Stéphane Collaro et sa carrière à la télé : «J’ai été censuré une seule fois» - Le Parisien

Stéphane Collaro et sa carrière à la télé : «J’ai été censuré une seule fois»

France 3 diffuse vendredi soir une émission sur la télé des années 80. Symbole de l’époque, Stéphane Collaro plonge dans ses souvenirs.

 Stéphane Collaro, ici à Levallois en 2008, revient sur sa carrière pour Le Parisien.
Stéphane Collaro, ici à Levallois en 2008, revient sur sa carrière pour Le Parisien. LP/JEAN-BAPTISTE QUENTIN

    Il a préféré disparaître du petit écran et s'exiler sur l'île de Saint-Martin, aux Antilles. Loin, très loin du petit monde de la télévision qu'il a durablement secoué, depuis ses débuts dans « Le Petit Rapporteur » jusqu'à son « Bébête show » et ses grandes émissions de variétés, ponctuées par les apparitions de ses « Coco Girls ». Stéphane Collaro, 74 ans, a marqué la télévision comme les années 1980, auxquelles France 3 rend hommage vednredi soir (« La télé des années 80, les dix ans qui ont tout changé », à 20 h 55).

    La télévision vous manque ?
    Pas du tout ! Je n'ai aucune nostalgie. J'ai fait mon temps. J'ai beaucoup travaillé et surtout, je me suis bien amusé. Mais je ne boude pas la télé, ça me fait plaisir d'y être invité de temps en temps.

    Vous vous êtes arrêté pour ne pas mourir sur scène ?
    Non. Après 20 ans de télévision à haute dose, j'étais au bout de mes possibilités. Depuis, je n'ai jamais eu envie d'en refaire.

    Pas de regret, quand vous voyez que Jean-Pierre Foucault ou Michel Drucker présentent encore des émissions ?
    Chacun fait ce qu'il veut. Selon moi, il faut savoir laisser la place aux autres et ne pas s'éterniser. Mais je respecte ceux qui pensent le contraire.

    Dans les années 80, la télévision était-elle plus libre qu'aujourd'hui ?
    On ne peut absolument pas dire ça ! La télévision s'est libérée sous Giscard, après avoir été très encadrée sous de Gaulle et Pompidou. Mais cela ne s'est pas fait en claquant des doigts : on a dû forcer la porte. La liberté, nous l'avons conquise petit à petit. Comme avec Jacques Martin dans « Le petit Rapporteur », qui a été une grosse avancée.

    On ne pourrait plus faire défiler des playmates seins nus comme vos « Coco girls »…
    Non. On a mis des filles à poil à l'antenne par provocation. Pour casser des tabous, lutter contre l'hypocrisie face à cette télé où on pouvait virer une speakerine qui avait montré ses genoux à l'écran (Ndlr : Noëlle Noblecourt en 1964). De même qu'on ne pourrait plus représenter le président de la République en grenouille dans « Le Bébête show ».

    Ce programme était la bête noire des hommes politiques !
    Certains en étaient contents, d'autres beaucoup moins. Jean-Marie Le Pen nous a fait un procès. Mais il avait raison : on l'avait représenté avec un casque à pointe de l'armée allemande… Après, on l'a fait en Bécassine. C'était beaucoup plus drôle ! On a envisagé avec TF 1 de relancer « Le Bébête Show ». Je les ai contactés trop tard, car ils venaient d'embaucher Nicolas Canteloup. Dommage, ça aurait été rigolo de s'attaquer à la nouvelle génération.

    Vous n'avez jamais été censuré ? Une seule fois lors de la présidentielle de 1981. La direction d'Antenne 2 (ex-France 2) nous a interdit formellement de diffuser un sujet sur la candidature de Coluche réalisé pour le « Collaro Show ». J'ai menacé de quitter la chaîne, mais Coluche m'a dit de rester pour mes équipes. Plus tard, on est allé beaucoup trop loin avec Édith Cresson (ndlr : représentée en panthère amoureuse de Mitterrand). On allait lever le pied quand elle nous a critiqués. Elle a dit dans la presse américaine qu'il fallait nous interdire. On a été obligés d'en remettre une couche…

    Vous vivez désormais à Saint-Martin. Vous êtes heureux ?
    On était très bien avant l'ouragan Irma, qui nous a terriblement secoués. La reprise est très difficile. Comme tout le monde, on fait du camping dans notre propre maison.

    Paris vous manque ?
    Non, car j'y vais de temps en temps, notamment pour préparer mon film que j'espère tourner d'ici là fin de l'année. C'est une comédie sur une famille de banlieue qui craque et émigre aux Antilles. Je l'écris depuis 2 ans avec ma fille Julia. Je suis en plein casting.

    Vous regardez toujours la télévision ?
    Que d'un œil. Quel gaspillage de voir des animateurs talentueux animer des jeux ! Le reste manque beaucoup d'originalité : il n'y a que des talks avec des gens qui bavardent. Cela ne coûte pas cher et c'est facile à faire. Il y a peu de création, mais les chaînes ne sont plus dirigées par des saltimbanques. Parfois, j'ai l'impression qu'on a lutté pour rien : la censure et l'autocensure sont fortes…

    A cause de qui ? Essentiellement de la connerie humaine ! Les bonnes idées basculent dans l'extrême, comme la lutte contre le tabac. Interdire la cigarette au cinéma, c'est débile ! On ne va pas bannir des films l'alcool et les scènes de sexe ! Ou « balance ton porc ». Les porcs méritent d'être punis. Mais c'est à la justice de faire le travail. Il ne faut pas tomber dans la délation.