Laurent Brosse, maire (Dvd) de Conflans : retour sur dix ans de mandat

Laurent Brosse, le maire (Dvd) de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), se dit "fier d'avoir su tenir la barre de la capitale de la batellerie".

Premier maire de droite depuis 1977, Laurent Brosse avait été élu en 2014 à l'âge de 28 ans.
Premier maire de droite depuis 1977, Laurent Brosse avait été élu en 2014, à l’âge de 28 ans. ©Facebook Laurent Brosse
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Il y a dix ans, le jeune candidat Ump Laurent Brosse, alors inconnu de la scène politique, remportait à la surprise générale l’élection municipale à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), bastion socialiste depuis 1977. Le successeur de l’ex-Premier ministre Michel Rocard (maire de Conflans de 1977 à 1994) et du président de la région Île-de-France Jean-Paul Huchon (de 1994 à 2001) revient sur sa décennie de mandat, histoire de dresser un bilan.

Dans quel état d’esprit étiez-vous lors de votre élection

J’étais extrêmement ému, considérant que j’avais réussi à faire basculer Conflans à droite après tant d’années à gauche, sachant que je n’étais même pas conseiller municipal. Conscient d’avoir eu la chance de bénéficier de la division de mes adversaires, j’étais cependant aussi très fier de devenir, à 28 ans, le plus jeune maire des Yvelines et le deuxième plus jeune maire de France dans une ville de plus de 30 000 habitants.

Étiez-vous surpris par votre victoire ?

Non, bien qu’inexpérimenté, tout comme mon équipe, nous avions un programme carré, comprenant 78 propositions, un chiffre symbolique. Son nom : Ensemble, osons l’avenir. Nous avions travaillé sur ce dernier avec beaucoup de sérieux.

Comme s’est déroulée votre prise de fonction

Nous avons immédiatement pris trois mesures, à commencer par l’instauration de 30 minutes de stationnement gratuit, toujours en vigueur actuellement. Nous étions également en pleine réforme des rythmes scolaires, qui suscitait beaucoup de tensions auprès des parents d’élèves. Heureusement, elle n’a pas été maintenue par le gouvernement. Enfin nous avons réalisé un audit financier, qui nous a permis de nous rendre compte de la présence de plusieurs emprunts toxiques, catastrophiques pour le budget de la Ville. Nous avons donc fait en sorte d’en sortir entre 2014 et 2017, pour être désormais en mesure de réaliser des investissements.

Où en êtes-vous par rapport aux propositions de votre programme ?

Nous avons opté pour un plan d’urbanisme intitulé Conflans Demain courant sur plusieurs mandats. Il comprend la réfection de la rue Maurice-Berteaux (en cours, livraison en 2025) et de l’hôtel de ville (fin 2024), du gymnase Foch (en cours), des quartiers Paul-Brard (en cours) et Chennevières – avec le réaménagement de la place de la Liberté – (en concertation), ainsi que l’aménagement de l’Île de Devant et de la zone d’activité Les Boutries. Notre projet de pôle santé est, quant à lui, en suspens pour des raisons juridiques, mais il est toujours d’actualité, je viens d’ailleurs de valider le mémoire en défense face au recours dont il fait l’objet.

Vous estimez donc avoir bien avancé ?

Oui nous en sommes à environ 80 % de réalisation. J’ai pu cependant constater que les actions publiques prennent du temps, face aux aléas techniques et juridiques. Je peux également affirmer que le calendrier prévisionnel des projets Paul-Brard et du centre-ville sera tenu. De même, la mise en place de la vidéosurveillance urbaine arrive à sa 3e phase. Je viens d’envoyer la demande pour l’installation de neuf nouvelles caméras, qui s’ajouteront aux neuf premières qui sont déjà utilisées par les polices municipales et nationales. Elles ont d’ailleurs aidé à résoudre des enquêtes. C’est donc plutôt positif, même s’il est difficile d’estimer l’effet persuasif qu’elle peuvent générer.

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Vous êtes donc satisfait de cette première expérience de maire ?

Tout à fait, je suis très fier d’avoir su tenir la barre de la capitale de la batellerie avec une équipe inexpérimentée, y compris moi-même. Ma principale satisfaction étant la réfection de la place Fouillière, sur le quai de Seine, qui est devenue un véritable lieu de vie et la principale attraction de Conflans. Tout un symbole.

Samuel Paty : « Ce drame m’a profondément atteint »

Laurent Brosse

La plus belle journée de ces 10 ans ?

L’organisation du prologue de Paris-Nice en 2016 à Conflans. Nous avons accueilli 20 000 spectateurs, dont Bernard Hinault, avec lequel j’ai eu la chance de faire la tournée des commerçants.

La pire journée ?

L’assassinat terroriste de Samuel Paty, évidemment. Ce drame m’a profondément atteint. Les agents de la police municipale, qui étaient les premiers sur place, m’ont appelé pour me prévenir. Ils étaient tellement choqués que je n’ai pas très bien compris ce qu’ils m’expliquaient. L’un d’eux n’a d’ailleurs toujours pas pu reprendre ses fonctions.

La plus belle rencontre ?

Lilian Thuram, qui était venu à Conflans en 2017, pour parler des discriminations avec les élèves de 3e du collège Montaigne au nom de sa fondation. Je l’ai trouvé brillant et j’ai été impressionné par son humilité.

La bourde du mandat ?

Lors d’une cérémonie d’investiture du nouveau conseil municipal des jeunes, en 2016, j’ai mis les écharpes tricolores des premiers enfants élus dans le mauvais sens, sur leur épaule gauche. Je m’en suis rendu compte trop tard, j’ai donc fait pareil pour tous les autres.

Les oppositions : « Un jeune maire avec de vieilles idées »

« Laurent Brosse n’a aucune conscience écologique. La Ville n’a pas investi dans les énergies renouvelables, comme la géothermie, l’extension des réseaux de chaleur, la création d’une chaufferie bois, l’installation de panneaux solaires, alors que de nombreuses villes voisines l’ont fait avec profit. Les arbres coupés ne sont même pas remplacés », regrette Gaël Callonnec, le président Eelv du groupe Ici Conflans. « La majorité actuelle ne prépare pas notre ville au défi du siècle que représente la menace du réchauffement climatique », estime l’élu conflanais d’opposition.

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Gaël Callonnec, le président Eelv du groupe Ici Conflans. ©Christian Dao

« Les emprunts toxiques ont été fort mal négociés. La Ville s’est retrouvée acculée à verser une pénalité de 10 M€ à la banque, en plus du remboursement du capital, soit l’équivalent de ce qu’elle aurait dû payer en treize ans, dans le pire des cas de figure envisageable. Suite à ce fiasco, le maire a augmenté les impôts de 13 % et a considérablement baissé les dépenses », poursuit Gaël Callonnec, économiste de métier.

« Un roi fainéant grassement rémunéré »

« Les premières coupes sacrificielles ont visé la petite enfance : il a supprimé les activités périscolaires, les colonies de vacances, la plupart des postes d’assistantes scolaires, la caisse des écoles (sauf pour l’école Saint-Joseph) et des places en crèches. Il a aussi serré tous les budgets et réduit les effectifs. Un tiers des agents de la ville sont en contrat précaire », dénonce l’élu.

« Si la municipalité dégage désormais de confortables excédents, le maire a renoncé ou retardé des investissements rentables, comme l’isolation des bâtiments publics, qui auraient permis de faire de substantielles économies de facture énergétique », insiste Gaël Callonnec.

Pour lui, Laurent Brosse porte aussi « une immense responsabilité dans la création de Gps&o, gigantesque intercommunalité ayant entraîné une augmentation des impôts fonciers de 300 € en moyenne par foyer, alors même que les services publics de base (comme la propreté et l’entretien de la voirie ou le ramassage des déchets) ont diminué ». Selon l’élu écologiste, « le maire a délégué 80 % des compétences de la Ville à la communauté urbaine, bénéficiant en échange d’un titre de vice-président, faisant de lui un roi fainéant grassement rémunéré ». Gaël Callonnec conclut : « Le seul avantage que nous a procuré Gps&o est le financement de l’aménagement de la place Fouillère, unique investissement d’envergure du premier mandat, dont il s’attribue le mérite. »

« Le compte n’y est pas »

« Pour nous, le bilan de Laurent Brosse est médiocre », estime Mickaël Littière, le président du groupe d’opposition (Divers centre) Ensemble pour Conflans. « Le maire se targue d’avoir rénové la place Fouillère, mais c’est plutôt l’arbre qui cache la forêt, considérant qu’aucun quartier n’a connu de vrai coup de neuf, sans évoquer Les Roches et Fin d’Oise, les éternels oubliés« , ajoute l’ancien premier adjoint en charge de la sécurité et de la prévention, qui a vu ses délégations retirées par le maire en juin 2022. « Au centre-ville, seuls les travaux de mise à niveau des réseaux d’eau sont réalisés… Le fameux Conflans Demain est donc encore dans les cartons, on l’attend toujours », ironise l’élu.

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Mickaël Littière, le président d’Ensemble pour Conflans. ©Facebook Mickaël Littière

« Nous avons un jeune maire, certes, mais avec de vieilles idées, qui ne sont pas en adéquation avec les attentes des familles conflanaises, conscientes des qualités indéniables et du grand potentiel de leur ville », poursuit Mickaël Littière.

« Question sécurité, nous manquons de policiers municipaux et la vidéosurveillance est quasi inexistante, quoi qu’en dise le maire, avec seulement dix-sept caméras pour couvrir 14 km2, sans centre de supervision urbain (Csu), qui rendrait plus efficace le dispositif », insiste l’ancien bras droit de Laurent Brosse. « Je suis également en profond désaccord avec la politique liée à la petite enfance et à la scolarité, face au refus du maire de créer une nouvelle crèche municipale qui permettrait de désengorger les files d’attente, parfois de plusieurs années, auxquelles les parents sont confrontés. De même, malgré la multiplication des programmes immobiliers, notamment dans les rues Carnot et Foch, il n’y a aucune nouvelle école municipale en vue. Seulement un quart des groupes scolaires ayant été rénové, c’est trop peu. »

Concernant la transition écologique, Mickaël Littière donne un « zéro pointé » au maire. « Il suffit d’interroger les cyclistes… Et ce n’est pas les bacs à fleurs installés rue Maurice-Bertaux qui permettront d’oublier que la majorité soutient le projet hors temps de l’A104bis. »

Le chef de file d’Ensemble pour Conflans aurait également souhaité que la Ville accompagne davantage sa population vieillissante, ou encore la rende plus agréable grâce aux nombreux outils digitaux qui existent. Bref, pour Mickaël Littière, « le compte n’y est pas ».

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