Cannes 2024 : « Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde » d’Emanuel Parvu, un coupable idéal

Victime d’une agression, un adolescent voit ses parents, la police et le curé se retourner contre lui lorsqu’ils apprennent son homosexualité. Un réquisitoire plutôt réussi contre l’obscurantisme.

Publié le 19 mai 2024 Mis à jour le 20 mai 2024 à 13:15

En 2022, Cristian Mungiu présentait en compétition le très inquiétant R.M.N, œuvre inspirée d’une histoire vraie où la population d’un village se mettait à harceler des migrants africains venus travailler dans la boulangerie industrielle locale. Avec Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde, Emanuel Parvu s’attaque à une autre forme d’obscurantisme, l’homophobie. Et si son film n’a pas la même ampleur que celui de son homologue roumain, le cinéaste prend lui aussi le pouls inquiétant d’une frange conservatrice de la population de son pays.

Tous tentent à leur manière d’étouffer l’affaire

Adi, adolescent de 17 ans, rentre un soir le corps meurtri et le visage tuméfié. Deux hommes l’ont attaqué sans qu’il soit capable de les identifier. Mais dans ce village, les nouvelles vont vite. Et lorsque son père apprend que les fils de son usurier sont les auteurs de l’agression, il réclame justice. Mais les justifications avancées pour le tabassage font basculer les équilibres. Les assaillants s’en sont pris à Adi car ils l’ont surpris en train d’embrasser un autre garçon. « Pas de ça chez nous » clament tous en choeur le chef de la police, le père des petites frappes, le curé et plus étonnant, les parents d’Adi, effondrés de découvrir l’homosexualité de leur fils. Tous tentent à leur manière d’étouffer l’affaire.

En analysant le revirement des parents qui transforment leur enfant victime en coupable, Emanuel Parvu dresse un réquisitoire contre le poids des préjugés, l’importance du qu’en-dira-t-on, tout en mettant en lumière la corruption d’une oligarchie locale. Dommage que certains pans du film restent anecdotiques. Tel le récit d’apprentissage où pointe le désir d’émancipation d’Adi et la société corsetée et conformiste qui étouffe une partie de sa jeunesse. Mais ce qui intéresse Parvu, c’est d’abord la critique d’une idéologie mortifère. Car ce qu’on pourrait attribuer à un coup de chaud n’est pas une folie passagère mais bien un système pensé pour maintenir le pouvoir d’une minorité.

Trois kilomètres jusqu’à la fin du monde, d’Emanuel Parvu, 1 h 45, Roumanie

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