de la froidure.Des jeux sont organisés, des chants éveillent de pieuses réminiscences, les rondes d'écolières réapparaissent.Mais, oui! pour une postulante ou une novice, la vie écolière, ce n'est pas de l'histoire ancienne !.A la veillée, le sympathique aumônier se charge de les asseoir ; en conséquence, il envoie son gramophone.Les novices, réunies pour la première fois dans leur nouveau noviciat, se groupent autour du parleur invisible.Hélas! il n'y a pas assez de chaises! alors on s'assied à la Carmélite; ce qui n'empêche ni le plaisir ni l'intérêt.Le gramophone chante, parle et rit: les voiles blancs peuvent en faire autant! Soudain la cloche se fait entendre: « Loué soit Jésus-Christ!» Quoi!.déjà?Comme cette réponse n'est pas de rubrique, on se ressaisit et l'on ajoute: « A JAMAIS ».En réalité, c'est une bien belle journée qui disparaît.Il s'en trouvera encore.Le bon Dieu en tient toujours en réserve, pour celles qui s'occupent d'établir le royaume de Dieu en leur âme.II Quelques minutes plus tard, une note contrastante bouleverse les esprits.Une catastrophe se prépare.Le Feu! Le Feu! C'est bien cela!.Le feu commence son ravage dans une armoire, située entre la cuisine et le réfectoire: soeur Marie-de-Sainte- Emmélie (Ally) et soeur Marie-de-Saint-Ernest (Morin), employée comme aide à l'infirmerie, aperçoivent la flamme sortant par la porte entr'ouverte.Elles donnent aussitôt l'alarme en criant: Le Feu!.Le Feu!.On accourt, et soeur Marie-de-Sainte-Gene- viève, qui se trouvait providentiellement aux alentours, arrache les tabliers enflammés; d'autres soeurs jettent des chaudières d'eau pour enrayer l'incendie.Le feu aurait pris, croit-on, par un morceau de flanelle huilée, oublié dans ce coin de débarras.Une heure de plus, et nous avions une catastrophe, car, dans ce même coin, se trouvaient des copeaux, de menus morceaux de bois sec, gardés pour allumer les poêles.Encore une fois, mer- 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 327 veilleuse protection de la sainte Vierge et de notre vénéré Fondateur : Magnificat ! * * * Bon! Le déménagement est à l'ordre du jour.Les dortoirs et quelques chambres sont meublés; tout le monde y met la main et.ses forces; ce sera fini dans quelques jours.A la cuisine, les nouveaux chaudrons à la vapeur sont installés.A la buanderie, à la repasserie, les tonneaux géants et la calandre sont prêts à tourner.Adieu les longs repassages aux fers si lourds! si lourds! Il ne restera bientôt plus rien du bon vieux temps.C'est triste, tout de même.Pour imprimer un bon fonctionnement à ces machines, il faut des experts.Or, soeur Sainte-Irène, religieuse de la Sainte- Famille, employée au collège, enseigne à nos soeurs Marie-de- Saint-Côme et Marie-de-Saint-Bruno la manière de s'en servir.Tout est mû par l'électricité; la leçon est bientôt comprise et tout fonctionne à merveille.A la cuisine, deux religieuses de la Providence, soeur Joachim et soeur Elisabeth du Sacré-Coeur, enseignent le « comment s'y prendre », pour utiliser les nouveaux chaudrons chauffés à la vapeur.Nous sommes reconnaissantes envers ces charitables soeurs qui nous font bénéficier si aimablement de leur savoir-faire.Un fait, pénible en soi, se présente sous notre plume et nous ne pouvons nous défendre de le relater ici; puisqu'il a des rapports avec l'aménagement, il ajoutera un nouveau témoignage à l'esprit religieux de notre bonne soeur Marie-de-Saint-Jean-Baptiste, l'assistante générale d'alors.Voici: dans la construction d'une maison considérable comme celle que nous avons vue s'élever il se trouve un grand nombre de bouts de planches, bons seulement pour le feu.Or, notre chère mère assistante, toujours aux aguets pour la garde de la pauvreté religieuse, s'imposa la tâche, assez rude pour son grand âge, de ramasser les menus morceaux de bois, afin de les faire servir au chauffage des poêles.Un jour qu'elle franchissait le seuil de la porte, les bras chargés, elle fit un faux pas et tomba par terre.Un ouvrier 328 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 s'offrit à l'aider, elle refusa; mais elle ne put cependant, se relever seule, elle ressentait une douleur trop vive; il lui fallut accepter l'aide offerte; l'ouvrier revint.Le premier soin de la blessée fut de lui dire : Voulez-vous, monsieur, porter mon bois à la bua?\derie ?.sans songer au mal que lui causaient des os brisés ou fêlés.Le médecin mandé, la condamna à demeurer la jambe étendue, durant plusieurs jours.Celles qui ont connu notre chère soeur Marie-de-Saint-Jean-Baptiste comprendront ce que la vénérable soeur dut souffrir de son repos accidentel, mais elles ne seront pas surprises de son esprit de pauvreté.Le mois d'avril donne le premier signe avant-coureur du Chapitre général.Le 31, à la maison mère, on procède à l'élection des députées, l'élue est nommée séance tenante.A la grande satisfaction de toutes les soeurs, nous entendons désigner soeur Marie-de-Saint-Stanislas-Kostka, assistante au noviciat.Le 6 mai, mère Marie-de-Saint-Basile fait connaître les députées des autres établissements, choisis par Rome, selon la demande de Mgr Bruchési: Maison de Saint-Basile—Soeur Marie-de-Saint-Adolphe — Saint-Jean de l'Evangéliste—Soeur Marie-de-S.-Alexandre — Sacré-Coeur, New-Bedford—Soeur Marie-de-S.-Virginie — St-Ls-de-Gonzague, Nashua—Soeur Marie-de-S.-Narcisse — St-Georges, Manchester—Soeur Marie-de-S.-Julien.Des prières supplémentaires sont demandées dans toutes nos missions; car si l'assistance du Saint-Esprit est nécessaire en tout temps, elle l'est doublement à l'occasion d'un Chapitre général.* * Sans le savoir, ou le sachant, mère Marie-de-Saint-Basile mettait la dernière main à l'oeuvre importante confiée par Mgr Fabre à son talent administratif et religieux.Elle déploya à l'occasion de ce Chapitre général une ardeur, un zèle, une prévoyance dignes de sa belle intelligence, de son esprit perspicace que le poids des ans n'a pas affaibli.Ses filles entrèrent dans ses inten- 1902 DES SOEURS DE SAIXTE-CROIX 329 tions, en s'armant de la prière et de la confiance en la bonne Providence.* * Le 15 avril, nous apprenons avec reconnaissance que le couvent St-Denis, avenue Laurier, Montréal, est complètement terminé, mais non meublé.Les soeurs doivent l'habiter quand même; les meubles les plus indispensables entreront bientôt.Mais pour le premier repas et plusieurs autres, elles n'ont pas de table.Les bonnes soeurs ne se désoleront pas pour si peu.Les industrieuses ouvrières en fabriqueront une très commode: à proximité se trouve un vieux tableau noir; on le couche sur deux vieux pupitres et c'est fait! Sur la table improvisée, on dépose le dîner apporté du pensionnat Saint-Basile, par soeur Marie-de-Sainte-Angèle-de-Mérici (Levacalier), supérieure et par soeur Marie-de-Sainte-Nathalie (Labine); toutes deux se joignent aux fondatrices: SS.Marie-de-Sainte-Octavie, (Viger) et Marie-de-Sainte-Adéline, (Lachapelle).Chaque matin, depuis deux années, ces deux soeurs ont voyagé du pensionnat Saint- Basile, rue Mont-Royal, pour se rendre à leurs classes.Enfin, elles entrevoient le jour heureux où il ne leur faudra qu'ouvrir une porte pour enseigner le petit peuple qui les attend.Le 17 avril, la maison Saint-Denis est bénite par M.le curé St-Jean; dans l'après-midi, mère Marie-de-Saint-Basile vient elle-même conduire la première supérieure officielle de l'établissement: soeur Marie-de-Sainte-Justine (Dagenais).La supérieure générale les quitte le soir, en leur souhaitant toutes les consolations possible, en dépit des épreuves inévitables dans toute fondation.Le bienveillant fondateur de cette maison, M.le curé St- Jean, s'est toujours montré dévoué à son oeuvre, d'ailleurs partie intégrante de sa paroisse.Quand le ministère paroissial eut absorbé tous ses loisirs, il nomma M.l'abbé Georges Charrier, vicaire, chapelain de l'école.A l'exemple de son curé, M.Charrier se montra toujours excessivement zélé.1 1 M.Georges Chartier est aujourd'hui vicaire général du diocèse de Montréal, (1934).330 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 L'école ne comptait alors que quatre classes, dont deux sous la direction des religieuses.Le chapelain donna régulièrement des cours de catéchisme; il présida la lecture des notes du mois et s'intéressa à la bonne formation des élèves, à leurs études, à leurs progrès.M.Chartier, ainsi que les soeurs, voulait des jeunes filles pieuses et laborieuses.Cette maison a marché de progrès en progrès; elle compte aujourd'hui (1933) dix-neuf classes, vingt et une religieuses et quelques maîtresses séculières.En somme, l'événement notable de ce mois d'avril est à coup sûr, l'ouverture du couvent Saint-Denis.La paroisse Saint-Laurent est en liesse (le 22 avril), par la célébration du JUBILÉ D'ARGENT sacerdotal de son digne curé, le R.P.Dion, provincial de la congrégation de Sainte-Croix.A cette occasion, mère Marie-de-Saint-Basile et son assistante, mère Marie-de-Saint-Jean-Baptiste, se rendent au presbytère pour présenter au distinugé jubilaire les respectueux hommages et les félicitations de notre communauté.Nous lui devons beaucoup.A l'instar de son prédécesseur, le toujours regretté P.Beaudet, le R.P.Dion est pour nous le conseiller bienveillant dans toutes les circonstances difficiles.Ce bon Père continue la tradition, non interrompue depuis l'origine de notre Institut au Canada.Ce qui nous permet d'avancer sans crainte: Les religieux de Sainte-Croix ont toujours été nos Pères et nos 7naîtres.* * * Il appert, dans les desseins du bon Dieu, que ce 23 avril devait être ensoleillé.Vers trois heures de l'après-midi, Mgr C.-H.Gauthier, archevêque de Kingston, arrivait à la maison mère, en compagnie du R.P.Geoffrion, as.a, et de M.l'abbé Lecours, curé de la Longue-Pointe.Sa Grandeur est saluée au parloir par notre révérende mère générale, mère Marie-de-Saint- André et soeur Marie-de-Saint-Jérôme.Après une causerie intéressante, Monseigneur est conduit à l'infirmerie où l'attend sa cousine malade, soeur Marie de Sainte-Catherine-d'Alexandrie.Quelle joie pour la chère soeur, que le repos forcé remplit 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 331 de tristesse.Les paroles de foi, de sympathie sincère du pieux cousin lui aident à prononcer le FIAT, si pénible pour une nature ardente comme la sienne.Désormais, elle envisagera l'éternité; elle vivra dans le surnaturel.De l'infirmerie, le révérendissime Prélat se rend chez les pensionnaires.Pas de réception!.Monseigneur préfère entrer dans chaque classe où il se montre on ne peut plus condescendant.Aussitôt, les élèves sont à l'aise.Il les questionne sur le lieu de leur naissance, sur leurs parents; chez les petites, sa main bénissante trace sur plusieurs fronts le signe de la croix, ou présente à d'autres sa croix pectorale et son anneau à baiser.Les benjamines approchent le plus près possible du doux évêque, quelques- unes baisent sa main.En un mot, c'est grande joie pour ces jeunes coeurs!.Le soir, Mgr Gauthier prend le souper au presbytère; à la veillée, Sa Grandeur assiste à une séance au collège, puis vient passer la nuit chez notre aumônier.La messe du 24 avril est donc célébrée dans notre chapelle par Mgr l'archevêque de Kingston.La directrice de la chorale du noviciat, soeur Marie-de- Saint-Bernard (Dagenais), nous fait entendre ses plus belles harmonies.Ce sont les coeurs qui chantent, et dans la nef, les âmes prient en chantant.Après le déjeuner, toutes les soeurs, professes, novices ou postulantes d'Alexandria, se rendent au parloir; car Monseigneur désire voir toutes ses co-paroissiennes.La conversation est joyeuse et animée; elle se termine par une bénédiction et un Deo grattas pour la journée.Une autre visite, toute céleste celle-là, nous était réservée le 26 avril.Malgré la piètre apparence de la chapelle provisoire, Notre-Seigneur ne dédaigne pas de venir demeurer avec nous, exposé à nos adorations, quarante heures durant.La sainte Église, notre cher pays, nos familles, nos bienfaiteurs, nos élèves bénéficieront de cette faveur immense.332 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 Puis, nous saluons le mois le plus beau.Aux premiers jours de mai, M.le chanoine Martin fait deux courtes visites.Le 6, nos malades ont la consolation de le voir célébrer à leur autel provisoire.Le 8, en la fête de l'Ascension, la même faveur leur est accordée par l'aumônier, tandis que le R.P.Guertin, c.s.c, dit la messe de communauté.Le R.P.Crevier donne l'instruction dans la soirée.Le prédicateur exhorte son auditoire à entrer résolument dans la voie de la croix avec Jésus-Christ.« Que ne fait-on pas, dit le Père, pour acquérir les biens de la terre ?Les épreuves sont incomparablement plus précieuses que tous les trésors du monde.Oh! si nous avions la foi, comme nous bénirions les épreuves que le bon Dieu nous envoie pour nous rapprocher de Lui, pour nous sanctifier! Par la médiation de Marie, notre bonne Mère au pied de la croix, nos souffrances seront adoucies et embelliront notre couronne éternelle ».Suit une réception d'Enfants de Marie, par M.l'aumônier.Les nouvelles congréganistes sont: Mlles Antoinette Cousineau, Victoire Gougeon, Eugénie Cantara, Roseline Gagné, Victoria et Clara Rouleau, Maria Chevalier, Mélodie Desautels, Alber- tine Sheilburne, Clara Prévost et Edna Richard.Sept jeunes filles sont admises dans l'association des SS.Anges, degré qu'il convient franchir avant de devenir congré- ganiste de la sainte Vierge.* * Notre chère soeur Marie-de-Sainte-Catherine-d'AIexandrie va toujours s'affaiblissant.Au matin du 14 mai, le prêtre, allant lui porter la sainte communion, la trouve évanouie; l'infirmière venait de la quitter.Alors le Père dépose la sainte Hostie dans le tabernacle provisoire, ce qui permet aux malades de passer une heure en adoration, elles sont privées de la présence de Jésus- Hostie depuis quatre mois! Vers huit heures, la malade est revenue à elle-même et le prêtre lui donne la sainte Communion : elle la reçoit avec une joie inexprimable.Trois jours plus tard, la chère soeur recevait l'Extrême- Onction, après avoir renouvelé de tout coeur le sacrifice de sa vie.1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 333 Elle entrevoit sa fin prochaine avec le calme et la paix que procure la bonne conscience.A six heures du matin, le 17 mai, les symptômes de la mort apparaissent sur sa figure amaigrie et décolorée.Le prêtre est appelé en toute hâte, ainsi que le conseil général; on récite les prières des agonisants ; l'aumônier donne une suprême absolution et la chère soeur s'éteint, sans frayeur apparente.Notre-Dame des Sept-Douleurs vint au secours de sa fille qui l'a tant aimée et lui a demandé si souvent la faveur de mourir un samedi.Or, le 17 mai 1902, tombait un samedi.A six heures et vingt minutes, le prêtre montait à l'autel; il offrit la divine Victime pour le repos de la chère âme entrée dans l'éternité depuis dix minutes.La sainte communion fut offerte à la même intention.Soeur Marie-de-Sainte-Catherine-d'Alexandrie laissa des regrets parmi celles qui l'ont connue.Femme aimable, au coeur d'or, et religieuse dévouée dans toute la mesure du possible, souvent plus dévouée que ne lui permettaient ses forces.Gaie de caractère, en apparence, du moins, car elle souffrit toute sa vie de peines morales pénibles; mais en compagnie de ses soeurs, rien n'y paraissait, preuve d'une âme forte et généreuse.Employée par vocation à l'éducation de la jeunesse, elle s'y donna entièrement.Ses élèves aimaient et appréciaient cette maîtresse qui savait bien les payer de retour.Son heureuse influence ramenait au devoir les natures les plus revêches ; toutes s'adoucissaient à son contact.Ses contemporaines parlent encore de sa délicate et discrète charité envers les pauvres enfants dépourvus et délaissés.Soeur Marie-de-Sainte-Catherine-d'Alexan- drie nous quitta à l'âge de cinquante et un ans, dans la trente- troisième année de sa vie religieuse.* * Comme contraste, ce deuil est suivi de la fête de la Pentecôte.M.l'aumônier en relève la grandeur dans un sermon dont le texte est extrait de l'hymne Veni Creator.Il développe en maître la stance: « Accende lumen sensibus ».Son auditoire goûte religieusement les leçons qui en découlent : 334 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 « Demandez à l'Esprit sanctificateur lumière, force, charité, afin de servir le Seigneur avec une volonté généreuse ».Mettez toute votre confiance, toute votre espérance dans la vertu de l'Esprit saint, et votre vie sera une Pentecôte perpétuelle ».Cette grande pensée terminait l'instruction.* * Le 21 mai, mère Marie-de-Saint-Basile est appelée au parloir ; M.le curé Deniers de Somersworth, N.H., États-Unis, désirant ouvrir une école paroissiale, vient demander six soeurs pour en prendre la direction.Cette fondation avoisinerait deux autres de nos établissements, donc, elle est considérée comme avantageuse et est acceptée pour le mois de septembre de la présente année.* * * Une corvée, genre nouveau, tout à fait, se terminera bientôt.Il s'agit de détirer la laine avec laquelle la bonne soeur Marie- de-Saint-Léopold (Gingras) confectionnera des matelas pour les chères missionnaires.Depuis plus de deux mois, aux récréations du midi et du soir, les soeurs forment un joyeux cercle autour de notre révérende mère générale et des mères conseillères.Les doigts fragiles font de la besogne, ce qui n'empêche pas les mots amusants, les histoires récréatives, les réparties spirituelles: puis l'ouvrage avance, et l'heure aussi.Tout fonctionne pour le mieux dans l'aménagement des pièces de la nouvelle bâtisse, rien ne traîne.La chapelle sera ouverte au culte dans quelques jours.Grâce à la généreuse offrande, ou des entrepreneurs, ou des amis de la communauté, ou des employés, nous admirons à la voûte du sanctuaire de jolis électroliers, ou appliques.Voici la liste des donateurs: M.O.-M.Déguise, contracteur; M.O'Brien, de Renfrew; M.Philémon Cousineau, avocat de Saint-Laurent ; nos menuisiers ; MM.Dupuis et Frères; MM.Blouin, Desforges et Latourelle de la « Dominion Bridge, Co.»; M.I.Lafleur; MM.Pallascio et Cie, et plusieurs autres dont les noms ne nous ont pas été transmis.Nous aimons redire ici, ce que nous avons écrit déjà: aussi longtemps que 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 335 durera notre Congrégation, chaque soir, des milliers de voix diront pieusement: « Accordez, Seigneur, la vie éternelle à tous ceux qui nous font du bien en votre nom »; et pour les bienfaiteurs défunts: « Donnez-leur, Seigneur, le repos éternel, et faites luire pour eux la lumière éternelle.Qu'ils reposent en paix.» Durant les derniers jours de mai, notre vénérable ancienne, soeur Marie-des-Anges (Cousineau) est retenue à l'infirmerie, où elle utilise son peu de forces à tresser les couronnes de fin d'année.La température frisquette de son appartement lui est contraire et nous voudrions tant la conserver! Comme il est triste son atelier de fleurs en cire, quand elle n'est pas là! Son assistante, soeur Marie-de-Saint-Luc (Taillefer), la regrette bien davantage.Depuis nombre d'années, elles étudient ensemble les fleurs du bon Dieu, si belles! si belles! mais, si tôt fanées.Toutes deux travaillent à les remplacer, pour la forme et la nuance, par des fleurs durables.* * Le mois de juin nous apparaît avec sa verdure, ses oiseaux et ses fleurs.Comme il se montre favorable aux fêtes du coeur! A Sainte-Scholastique, on sait profiter de sa générosité et l'on célèbre avec grand apparat le JUBILÉ sacerdotal du M.le curé Hétu.Voici les échos qui nous en arrivent: « La paroisse et le couvent s'unissent pour célébrer le JUBILÉ de leur excellent pasteur.Les élèves du pensionnat se sont surpassées, dit-on; le Jubilaire a paru vivement et sensiblement ému, durant la séance en son honneur.Le programme a été rempli avec distinction; la marche avec les lis en mains, mérita des applaudissements; la mise en scène d'un drame en vers, style biblique, réussit on ne peut mieux.Comme point final, le tableau d'une première messe à laquelle assistèrent, nombreux, les anges de la terre; à ce spectacle, le bon curé pleura.» La séance terminée, le Jubilaire parla en ces termes: « Lorsqu'un voyageur est fatigué de la route, ou même, comme aujour- 336 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 d'hui, il ne se trouve qu'à mi-chemin, il cherche un endroit frais et commode pour s'y reposer à loisir; mes chers enfante, je n'ai pas eu à chercher le délicieux endroit.vous me l'offrez gracieusement dans cette maison qui m'est chère à tant de titres; cette maison où je n'ai trouvé que des consolations.Je dis chère à tant de titres: d'abord à raison des personnes qui la dirigent et des enfants qui font ma joie et mon orgueil.Sans interrompre vos classes, comment avez-vous pu préparer cette belle fête qui parle si éloquemment en votre faveur?» M.le curé félicite et remercie les organisatrices; et, à l'avenir, dit-il, je vivrai du souvenir de cette fête exquise ».Plusieurs prêtres assistaient, ainsi que les notables de la paroisse.Au 13 juin, se lève la première aurore de la Saint-Basile; elle est belle, très belle.Que sera donc le plein midi ?.La fête préparée chez les élèves surpasse tout ce que nous avons vu dans le passé; les beaux souvenirs de l'enfance, de la jeunesse, de la vie religieuse de notre révérende mère générale sont évoqués; tout cela, rappelé par des anges, est émotionnant.Outre les fleurs, les pensionnaires présentent à la vénérable héroïne du jour la somme de cinquante dollars.Dans cette solennelle occasion, les novices ont trouvé le moyen pratique de fournir leur part, en déposant dans la corbeille de fête la jolie somme de cent quatre-vingt cinq dollars; ce chiffre a son éloquence, à une époque où la moitié de l'ameublement de la chapelle doit être remis à neuf.Le lendemain, 14, c'est la bénédiction de la chapelle, avant la messe basse; la communauté et le pensionnat sont présents.La grand'messe est célébrée à huit heures et demie, par M.le chanoine Martin, avec diacre et sous-diacre.On remarque au choeur les RR.PP.Dion, provincial de Sainte-Croix, et Crevier, assistant et procureur du collège Saint-Laurent.Dans l'après- midi, le R.P.Dion donne la bénédiction du Saint-Sacrement.Pour compléter le bonheur intime de cette fête, le courrier apporte à celle qui en est l'objet une lettre dont voici la teneur: 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 337 Sainte-Scholastique, le 14 juin 1902 Ma révérende Mère,.C'est aujourd'hui la Saint-Basile et je me trouve à Sainte- Scholastique, votre paroisse natale.Après avoir prié pour vous à la sainte messe, je vous offre mes meilleurs souhaits de fête et je vous bénis de tout mon coeur.PAUL, archevêque de Montréal.Selon nous, cette exquise petite lettre tombait comme une pierre précieuse dans la corbeille de notre mère générale.Le programme n'est pas encore épuisé.A la veillée, grande séance par les pensionnaires.Séance récréative ?— Oui et non, car la pièce principale: «Yva, ou le triomphe de la foi,» si bien interprétée, fait verser des larmes.Un monologue en anglais, par Mlle Katie Smith, déride les fronts les plus sérieux; les petites ont aussi une plaisante comédie.M.le supérieur, présent à la fête, renouvelle ses félicitations, déjà plus d'une fois exprimées en pareille occurence, et exhorte la communauté à remercier le ciel de ses libéralités à notre égard.Le 15 juin, un dimanche, l'économe générale adresse une invitation à tous ceux qui, à l'un ou l'autre titre, ont travaillé à la construction, d'assister au salut solennel d'actions de grâces, ainsi que nos bienfaiteurs et amis de Saint-Laurent.Les parents des élèves, alors au parloir, sont également les bienvenus.Avant la bénédiction du très Saint-Sacrement, M.l'aumônier avec sa délicatesse ordinaire, rappelle aux messieurs et aux dames, que Notre-Seigneur a travaillé de ses mains divines; et que la sainte Vierge et saint Joseph ont toujours peiné sous le poids du labeur; ils étaient si pauvres! Le prédicateur engage les auditeurs à unir leurs fatigues journalières à celles de ces trois admirables modèles.Ce sera pour eux tous une source de mérites et de bénédictions.S'adressant ensuite aux élèves finissantes, il leur recommande de se montrer toujours dignes de leur maison d'éducation, par leur conduite modeste, selon les enseignements de la morale chrétienne.338 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 « Et vous, chers parents, vous aiderez vos jeunes filles à continuer, chez vous, la belle, pieuse et laborieuse vie qu'elles ont menée, ici; cela, pour leur bonheur et le vôtre.Je vous félicite d'avoir confié vos enfants à cette institution, dont le renom grandit toujours.Vous le savez aussi bien, et peut-être mieux que moi, l'éducation donnée dans ce pensionnat est basée sur la vie profondément chrétienne, empreinte de la bonne simplicité, d'une modestie exemplaire; la formation à la vie domestique est ici à l'honneur.« Les maîtresses méritent bien des éloges, certes, pour tout ce qu'elles accomplissent dans le coeur et l'intelligence de vos enfants, et je ne crains pas de blesser leur modestie en les louant en public.Je sais qu'elles renvoient à Dieu tout honneur et toute gloire.Elles sèment, elles plantent, et Dieu donne l'accroissement.» Le prédicateur remercie chaleureusement les ouvriers et tous ceux qui ont contribué à la construction et à l'embellissement de la chapelle, en sacrifiant, avec générosité une partie de leur salaire, si légitimement acquis.Des âmes pieuses, leur assure-t-il, élèveront chaque jour des mains suppliantes vers le Dieu de toutes grâces pour attirer ses bénédictions sur leurs travaux et sur leurs familles.Le 17 mai, Sa Grandeur Mgr Lorrain, évêque de Pem- brooke, honorait notre communauté d'une visite.Le conseil général et soeur Marie-de-Bon-Secours, sa cousine jubilaire, le rencontrèrent au parloir.Après une causerie des plus aimable, Monseigneur promet de revenir visiter la communauté l'an prochain et de célébrer dans notre chapelle neuve, puis il ajoute en souriant: « si ma cousine, soeur Marie-de-Bon- Secours, n'est pas morte! » Une messe d'action de grâces à saint Joseph suivit ces jours de bonheur; notre saint protecteur nous a comblées, depuis deux ans, d'une façon merveilleuse.Le R.Père Nolin, S.J., revient le 23 mai afin d'enrôler une douzaine de finissantes dans le 6e degré de la « Milice du Pape ».Il leur rappelle le privilège de recevoir, par Tinter- 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 341 médiaire de leur confesseur, à l'article de la mort, la bénédiction papale; faveur accordée aussi à leur père et à leur mère, à leurs frères et à leurs soeurs; et il ajoute: « Mesdemoiselles, vous entrerez bientôt dans vos familles, rendez-vous utiles — ne soyez pas des emplâtres; aidez vos mamans au soin du ménage; rendez-leur tous les services possible.Soyez fidèles à la prière, à la fréquentation des sacrements.Continuez chez vous, et toujours, l'offrande de vos actions au Sacré Coeur et inscrivez- les sur le trésor.» Ce même jour, Mgr Racicot, vicaire général du diocèse» après avoir présidé la distribution des prix, au collège, nous procure le plaisir et l'honneur d'une visite.Avec M.l'aumônier, le conseil général et quelques prêtres, il parcourt les nouveaux appartements et s'intéresse à tout; il adresse la parole aux soeurs qu'il rencontre; sa bonté, sa condescendance, sa belle simplicité mettent tout le monde à l'aise.* * * Le 23 juin, M.l'aumônier donne connaissance, à la communauté, de la communication officielle de Mgr l'archevêque de Montréal concernant le couronnement de Sa Majesté le roi Edouard vu, qui aura lieu le 26 du présent mois.Ensuite apparaît la fête du couronnement de nos élèves la grande solennité du labeur constant; M.le chanoine Dauth, de l'archevêché de Montréal, en est le distingué président.A ses côtés figurent des membres du clergé, le conseil général, les autorités civiles du village.Les religieuses professes et les nombreux parents des élèves composent un bel auditoire.Le programme est relativement court; la proclamation des prix est déjà si longue! En premier item, nous entendons les noms de Mlles Maria Brissette, Laurenda Raymond, Florida Lacroix.Elles reçoivent la médaille d'or des graduées en français, et le diplôme avec la note « Grande distinction ».Les médailles des cours supérieurs français, anglais et d'instruction religieuse sont présentées par l'abbé Moulin, aumônier, et par le R.Père Dion, provincial de Sainte-Croix; 342 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 elles sont décernées à Mlles Roseline Gagné et Angela McDonald.Les autres étudiantes qui reçoivent des médailles sont: Mlles Laurenda Raymond, Victoire Gougeon, Laudia Thérien, Dulcinie Lizotte, Philomène Baily, Marie-Louise Sansouci, Katie Smith, Clara Labine.Sa Grandeur Mgr Paul Bruchési, archevêque de Montréal, donne un superbe volume pour style épistolaire; il est mérité par Mlle Victoire Gougeon.Nous n'avons énuméré que les cours supérieurs dans lesquels sont ordinairement décernées les médailles d'or.Il serait fastidieux de présenter ici la longue liste des médailles et des prix distribués à cette fête.Mais le devoir qui nous incombe en ce moment, c'est celui de la reconnaissance.Nous voudrions buriner sur le granit le nom des généreux bienfaiteurs et amis de l'éducation; sans se lasser, ils apportent chaque année à la jeunesse étudiante un stimulant aux progrès dans les sciences religieuses, profanes et domestiques.Ces généreux bienfaiteurs se souviennent donc de leurs années d'étude! A l'instar de la génération actuelle, ils aimaient les médailles d'or, les livres et les mentions honorables.Dans cette loyale ambition des récompenses scolaires, nous découvrons, à l'état latent, une âme noble que n'aviliront pas les bassesses morales; une âme élevée, ennemie du terre à terre, qui suivra la route de l'honneur devant Dieu et devant la société.Les âmes médiocres ne connaissent pas cette légitime fierté.Le programme de la fête se terminait par les adieux des finissantes.Des phrases dictées par le coeur, nous relevons quelques pensées.Outre l'intérêt qu'elles fourniront, elles ramèneront peut-être, aux beaux jours de la jeunesse, certaines âmes que les multiples chagrins de la vie, ou ses désillusions, accableraient de tristesse.Mlle Maria Brissette, au nom de ses compagnes, s'exprimait ainsi: « Tout est fête aujourd'hui dans notre pensionnat! Les figures rayonnent de bonheur, les lèvres sourient, la perspective des vacances met tous les coeurs en liesse.Pourtant, mes compagnes et moi, nous sommes attristées, nos yeux se voilent de larmes; car c'est le jour des adieux!.1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 343 « Comme une volée d'hirondelles, les élèves de cette maison, dans quelques instants, prendront leur essor vers le foyer paternel; mais la fin des vacances ramènera la majeure partie des oiseaux à la volière, et.nous n'y serons pas! Pour nous, notre vie de pensionnaires, vie joyeuse et paisible, se termine aujourd'hui; la vie sérieuse du monde va commencer.Quelle sera- t-elle ?.La jeunesse avide de bonheur se plaît à oublier les réalités du passé, que lui rappelle la voix de l'expérience, et elle se penche anxieuse vers les espérances de l'avenir.Avant de quitter le port, nous tournons nos regards vers notre boussole, Marie! du fond du coeur, nous lui répétons: Vierge, étoile des mers, Levez-vous sur nos têtes.Calmez les flots amers Et chassez les tempêtes.«Fixées au mât de la CROIX, l'espérance activera notre course et sous le souffie vivifiant de la grâce, nous franchirons les écueils dont le monde est parsemé.«Avenir mystérieux, que nous réserves-tu?.Que tiens- tu caché dans les replis de ce manteau qui te dérobe à nos regards?Ton secret, tu le gardes, nous le savons! L'avenir nous le révélera à l'heure de Dieu.Pour le découvrir, pour entendre la voix divine qui parle aux âmes, nous ferons silence autour de nous et nous nous livrerons à la confiance.» Suivent les remerciements adressés au distingué président, M.le chanoine Dauth, et aux généreux bienfaiteurs.Pour mère Marie-de-Saint-Basile, la gratitude se précise davantage: « Merci à vous, révérende mère générale, dont les bienfaits sont marqués en traits indélébiles dans nos âmes qui vous resteront attachées, par les liens les plus forts et les plus doux! Une seule parole résume notre reconnaissance et notre amour: en vous, nous avons trouvé une mère ! » Les maîtresses reçoivent une large part de remerciements et, certes, elles l'ont bien méritée : « Merci à vous toutes, bonnes et dévouées religieuses, qui, chaque jour, nous avez fait béné- 344 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 ficier de votre savoir et de vos vertus.Nous aimerons rappeler le souvenir des jours heureux, mais trop courts, passés sous votre direction.Le pensionnat Notre-Dame-des-Anges sera l'oasis où nous reviendrons retremper nos énergies et goûter, quelques instants encore, un paisible repos.Puisse la Congrégation de Sainte-Croix, notre seconde famille, étendre sa protection sur la jeunesse, désireuse de s'abreuver aux sources pures du devoir et de la science.1 Les adieux terminent la fête des prix.M.le chanoine Dauth, le distingué président, prend alors la parole.Il relève ce qu'il a vu et entendu et félicite les élèves de leurs beaux succès scolaires et fait ensuite passer devant les yeux de la jeunesse inexpérimentée tous les dangers que récèle « le champ fleuri des vacances ».« Attention, mesdemoiselles, sous les beaux et riants massifs en fleurs, un serpent vous guette au passage.N'approchez pas trop près?.Il y a danger, surtout si vous êtes seules.Par prudence je vous conseillerais, en entrant au foyer paternel, de vous choisir une amie, une confidente, et cette amie, cette confidente, ne la quittez plus jamais.Où la trouverez-vous, cette amie?.Mais elle est tout près de vous; vous la nommez MAMAN! Voilà, mesdemoiselles, l'amie fidèle, discrète, prudente et dévouée jusqu'à la mort.Ne craignez pas, la mère chrétienne mérite toute la confiance de sa fille ou de son fils!.Si, par malheur, le bon Dieu vous avait enlevé votre mère, vous trouverez dans votre soeur aînée, dans une bonne tante, ou une 1 Deux de ces jeunes filles sont religieuses dans notre communauté' une seule vit encore, Mlle Maria Brissette (S.M.-du-S.-Rédempteur).Mlle Florida Lacroix, (S.-M.-de-S.-Thomas-d'Aquin) est décédée le 25 mai 1922, dans sa vingtième année de religion.Elle remplissait alors l'office de directrice générale des études.Mlle Laurenda Raymond joue dans la haute société montréalaise et parmi les affligés, les déshérités, le rôle d'ange consolateur.Elle donne son coeur, sa sympathie.Elle est apôtre, elle édifie; malgré sa santé débile, elle prête son concours aux oeuvres sociales.Inviolablement attachée à son Aima Mater, elle remplit depuis vingt ans, l'office de trésorière dans l'Association des Anciennes, fondée en 1913, par l'initiative de Mme Albina Jette-Joanette, de si douce mémoire.Mme Joanette est décédée le 4 septembre 1931.Depuis 1933, Mlle Laurenda Raymond est vice-présidente de l'Association Notre- Dame des Anges.1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 345 grand'mère, l'appui, le conseil, la protection dont vous avez besoin.Votre père saura vous protéger, vous conseiller, en dépit de son travail absorbant.Ne faites rien sans son avis.« Rendez-vous utiles dans ce cher chez-vous; votre esprit est fatigué de l'étude?Que vos bras agissent pour reposer la tête.Il y a l'entretien de la maison, il y a de la couture, mettez- vous à l'oeuvre! On vous a appris dans cette maison à manier l'aiguille et le balai; on vous a enseigné l'art culinaire?.Offrez- vous à préparer les repas: bonne soupe, bonne viande, etc.On vous a appris le raccommodage, le reprisage ?L'heure est venue d'utiliser votre savoir!.Comme votre mère sera fière de sa fille!.Soyez bonnes, douces, secourables à vos petits frères et petites soeurs.Ne dites pas: ADIEU les notes, il n'y en a plus! je puis agir à ma guise, maintenant.Vous vous trompez, mesdemoiselles, vous vous trompez! il vous faut encore et toujours obéir!.Vous aurez des NOTES et beaucoup plus sérieuses que celles du couvent.Dans le grand livre du bon Dieu, nous avons une page sur laquelle notre nom est inscrit.Nos NOTES y entrent jour par jour, avec une précision et une justice impeccables.Seulement, vous n'en entendrez la lecture qu'à la fin des temps.La chose est grave, songez-y sérieusement.Bonnes vacances! Mesdemoiselles, n'oubliez pas vos NOTES.» L'auditoire se retire.Les jeunes filles courent embrasser leur mère, la tête couronnée de lauriers et les bras chargés de volumes de tous formats et de toutes couleurs.Les mamans sont heureuses! La joie se lit sur leur figure.Les papas sont également fiers, mais leur joie reste au fond du coeur.Ils disent: « Ma fille est bien!.J'en suis content!.» Après une heure environ, les maîtresses se trouvent seules.Demain, s'ouvrira une ère nouvelle.Les soeurs n'auront qu'un jour pour remettre tout en ordre.Pour y réussir, elles sacrifieront la licence agréable que procure la fête nationale, le 24 juin.Le 25 juin, Sa Grandeur Mgr Paul Bruchési, archevêque de Montréal et délégué apostolique pour notre communauté, arrive à la maison mère pour présider le Chapitre général composé de vingt et un membres.346 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 Le lendemain, 26 juin, Monseigneur entonne le Veni Creator, puis célèbre le saint sacrifice.La première séance s'ouvre à huit heures et demie.Le 27, Sa Grandeur offre le saint sacrifice pour nos vénérés fondateurs et nos soeurs décédées.Le 28, de nouveau, nous assistons à la messe de notre digne Prélat et nous avons la faveur de communier de son auguste main; les élections ont lieu dans l'après-midi.Notre illustrissime et révérendissime Père a présidé toutes les séances du Chapitre, avec un dévouement admirable.A trois heures et demie, la cloche convoque toute la communauté à la chapelle, et Monseigneur prononce l'allocution, dont nous donnons des extraits fidèles: « Mes Filles, « Il vient de se passer parmi vous un acte important qui fera époque dans vos Annales, et dont vous retirerez, j'en ai la certitude, un bien réel et durable.«.J'ai eu l'occasion de présider plusieurs Chapitres généraux dans diverses communautés; j'y ai toujours trouvé de grands sujets d'édification; mais pendant les longues et laborieuses séances de celui-ci, j'ai constaté avec bonheur, dans toutes les religieuses qui y ont pris part, outre l'esprit d'humilité, de renoncement et de sacrifice, un profond respect pour l'autorité et une grande soumission à la sainte Église; pas le moindre nuage n'est venu altérer la paix, la concorde et l'union des coeurs.L'harmonie la plus parfaite a régné dans les délibérations, entre tous les membres de cette vénérable assemblée.« Nous nous sommes d'abord occupés de vos Constitutions qui ont été revues avec soin; quelques articles y ont été ajoutés, d'autres retranchés ou modifiés.Le plan des études, tant au noviciat que dans vos pensionnats et vos externats, a été également examiné ; puis, nous avons passé au mode d'administration.Désormais, vos établissements seront divisés en trois provinces et il y aura, à la maison mère, une supérieure locale.On vous fera connaître, en temps opportun, les changements qu'on a jugé à propos d'introduire.Enfin, les nouvelles 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 347 mesures et les décisions qui ont été prises, sous mon impulsion et ma direction, ont eu pour but unique la gloire de Dieu et le plus grand bien de votre Institut.« Il restait à procéder aux élections.D'après vos Constitutions, une supérieure générale qui a accompli deux sexennats consécutifs ne peut être réélue sans l'assentiment du Saint- Siège.Votre mère générale, dans son humilité, a demandé à se retirer de l'administration.Elle a même prié ses filles de ne pas voter pour elle.Cet acte de vertu m'a édifié et touché, de même que tous les membres du Chapitre.Les capitulantes ont cru devoir se rendre au désir de leur mère et lui accorder un repos bien mérité, par ses longues années de dévouement, de travaux et d'abnégation.Une autre, mes Filles, va la remplacer auprès de vous.N'oubliez jamais le respect et la reconnaissance que vous devez à celle qui a dirigé avec tant de prudence et de succès les oeuvres de votre Congrégation.L'emploi qui lui sera assigné la mettra à même de vous aider encore de ses conseils et de ses lumières.« Le bon Dieu vous donne aujourd'hui, pour supérieure générale, mère Marie-de-Saint-Gabriel, ayant pour première assistante, mère Marie-de-Saint-André.Deuxième assistante, mère Marie-de-Saint-Julien.Troisième assistante et secrétaire générale, mère Marie- de-Sainte-Euphrasie.Quatrième assistante et économe générale, mère Marie-de- Saint-Romuald.Que les nouvelles conseillères veuillent bien approcher, ajoute Monseigneur.A ces mots, nos mères vont s'agenouiller aux pieds de Sa Grandeur.« Ma mère, je confirme l'élection du Chapitre, ou plutôt, c'est Dieu lui-même qui vous nomme supérieure générale de votre Congrégation.« Un fardeau écrasant reposera sur vos épaules; vous aurez à gouverner, à diriger les progrès de vos soeurs dans la vertu, l'éducation des enfants, l'observation des Constitutions.Vous devrez donner le bon exemple, et comme Notre-Seigneur agir avant d'enseigner; être un modèle de régularité, de bonté et de soumission au siège épiscopal.Aimez vos filles comme une 348 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 mère, et efforcez-vous de les rendre heureuses.Une mère est bienveillante; elle s'oublie pour penser aux autres.Imitez le dévouement et la bonté de celle qui était votre mère et qui devient votre fille.« Toutefois, que la grandeur de vos devoirs et de vos responsabilités ne vous effraye point; dites comme saint Paul: « Je -puis tout en Celui qui me fortifie ».Le bon Dieu aime parfois à se servir de faibles instruments pour accomplir son oeuvre ; c'est ainsi que, d'un enfant pauvre, il fait un évêque.Je vous répéterai ces paroles de l'archange Gabriel: « Le Seigneur est avec vous ».Oui, le Saint-Esprit sera avec vous, quand vous parlerez, quand vous commanderez, quand vous agirez.« Et vous, chères assistantes, soyez le soutien et la consolation de celle que l'Église institue aujourd'hui mère de votre Congrégation.Vous devrez l'aider à remplir la mission qui lui est confiée et travailler constamment avec elle, en esprit d'union et de charité, à accomplir la volonté de Dieu sur votre Institut, à maintenir, à fortifier l'autorité, à engager les soeurs à la soumission, à la piété filiale.Enfin, vous saurez respecter les choses qui vous paraissent inexplicables.« De votre côté, mes Filles, rendez à votre mère le respect, l'obéissance, l'amour qui lui sont dus et allégez pour elle, autant qu'il sera en votre pouvoir, le lourd fardeau de la supériorité.« Pour vous, mes chères novices, une autre maîtresse s'occupera de votre formation religieuse; mais consolez-vous, vous ne perdez pas pour toujours celle qui vous était toute dévouée.Elle reste encore votre mère, et au sortir du noviciat, c'est-à- dire, bientôt, vous la retrouverez.» Monseigneur entonne alors le Te Deum, que le choeur continue avec émotion.Puis Sa Grandeur se retire en bénissant l'assemblée.Pendant le chant du psaume, Ecce quam bonum, notre révérende mère, tout éplorée, donne le baiser de paix à chacune de ses filles.Sur cet acte important du Chapitre général se termine la longue et fructueuse administration de mère Marie-de-Saint- 1902 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 349 Basile: dix-neuf ans, cinq mois et quinze jours d'une vie débordante, pour la gloire de Dieu et, partant, pour l'honneur et la prospérité de notre Congrégation.Quelle somme de mérites devant Dieu, devant la sainte Église, devant la société, et devant notre chère famille religieuse! De neuf établissements en 1883, le nombre s'est élevé à vingt-sept, en 1902, dont dix-huit fondés sous l'administration de mère Marie-de-Saint-Basile, sans tenir compte des couvents fermés à la même époque, et dont il a été parlé au cours de ce volume.Dix mille cinq cent quatre-vingt-quinze élèves des deux sexes fréquentaient nos écoles en 1902.A l'heure où nous écrivons ces lignes, ces mêmes enfants ont vu les années s'accumuler sur leur tête; le courant de la vie les a dispersés à travers le monde.On les retrouve partout; dans le clergé séculier et régulier, dans les couvents, dans les cloîtres et jusque dans les missions lointaines: aux Indes, en Chine, dans l'Ouest canadien.Dans la société civile, nous trouvons des hommes de professions libérales, qui ne craignent pas d'affirmer leur CREDO; des pères et des mères de famille qui sont des modèles pour la société et la consolation de leurs pasteurs.Leur première formation morale, religieuse et intellectuelle, a été puisée dans nos écoles; la Nouvelle-Angleterre en fournit un bon nombre.L'oeuvre de nos vénérés fondateurs s'est continuée, par l'intermédiaire de mère Marie-de-Saint-Basile, avec la collaboration de ses filles dévouées.Le culte du passé ne doit pas s'éteindre, non jamais!.Aimons et conservons tout ce qui est souvenir! Il ne déplaira nullement aux membres de notre Congrégation que, par respect pour ceux et celles qui nous ont précédées, on conserve, ou qu'au besoin, on restaure jusqu'à la manière dont ils ont rendu gloire au souverain Maître, le seul distributeur des rôles à remplir dans la vie.Notre humble Institut doit des actions de grâce au Pasteur suprême parce que, dans sa miséricorde, Il a daigné nous confier un coin de son immense bergerie.En témoignage de perpétuelle gratitude, travaillons sans relâche à paître les agneaux du Christ ; distribuons généreusement l'herbe fraîche de la doctrine chrétienne que nous fournit le saint Évangile.Supplions le divin 350 ANNALES DE LA CONGRÉGATION 1902 Berger de prendre en pitié, ainsi qu'aux jours de sa vie mortelle, les brebis imprudentes égarées dans les broussailles de la vie mondaine; si les pieds du Berger compatissant se heurtent aux pierres du chemin, ou se déchirent aux ronces, les larmes d'amour de la brebis repentante consoleront son coeur et répareront les blessures.ON NE SAURAIT TROP PROPAGER LE CULTE ET LE SOUVENIR DES GRANDES AMES DANS UN TEMPS OU IL Y EN A SI PEU.Lacordaire ÉPILOGUE 1902 - 1923 Voici le soir!.A l'heure où expirait le mandat providentiel de mère Marie- de-Saint-Basile, il lui restait encore, dans les décrets éternels, vingt et une années à passer sur la terre.La nouvelle supérieure générale, la bonne mère Marie-de-Saint-Gabriel, s'occupa d'abord de lui procurer tout le repos que réclamait sa santé déprimée.Selon le désir de la supérieure démissionnaire, elle fut envoyée à Saint-Liguori, village de la campagne où la vie est si calme et si tranquille! Elle y séjourna plusieurs semaines, entourée de toute l'affection, de tout le respect et de tous les soins possibles.Ce repos lui procura un renouveau de vitalité et son énergie naturelle triompha de la faiblesse.Au mois d'août, époque des grandes nominations, le conseil général lui confia la charge de supérieure de la province de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, récemment érigée.De première supérieure générale, elle devint première supérieure provinciale.Sa résidence, approuvée par Rome, se trouvait au pensionnat Saint-Basile, à Montréal, qu'elle-même avait édifié.Elle s'y dévoua durant un triennat, avec un zèle digne de sa force d'âme, de sa volonté énergique et de son esprit de foi.Mais son grand âge ne lui permettait plus les longues et fatigantes sorties dans la campagne pour les visites officielles, surtout pendant la saison d'hiver.La bonne mère se crut obligée de demander sa retraite.Le conseil général ne consentit pas à mettre sous le boisseau cette lumière encore si vive, et mère Marie- de-Saint-Basile fut désignée supérieure au pensionnat de Saint- Martin, le premier de nos établissements, fondé en 1847.Elle y demeura six années, de 1905 à 1911.Cette maison de Saint- 354 ANNALES DE LA CONGRÉGATION Martin avait vu ses débuts dans l'apostolat, alors que, novice, elle essayait sa vocation.Le curé et ses anciennes élèves aux cheveux blanchis lui firent une réception des plus chaleureuses.Dans ce poste moindre, sa charité grandit toujours.Sa clairvoyance maternelle s'aiguisa dans ce cercle familial; rien ne lui échappait : ni la surveillance des classes, ni la santé du personnel, ni la fidélité aux exercices spirituels.Le local devenu insuffisant, elle obtint de faire ajouter une aile au couvent; cette amélioration s'imposait, au point de vue hygiénique.Mère Marie-de-Saint-Basile exerça aussi son zèle comme supérieure locale, à Villeray de 1911 à 1914, et à Youville de 1914 à 192 '.Au mois d'août 1913, elle célébrait son JUBILÉ D'OR, à la maison mère, avec trois compagnes.Jubilé grandiose! Il en sera parlé dans un autre volume.La communauté se devait à elle-même cet acte de reconnaissance envers les quatre généreuses ouvrières de la première heure: mère Marie-de-Saint- Basile, soeur Marie-de-Sainte-Rosalie, soeur Marie-de-Sainte- Agnès, soeur Marie-de-Sainte-Anastasie, et soeur Marie-de- Saint-Hyacinthe célébrait, ce même jour, son Jubilé de diamant.C'est à l'occasion de ce Jubilé d'or que Madame Albina Jetté-Joanette, après s'être entendue avec les autorités du couvent, et avec la haute approbation de Mgr Bruchési, fonda l'Association des Anciennes sous le titre de ASSOCIATION NOTRE-DAME-DES-ANCES (l'A.N.D.A.), association qui a opéré et opère encore des oeuvres admirables de charité.1 Donc, c'est à Youville que mère Marie-de-Saint-Basile termina son apostolat.Bien que septuagénaire, son zèle ne connut point de baisse, pour la direction des classes et la tenue de la maison.En face des élèves, la vénérable mère retrouvait son coeur de vingt ans.Cependant la forte main du temps pesait sur sa santé.En 1920, elle renouvela ses instances, auprès du conseil général, pour obtenir sa retraite.Cette fois, la supérieure générale, mère Marie-de-Saint-Julien, agréa sa demande.Ainsi, 1 Voici les membres du 1er conseil de l'A.N.D.A.: Présidente: Mme H.Joanette, Vice-présidente: Mme J.-A.-E.Grou; Secrétaire: Mlle Augusta Dage- nais; Trésorière: Mlle Laurenda Raymond, Conseillères: Mme J.-N.Lapointe, Mme Ed.Gohier, Mlle Nellie Reid.LES JUBILAIRES DE 1913 DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 357 elle passa à la maison mère les deux dernières années de sa vie dans l'attente du ciel.Elle n'ignorait pas, la bonne mère, que là « où nos devancières ont passé nous passerons ».Dieu seul connut le grand sacrifice de la vénérable jubilaire, en s'arrachant du milieu de la jeunesse qu'elle aimait tant, et dont elle était si religieusement aimée; son coeur n'a jamais su vieillir] Depuis soixante ans, elle vivait en contact immédiat avec les enfants.Comment extraire du coeur de l'éducatrice des racines si profondes?La généreuse septuagénaire obtint l'office de surveillante des études au pensionnat, ce qui lui procura une grande consolation.Lorsqu'elle ne pouvait s'y rendre, elle faisait prévenir la supérieure, sa petite novice d'autrefois;1 mais dans l'autorité, sa foi lui montrait DIEU LUI-MÊME.Oui, cette femme, que nous avons vue pendant un demi- siècle exercer le commandement, nous apparaît, devenue simple soeur, un modèle vivant d'obéissance, de régularité et d'humble soumission.Elle demandait ses permissions comme une fervente novice; elle suivait tous les exercices réguliers, et se rendait scrupuleusement à son emploi.Les deux dernières années de la vie de mère Marie-de-Saint- Basile furent particulièrement marquées du signe de la croix.Les prédestinées au bonheur éternel voient l'ombre de l'arbre majestueux grandir toujours, car c'est le soirl.Cette ombre s'étend sur la terre, la solitude attriste le coeur, le silence, un silence profond enveloppe l'âme, et.la nature gémit! Notre mère connut ces heures d'angoisses.S'épanchant un jour dans le coeur d'une co-paroissienne jubilaire comme elle au mois d'août 1913, elle en reçut cette réponse juste, mais si froide: Ma mère, quand on vieillit, on ne doit vivre que de souvenirs.Cette vérité ne mit point de baume sur les blessures.La vigoureuse mère ne pouvait guère se figurer qu'elle était entrée dans la vieillesse.Elle se prit à réfléchir: elle se revit jeune soeur, au coeur plein d'enthousiasme et d'ambition; et elle examina ses cheveux de neige.Quoi! déjà?.comme mes jours ont passé!.Avec quelle rapidité vole la navette qui tisse notre drap mortuaire].1 Soeur Marie-de-Sainte-Béatrix-du-Sacré-Coeur.358 ANNALES DE LA CONGRÉGATION De même, elle jeta un regard sur ses oeuvres, elle revit sa place au timon des affaires, durant dix-neuf années.Elle découvrit, sans doute, quelques défectuosités, car il s'en est trouvé! Quelle vie humaine n'a pas à enregistrer certaines faiblesses dans son LIVRE DE COMPTES?.Le ciel lui facilitait la réparation dans la souffrance; et aux yeux de ses filles, les grandes oeuvres accomplies sous son gouvernement couvraient toutes les lacunes.Nous pouvons avancer, sans figure, que la semence jetée dans le sillon par mère Marie-de-Saint-Basile a levé ; depuis longtemps nous en savourons les fruits.Vers la fin de l'année 1921, la vénérable mère fut prise d'une angine qui devait la conduire au tombeau.Dans cet état de souffrances, son âme semblait se fortifier dans l'union de sa volonté à celle du divin Maître.Elle triompha du mal et en dépit d'une toux opiniâtre, elle reprit la surveillance des études jusqu'en mars 1923.Alors l'infirmière lui interdit de se rendre au pensionnat.Elle se soumit comme une jeune enfant; puis elle ajouta aussitôt: « Avertissez tout de suite soeur supérieure, et priez-la de me trouver une remplaçante pour ce soir.et peut- être, pour jusqu'à Pâques.» Sans le savoir, elle désignait le jour de sa mort.Le matin de Pâques, au premier son de la cloche du lever, la malade prononça le Benedicamus Dornino; mais son infirmière lui fit remarquer qu'elle devait rester au lit.« Et ma communion ?» reprend la bonne mère, d'un ton suppliant, je me suis tenue à jeun pour communier ?.Oui, ma mère, vous communierez dans votre lit ».Alors, elle baissa les yeux et se mit à prier avec sa ferveur accoutumée.Le prêtre lui apporta la sainte Hostie tant désirée.Au cours de la journée, le mal parut s'aggraver; la malade reçut cependant, avec son bon sourire, toutes les soeurs qui vinrent la visiter.A cinq heures, la congestion pulmonaire annonça la fin prochaine.M.l'abbé Dufresne, notre aumônier, lui administra les derniers sacrements; le divin Viatique, reçu pour la seconde fois, en ce beau jour de la Résurrection, lui communiqua une force surnaturelle qui la soutint dans le terrible passage du temps à l'éternité.DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 359 La prière à voix basse et à haute voix devint incessante, dans cette chambre où la terrible faucheuse guettait sa proie.A deux heures et dix minutes du matin, le râle de la mort diminua; la respiration tantôt s'arrêtait, tantôt s'accélérait, la chère et vénérable agonisante promenant un dernier regard sur les soeurs éplorées, esquissa un léger sourire, sourire d'adieu.Puis, un long soupir souleva sa poitrine; soudain, dans un mouvement con- vulsif, la mourante se dressa sur son lit et une expression d'effroi parut sur son visage; on aspergea la chambre avec de l'eau bénite, tandis que les infirmières la replaçaient sur ses oreillers.Le calme revint illuminer sa figure, belle jusque dans la mort.encore un soupir.puis un deuxième.puis, un troisième.et l'âme a brisé ses entraves, mère Marie-de-Saint-Basile n'était plus!.La terre a reçu sa dépouille mortelle, mais la vénérable mère continuera de vivre dans ses oeuvres.Les modestes pages que nous présentons aux membres de notre Institut donnent une idée, sinon complète, du moins, assez exate de son zèle à continuer l'oeuvre de nos fondateurs.Elle a maintenu, de toute son énergie, la fidélité aux saintes Règles; elle a veillé minutieusement à la bonne formation des sujets, comme elle a toujours cherché à élever une jeunesse profondément chrétienne pour l'honneur de Dieu et de la Religion.Ce volume, sans prétention littéraire, redira, tout de même, le nom de mère Marie-de-Saint-Basile à toutes les générations de religieuses qui viendront chercher un abri à l'ombre bienfaisante de Sainte-Croix.Celles qui ne l'ont pas connue apprendront à la vénérer, et elles rediront avec nous: « Oui, elle fut vraiment la femme providentielle! Bénissons sa mémoire!» Bonne mère, encore un mot!.Du haut de la céleste sphère, où vous êtes parvenue, comme la terre doit vous paraître petite et misérable!.A l'exemple des saints, nos frères, prenez en pitié les habitants de la minuscule planète.Suivez toujours du regard vos filles spirituelles, suppliez Jésus de con- 360 ANNALES DE LA CONGRÉGATION server notre Congrégation qu'il a « possédée dès le commencement » — Quam possedisti ab initio.Souvenez-vous de vos anciennes élèves qui n'oublient pas votre nom! Sollicitez pour elles, pour nos parents, pour nos bienfaiteurs, les dons et les fruits du Saint-Esprit.Et l'auteur dépose sa plume en la fête de la Pentecôte.Saint-Laurent, Maison mère, ce 4 juin, 1933.DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 361 FAIBLE ÉCHO D'UNE FORTE VIE 1 Sur ta longue et pleine carrière, Déjà le soir est descendu.Mais dans l'éternelle lumière Commence le jour attendu.Dieu fit déborder en ton âme Sa douce et ferme charité, Partout tu rayonnais ta flamme, Comme le soleil, la charité.Tu t'inclinais avec délices Vrrs l'innocence des petits Préparant ces vivants calices A refleurir le Paradis.Et dans ta fidèle mémoire.Mieux que sur le marbre ou i'airain, Se burinait le nom, l'histoire De tous: pauvre, riche, orphelin.Rien n'altérait ta confiance Quand le ciel s'embrumait parfois.Avec sagesse, avec prudence, Vingt ans, tu guidas Sainte-Croix.La vie épuisa goutte à goutte L'ardente sève de ton coeur.Car nul ne passa sur ta route Qu'il ne reçut de ta ferveur.Le bien que l'on sème sur terre Se moissonne en l'éternité.La tâche généreuse, austère Mesure la félicité.Dans notre amour comme en un temple, Immortel vit ton souvenir.Nous saurons, Mère, à ton exemple.Pour Dieu seul travailler, souffrir! SOEUR M ARIE-DE-SAINTE-ROSELINE, R.S.C.1 Poème écrit pour la carte mortuaire de Mère Marie-de-Saint-Basilp 362 ANNALES DE LA CONGRÉGATION SUPÉRIEURES SOUS L'ADMINISTRATION FRANÇAISE 1847 - 1882 SUPÉRIEURES: Soeur Marie-de-Sauveur, 1847-1849 Mère Marie-des-Sept-Douleurs, 1849-1863 Soeur Marie-de-Sainte-Léocadie, 1863-1865 Soeur Marie-de-Saint-Bernard, 1865-1866 Soeur Marie-de-l'Immaculée-Conception, 1866-1870 Soeur Marie-de-Saint-Alphonse-Rodriguez, 1870-1879 Soeur Marie-de-Saint-Raphaël, 1879-1882 Soeur Marie-de-Saint-Jean-Baptiste, juillet 1SS2 à janvier 1883 ÉTABLISSEMENTS FONDÉS SOUS L'ADMINISTRATION FRANÇAISE 1 SAINT-LAURENT — Maison mère, noviciat, pensionnat, externat, 1847 2 Maison de St-Martin (Laval), pensionnat, septembre 1847.[27 mai 3 Maison de Ste-Scholastique (D.-M.)i pensionnat, décembre 1850.4 Maison de Varennes (Verchères), pensionnat, novembre 1854.5 Maison d'Alexandria (Glengary), Ontario, 17 février 1856.6 Maison de Saint-Liguori (Montcalm), pensionnat, 17 mars 1859.7 Maison de Saint-Ignace à Montréal, pensionnat 5 juin 1871.8 Maison de Sainte-Rose (Laval), pensionnat, 10 septembre 1876.9 Maison de Grosvenordale (Conn.), E.-U., pensionnat, 20 décembre 1S82 10 Maison de St-Jean l'Evangéliste, Montréal, 14 août 1882.ÉTABLISSEMENTS FONDÉS SOUS L'ADMINISTRATION DE MÈRE MARIE-DE-SAINT-BASILE 1883 - 1902 1 Maison de Saint-Louis-de-Gonzague, Nashua, N.-H., août 1S83.2 Maison de Sainte-Brigide à Montréal, août 1885.3 Maison du Sacré-Coeur, New-Bedford (Mass), E.-U., 1886.4 Maison de Saint-François-Xavier, Nashua (N-H.) août 1886.5 Maison de Saint-Ignace à Nominingue (Labelle), août 1S87.6 Maison de Renfrew, Ontario, 20 janvier 1887.7 Maison de St-Albans, Vt., E.-U., 1889.8 Maison de Suncook, (N.-H.), E.-U.1890.9 Maison du Saint-Rosaire à Rochester (N.-H.), E.-U., 1S93.10 Maison de Saint-Hyacinthe (N.-B.), E.-U., 1894.11 Maison de Saint-Basile à Montréal, grand pensionnat, en 1896.12 Maison de Saint-Joseph à Springfield (Mass.), E.-U., 25 août 1898.DES SOEURS DE SAINTE-CROIX 363 13 Maison de Saint-Antoine, New-Bedford (Mass.), E.-U., février 1899.14 Maison de N.-D.des Sept-Douleurs à Adams (Mass.), 25 août 1899.15 Maison de Saint-Georges, à Manchester (N.-H.), mars 1899.16 Maison de Saint-Edouard à Montréal, 22 août 1900.17 Maison de Saint-Denis à Montréal, 15 août 1902.18 Maison de Saint-Martin à Somersworth (N.-H.), E.-U., 22 août 1902.19 Maison de la Nativité à Labelle, (Labelle), 26 août 1902.ÉTABLISSEMENTS FONDÉS SOUS L'ADMINISTRATION DE MÈRE MARIE-DE-SAINT-BASILE ET FERMÉS DANS LA SUITE 1 Maison de Fall-River, fondée en 1883; fermée en 1895.2 Maison de Magog, fondée en 1885; fermée en 1909.3 Maison de Redford, N.Y., fondée en 1885; fermée en 1914.4 Maison de Lafontaine, Simcoe, Ont., fondée en 1885; fermée en 1893.5 Maison de Vergennes, Vt., E.-U., fondée en 1886; fermée en 1907.6 Maison de Keeseville, N.-Y., fondée en 1894; fermée en 1913.7 Maison de Sainte-Martine (Beauharnois), fondée en 1888; fermée en 1893 8 Maison de Fitchburg (Mass.), fondée en 1895; fermée en 1902.TABLE DES MATIERES LIVRE QUATRIÈME ADMINISTRATION DE MÈRE MARIE-DE-SAINT-BASILE 1894 — 1902 CHAPITRE PREMIER 1894 PAGES Coup d'oeil rétrospectif — Un peu de statistique — Lettre pastorale de NN.SS.les archevêques et évêques de la province ecclésiastique de Québec sur l'Éducation — Récit succinct du zèle de mère Marie-de- Saint-Basile pour la formation des religieuses éducatrices — Le travail de la première directrice générale des études, pour favoriser l'acquisition de la science chez les maîtresses — Moyens employés par la mère supérieure pour aider ses filles à atteindre la perfection de leur saint état.Décès de soeur Marie-de-Sainte-Albine (Pelletier) — Décès de soeur Marie de Sainte-Euphémie (Plourde) — Soeur Marie de-Saint-Gabriel est nommée maîtresse des novices — M.Patrick Craven, de New-York, donne le maître-autel — Achat de la terre Rochon — Visite du R.P.Dom Gréa — Visite de l'honorable A.-P.Caron — réception des Enfants-de-Marie — FONDATION DE LA MAISON DE SAINT- HYACINTHE, à New-Bedford, Mass 7 CHAPITRE DEUXIÈME 1895 Voeux du chapelain à la communauté — Le R.P.Dom Antoine, abbé mitre — Visites régulières — Visite au couvent d'Hochelaga, chez les Dames du Sacré-Coeur, madame Bourque, ancienne élève — Quelques malades — Prise d'habit privée — Le mois de mars et les grands événements qu'il rappelle — Achat d'un terrain — Une alerte à propos du feu à l'autel •— Prières demandées pour le succès du Concile provincial — La Grande Semaine — Première commu- 366 ANNALES DE LA CONGRÉGATION nion — Visite de Mgr Fabre — La Saint-Basile — Examens des finissantes — Circulaire de la mère générale — Échappé à un incendie — Distribution des prix — Les vacances — Les retraites — Visites à diverses communautés — Jubilé d'or à Hochelaga — L'abbé Alphonse Brunet, son départ pour Lourdes — La seconde retraite — Décès de soeur Marie de Saint-Wïlfrid — La maison de FALL-RIVER est fermée — FONDATION DE FITCHBURG — Mère générale au Nominingue — Religieux en visite — Notre fête patronale — Pieuse mort de soeur Marie-de-Saint-Flavien (Pépin) — Le premier concile provincial — Circulaire annonçant le Chapitre général — Origine du PARC SAINTE-ANNE CHAPITRE TROISIÈME 1896 Esprit de prière de la supérieure générale — Pieuse mort du R.P.Beaudet, curé — Visite du R.P.Estevenon, supérieur des religieux de Saint-Sacrement — Une soeur malade — Cérémonie religieuse — Jubilé d'argent de la mère maîtresse des novices — Le R.P.Dion, supérieur provincial et curé — Décès de soeur Marie-du-Saint-Nom- de-Jésus (Plourde) — En avril, événements divers — Le mois de mai — Visite de Mgr Langevin — Première communion — Retour de l'abbé Brunet — M.le curé Gaboury — Circulaire de Mgr Fabre — Le chanoine Bruchési et l'inspecteur Brault — Exposition des travaux scolaires — La fête des prix — Le pensionnat Saint-Basile — Professeurs d'anglais et de diction.Mgr Fabre, sa visite canonique — Le Chapitre général — Dernière réunion des vacances — Embarras financiers — « La Presse » et le pensionnat Saint-Basile — Bénédiction du couvent de la chapelle — Visite de l'honorable Alphonse Desjardins — Mgr Lorrain — Lettre de Mgr Fabre au cardinal Siméoni — Départ de l'abbé Joseph Demers — Le nouveau chapelain — Décès de soeur Marie de Saint- Charles (Toupin) — Maladie de Mgr Fabre — La supérieure générale à l'archevêché — Pieuse mort de Mgr l'archevêque de Montréal CHAPITRE QUATRIÈME 1897 Translations des restes mortels de Mgr Fabre — Les obsèques — Regrets du personnel de l'évêché — Les vertus et les qualités de Mgr Fabre — Service solennel pour le repos de l'âme de notre regretté supérieur ecclésiastique — Retraite et cérémonie religieuse par Mgr Racicot — TABLE DES MATIERES 367 Maladie et mort de soeur Marie de Saint-François-Xavier (Coallier) — Jubilé de la paroisse Saint-Patrick — Communication de Rome — Visite de Mgr le Vicaire capitulaire de l'archevêché — Mère Marie de Saint-Basile rentre de ses visites aux États-Unis — Conversion d'une jeune fille du pensionnat (L.Dennison) — Quelques visiteurs — M.l'abbé Dubuc — Les pensionnaires au Musée McGill — CINQUANTENAIRE de notre fondation au Canada (1847) — Portraits du vénéré Fondateur distribués dans les missions — Don de deux statues — La fête des prix — Circulaire de la mère générale — Elle assiste à des séances de fin d'année — Trois soeurs à Ottawa — Retraite des novices — Le chanoine Bruchési est élu évéque de Montréal — Son sacre — Une lettre de mère Marie du Désert — Circulaire du chanoine Archambault — Les obédiences — Changement de chapelain — Nouveau supérieur ecclésiastique — Le chanoine Martin, sa visite — Retraite des élèves — L'abbé H.Brissette — Fêtes du pensionnat — Distributions des Constitutions — Allocution de M.le Supérieur — Evénements divers — Prise d'habit — La Noël 85 CHAPITRE CINQUIÈME 1898 Mgr Bruchési offre un souvenir de son sacre — Visite de M.le chanoine Martin et de plusieurs membres du clergé — Le R.P.Dion, c.s.c, parle de Rome — Visite de M.le curé Châtillon — Visite inattendue de Mgr Bruchési — L'abbé Lavallée et « La vraie dévotion à Marie » — Visite du supérieur général de Sainte-Croix — Fête religieuse — Maladie et mort de soeur Marie de Saint-Damien (La- flèche) — Mort du cardinal Taschereau — La supérieure en visite officielle — Mgr Pascal, de Saskatchewan, à Saint-Laurent — Demande de fondation — Fête de la directrice du pensionnat — Les Quarante-Heures — Retraite, première communion — Don à la communauté.121 II Visite du chanoine Sa varia — Retour de la mère supérieure — Visite des SS.des SS.NN.de Jésus et de Marie et leurs élèves — M.le supérieur part pour visiter nos maisons des États-Unis — Une fête à BON MARCHÉ — Autre demande de fondation — Réception d'enfants de Marie — Maladie de mère Marie de Sainte-Madeleine — Lettre de l'abbé Monnier, France — Le SOIXANTIÈME anniversaire de l'ordination sacerdotale du T.R.P.Moreau — Visite de Mère Léonie — Le R, P.Français et la Saint-Basile — La 368 ANNALES DE LA CONGRÉGATION fête des prix — Lettre circulaire — Pieux décès de mère Marie de Sainte-Madeleine —• Lettres de condoléances — Éloges de la semai ne religieuse III Une cérémonie religieuse — Les RR.PP.Capitulants de Sainte-Croix visitent la communauté — Mère Marie-de-Saint-Jean-Baptiste est nommée assistante générale pour la seconde fois — Le R.P.Zahm, c.s.c.— Retraite annuelle, prêchée par le R.P.Louis Lalande, S.J.— Départ du R.P.G.Français — Divers professeurs — Les grandes nominations — FONDATION DE SPRINGFIELD — Nouvel aumônier — Décès de Soeur Marie de Sainte-Edith (Dineen) — Fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs — Tempête formidable — Retraite des élèves par l'abbé Lamarche — Maladie et mort d'une novice — Deux religieuses de la Providence — Décès de soeur Marie- de Saint-Joseph (Gaucher) — Demande de fondation — Le R.P.Sava, rédemptoriste — Le Coutumier — Le R.P.Louis Lalande — L'abbé Elie Auclair et réception des Enfants de Marie — Le R.P.Larue —• Maladie d'une supérieure — La messe de minuit CHAPITRE SIXIÈME 1S99 Souhaits de l'aumônier — Mère Marie-de-Saint-Basile envoie sa vingt- quatrième circulaire — Décès de soeur Marie-de-Saint-Louis (Pain- chaud) — Visite de Mgr Bruchési — Achat d'une imprimerie et d'un outillage de reliure — Le centième anniversaire de naissance du Fondateur — Fête de confirmation, de vêture et de profession —• (7 mars) — FONDATION DE ST-GEORGES à Manchester, N.-H.— Evénements divers — Enfants de Marie — Retraite des finissantes et première communion — M.le supérieur — Mgr Bruchési — Le 14 juin — Fin de l'année scolaire — La Saint-Jean-Baptiste — Un triduum — Les vacances — Sermon de Mgr Bruchési pendant la retraite — Clôture de la retraite — FONDATION D'ADAMS, Mass.— Rentrée des élèves et des postulantes — Fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs — Maladie et mort du R.P.Rézé — Une visite à l'école normale, C.N.D.— A Lachine — Centenaire de Mgr Bourget — Premier jubilé d'or (S.M.de Bon-Secours) — Visites: Mgr Légal, Mgr Gravel, Mgr Decelles — Visite à l'archevêché — FONDATION DE SAINT-ANTOINE à New-Bedford, en février mut-' TABLE DES MATIERES 369 CHAPITRE SEPTIÈME 1900 Messe à minuit pour l'ouverture de l'année sainte —• Le R.P.Martineau, S.J.— Décès de soeur Marie-de-Saint-Ignace (Vallée) — Examen des plans de la nouvelle construction — Prières du jubilé — Achat de la carrière — Evénements de février — Pieux décès de la T.H.M.Marie-des-Sept-Douleurs — Service solennel de la mère co-fondatrice — Une tempête de neige et ses heureuses conséquences — Demande de fondation — Jubilé sacerdotal du R.P.Estevenon, s.s.s.— Visite de Mgr Falconio — Une semaine de béatitudes — Une soeur malade — Le Vendredi saint — Le saint jour de Pâques — Confirmation par Mgr Bruchési — Le R.P.Pichon, s.j.— Retour de mère générale des États-Unis — Maladie de la maltresse des novices 213 II Jubilé d'or de Soeur Marie-des-Anges — Vêture — Evénements divers du 29 mai au mois de juillet — Séance « Fabiola » — Fin d'année — Retraite annuelle par le R.P.Côté, O.P.— Profession et sermon — Le R.P.Adam, S.J.— Mgr Bruchési — Le R.P.Adolphe Clément, c.s.c.— Décès de soeur Marie-de-Saint-Honoré (Montminy) — Départ de l'aumônier (M.Bertrand) 230 III Le R.P.Pichon, s.j.— Nouvel aumônier (M.l'abbé Moulin) — Mgr l'archevêque propose l'érection d'un monument pour Mgr Bourget — Lettre de Mgr Bruchési — Fête du supérieur ecclésiastique — Jubilé chez les Carmélites — Chez les Dames du Sacré-Coeur — Chez M.Sévère Dugas — Le R.P.Pichon, s.j.— Nouveau cimetière — Le cercle littéraire — Décès de soeur Marie-de-Sainte-Adélaï- de — L'Inspecteur Lippens — Nouvelles congréganistes •— Jubilé de M.le curé Bonin — Jubilé de Mgr Beaven — Jubilé du couvent de Sainte-Scholastique — La dernière nuit de l'année et du siècle.248 CHAPITRE HUITIÈME 1901 Circulaire de mère Marie de Saint-Basile, précieux conseils — Sermon de l'abbé Moulin — Notre filleule, la paroisse de St-Miehel-des-Saints — L'influenza — Cérémonie religieuse — Premier anniversaire de la mort de la regrettée mère Marie-des-Sept-Douleurs — Maladie et décès de la reine Victoria, 1ère — Extension du jubilé — Décès de soeur Marie-de-Sainte-Mathilde (Desautels).2 9 370 ANNALES DE LA CONGRÉGATION II UNE SURPRISE.— Fête de l'aumônier — Visite à Magog — Travaux de démolition — Maladie et mort de soeur Marie de-Saint- Hortense (O'Breen) — Confirmation, Mgr Bruchési - messe et réception chez les élèves — Dévouement généreux des soeurs — Les Quarante-Heures — Succès encourageants dans l'imprimerie et la reliure — Le mois de Marie — Première communion — Décès de soeur Marie de Sainte-Ernestine (Montminy) — Réception d'Enfants de Marie — Exposition des travaux des pensionnaires — La Saint- Basile transférée au 17 juin — La distribution des prix — La retraite — Cérémonie religieuse 277 III Décès de soeur Marie-de-Sainte-Marthe (Chalifoux) — Visite de deux soeurs de Sainte-Croix de l'Indiana — Ouverture des cours de pédagogie au Mont-Sainte-Marie •— Circulaire de la supérieure générale — Visites et visiteurs — Un nouveau prêtre — Don généreux de Mme Breen — Décès d'une novice — Les fêtes du mois de septembre — M.le supérieur au noviciat — Grand congé —• Maladie de soeur Marie de Saint-Thomas-d'Aquin (Tourangeau; — Retraite des élèves 290 IV Absence de mère Marie-de-Saint-Basile — M.le supérieur rentre d'un voyage aux États-Unis —- Décès de soeur-Marie-de-Saint-Thomas- d'Aquin — Fête du supérieur ecclésiastique — Son allocution aux soeurs — Le 21 novembre célébré solennellement — Deux religieuses des SS.NN.de Jésus et de Marie — Réception d'Enfants-de-Marie — Cérémonie de vêture et de profession religieuse — Mgr Bruchési et Mgr Decelles chez les élèves — Monseigneur à la communauté — Baptême et confirmation d'une élève 298 CHAPITRE NEUVIÈME 1902 Voeux de l'aumônier — La lumière électrique dans le couvent — Mgr Bruchési aux États-Unis — premiers examens des graduées — Messe à l'infirmerie — Salle de communauté transformée en chapelle — Le R.P.Nolin et la « Milice du Pape » — Annonce de la visite pastorale de Mgr Bruchési — Le 19 février Sa Grandeur est au couvent le lendemain, confirmation et ouverture de la visite pastorale - Allocution — Réception chez les élèves — Monseigneur se rend au pouvoir électrique, ensuite dans les salles de récréation — Le len- TABLE DES MATIERES 371 demain dans les classes — Dix septième anniversaire de prêtrise de l'aumônier — Acte de visite de Mgr l'archevêque — Trois religieuses de la Congrégation Notre-Dame — Fête de saint Joseph et de saint Gabriel — 311 LE FEU! LE FEU! — Le déménagement — Religieuses de la Sainte- Famille et de la Providence donnent des leçons — Vendredi saint — Pâques — Élections des députées au Chapitre général — Visiteurs — L'ACADÉMIE LAURIER — Trois religieuses de la congrégation Notre-Dame — JUBILÉ sacerdotal du R.P.Dion, c.s.c.— Visite de Mgr Gauthier, archevêque de Kingston — La fête de l'Ascension Maladie de soeur Marie-de-Sainte-Catherine d'Alexandrie, sa mort — Demande de fondation — Une longue corvée —• Quelques bienfaiteurs — Soeur Marie-des-Anges à l'infirmerie — JUBILÉ sacerdotal de M.Hétu — La Saint-Basile, une fête pour nos employés — Visite de Mgr Lorrain — Le R.P.Nolin, S.J.— Mgr Racicot — La fête des prix — Ouverture du Chapitre général par Mgr Bruchési — Le nouveau Conseil 326 ÉPILOGUE 352 FAIBLE ECHO D'UNE FORTE VIE (Poésie) 361 SUPÉRIEURES sous L'ADMINISTRATION FRANÇAISE 1817-1882 362 ÉTABLISSEMENTS FONDÉS sous L'ADMINISTRATION FRANÇAISE ET SOUS MÈRE MARIE-DE-SAINT-BASILE 363 s* IMPRIMA AU CANADA IMPRIMÉ AU "DEVOIR" 4M Mt.ma Notre-Dame Mon trial PRINTID IM CANADA

Sujets :
Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs   


Regroupements :


Liens :