Judith Gautier, la première femme en sinologie : originalités d’un parcours et d’un regard

Qui est Judith Gautier ? La fille aînée de Théophile Gautier, une amie de Victor Hugo, la correspondante de Richard Wagner ? Certes, mais c’est également la première femme élue à l’Académie Goncourt, et encore, surtout, une pionnière de la traduction de la poésie chinoise. Avec son recueil mondialement connu, Le Livre de Jade, elle a ainsi introduit de nouvelles formes poétiques dans la langue française.

Différente des étudiants de chinois de son époque, la formation de Judith Gautier à la langue et la culture chinoises s’avère unique, se faisant à la marge des cursus universitaires. À une époque où très peu de Chinois pouvaient atteindre le continent européen, elle pourtant a bénéficié de cours privés, assurés par le lettré Ding Dunling. Elle a été conduite devant le sanctuaire de la culture chinoise pour y entamer la construction d’un monde exotique imaginaire, où l’on voit une fusion du « beau idéal antique » avec le « beau idéal moderne ».

Judith Gautier est l’un des témoins importants de l’histoire des échanges culturels entre la Chine et la France : elle a d’ailleurs entretenu des relations amicales avec les premiers envoyés chinois, tels que Yu Geng ou Sun Baoqi. Sa participation aux activités organisées à la Légation de Chine à Paris, ses visites au pavillon chinois lors des Expositions universelles l’ont transformée en une « vraie Chinoise », comme elle l’affirme lors de son élection à l’Académie Goncourt : « Je suis une Chinoise […] Je serai, toute mon existence, une sorte d’Extrême-Orientale détachée des choses de son temps et de son milieu […]. »

Yichao SHI est maîtresse de conférences habilitée à diriger des recherches à l’Université Jiaotong de Shanghaï. Elle est titulaire d’un doctorat de Sorbonne Université et concentre ses recherches sur la littérature française et l’histoire des échanges culturels entre la Chine et la France. Elle préside actuellement un projet de recherche sur la Chine rêvée de Judith Gautier, soutenu par la Fondation nationale des sciences sociales de Chine (n°21CWW021) et s’intéresse aux traductions et aux créations littéraires de l’écrivaine au sujet de la Chine.