Daniel Prévost : « Je tourne tout en dérision parce que je trouve que tout est dérisoire »
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Daniel Prévost : « Je tourne tout en dérision parce que je trouve que tout est dérisoire »

Daniel Prévost pose pour Paris Match.
Daniel Prévost pose pour Paris Match. © Julien Faure
Fabrice Leclerc

À l’affiche de « Maison de retraite 2 », le comédien prouve que son humour acide et sa folie exacerbée font toujours mouche. Rencontre survoltée.

« Je te préviens, je suis un instable. À un moment, tu vas peut-être me casser les pieds, et je vais me lever et partir ! » lance-t-il en rigolant. Rien de mieux pour ambiancer notre première rencontre. Daniel Prévost est imprévisible et a passé l’âge (84 ans qu’il porte encore bien) de se forcer. ­Sourire ­carnassier, débit de mitraillette, tutoiement immédiat, il est tel qu’on le voit sur les écrans. Une grenade dégoupillée. « Faut déconner, sans arrêt. Je tourne tout en dérision parce que je trouve que tout est dérisoire. Mais attention, pour bien déconner, il faut ­toujours le faire avec le plus grand sérieux. »

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Ce qu’il fait depuis plus de ­cinquante ans au cinéma – avec une centaine de films à son actif –, à la télé, au théâtre et, on le sait moins, en littérature. Il aime aller d’un extrême à l’autre, jouer Molière et du boulevard, incarner René Bousquet (dans le téléfilm de Laurent Heynemann, en 2006) ou un général dans « Mon curé chez les ­Thaïlandaises », écrire l’absurde ou ses blessures profondes.

Le comédien est cette semaine à l’affiche de « Maison de retraite 2 », la suite du film à succès du même nom, où il retrouve ses copains comiques en seniors azimutés et Kev Adams, qu’il trouve « délicieux ». Et ­la thématique sous-jacente sur la façon qu’a notre société de (ne pas) s’occuper de ses aînés. « Je jubile en jouant cela. Je suis toujours content quand il s’agit d’incarner ces personnages. Et puis, le film dit des choses très réelles sur ce qui se passe aujourd’hui. »

Jean Yanne, son meilleur ami

On l’interroge sur ses rôles à la frontière du burlesque ou de la folie pure, mais peine perdue. Daniel Prévost n’a jamais été influencé par quiconque, Pierre Dac ou les Marx ­Brothers. La seule inspiration qu’il cite est celle de son ami Jean Yanne. « C’était mon meilleur copain. On aimait rigoler des mêmes conneries. Il m’a fait tourner dans tous ses films, et c’est la seule ­personne pour qui j’ai pleuré. Tiens, c’est marrant, tu ne m’as pas encore parlé du “Dîner de cons” ! » s’esclaffe-t-il.

Le triomphe de Francis Veber, dont il loue la mécanique comique imparable, lui vaudra un César du meilleur second rôle. « Une récompense, c’est bien, mais il ne faut pas croire que cela change quelque chose. Moi, dans l’année qui a suivi, on ne m’a proposé qu’un seul téléfilm. Un comédien, ça doit être au service complet d’un rôle. Tu dois honorer le texte qu’on te donne. Il m’arrive de proposer des choses. Mais je n’impose jamais. » Il n’en a pas marre qu’on lui parle encore aujourd’hui du fameux sketch du « Petit rapporteur », hilarante balade dans le ­village de Montcuq, totalement improvisée ? « J’ai compris pendant qu’on tournait que toutes les blagues ­passaient rubis sur l’ongle. Alors j’en ai rajouté. Depuis, les habitants de Montcuq ont même renommé une place du nom de l’émission. »

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À 40 ans, j’ai ressenti le besoin d’écrire. Pour rigoler mais parfois aussi pour exorciser des drames.

Daniel Prévost

Daniel Prévost n’est pas du genre à parler de lui. Le théâtre l’a formé, pas les études supérieures. Mais c’est avec la littérature qu’il a finalement dévoilé ses fêlures. Les bons et les mauvais moments de sa vie, le portrait de sa directrice d’école, la mort accidentelle de son épouse (« Tu ne sauras jamais combien je t’aime ») ou la découverte d’un père kabyle faite sur le tard (« Le passé sous silence »). « À 40 ans, j’ai ressenti le besoin d’écrire. Pour rigoler mais parfois aussi pour exorciser des drames. La vie m’a déconstruit. Il faut croire au destin, le confronter. Quand je vois une pierre sur mon chemin, je la ramasse et je la mets dans mon sac à dos. Alors oui, le sac est bien rempli. »

On lui apprend que ses films ont totalisé plus de 60 millions d’entrées. « Ah, oui ? Ben merde alors ! Depuis le temps que je fais ce métier, les gens ont pris l’habitude de me voir. Ils savent qu’ils retrouveront toujours un peu de moi dans quelqu’un d’autre. » Cela fait déjà cinquante minutes que l’on joue cette partie de ping-pong ­verbal. Daniel Prévost est resté, finalement. On a les victoires qu’on peut.

« Maison de retraite 2 », en salle actuellement.
« Maison de retraite 2 », en salle actuellement. © DR

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