Marcel Proust sous l'emprise de la photographie

 


Marcel Proust sous l'emprise de la photographie

Brassaï

Gallimard, 1997


Myriam et claudialucia proposant un challenge, disons, autour de Proust, avec moult lectures communes et propositions, et avec trois logos au choix!, je n'ai pas résisté longtemps (j'ai une réputation à défendre). 


L'auteur d'abord. Brassaï. 1899-1984. Wikipedia vous dira tout. Je savais juste que c'était un photographe, ce qui garantit une certaine expertise sur le sujet choisi et j'ai découvert qu'il avait lu (et relu) l'œuvre de Proust.
D'emblée nous plongeons dans l'atmosphère de l'époque et de l'ambiance proustienne avec seize photographies en noir et blanc telles Entrée du Ritz, Le jardin des Tuileries, Amazones au bois. Puis l'on découvre l'écriture de Brassaï, agréable et fluide. 
De nombreuses citations, de La recherche, Jean Santeuil, la correspondance, parsèment le livre, passionnant de bout en bout. L'œuvre de Proust, ce qui n'étonnera pas ses fans, est très riche, et peut s'étudier sous des angles tellement divers. Alors la photographie, oui, et Brassaï est convaincant. Il a été "surpris, déconcerté même, par la place prépondérante prise par la photographie dans sa vie et dans son œuvre."

Dans sa vie? 
Il existe des photographies de Proust, bien sûr, mais j'ai appris que sa recherche obstinée était d'obtenir des photos de connaissances, par exemple Robert de Montesquiou, personnes qu'il désirait insérer dans son œuvre, et composer un personnage., quitte à insister parfois lourdement. D'ailleurs un épisode de son œuvre le montre ainsi à Doncières avec Saint-Loup, tentant d'obtenir une photo de Mme de Guermantes. Tentative ratée (comme c'était arrivé en réalité)("Non, il faudrait que je lui demande la permission d'abord."). Il semble aussi par ailleurs que Proust insistait pour montrer à ses visiteurs des photographies dont ils n'avaient cure. Une passion pas trop partagée?
Parfois il lui fallut des années de patience. Il a même tenté le vol, mais la chambrière se révéla incorruptible.
"Proust reçut d'elle [Simone, fille de Jeanne Pouquet] l'image tant convoitée depuis tant d'années,  un instantané d'amateur pris au tennis du Boulevard Bineau à Neuilly, en 1892. La jeune fille [Jeanne Pouquet] est debout sur une chaise entre deux amies. Le jeune homme timide et gauche, agenouillé à ses pieds et qui gratte une raquette en guise de guitare, est Marcel Proust lui-même."
Dans son oeuvre?
On pourrait parler de la photographie de la grand mère, de celle de Vinteuil, d'Odette (sous différentes identités), la photographie des chevaliers de Malte, Morel et la photo de Charlus, ...
Dans Journées en automobile, son voyage en Normandie avec Agostinelli propose en deux pages une dizaine d'instantanés. Des tours, des clochers, en nombre varié, apparaissent disparaissent. On reconnaîtra la même idée dans du côté de chez Swann.

"Il en est des plaisirs comme des photographies. Ce qu'on prend en présence de l'être aimé n'est qu'un cliché négatif, on le développe plus tard, une fois chez soi, quand on a retrouvé à sa disposition cette chambre noire intérieure dont l'entrée est 'condamnée' tant qu'on voit du monde." A l'ombre des jeunes filles en fleurs.

La photographie, "c'est l'instantané de ce qui dure dans une personne." Correspondance

Pour moi ce livre est un indispensable. J'ai beaucoup aimé cette façon de 'voir' l'oeuvre de Proust.

Avis Babelio

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