Les raisons de l'échec de la reprise d'Aigle Azur | Les Echos
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Les raisons de l'échec de la reprise d'Aigle Azur

Le tribunal de commerce d'Evry avait reçu 14 offres au début de la procédure de redressement judiciaire il y a moins d'un mois, pour finalement n'en retenir aucune ce vendredi. Il a annoncé l'arrêt de l'activité d'Aigle Azur, dont les salariés vont être licenciés et les rares actifs liquidés.

Les avions d'Aigle Azur stockés à Chateauroux depuis l'arrêt des vols, le 7 septembre, vont retourner chez leurs loueurs.
Les avions d'Aigle Azur stockés à Chateauroux depuis l'arrêt des vols, le 7 septembre, vont retourner chez leurs loueurs. (Laurent Grandguillot//REA)

Par Bruno Trévidic

Publié le 27 sept. 2019 à 17:31Mis à jour le 27 sept. 2019 à 17:51

C'est la fin pour Aigle Azur. Moins d'un mois après sa mise en redressement judiciaire, la deuxième compagnie aérienne française cessera officiellement d'exister à compter de ce vendredi minuit, après 73 ans d'existence. Faute d'offre de reprise viable, le tribunal de commerce d'Evry a en effet décidé de liquider l'entreprise. Ses 1.150 salariés, dont environ 800 en France, vont donc être licenciés dans les 15 jours et ses quelques actifs seront cédés aux plus offrants par les mandataires. Quant à ses droits de trafic et ses créneaux horaires à Orly, ils seront redistribués gratuitement.

« Aucune solution pérenne n'a été proposée par les candidats repreneurs », explique la présidente du tribunal, dans un communiqué, déplorant « les désistements ou les absences d'offres concrètes, l'absence de moyens financiers des candidats crédibles […] l'indétermination de la provenance des fonds » ou encore « l'irrecevabilité de certaines propositions ».

14 offres au départ et zéro à l'arrivée

Lors du placement d'Aigle Azur en redressement judiciaire, le 2 septembre, tous les espoirs semblaient pourtant permis au vu des 14 offres et marques d'intérêt déposées auprès du tribunal. Mais le retrait annoncé des deux favoris, le groupe Air France et le groupe Dubreuil , en fin de semaine dernière, avait douché les espoirs des salariés. En début de semaine, quatre offres seulement étaient encore en lice, mais aucune n'offrait les mêmes garanties financières nécessaires, les autres candidats à la reprise, parmi lesquels deux anciens dirigeants d'Air France, Lionel Guérin et Philippe Micouleau, et un actionnaire minoritaire, Gérard Houa, ayant conditionné leurs offres à l'obtention de prêts.

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Règles strictes non satisfaites

Or les règles en la matière sont plutôt strictes. Pour être recevable juridiquement, une offre de reprise, même partielle, doit comporter un tableau de financement et surtout, la preuve de l'existence de fonds bancaires suffisants pour pouvoir faire face, dans le cas d'une compagnie aérienne, à un mois de coûts d'exploitation. Un complément de financement sous forme de promesse de prêt privé ou un abondement de l'Etat est possible, mais uniquement en complément et non pas en principal. Par ailleurs, les candidats à une reprise partielle dans le cadre d'une liquidation judiciaire avec poursuite de l'activité, doivent également disposer des autorisations nécessaires pour opérer une compagnie aérienne.

Air France et le groupe Dubreuil hors course

Les seuls candidats ayant à la fois les disponibilités financières et tous les certificats nécessaires étaient Air France et la maison mère d'Air Caraïbes. Mais pour pouvoir reprendre une branche d'activité d'Aigle Azur et ses créneaux horaires, les règles françaises et européennes les obligeaient à s'engager à reprendre les salariés correspondant à cette activité, avec leurs contrats de travail actuel et leur ancienneté. Ce que ni l'un ni l'autre ne voulait ni ne pouvait se permettre. Pour pouvoir être embauché chez Air France, les pilotes d'Aigle Azur devraient en effet réussir les tests de sélection et perdre leur ancienneté en intégrant pas le bas, la liste de séniorité qui gère l'avancement des carrières dans toutes les compagnies.

Les recrutements vont pouvoir commencer

Paradoxalement, la liquidation d'Aigle Azur lève ces contraintes et devrait permettre à Air France et au groupe Dubreuil de récupérer, à leurs conditions, une partie des navigants d'Aigle Azur. En prévision de cette issue, la maison mère d'Air Caraïbes et de French Bee avait déjà ouvert un site permettant aux navigants d'Aigle Azur de faire acte de candidature. De son côté, le secrétaire d'Etat aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari, a annoncé la mise en place d'un « accompagnement particulier […] pour les personnels d'Aigle Azur afin d'assurer un retour plus rapide à l'emploi avec notamment l'offre de formations et un travail sur le reclassement ».

Créneaux à prendre

Air France, Air Caraïbes et French Bee peuvent également espérer récupérer, sans bourse délier, une partie au moins des précieux créneaux horaires d'Aigle Azur à Orly. Avec la liquidation de la compagnie, ils peuvent être redistribués selon les règles européennes qui en réservent la moitié aux « nouveaux entrants », et l'autre moitié, aux compagnies déjà en place. Quant aux droits de trafic entre la France et l'Algérie et aux dizaines de milliers de clients d'Aigle Azur sur cette destination, ils seront naturellement répartis entre Air France et Air Algérie, en attendant l'arrivée d'éventuels nouveaux concurrents.

Bruno Trévidic

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