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Décryptage

Non-coté : Blackstone et BlackRock à l'assaut des épargnants européens

L'offensive des deux géants américains de la gestion d'actifs illustre l'ambition des grands fonds internationaux : convertir les épargnants européens au private equity, à la dette privée et autres actifs alternatifs. En France, le marché pourrait passer de 100 à 150 milliards d'euros d'encours en 2025, selon Indefi.

Premier gérant alternatif mondial, Blackstone compte recruter en France ces prochains mois pour compléter son équipe commerciale.
Premier gérant alternatif mondial, Blackstone compte recruter en France ces prochains mois pour compléter son équipe commerciale.

Par Amélie Laurin

Publié le 29 juin 2021 à 06:30Mis à jour le 29 juin 2021 à 12:17

Après des années de discrétion à Paris depuis l'arrêt de son activité de conseil en fusions-acquisitions, Blackstone compte ranimer son bureau du boulevard Saint-Germain. Le groupe américain , premier gérant mondial d'actifs alternatifs, vient de recruter Anthony Guerra, un ancien de Goldman Sachs, pour développer localement son activité de private wealth solutions. Autrement dit, la vente de fonds non-cotés (immobilier, private equity…) aux épargnants aisés.

« Nous comptons recruter pour augmenter de façon substantielle notre présence en France auprès des clients privés et institutionnels », annonce Todd Myers, directeur mondial de la division private wealth solutions, qui pèse 100 milliards de dollars sur les 650 milliards gérés par le groupe.

Promesse de rendement face aux taux bas

La grande majorité des clients particuliers de Blackstone sont américains, mais ses équipes de Londres travaillent déjà avec les divisions de gestion de fortune des principales banques européennes. L'objectif est désormais d'élargir la cible vers plus d'établissements et une clientèle moins haut de gamme, en Suisse et en France notamment.

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Même ambition chez BlackRock. Surtout connu pour ses fonds cotés passifs, le numéro un mondial de la gestion d'actifs gère 260 milliards de dollars d'actifs alternatifs (actifs réels, dette privée, hedge funds). « Les marchés privés apportent une réponse à plusieurs tendances de fond : le contexte de taux bas, la demande de diversification des investisseurs et la recherche de rendements supérieurs », rappelle West Lockhart, responsable distribution et family office pour l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique chez BlackRock Alternative Specialists.

Bpifrance ouvre une brèche

D'autres groupes américains sont en embuscade. « Blackstone, KKR, Carlyle, EQT et CVC ont tous des équipes dédiées aux clients privés en Europe et une stratégie d'expansion, assure Frederik Meheus, directeur commercial de Moonfare, une fintech allemande qui distribue des fonds non-cotés. En parallèle, les banques et autres intermédiaires financiers européens demandent de grandes marques internationales, principalement anglo-saxonnes, avec un intérêt fort pour la tech et les sciences de la vie. »

En France, « le succès du fonds private equity secondaire de bpifrance auprès des particuliers le prouve : il y a de l'appétit pour le non-coté chez les clients 'mass affluent' (entre 100.000 et 1,5 million d'euros d'épargne financière), explique Richard Bruyère, associé fondateur du cabinet de conseil Indefi. Jusqu'à présent, le marché était polarisé entre les fonds institutionnels ouverts aux clients des banques privées et les fonds fiscaux grand public axés sur les start-up (FIP et FCPI), en perte de vitesse. »

Indefi estime à 140-150 milliards d'euros le potentiel d'épargne non-cotée qui sera gérée pour des particuliers en France en 2025. Contre près de 100 milliards à fin 2020… dont 75 % d'immobilier via les SCPI et autres véhicules de « pierre-papier ». De son côté, France Invest, le lobby français du capital-investissement, vise 10 milliards d'euros de collecte annuelle auprès des particuliers d'ici à cinq ans, notamment via l'assurance-vie et l'épargne retraite et salariale, contre 1,5 milliard en 2020 (pour les flux en direct seulement). En espérant que les valorisations élevées et l'illiquidité de la classe d'actifs ne créent pas de déconvenues.

Les grands assureurs-vie tricolores ont déjà lancé des unités de compte dédiées aux actifs privés. Et des gérants français comme Apax et LBO France ont créé des fonds avec des tickets d'entrée de quelques dizaines de milliers d'euros. Mais les acteurs locaux ont une force de frappe inférieure à celle de leurs homologues américains. « Les gérants et les banques ne voient pas le coup arriver. Le terrain va être occupé par les étrangers », prédit un professionnel du secteur, désabusé.

Barrières juridiques, réglementaires et commerciales

Difficile pour autant de prédire le succès des uns et des autres. « Tout le monde est d'accord pour dire qu'il y a un énorme marché pour le non-coté, mais il y a de fortes barrières juridiques, réglementaires (liées par exemple au fonctionnement de l'assurance-vie en France) et commerciales », prévient Jean-Denis Bachot, directeur du bureau français de Fidelity International. C'est l'une des raisons de l' alliance de la société de gestion Fidelity International et de Moonfare , qui veulent devenir un intermédiaire entre les gérants et les distributeurs d'épargne. 

De son côté, BlackRock va s'appuyer sur iCapital, le précurseur américain de Moonfare, pour commercialiser des produits adaptés à la réglementation européenne. « Nous allons lancer au quatrième trimestre un fonds nourricier luxembourgeois géré par iCapital, avec un premier compartiment dédié à la dette privée, précise West Lockhart. En parallèle, nous avons l'intention de créer notre troisième Eltif [ fonds européen de long terme , NDLR], car c'est actuellement le seul produit qui offre un passeport européen et des seuils de souscription assez bas [10.000 euros] pour répondre à la demande croissante des distributeurs. »

Quant à BlackStone, il pourrait miser en France sur une SLP (société de libre partenariat) pour vendre de l'immobilier, l'une de ses spécialités. Il travaille aussi à une structure de type fonds nourricier au Luxembourg.

Amélie Laurin

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